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04/02/2010 | OHADA | N°003

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 04 février 2010, 003


Le créancier ayant saisi le tribunal d’une demande en validation d’hypothèque conservatoire, procédure prévue par les articles 136 et suivants AUS, en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’appel a violé par fausse application l’article 247 AUPSRVE, et par refus d’application, l’article 136 susvisé. Par conséquent, il y a lieu de casser l’arrêt attaqué.
Il échet de condamner le débiteur au paiement de la créance, dès lors qu’aux termes de l’article 136 AUS, le créancier peut former devant la juridiction compétente l’action en validité d’hypothèque

conservatoire ou la demande au fond, même présentée sous forme de requête a fin d’injonctio...

Le créancier ayant saisi le tribunal d’une demande en validation d’hypothèque conservatoire, procédure prévue par les articles 136 et suivants AUS, en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’appel a violé par fausse application l’article 247 AUPSRVE, et par refus d’application, l’article 136 susvisé. Par conséquent, il y a lieu de casser l’arrêt attaqué.
Il échet de condamner le débiteur au paiement de la créance, dès lors qu’aux termes de l’article 136 AUS, le créancier peut former devant la juridiction compétente l’action en validité d’hypothèque conservatoire ou la demande au fond, même présentée sous forme de requête a fin d’injonction de payer.
Il y a lieu de condamner le débiteur au paiement de dommages-intérêts, dès lors que par son retard de paiement et sa mauvaise foi, il a causé un préjudice particulier indépendant de ce retard aux créanciers, lesquels avaient pourtant consenti la remise d’une bonne partie de la dette, sur sa proposition de règlement. ARTICLE 136 AUS ARTICLE 247 AUPSRVE Cour commune de justice et d’arbitrage, 1ère CHAMBRE, ARRET N° 003 DU 04 FEVRIER 2010 Affaire : Mme K et autres C/ T, Le Juris Ohada, n° 2/2010, avril-juin 2010, p. 6

Sur le renvoi, en application de l’article 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique, devant la Cour de céans, de l’affaire K et autres contre T, par Arrêt n°57 du 24 mai 2004 de la Cour Suprême du Mali, saisie de deux pourvois formés par Maîtres Issoufou DIALLO et Mah Mamadou KONE, avocats à la Cour, agissant aux noms et pour les comptes de K et autres et T enregistrés respectivement sous les n°s 252 et 253 du 13 juillet 2001 contre l’Arrêt n°363 rendu le 11 juillet 2001 par la Cour d’appel de Bamako et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;
EN LA FORME : Reçoit les appels interjetés ;
AU FOND : Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a converti l’hypothèque provisoire inscrite le 20 septembre 1999 en hypothèque définitive sur le T.F. n° 5620 appartenant à T pour le compte des intimés ;
L’infirme en ses autres dispositions ;
Statuant à nouveau : déclare irrecevable la demande de somme d’argent et de dommages-intérêts présentée par les intimés ;
Met les dépens à la charge de l’appelant » ;
Les deux requérants invoquent respectivement à l’appui de leur pourvoi deux moyens de cassation tels qu’ils figurent dans les mémoires ampliatifs annexés au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Juge Biquezil NAMBAK ;
Vu les dispositions des articles 13, 14 et 15 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu les dispositions du Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il résulte des pièces du dossier de la procédure que par trois actes notariés en date du 30 septembre 1994, Madame K et autres avaient consenti à Monsieur T un prêt portant sur la somme de 52.300.000 FCFA ; que ce dernier n’ayant pas respecté l’échéancier convenu de remboursement du prêt, et à la requête de ses créanciers, le Président du Tribunal de première instance de la commune II du district de Bamako avait rendu l’Ordonnance n°291 du 14 septembre 1999 les autorisant à prendre inscription provisoire d’hypothèque sur le titre foncier n°5620 de Bamako appartenant à T pour sûreté de leur créance ; que sur requête en validation d’hypothèque présentée le 15 novembre 1999 par les créanciers, le Tribunal de première instance de la Commune II du district de Bamako avait, par Jugement n°355 du 30 août 2000, condamné Monsieur T à leur payer la somme de 35.500.000 FCFA, déclaré définitive l’hypothèque conservatoire inscrite le 20 septembre 1999 sur le titre foncier n°5620 appartenant à T et condamné en outre le défendeur à payer aux requérants la somme de 2.000.000 FCFA à titre de dommages intérêts ; que sur appel de Monsieur T, la Cour d’appel de Bamako avait rendu l’Arrêt n°363 du 11 juillet 2001 dont pourvoi par les deux parties devant la Cour Suprême du Mali, et celle-ci, par Arrêt n°57 du 24 mai 2004 s’est déclarée incompétente au profit de la Cour de céans ;
Sur le moyen tiré de la fausse application de la loi
Vu l’article 136, alinéa 3 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés ;
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué une fausse application de la loi en ce que, pour rejeter la demande de Madame K, l’arrêt déféré s’est fondé sur le fait que, selon les articles 247 et suivants de l’Acte uniforme susvisé, « il y a lieu d’avoir un titre exécutoire avant de vendre un immeuble » alors que, selon le moyen, « dans le cas d’espèce il n’a jamais été question de vente d’immeuble avant l’obtention de titre ; que Madame K a saisi le Tribunal d’une demande en validation d’hypothèque et en condamnation de T au paiement de sa créance ; que dès lors en statuant ainsi, la Cour d’appel a appliqué au cas d’espèce une loi qui ne devrait pas le régler ; qu’il échet en conséquence de casser son arrêt ;
Attendu qu’aux termes de l’article 136, alinéa 3 de l’Acte uniforme susvisé, « elle [la décision rendue] fixe au créancier un délai dans lequel il doit, à peine de caducité de l’autorisation, former devant la juridiction compétente l’action en validité d’hypothèque conservatoire ou la demande au fond, même présentée sous forme de requête à fin d’injonction de payer. Elle fixe, en outre, le délai pendant lequel le créancier ne peut saisir la juridiction du fond. » ;
Attendu que les articles 247 et suivants de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution sont relatifs aux conditions
de la saisie immobilière ; qu’en l’espèce, Madame K a saisi le Tribunal d’une demande en validation d’hypothèque conservatoire, procédure prévue par les articles 136 et suivants de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés ; qu’il suit qu’en statuant comme elle l’a fait, la Cour d’appel de Bamako a violé, par fausse application l’article 247 précité et, par refus d’application, l’article 136 susvisé ; qu’il échet en conséquence de casser l’arrêt attaqué et d’évoquer, sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur les autres moyens ;
Sur l’évocation
Attendu que par acte du greffe en date du 1er septembre 2000 T, par le canal de son conseil, a interjeté appel du Jugement n°355 rendu le 30 août 2000 par le Tribunal de première instance de la Commune II du District de Bamako dont le dispositif est ainsi conçu :
« Statuant publiquement, par décision contradictoire, en matière civile et en premier ressort ;
Déclare Madame K et Monsieur C recevables en leur demande, en la forme. ;
Au fond : condamne Monsieur T à leur payer la somme de trente cinq millions cinq cents mille francs CFA (35.500.000 F CFA) ;
Déclare définitive l’hypothèque conservatoire inscrite le 20 septembre 1999 sur le Titre Foncier n°5620 de Bamako appartenant à Monsieur T ;
Dit qu’elle rétroagira au jour de l’inscription provisoire ;
Condamne en outre le défendeur à payer aux requérants la somme de deux millions à titre de dommages intérêts ;
Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement au sens de l’article 531 Nouveau du C.P.C.C.S ;
Rejette toutes autres demandes des requérants ;
Laisse les dépens à la charge du défendeur. » ;
Attendu que T sollicite d’infirmer le jugement entrepris et déclarer l’action des intimés irrecevable ou subsidiairement, de les débouter de leur demande d’inscription hypothécaire et de dommages intérêts ; qu’il explique que, par des grosses notariées, portant la formule exécutoire, des prêts d’argent ont été faits par les intimés au concluant ; qu’il a fait des paiements ramenant le montant de la créance initiale de 56.000.000 FCFA à 35.000.000 FCFA ; que par une autre grosse notariée il a donné son immeuble en hypothèque ; que le premier juge a statué en omettant de répondre aux exceptions qu’il a soulevées ; que tous ces actes notariés étant des décisions définitives ayant acquis force de chose jugée, les intimés ne pouvaient plus les contourner par la voie de mesure provisoire ; qu’en exécution de ces grosses notariées, une transaction est intervenue entre les parties sous forme de protocole d’accord qui remplaçait lesdites grosses ; qu’en refusant la renégociation pour de nouvelles échéances permettant l’homologation et la bonne exécution dudit protocole, les intimés ne l’ont pas exécuté de bonne foi ; qu’en outre, les intimées devaient présenter leur action en validité d’hypothèque ou la demande au fond au plus tard le 17 novembre 1999, et pas avant le 20 octobre 1999 ; que le délai prévu par l’article 136 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés n’a pas été respecté ; qu’enfin, l’article 140 du même Acte a été violé en ce qu’aucune notification de l’inscription hypothécaire du 20 octobre 1999 n’est intervenue dans les 15 jours ; que la demande de dommages intérêts de K et autres n’est pas justifiée, le protocole d’accord n’étant pas homologué, aucun paiement ne pouvait être demandé ;
Attendu que les intimés K et autres, dans leurs conclusions écrites, déclarent relever appel du même jugement et demandent de le confirmer en toutes ses dispositions sauf celles
relatives aux dommages-intérêts et subsidiairement de condamner T à leur payer 9.500.000 Frs CFA ; qu’ils soutiennent qu’après paiement d’une partie, leur créance a été ramenée à 40 millions ; que l’homologation du protocole d’accord ayant été refusé par le tribunal, ils n’étaient détenteurs que d’une simple reconnaissance de dette non exécutoire ; qu’en plus l’ordonnance autorisant l’inscription d’hypothèque a été signifiée au conservateur des Domaines suivant procès-verbal en date du 20 septembre 1999 ; que ladite notification a été signifiée à T suivant acte du 05 octobre 1999 ; qu’ainsi leur requête au fond du 15 novembre 1999 est régulière et recevable ;
Sur la demande d’infirmation du jugement entrepris
Attendu qu’il ressort des pièces versées au dossier que la créance de K et C existe envers T ; qu’il est établi que l’ordonnance autorisant l’inscription de l’hypothèque a été signifiée au Conservateur des Domaines le 20 septembre 1999 et signifiée à T le 05 octobre 1999 ; que la requête des intimés est donc recevable ; qu’il y a lieu de dire que la requête de T tendant à l’infirmation du jugement est non fondée ;
Sur la demande de condamnation au paiement de la créance
Attendu qu’aux termes de l’article 136 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés, le créancier peut former devant la juridiction compétente « l’action en validité d’hypothèque conservatoire ou la demande au fond, même présentée sous forme de requête à fin d’injonction de payer.. » ; qu’il échet de condamner T au paiement de la créance des intimés ;
Sur la demande de condamnation du débiteur au paiement des dommages intérêts
Attendu qu’il est établi que le débiteur, par son retard de paiement et sa mauvaise foi, a causé un préjudice particulier indépendant de ce retard aux créanciers, lesquels, sur sa proposition de règlement, avaient pourtant consenti la remise d’une bonne partie de la dette ; qu’il y a lieu de condamner T au paiement des dommages et intérêts ;
Attendu que T ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré,
Casse l’Arrêt n°363 rendu le 11 juillet 2001 par la Cour d’appel de Bamako ;
Evoquant et statuant sur le fond :
Rejette la requête de T tendant à l’infirmation du Jugement n°355 du 30 août 2000 ;
Confirme ledit jugement en toutes ses dispositions ;
Condamne T aux dépens.
PRESIDENT : M. Jacques M’BOSSO


Synthèse
Numéro d'arrêt : 003
Date de la décision : 04/02/2010

Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2010-02-04;003 ?
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