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29/11/2011 | OHADA | N°011/2011

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 29 novembre 2011, 011/2011


Les termes employés à l’article 34 du contrat de concession ne sont que des périphrases traduisant la règle de l’autorité de la chose jugée, qui s’attache à la sentence rendue sous l’égide de la CCJA, qui ne peut être remise en cause et n’est susceptible d’aucune autre voie de recours que celle du recours en contestation de validité, auquel ne saurait faire obstacle, la seule mention du caractère « définitif » de la sentence dans la convention d’arbitrage, toutes les sentences rendues sous l’égide de la CCJA étant revêtues de « l’autorité de chose jugée »

, comme prévu à l’article 23 de l’Acte uniforme sur le Droit de l’arbitrage et considé...

Les termes employés à l’article 34 du contrat de concession ne sont que des périphrases traduisant la règle de l’autorité de la chose jugée, qui s’attache à la sentence rendue sous l’égide de la CCJA, qui ne peut être remise en cause et n’est susceptible d’aucune autre voie de recours que celle du recours en contestation de validité, auquel ne saurait faire obstacle, la seule mention du caractère « définitif » de la sentence dans la convention d’arbitrage, toutes les sentences rendues sous l’égide de la CCJA étant revêtues de « l’autorité de chose jugée », comme prévu à l’article 23 de l’Acte uniforme sur le Droit de l’arbitrage et considérées comme décisions définitives ayant force de chose jugée, dès lors qu’elles ne sont plus susceptibles de voies de recours suspensives ; elles peuvent aussi faire l’objet d’un exequatur dès leur reddition, conformément à l’article 30 du Règlement d’arbitrage de la CCJA, que la convention d’arbitrage l’ait prévu ou non, sans que cette éventualité puisse constituer un obstacle à l’exercice du recours en contestation de validité de la sentence. Ainsi, l’exception d’irrecevabilité du recours n’est pas fondée et doit être rejetée.
Au regard des productions et des arguments pertinents de la société ABS International Corporate Ltd ci-dessus exposés, la constitution de Maître Rasseck BOURGI est régulière et la qualité de représentant légal de la société ABS International Ltd de Monsieur Abdou S. DIASSE établie. En effet, ledit mémoire, même s’il ne fait que reprendre pour l’essentiel les arguments développés dans le recours en contestation de validité de sentence, n’a pas fait l’objet d’une autorisation préalable du Président de la Cour de céans, comme prescrit à l’article 31 du Règlement de procédure de la CCJA. Il échet en conséquence, de l’écarter des débats.
Il est de jurisprudence que la mission des arbitres, définie par la convention d’arbitrage, est délimitée principalement par l’objet du litige, tel qu’il est déterminé par les prétentions des parties, sans s’attacher uniquement à l’énoncé des questions dans l’acte de mission. Ainsi, le tribunal arbitral, en relevant, par une interprétation exclusive de toute dénaturation des faits de la cause, que la responsabilité délictuelle de l’Etat du Mali « constamment invoquée par l’Etat du Mali » est dans le débat, s’est légalement autorisé, dans le respect de sa mission et sans violer le principe du contradictoire, à retenir la responsabilité délictuelle de l’Etat du Mali.
Outre le fait, comme indiqué ci-dessus, que la mission des arbitres est délimitée principalement par l’objet du litige tel qu’il résulte des prétentions des parties, sans s’attacher uniquement à l’énoncé des points spécifiés dans l’acte de mission, il y a lieu de relever que le tribunal arbitral, qui a retenu la responsabilité délictuelle et subséquemment, la réparation du préjudice par équivalent, sous forme de dommages-intérêts, conformément à l’article 123 de la loi malienne portant Régime Général des Obligations, a pris en compte tous les éléments permettant d’évaluer le préjudice, parmi lesquels, le coût d’acquisition des bus ; au surplus, le non-respect par l’arbitre de sa mission, ne peut avoir pour objet la révision au fond, de la sentence, mais seulement de permettre au juge de vérifier si les
arbitres se sont ou non, sur les points où leur décision est critiquée, conformés à leur mission, sans avoir à apprécier le bien-fondé de leur décision. Il suit que ce moyen n’est pas fondé.
ARTICLE 29 AUA ARTICLE 29-2 DU REGLEMENT DE PROCEDURE DE LA CCJA ARTICLE 30-6 DU REGLEMENT DE PROCEDURE DE LA CCJA ARTICLE 31 DU REGLEMENT DE PROCEDURE DE LA CCJA ARTICLE 34 DE L’ACCORD FRANCO-IVOIRIEN DE COOPERATION EN MATIERE DE JUSTICE ARTICLE 123 DE LA LOI MALIENNE PORTANT REGIME GENERAL DES OBLIGATIONS CIVILES ET COMMERCIALES Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.), Arrêt n° 011/2011 du 29 novembre 2011, Audience publique du 29 novembre 2011, Recours en contestation de validité de sentence arbitrale n° 007/2008/PC du 19 février 2008, Affaire : Etat du MALI (Conseils : Maître Abdoul Karim KONE du Cabinet BERTHE Avocats Associés, Avocats à la Cour ; Maître Abdoulaye Garba TAPO du Cabinet EXAEQUO DROIT MALI, Avocats Associés, Avocats à la Cour) contre Société ABS International Corporate LTD (Conseils : Maître Rasseck BOURGI et Maître Agnès OUANGUI, Avocats à la Cour). – Recueil de Jurisprudence n° 17 (Juillet – Décembre 2011), p. 40 ; Juris Ohada, 2011, n° 4, octobre – décembre 2001 , p. 7.
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A), a rendu, en assemblée plénière, l’Arrêt suivant, en son audience publique du 29 novembre 2011, où étaient présents :
Messieurs Antoine Joachim OLIVEIRA, Président, Maïnassara MAIDAGI, Premier vice-Président, Ndongo FALL, Second vice-Président, rapporteur, Doumssinrinmbaye BAHDJE, Juge, Namuano F. DIAS GOMES, Juge, Abdoulaye Issoufi TOURE, Juge, Madame Flora DALMEIDA MELE, Juge, Messieurs D. Victoriano OBIANG ABOGO, Juge, Marcel SEREKOISSE-SAMBA, Juge
Et Maître Paul LENDONGO, Greffier en chef ;
Sur le recours en contestation de validité de sentence arbitrale enregistré au greffe de la Cour de céans, le 19 février 2008 sous le n° 007/2008/PC formé par Maître Abdoul Karim KONE du Cabinet BERTHE Avocats Associés et Maître Abdoulaye Garba TAPO du Cabinet EXAEQUO DROIT MALI, Avocats Associés, au nom et pour le compte de l’Etat du Mali, représenté par le Ministère de l’Equipement et des Transports, avenue de la Liberté, angle rue 35, poursuites et diligences du Directeur général du Contentieux de l’Etat du Mali,
en contestation de validité de la sentence rendue le 16 janvier 2008 par le tribunal arbitral composé de Maître Philippe LEBOULANGER et Maître Abbé YAO, co-arbitres, et du Docteur Gaston KENFACK DOUAJNI, Président, dont le dispositif est le suivant :
« ... Statuant à l’unanimité de ses membres,
- Constate que le contrat de concession signé le 27 octobre 2005 n’est pas entré en vigueur, les conditions de ladite entrée en vigueur incombant à la société ABS International Corporate Ltd n’ayant pas été satisfaites par cette dernière, et la condition tenant à la validation de la redevance bus n’ayant pas été homologuée par l’IATA ;
- Dit que la responsabilité contractuelle de l’Etat du Mali n’est pas établie ;
En conséquence,
- Déboute la société ABS International Corporate Ltd de sa demande de condamnation de l’Etat du Mali, sur le fondement de la responsabilité contractuelle dudit Etat ;
En revanche,
- Constate que l’Etat du Mali a commis une faute au préjudice de la société ABS International Corporate Ltd, en laissant cette dernière acquérir des bus destinés à être exploités dans le cadre de l’exécution d’un contrat, sans informer ladite société, du refus d’homologation par l’IATA, de la redevance bus, homologation de laquelle dépendait l’entrée en vigueur dudit contrat ;
- Condamne l’Etat du Mali, en conséquence, à payer à titre de dommages-intérêts compensatoires, la somme totale de 1.024.525.754 FCFA (un milliard vingt-quatre millions cinq cent vingt-cinq mille sept cent cinquante quatre francs CFA), dont le détail se présente comme suit :
1/ - coût d’acquisition des bus : 1.240.338,00 euros, soit 813.608.395 FCFA (voir pièce ABS n° 26/2) ;
2/ - frais d’immobilisation desdits bus sur une durée de six mois, à compter de leur arrivée à Bamako le 21 novembre 2005 jusqu’à leur réacheminement à Dakar le 26 avril 2006 (voir pièce ABS n° 23) : 83.560.595 FCFA ;
3/ - frais de réacheminement des bus de Bamako à Dakar : 4.200.000 FCFA (voir pièce ABS n° 25/III) ;
4/ - frais d’avocats et autres débours exposés par la société ABS International : 40.000.000 FCFA (voir pièce P25 de la Note du 28 juin 2007 résumant les observations développées par ABS International Corporate Ltd et les moyens soutenus par elle lors de l’audience du 31 mai 2007) ;
5/ - 70 % des frais de l’arbitrage liquidés par le Tribunal arbitral à la somme de 118.795.375 FCFA : 83.156.766 FCFA ;
- Déboute les parties du surplus de leurs demandes. » ;
Vu les dispositions des articles 21 et 25 du Traité du 17 octobre 1993 relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de Procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage du 18 avril 1996 ;
Vu les dispositions du Règlement d’Arbitrage de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage du 11 mars 1999 ;
Sur la recevabilité du recours en contestation de validité de la sentence
Attendu que par écritures en date du 10 avril 2008, ABS International Corporate Ltd plaide à titre principal, l’irrecevabilité, au regard des dispositions de l’article 29.2 du Règlement
d’Arbitrage de la CCJA, du recours en contestation de validité de la sentence, au motif que l’Etat du Mali y a renoncé par la signature du contrat de concession, qui prévoit en son article 24 que, s’il y a lieu, « ... toute sentence prononcée par le tribunal arbitral sera définitive, opposable aux parties et pourra se voir conférer l’exequatur par les juridictions compétentes » ;
Attendu que dans son mémoire en réponse en date du 08 mai 2008 intitulé « en réplique » reçu au greffe de la Cour, le 13 mai 2008, l’Etat du Mali soutient que, contrairement à l’argumentaire de ABS International Corporate Ltd, le caractère définitif de la sentence n’exclut pas l’exercice de voies de recours, car ce caractère ne confère pas à une décision, la « force de chose jugée » qui rend la décision insusceptible de recours, contrairement à l’autorité de la chose jugée qui confère à la décision, « force probante ... et foi de son authenticité jusqu’à inscription de faux » et implique essentiellement le dessaisissement des arbitres, en laissant susciter les voies de recours prévues ;
Qu’il précise que la possibilité de faire exequaturer la sentence à venir ne peut être interprétée comme une renonciation au recours qui, une fois formé, constitue un obstacle à la délivrance de l’exequatur ;
Mais, attendu que les termes employés à l’article 34 du contrat de concession ne sont que des périphrases traduisant la règle de l’autorité de la chose jugée, qui s’attache à la sentence rendue sous l’égide de la CCJA, qui ne peut être remise en cause et n’est susceptible d’aucune autre voie de recours que celle du recours en contestation de validité, auquel ne saurait faire obstacle la seule mention du caractère « définitif » de la sentence dans la convention d’arbitrage, toutes les sentences rendues sous l’égide de la CCJA étant revêtues de « l’autorité de chose jugée », comme prévu à l’article 23 de l’Acte uniforme sur le Droit de l’arbitrage et considérées comme décisions définitives ayant force de chose jugée, dès lors qu’elles ne sont plus susceptibles de voies de recours suspensives ; qu’elles peuvent aussi faire l’objet d’un exequatur dès leur reddition, conformément à l’article 30 du Règlement d’Arbitrage de la CCJA, que la convention d’arbitrage l’ait prévu ou non, sans que cette éventualité puisse constituer un obstacle à l’exercice du recours en contestation de validité de la sentence ;
Qu’ainsi, l’exception d’irrecevabilité du recours n’est pas fondée et doit être rejetée ;
Sur la régularité du dépôt de mémoire
Attendu que l’Etat du Mali, dans son mémoire en réplique sus référencé, conclut au rejet des écritures déposées par les conseils de la Société ABS International Ltd, d’une part, pour défaut de mandat spécial produit de Me Rasseck BOURGI, qui a cosigné lesdites écritures aux côtés de Maître Agnès OUANGUI, d’autre part, pour faute de production d’un mandat spécial ou de preuve de sa qualité au sein de ladite société de Monsieur Alioune DIASSE désigné comme son représentant ;
Attendu que dans son mémoire en duplique en date du 25 juin 2008 reçu au greffe de la Cour, le 14 juillet 2008, la société ABS International fait observer en réponse à ces objections que, d’une part, au regard de l’article 34 de l’Accord de Coopération en matière de Justice entre la République française et la République de Côte d’Ivoire du 24 avril 1961 combiné à l’article 23.1 du Règlement de Procédure de la CCJA, qui dispose qu’« est admis à exercer le ministère d’avocat toute personne pouvant se présenter en cette qualité devant une juridiction de l’un des Etats-Parties au Traité », d’autre part, au vu du mandat spécial en cours de validité déjà versé aux débats et produit à toutes fins utiles en nouvelle communication et faisant l’objet de la pièce numéro 6 jointe au mémoire, la constitution de Maître R. BOURGI est régulière ;
Qu’elle ajoute qu’en ce qui concerne la qualité de son mandataire Monsieur Alioune DIASSE, elle verse encore, à toutes fins utiles, en nouvelle communication, la pièce numéro 8 jointe au mémoire, les statuts de la Société ABS International Corporate Ltd justifiant cette qualité ;
Attendu qu’il échet de dire qu’au regard des productions et des arguments pertinents de la société ABS International Corporate Ltd ci-dessus exposés, que la constitution de Maître Rasseck BOURGI est régulière et la qualité de représentant légal de la Société ABS International Ltd de Monsieur Abdou S. DIASSE établie ;
Attendu que dans ses mêmes écritures, la Société ABS International Corporate Ltd conclut à l’irrecevabilité du mémoire en réplique de l’Etat du Mali, au motif que le dépôt dudit mémoire n’a pas fait l’objet d’une autorisation délivrée conformément à l’article 31 du Règlement de Procédure de la CCJA ;
Attendu qu’en effet, ledit mémoire, même s’il ne fait que reprendre pour l’essentiel les arguments développés dans le recours en contestation de validité de la sentence, n’a pas fait l’objet d’une autorisation préalable du Président de la Cour de céans, comme prescrit à l’article 31 du Règlement de Procédure de la CCJA ; qu’il échet en conséquence, de l’écarter des débats ;
Sur le moyen du recours en contestation de validité de la sentence
Attendu que le présent recours est fondé sur un moyen unique « tiré de l’article 30.6 du Règlement d’Arbitrage de la CCJA ... le Tribunal arbitral [ayant statué] ultra petita en ce qu’il ne s’est pas conformé à la mission qui lui a été confiée » ;
Que la partie recourante expose à l’appui du moyen invoqué, que l’acte de mission établi au siège du tribunal arbitral, le 11 décembre 2006, prévoit en son point IV page 5 que, « le Tribunal est appelé à statuer sur les demandes précisées au point III ... libellé comme suit :
« PRETENTIONS DES PARTIES
A - Les demandes de la Société ABS Corporate LTD
La Société ABS International LTD demande au tribunal arbitral de constater que l’Etat du Mali a dénoncé de manière irrégulière, sans motivation et de façon abusive, le contrat de concession ... et le condamner en conséquence à réparer intégralement le préjudice financier et commercial subi par la Société ABS International, préjudice se décomposant comme suit :
- frais engagés dans le cadre de la création, de la mise en place d’ABS Mali-SA, du démarrage des opérations et réacheminement des bus : 45.004.146 FCFA ;
- coût d’immobilisation des bus (à parfaire jusqu’à la cessation de l’immobilisation des bus) : 83.560.595 FCFA ;
- manque à gagner lié à la non-exécution du contrat : 4.792.595.234 FCFA ;
- détérioration de l’image de marque d’ABS International et atteinte à la réputation de celle-ci : 770.000.000 FCFA ;
TOTAL : 5.691.159.075 FCFA ... ».
Qu’elle précise qu’ainsi, « le point unique du litige et sur lequel le tribunal arbitral devait statuer, était de savoir si l’Etat du Mali encourait une quelconque responsabilité contractuelle pour rupture abusive de contrat ... Tous les autres points retenus dans l’acte de mission [n’étant] que les conséquences de la reconnaissance ou non de la responsabilité contractuelle alléguée » ;
Qu’elle estime que le tribunal a alors outrepassé le périmètre de sa mission en ce qu’i a, après avoir constaté que le contrat de concession signé n’était pas entré en vigueur en raison de la non-réalisation des conditions pour ce faire, écarté la responsabilité contractuelle pour ensuite évoquer d’office et retenir la responsabilité délictuelle de l’Etat du Mali, qui aurait commis une faute ayant occasionné divers préjudices justifiant les condamnations telles qu’elles résultent du dispositif suscité et notamment, la condamnation à payer le coût d’acquisition des bus que ABS International Corporate Ltd devait mettre en service à l’aéroport de Bamako, alors que cette demande n’apparaît nulle part dans l’acte de mission et est injustifiée, étant donné que ces véhicules sont demeurés la propriété de ABS International Corporate Ltd, qui les a d’ailleurs récupérés ;
Attendu que par écritures en date du 10 avril 2008, la Société ABS International Ltd conclut à titre subsidiaire, au mal-fondé du recours, en invoquant la conception restrictive du moyen tiré du non-respect par l’arbitre, de sa mission adoptée par la doctrine et la jurisprudence, notamment françaises, selon lesquelles « ce grief n’a pas pour objet la révision au fond de la sentence mais seulement de permettre au juge de vérifier si les arbitres se sont ou non, sur les points où leur décision est critiquée, conformés à leur mission, sans avoir à apprécier le bien- fondé de leur décision » ;
Qu’elle précise aussi que, « le tribunal avait toute latitude, dans le cas où la responsabilité de l’Etat du Mali devait être retenue, pour choisir le fondement juridique qu’il juge approprié pour apprécier cette responsabilité et faire droit à la demande d’indemnisation sans pour autant ... statuer ultra petita » ;
Attendu que le moyen tel qu’il est présenté comporte deux branches ;
Sur la première branche du moyen
Attendu que l’Etat du Mali, après avoir rappelé dans la première branche du moyen, les termes de l’acte de mission, prétend que le point unique sur lequel le tribunal arbitral devait statuer, est relatif à la question de savoir s’il encourait une quelconque responsabilité contractuelle pour rupture abusive du contrat qui le liait à la Société ABS International LTD ;
Mais, attendu qu’il est de jurisprudence que la mission des arbitres, définie par la convention d’arbitrage, est délimitée principalement par l’objet du litige, tel qu’il est déterminé par les prétentions des parties, sans s’attacher uniquement à l’énoncé des questions dans l’acte de mission ;
Qu’ainsi, le tribunal arbitral, en relevant, par une interprétation exclusive de toute dénaturation des faits de la cause, que la responsabilité délictuelle de l’Etat du Mali « constamment invoquée par l’Etat du Mali » est dans le débat, s’est légalement autorisé, dans le respect de sa mission et sans violer le principe du contradictoire, à retenir la responsabilité délictuelle de l’Etat du Mali ;
Sur la deuxième branche du moyen
Attendu que l’Etat du Mali, dans la seconde branche du moyen, critique la sentence, en ce que le tribunal arbitral l’a condamné à payer à la Société ABS International LTD, le coût d’acquisition des bus, alors qu’une telle demande ne résulte pas de l’acte de mission ;
Mais attendu, sur ce point, outre le fait comme indiqué ci-dessus que la mission des arbitres est délimitée principalement par l’objet du litige tel qu’il résulte des prétentions des parties, sans s’attacher uniquement à l’énoncé des points spécifiés dans l’acte de mission, il y a lieu de relever que le tribunal arbitral, qui a retenu la responsabilité délictuelle et subséquemment, la réparation du préjudice par équivalent, sous forme de dommages-intérêts, conformément à
l’article 123 de la loi malienne portant Régime Général des Obligations, a pris en compte tous les éléments permettant d’évaluer le préjudice, parmi lesquels le coût d’acquisition des bus ; qu’au surplus, le non-respect par l’arbitre de sa mission, ne peut avoir pour objet la révision au fond de la sentence, mais seulement de permettre au juge de vérifier si les arbitres se sont ou non, sur les points où leur décision est critiquée, conformés à leur mission, sans avoir à apprécier le bien-fondé de leur décision ;
D’où il suit que ce moyen n’est pas fondé ;
Sur les dépens
Attendu que l’Etat du Mali ayant succombé, doit être condamné aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré ;
- Déclare recevable en la forme le recours en contestation de l’Etat du Mali ;
- Rejette ledit recours comme non fondé ;
- Condamne l’Etat du Mali aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président Le Greffier en Chef __________


Synthèse
Numéro d'arrêt : 011/2011
Date de la décision : 29/11/2011

Analyses

SENTENCE ARBITRALE - AUTORITÉ DE LA CHOSE JUGÉE - RECEVABILITÉ DU RECOURS EN CONTESTATION DE VALIDITÉ DE SENTENCE : OUI RÉGULARITÉ DU DÉPÔT DE MÉMOIRE EN RÉPONSE DU DÉFENDEUR À LA CONTESTATION DE VALIDITÉ : OUI RESPECT PAR L'ARBITRE DE SA MISSION : OUI. VALIDITÉ DE LA SENTENCE ARBITRALE


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2011-11-29;011.2011 ?
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