CCJA – COMPETENCE – AFFAIRE SOULEVANT DES QUESTIONS RELATIVES A L’APPLICATION DE L’ACTE UNIFORME PORTANT DROIT COMMERCIAL GENERAL – COMPETENCE (OUI).
PROCEDURE – RECOURS EN CASSATION – MOYEN – NON SIGNIFICATION DE L’ARRET ATTAQUE – CONDITION DE RECOURS EN CASSATION (NON) – POINT DE DEPART DE LA COMPUTATION DU DELAI DANS LEQUEL LE RECOURS DOIT ETRE EXERCE (OUI) – RECOURS POUVANT ETRE EXERCE AVANT TOUTE SIGNIFICATION DE L’ARRET ATTAQUE (OUI) – IRRECEVABILITE DE L’EXCEPTION D’IRRECEVABILITE (OUI).
PROCEDURE – RECOURS EN CASSATION – MOYEN NOUVEAU – MOYEN MELANGE DE FAIT ET DE DROIT – IRRECEVABILITE.
DROIT COMMERCIAL GENERAL – BAIL COMMERCIAL – RUPTURE – MOTIFS – NON PAIEMENT DES LOYERS OU NON RESPECT DES CLAUSES ET CONDITIONS DU BAIL (NON) – SOUSCRIPTION D’UN BAIL A CONSTRUCTION PAR LE BAILLEUR SUR LE SITE DONNE A BAIL AUX DEMANDEURS AU POURVOI – APPLICATION DES ARTICLES 101 ET 102 DE L’ACTE UNIFORME (NON).
DROIT COMMERCIAL GENERAL – BAIL COMMERCIAL – CONDITIONS DE RESILIATION DE PLEIN DROIT – LOI APPLICABLE – ARTICLE 83 DE L’ACTE UNIFORME (NON).
DROIT COMMERCIAL GENERAL – BAIL COMMERCIAL – RENOUVELLEMENT – RENOUVELLEMENT PAR TACITE RECONDUCTION – LOCATAIRES LIES PAR CONTRATS A DUREE INDETERMINEE – LOCATAIRES DECHUS DE LEUR DROIT AU RENOUVELLEMENT DES BAUX – APPLICATION DES ARTICLES 91 ET 92 D’ACTE UNIFORME (NON).
PROCEDURE – RECOURS EN CASSATION – MOYEN – NON PRECISION DE LA PARTIE CRITIQUEE – IRRECEVABILITE.
Bien que les contrats soient conclus avant l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général, la rupture desdits contrats étant intervenue après l’entrée en vigueur dudit Acte, c’est en application des dispositions de cet Acte que la procédure de résiliation doit être faite conformément à l’article 10 du Traité OHADA.
Par ailleurs, l’affaire soulève des questions relatives à l’application de l’Acte uniforme portant droit commercial général, dès lors que les différentes parties ont eu à invoquer différentes dispositions de cet Acte uniforme.
Par conséquent, l’exception d’incompétence n’est pas fondée.
La signification d’un arrêt n’étant pas la condition du recours contre celui-ci comme l’est le fait d’en avoir connaissance par tout moyen, mais marque plutôt le point de départ de la computation du délai dans lequel le recours doit être exercé, l’exception d’irrecevabilité du recours soulevée n’est pas fondée et doit être rejetée, dès lors que les dispositions du Règlement de procédure de la CCJA n’interdisent pas le recours fait avant toute signification de la décision attaquée.
L’application de l’article 101 de l’Acte uniforme portant Droit commercial général n’ayant pas été demandée à la Cour d’appel, le moyen pris de la violation dudit article est un moyen nouveau mélangé de fait et de droit, qui doit être déclaré irrecevable.
Les articles 101 et 102 de l’Acte uniforme portant Droit commercial général ne sauraient s’appliquer, dès lors que les relations contractuelles n’ont pas pris fin pour non payement des loyers ou non respect des clauses et conditions du bail, mais parce que le bailleur a souscrit un bail à construction sur le site donné à bail en faveur d’un opérateur économique.
En constatant la résiliation de plein droit des contrats en application de l’article 8 desdits contrats, la Cour d’appel n’a pu violer par application inappropriée l’article 83, dès lors que cet article qui traite d’une obligation incombant au preneur ne traite donc pas des conditions de résiliation de plein droit du bail commercial.
En décidant que les appelants sont déchus de leur droit au renouvellement des baux, la Cour d’appel na pu violer les dispositions des articles 91 et 92 de l’Acte uniforme portant droit commercial général, qui n’avaient pas vocation à s’appliquer en l’espèce.
Les moyens du demandeur doivent être déclarés irrecevables, dès lors qu’ils ne précisent ni la partie critiquée de l’arrêt attaqué, ni ce en quoi ledit arrêt encourt les différents reproches qui lui sont faits. ARTICLE 101 AUPSRVE ARTICLE 102 AUPSRVE
Cour commune de justice et d’arbitrage, 1ère chambre, arrêt n° 40 du 10 juin 2010, Affaire : Monsieur K et 5 Autres C/ 1- Agence judiciaire de l’Etat de Guinée ; 2- N ; 3- Monsieur K. Le Juris Ohada n° 4/2010 octobre-novembre-décembre, p. 28
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 14 juillet 2008 sous le n°060/2008/PC et formé par Maîtres BERETE Sidiki et Santiba KOUYATE, Avocats au Barreau de GUINEE agissant aux noms et pour les comptes de Messieurs K et 5 Autres, domiciliés au quartier Taouya, Commune de Rotoma, Conakry (GUINEE) dans la cause les opposant à l’Agence judiciaire de l’Etat de GUINEE, représentant la Direction générale du Patrimoine Bâti Public, sise au quartier Boublinet, ayant pour conseil Maitre Laciné SYLLA, Avocat à la Cour, à Monsieur N, domicilié au quartier Lambanyi, Commune de Rotoma, BP 177 Conakry et à Monsieur K, domicilié au quartier Entag, Commune de Matoto, Conakry,
en cassation de l’Arrêt n°276 rendu le 03 juin 2008 par la Cour d’appel de Conakry et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en dernier ressort ;
En la forme : Reçoit les appels principaux et incidents de Monsieur K et autres et K ;
Au fond : Les déclare mal fondés
En conséquence, confirme le jugement commercial n°218 du 19/02/07 en toutes ses dispositions :
LE REFORMANT :
Déclare régulier et valable le bail à construction du 18 juillet 2005 conclu en faveur de N ;
Dit et arrête que les appelants sont déchus de leur droit au renouvellement des baux ;
Ordonne en conséquence leur expulsion des lieux ainsi que de tous autres occupants de leur chef :
Déboute les parties du surplus de leurs prétentions ;
Met les dépens à la charge des appelants ».
Les requérants invoquent à l’appui de leur pourvoi les vingt moyens de cassation tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Juge Maïnassara MAÏDAGI ;
Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu que N et Monsieur K, défendeurs au pourvoi, bien qu’ayant reçu notification du pourvoi respectivement par lettres n°381 /2008/G2 du 14 aout 2008, reçue le 25 novembre 2008 et n°383/2008/G2 du 14 aout 2008, reçue le 11 septembre 2008, n’ont pas déposé de mémoire dans le délai de trois mois qui leur a été imparti ; que le principe du contradictoire ayant été ainsi respecté, il y a lieu d’examiner le présent recours ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure que les 19 août 1993, 13 octobre 1995, 13 novembre 1995 et 18 décembre 2002, la Direction Nationale du Service de Gestion du Patrimoine Bâti Public avait conclu des baux commerciaux portant sur des magasins ou kiosques sis à SIG MADINA avec K, C, I, M, C et D et d’une durée de trois ans renouvelable sur l’accord des deux parties ; que ces baux commerciaux étaient d’abord verbaux depuis courant 1988 ; qu’à la suite d’un bail à construction signé le 18 juillet 2005 entre le Ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat et N et portant sur le terrain formant une parcelle sise dans le lot 36 du plan cadastral de Madina Sig, Code COMM 09111400, objet du titre foncier n°63 de Conakry 2, d’une superficie de 945, 776 mètres carrés, le Directeur général du Patrimoine Bâti adressait, le 01 novembre 2005, la lettre n°284/SGP/DGBP/05 à Monsieur K et 5 autres, leur accordant un délai d’un mois pour libérer les lieux de toute occupation ; que malgré la lettre n°284/SGP/DPBP/05 susindiquée, K et autres restèrent sur les lieux loués et obtinrent même du Président du Tribunal de première instance de Conakry III l’Ordonnance n°158/P/CA/CKRYIII/CAB/2007 du 28 juin 2007 ordonnant l’arrêt immédiat de tous travaux sur la parcelle du lot 36, objet du titre foncier n°63 du plan cadastral de Madina –SIG ainsi que toutes opérations tendant à l’expulsion ou à la démolition des bâtiments B et C, objet du litige les opposant à N, jusqu’à ce que le tribunal statue sur le mérite de leur action ; qu’en effet, par exploit d’assignation en date du 16 juillet 2007, K et 5 autres ont assigné N et l’Agent judiciaire de l’Etat à comparaitre à l’audience du 25 juillet 2007 à l’effet, par jugement avant dire droit d’ordonner l’arrêt immédiat de tous travaux sur la parcelle du lot n°36 susindiqué et de révoquer le bail signé le 18 juillet 2005 entre N et le Ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat, condamner N au paiement de 100.000.000 GNF à titre de dommages intérêts et ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir ; que par Jugement n°218 en date du 19 décembre 2007, le Tribunal examinant les demandes de K et autres ainsi que les demandes reconventionnelles d’Net de l’Agent judiciaire de l’Etat, de même que l’intervention volontaire d’A, avait entre autres, constaté que les baux des demandeurs sont des baux commerciaux, dit que les demandeurs sont déchus de leurs droits de renouvellement de leurs baux, condamné les demandeurs au paiement à N de la somme de 5.000.000 Fg à titre reconventionnel pour action abusive, ordonné l’exécution provisoire quant à la poursuite des travaux par N sur la partie non occupée par les demandeurs et débouté
les parties de toutes leurs demandes ; que sur appel de K et 5 autres ainsi que de A, la Cour d’appel de Conakry rendait le 03 juin 2008 l’Arrêt n°276 dont pourvoi ;
Sur la compétence de la Cour de céans au regard des articles 10 et 14 du Traité institutif de l’OHADA
Attendu que l’Agent judiciaire de l’Etat de GUINEE, défendeur au pourvoi, soutient que la Cour de céans doit se déclarer incompétente pour connaitre du présent pourvoi aux motifs que, d’une part, les baux conclus entre Messieurs K et cinq autres et la Direction Nationale du Service de Gestion du Patrimoine Bâti Public sont intervenus pour la première fois verbalement en 1988 et par écrit en 1993, 1995 et 2002 ; que leur exécution a commencé en 1988, date antérieure à l’entrée en vigueur du Traité OHADA en GUINEE qui est le 21 novembre 2000 ; qu’il apparait que les baux commerciaux invoqués constituent une situation juridique née sous l’empire de l’ordre juridique guinéen antérieur à l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme sur le droit commercial général ; que, d’autre part, l’Arrêt n°276 du 03 juin 2008 déféré devant la Cour de céans a déjà été déféré devant la Cour suprême de GUINEE sans que cette dernière ait rendu une quelconque décision, d’où un risque de contrariété de décisions ; qu’enfin, le bail de l’intervenant volontaire, Monsieur A, est un bail à usage d’habitation exclu du champ d’application de l’Acte uniforme ;
Mais attendu, en l’espèce, que c’est par lettre n°284/SGP/DGPBP/05 en date du 01 novembre 2005 que le Directeur général du Patrimoine Bâti a informé Monsieur K et 5 autres que l’Etat guinéen a souscrit un bail à construction en faveur d’un opérateur économique et que ledit bail portant sur le site abritant leurs kiosques résilie de fait le contrat les liant à la Direction générale du Patrimoine Bâti Public ; que par conséquent, bien que les contrats liant K et 5 Autres soient conclus avant l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général en République de GUINEE, la rupture desdits contrats initiée par le Directeur général du Patrimoine Bâti est intervenue après le 21 novembre 2000, date d’entrée en vigueur de l’Acte uniforme susindiqué ; qu’il s’ensuit que c’est en application des dispositions dudit Acte uniforme que la procédure de résiliation doit être faite conformément à l’article 10 du Traité susvisé aux termes duquel « les Actes uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les Etats parties nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieure ou postérieure » ; qu’en outre, il ressort aussi bien du Jugement n°218 du 19 décembre 2007 du Tribunal de première instance de Conakry 3 que de l’Arrêt n°276 du 03 juin 2008 de la Cour d’appel de Conakry que les différentes parties au procès ont eu à invoquer différentes dispositions de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général, notamment les articles 12, 71, 77, 80, 91, 92 et 101 dudit Acte uniforme et auxquelles le Tribunal de première instance comme la Cour d’appel ont eu à répondre ; qu’il ya lieu de retenir que la présente affaire soulève des questions relatives à l’application de l’Acte uniforme susindiqué et justifie donc la compétence de la Cour de céans à examiner le présent pourvoi en application de l’alinéa 3 de l’article 14 du Traité institutif de l’OHADA ; qu’il s’ensuit que l’exception d’incompétence de la Cour de céans soulevée par l’Agence judiciaire de l’Etat de GUINEE n’est pas fondée et qu’il échet de se déclarer compétent ;
Sur la compétence de la Cour de céans à examiner les demandes de condamnation à des dommages intérêts et astreintes formulées par K et Autres
Attendu que l’Agent judiciaire de l’Etat de GUINEE demande à la Cour de se déclarer incompétente à examiner les demandes de condamnations à des dommages-intérêts et aux astreintes formulées par Monsieur K et 5 Autres aux motifs, d’une part, que ces demandes sont formulées pour la première fois devant la Cour de céans pour n’avoir jamais été faites ni devant le premier juge, ni devant le juge d’appel et, d’autre part, que ces demandes nouvelles
ne soulèvent aucune question relative à l’application des Actes uniformes tels que prévus par l’article 14, alinéa 3 du Traité du 17 octobre 1993 ;
Mais attendu que les demandes de condamnations à des dommages et intérêts et aux astreintes formulées par K et 5 autres ne peuvent être examinées qu’au cas où la Cour de céans aurait le cas échéant, cassé l’arrêt attaqué et statué sur le fond ; que ces demandes, n’ayant aucune incidence sur la compétence de la Cour de céans à se prononcer sur le recours en cassation, il s’ensuit que la présente exception d’incompétence doit être rejetée comme non fondée ;
Sur la recevabilité du pourvoi tirée du défaut de signification de l’arrêt attaqué en violation de l’article 28.1 du Règlement de procédure de la CCJA
Attendu que selon l’Agent judiciaire de l’Etat de GUINEE, l’arrêt attaqué n’ayant été signifié que partiellement, à savoir à Messieurs K et cinq autres et ces derniers n’ayant procédé à aucune signification à toutes les parties avant de déposer leur recours, ce dernier est fait en violation de l’article 28.1 du Règlement de procédure ; qu’il y a lieu par conséquent de déclarer irrecevable ledit recours pour défaut de signification à toutes parties ;
Attendu qu’aux termes de l’article 28.1 du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, « lorsque la Cour est saisie par l’une des parties à l’instance par la voie du recours en cassation prévu au troisième ou quatrième alinéa de l’article 14 du Traité, le recours est présenté au greffe dans les deux mois de la signification de la décision attaquée par l’avocat du requérant dans les conditions fixées à l’article 23 ci- dessus… »
Attendu que la signification d’un arrêt n’est pas la condition du recours contre celui-ci comme l’est le fait d’en avoir connaissance par tout moyen mais marque plutôt le point de départ de la computation du délai dans lequel le recours doit être exercé ; que les dispositions du Règlement de procédure de la Cour de céans n’interdisent pas le recours fait avant toute signification de la décision attaquée ; qu’il s’ensuit, qu’en l’espèce, l’exception d’irrecevabilité du recours soulevée par l’Agent judiciaire de l’Etat de GUINEE n’est pas fondée et doit être rejetée ;
Sur le premier moyen
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 101 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général en ce que la Cour d’appel ne s’est pas prononcée sur l’obligation de mise en demeure préalable prévue par ledit article malgré son évocation par les requérants ; que c’est donc à tort que la Cour d’appel a ordonné leur expulsion après avoir constaté le caractère commercial de leurs baux qui n’étaient pourtant pas résiliés ;
Mais attendu que contrairement à ce que soutiennent les demandeurs au pourvoi, il ne ressort ni des pièces du dossier de la procédure, ni de l’arrêt attaqué, qu’ils avaient demandé à la Cour d’appel de Conakry l’application de l’article 101 de l’Acte uniforme susindiqué ; qu’il ressort de l’arrêt attaqué qu’ils ont plutôt demandé à la Cour d’appel de constater la reconnaissance partielle de leur prétention par le premier juge d’instance, de constater le rejet de l’intervention volontaire de Monsieur A, de constater que le juge d’instance a statué ultra petita, de dire et arrêter que la superposition des baux commerciaux est facteur de nullité du second et enfin demandé l’infirmation partielle du jugement à l’encontre de N et l’Agence judiciaire de l’Etat puis statuant à nouveau ou sur évocation, sollicité la résiliation ou la révocation du bail de N, de débouter celui-ci, l’Agence judiciaire de l’Etat et Monsieur A de leurs prétentions comme mal fondées, d’enjoindre à l’Etat, représenté par l’Agence Judiciaire de l’Etat, le respect strict de ses obligations contractuelles à leur égard et enfin de condamner
l’intimé N au paiement de cent millions (100.000.000) de francs guinéens à titre de dommages et intérêts ; qu’il s’agit donc d’un moyen nouveau, mélangé de fait et de droit, lequel doit être déclaré irrecevable ;
Sur le deuxième moyen
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les dispositions combinées des articles 101 et 102 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général et d’avoir fait une application erronée de l’article 8 des contrats des requérants en ce que la Cour d’appel invoque l’article 8 des baux commerciaux qui prévoit la résiliation de plein droit par voie de lettre recommandée avec accusé de réception ou par voie de lettre de mise en main propre et décharge datée et signée par le destinataire alors qu’aux termes de l’article 101 de l’Acte uniforme suscité, la mise en demeure est une obligation légale et qu’il ressort de la lecture dudit article 101 qu’en matière de bail commercial, il n’existe que la résiliation judiciaire et non la résiliation de plein droit prévue par l’article 8 des baux commerciaux ; que l’article 12 du code civil guinéen disposant qu’ « on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui nécessitent l’ordre public et les bonnes mœurs » et l’article 102 de l’Acte uniforme susindiqué retenant que « sont d’ordre public les dispositions des articles 69, 70, 71, 75, 78, 79, 85, 91, 93, 94, 95, 98 et 101 du présent Acte uniforme », il s’ensuit que les dispositions de l’article 101 instituant l’obligation de mise en demeure préalable pour la résiliation judiciaire du bail commercial est d’ordre public ; que dès lors, au regard de l’article 10 du Traité suscité, toute disposition contraire aux Actes uniformes étant nulle, l’article 8 des baux commerciaux est contraire à l’ordre public, donc nul et de nullité absolue, ne saurait être invoqué comme fondement d’une quelconque résiliation de plein droit ;
Attendu que les articles 101 et 102 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général ne sauraient s’appliquer en l’espèce, le Directeur général du Patrimoine Bâti ayant mis fin aux relations contractuelles non pas parce qu’il estimait que les preneurs ne payaient pas le loyer ou ne respectaient pas les clauses et conditions du bail mais plutôt parce que l’Etat Guinéen a souscrit un bail à construction en faveur d’un opérateur économique, lequel bail porte sur le site donné à bail aux demandeurs au pourvoi ; que par conséquent l’arrêt attaqué n’a pas pu violer les textes visés au moyen, lesquels n’ont pas vocation à s’appliquer en l’espèce ; qu’il échet en conséquence de rejeter ce deuxième moyen ;
Sur le troisième moyen
Vu l’article 83 de l’Acte uniforme sur le droit commercial général ;
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué une fausse application des dispositions de l’article 83 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général en ce que la Cour d’appel, en constatant illégalement la résiliation de plein droit des contrats, en vertu de l’article 8 contraire à l’ordre public, sans conviction fait une application inappropriée de cet article 83 ; qu’il est constant que les requérants ont bénéficié des contrats d’une durée de trois (3) ans renouvelable par tacite reconduction et que depuis le 1er novembre 1993 la durée de trois (3) ans a été suffisamment écoulée, donc les parties étaient en période de reconduction tacite, ainsi il s’agit en droit d’un contrat à durée indéterminée ; que c’est par fausse application de l’article 83 de l’Acte uniforme que la Cour d’appel de Conakry a constaté l’arrivée du terme desdits contrats 18 ans après ;
Attendu qu’aux termes de l’article 83 de l’Acte uniforme susvisé, « à l’expiration du bail, le preneur qui, pour une cause autre que celle prévue à l’article 94 ci-après, se maintient dans les lieux contre la volonté du bailleur doit verser une indemnité d’occupation égale au montant du loyer fixé pendant la durée du bail, sans préjudice d’éventuels dommages et intérêts. » ;
Attendu que l’article 83 traite d’une obligation incombant au preneur, à savoir celle de versement d’une indemnité d’occupation égale au montant du loyer fixé pendant la durée du bail, sans préjudice d’éventuels dommages et intérêts ; que ne traitant donc pas des conditions de résiliation de plein droit du bail commercial, la Cour d’appel n’a pu le violer par « application inappropriée » en constatant la résiliation de plein droit des contrats en application de l’article 8 desdits contrats ; que de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter ce troisième moyen comme non fondé ;
Sur le quatrième moyen
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué une fausse application des dispositions des articles 91 et 92 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général en ce que la Cour d’appel prétend s’opposer au droit de renouvellement des baux commerciaux aux motifs que « le juge d’instance ayant décidé a fait une application correcte de la loi. Les requérants n’ont pas formé une demande de renouvellement, en concluant donc à la déchéance en vertu des articles suscités » alors que le même juge d’instance a constaté le caractère commercial des baux des requérants et la Cour d’appel a confirmé en toutes ses dispositions ce jugement d’instance ; que les avantages multiples et juridiquement protégés d’un bail commercial lui sont indissociables dont le droit de renouvellement et que par conséquent la Cour d’appel ne peut le vider de son contenu ;
Mais attendu que les articles 91 et 92 précités traitent respectivement des conditions d’acquisition par le preneur du droit au renouvellement du bail et de la procédure à suivre pour demander ledit renouvellement dans le cadre d’un bail à durée déterminée ; qu’ en l’espèce, à la suite des renouvellements successifs, par tacite reconduction, des baux les liant à la Direction générale du Patrimoine Bâti, les demandeurs au pourvoi et la Direction se sont retrouvés désormais liés par des contrats à durée indéterminée ; qu’en conséquence, en décidant que les appelants sont déchus de leur droit au renouvellement des baux, la Cour d’appel de Conakry n’a pu violer les dispositions des articles 91 et 92 susindiqués, lesquels n’avaient pas vocation à s’appliquer en l’espèce ; qu’il s’ensuit que ce quatrième moyen n’est pas fondé et doit être rejeté ;
Sur les cinquième au vingtième moyens
Attendu que les seize autres moyens allant du 5ème au 20ème et invoqués par le demandeur à l’appui de son pourvoi en cassation de l’arrêt attaqué traitent successivement de la prétendue validité du contrat de Monsieur NIANE, des contestations des baux commerciaux, des constitutions de la durée desdits baux commerciaux, des constatations du bien fondé des mêmes baux et de leur droit de renouvellement, du bien fondé de l’administration des biens du domaine privé par le Patrimoine Bâti, du droit de la clientèle, des éléments du fonds de commerce, de la violation de certains articles aussi bien de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général que des codes foncier, domanial, civil, de procédure civile, économique et administrative ainsi que de la Constitution de la République de GUINEE (Conakry) ;
Mais attendu que les moyens susindiqués ne précisent ni la partie critiquée de l’arrêt attaqué, ni ce en quoi ledit arrêt encourt les différents reproches qui lui sont faits ; qu’il échet en conséquence de les déclarer irrecevables ;
Attendu que Monsieur K et autres ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Se déclare compétente ;
Rejette l’exception d’irrecevabilité soulevée par l’Agent judiciaire de l’Etat de GUINEE Conakry ;
Rejette le pourvoi formé par Monsieur K et autres ;
Les condamne aux dépens.
PRESIDENT : M. Jacques M’BOSSO.
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