en cassation de l’Arrêt n°347/2007 rendu le 08 juin 2007 par la Cour d’appel d’Abidjan et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en dernier ressort ;
Déclare recevable l’appel relevé par la société BERNABE Côte d’Ivoire contre le Jugement n°1632/02 rendu le 21 juin 2006 par le Tribunal de première instance d’Abidjan ;
L’y dit mal fondé et l’en déboute ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Condamne la Société BERNABE aux dépens. » ;
La requérante invoque au soutien de son pourvoi un moyen unique de cassation tel qu’il figure à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Jacques M’BOSSO, Président ;
Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’invitée par lettre n° 126/2008/G2 en date du 14 mai 2008 du greffier en chef de la Cour de céans à présenter un mémoire en réponse dans un délai de trois mois à compter de la date de réception de ladite lettre, la CICODIS, qui a reçu ladite lettre en même temps que le pourvoi le 16 mai 2008, n’a pas fait parvenir à la Cour ledit mémoire ; que le contradictoire ayant été respecté, il échet d’examiner le présent pourvoi ;
Attendu qu’il ressort de l’examen des pièces du dossier de la procédure que courant 1999, la société CICODIS avait acquis auprès de la société BERNABE Côte d’Ivoire diverses marchandises pour un coût total de 23.857.735 F CFA ; que confrontée peu après à des difficultés financières énormes suite aux pillages consécutifs au coup d’Etat militaire de décembre 1999, la CICODIS avait sollicité et obtenu de BERNABE Côte d’Ivoire un rééchelonnement de sa dette de sorte qu’à la date du 30 avril 2003, les paiements effectués selon le nouvel échéancier s’élevaient à la somme de 14.157.735 F CFA ; que par la suite, les paiements étaient interrompus et les démarches entreprises par BERNABE Côte d’Ivoire pour obtenir un règlement amiable du reliquat de sa créance étaient restées vaines ; qu’ainsi, BERNABE Côte d’Ivoire avait sollicité et obtenu du Président du Tribunal de première instance d’Abidjan Plateau l’Ordonnance d’injonction de payer n°2811/2005 du 29 janvier 2005 par laquelle il condamne la société Comptoir Ivoirien de Commerce et Distribution dite CICODIS à payer à la société BERNABE Côte d’Ivoire la somme de neuf millions sept cent mille (9.700.000) F CFA, outre les intérêts de droit courus à ce jour et les frais accessoires ; que ladite Ordonnance fut signifiée le 26 septembre 2005 à la société CICODIS ; que par acte d’huissier en date du 10 octobre 2005, la société CICODIS avait formé opposition contre ladite ordonnance ; que statuant sur l’opposition ainsi formée, le Tribunal de première instance d’Abidjan Plateau avait rendu le Jugement n°1692 Civ 3C du 21 juin 2006 par lequel il avait déclaré la société CICODIS recevable en son opposition, déclaré celle-ci bien fondée et rétracté l’ordonnance querellée ; que par exploit en date du 05 juillet 2006 du ministère de Maître BROU KOUAME, huissier de justice à Abidjan, la société BERNABE Côte d’Ivoire avait interjeté appel du jugement précité ; que statuant sur l’appel ainsi relevé, la Cour d’appel d’Abidjan avait rendu l’arrêt dont pourvoi ;
Sur le moyen unique
Vu les articles 274 et 275 de l’Acte uniforme portant droit commercial général
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir mal interprété l’article 274 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général en ce que la Cour d’appel d’Abidjan a considéré que c’est à bon droit que la CICODIS invoque la prescription de sa dette à l’égard de BERNABE Côte d’Ivoire faute pour celle-ci d’avoir rapporté la preuve que le dernier paiement effectué par celle-là date de 2003 alors que, selon le moyen, en reconnaissant sa dette par le paiement d’acompte, la CICODIS était censée avoir renoncé à la prescription ; qu’en effet, et toujours selon le moyen, la Cour de cassation française, interprétant l’article 2248 du Code civil qui traite de la prescription, a, dans un arrêt en date du 07 juillet 1980, affirmé que le fait pour le débiteur de payer un acompte de sa dette constitue une reconnaissance de dette qui interrompt la prescription ; que le paiement d’acompte a eu pour effet d’interrompre la prescription si bien qu’un nouveau délai a commencé à courir ; que ce délai n’est plus le délai de courte durée prévue par l’article 274 de l’Acte uniforme OHADA portant droit commercial général mais un délai de droit commun de trente ans ;
Attendu qu’aux termes des articles 274 et 275 alinéa 1er de l’Acte uniforme susvisé, « le délai de prescription en matière de vente commerciale est de deux ans.
Ce délai court à partir de la date à laquelle l’action peut être exercée. » et « une action résultant d’un manquement au contrat peut être exercée à partir de la date à laquelle ce manquement s’est produit » ;
Attendu, en l’espèce, qu’il résulte des productions que le dernier paiement effectué par CICODIS en faveur de BERNABE Côte d’Ivoire date du 17 mars 2003 pour un montant de 327.240 F CFA ; que depuis cette date, aucun paiement n’est intervenu ; qu’en conséquence et en application des dispositions susénoncées des articles 274 et 275, alinéa 1er de l’Acte uniforme susvisé, BERNABE Côte d’Ivoire avait jusqu’au 17 mars 2005 pour exercer son action en recouvrement du reliquat de sa créance ; qu’il suit que la requête aux fins d’injonction de payer introduite le 29 juin 2005, bien après l’expiration du délai impératif de deux ans susindiqué, est intervenue alors même que ladite action en recouvrement était déjà prescrite ; qu’il échet en conséquence de dire que le moyen unique invoqué par BERNABE Côte d’Ivoire n’est pas fondé et doit être rejeté ;
Attendu que BERNABE Côte d’Ivoire ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré.
Rejette le pourvoi formé par la société BERNABE Côte d’Ivoire ;
La condamne aux dépens.
PRESIDENT : M. Jacques M’BOSSO