L’article 46 de l’Acte uniforme sus indiqué se rapporte plutôt aux conditions de l’exécution forcée, en précisant les jours et heures pendant lesquels ladite exécution doit être entreprise et non pas au préjudice qui résulterait d’une procédure de saisie-vente irrégulière telle que spécifiée par la requérante dans le moyen ; en déclarant bonne et valable la vente des biens saisis faite le 14 avril 2006, la Cour d’Appel n’a en rien violé le texte visé au moyen ; il suit que ce premier moyen doit être rejeté parce que non fondé.
Aux termes de l’article 144 de l’Acte uniforme précité, « la nullité de la saisie pour vice de forme ou de fond, autre que l’insaisissabilité des biens compris dans la saisie, peut être demandée par le débiteur jusqu’à la vente des biens saisis » ; en l’espèce, la vente des biens saisis a eu lieu le 14 avril 2006 selon le procès-verbal dressé le même jour par Maître Berthé SEINDOU ; ce n’est qu’après cette vente que la requérante a demandé son annulation au juge des référés du Tribunal d’Abidjan ; ce faisant, elle a agi après coup et en méconnaissance des dispositions de l’article 144 précité, qui sont d’ordre public ; l’invocation des articles 49 et 100 alinéa 8 du même Acte uniforme est inopérante ; il suit que la Cour d’Appel, en infirmant en toutes ses dispositions l’ordonnance n° 491/06 du 04 mai 2006 et en rejetant l’action de la Société NRCCI tendant à l’annulation des saisies litigieuses, n’a pas violé les textes visés au moyen ; d’où il suit que ce deuxième moyen doit être également rejeté parce que non fondé.
Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A), Arrêt N° 012/2009 du 26 février 2009, Audience publique du 26 février 2009, Pourvoi n° 085/2007/PC du 19 septembre 2007 – Affaire : Société Négoce et Représentation Commerciale en Côte d’Ivoire dite NRCCI (Conseil : Maître ESSY N’GATTA, Avocat à la Cour) contre Société ALPI Côte d’Ivoire dite ALPICI (Conseil : Maître Franck Orly ZAGO, Avocat à la Cour).- Recueil de Jurisprudence n° 13, Janvier–Juin 2009, p. 52.
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.), de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A.), Deuxième Chambre, a rendu l’arrêt suivant en son audience publique du 26 février 2009, où étaient présents :
Messieurs Antoine Joachim OLIVEIRA, Président Doumssinrinmbaye BAHDJE, Juge, rapporteur Boubacar DICKO, Juge
Et Maître MONBLE Jean Bosco, Greffier ;
Sur le renvoi, en application de l’article 15 du Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des
Affaires en Afrique, devant la Cour de céans, de l’affaire Société Négoce et Représentation en Côte d’Ivoire dite NRCCI contre Société ALPI Côte d’Ivoire dite ALPICI, par arrêt n° 262/07 du 03 mai 2007 de la Cour Suprême de Côte d’Ivoire, Chambre judiciaire, formation civile, saisie d’un pourvoi formé le 04 octobre 2006 par Maître ESSY N’GATTA, Avocat à la Cour, y demeurant 28, boulevard Angoulvant, immeuble Le Fromager, 3ème étage, 04 BP 3060 Abidjan 04, dans la cause l’opposant à la Société ALPI Côte d’Ivoire dite ALPICI, société anonyme dont le siège est fixé à Abidjan Yopougon Kouté, 01 BP 8631, Abidjan 01, prise en la personne de son Directeur général Monsieur LAGUI Sergio, de nationalité italienne, demeurant à Abidjan, laquelle fait élection de domicile en l’Etude de Maître Franck Orly ZAGO, Avocat à la Cour, y demeurant Abidjan Plateau, angle boulevard de la République, avenue Terrasson de Fougère, immeuble Alpha 2000, 12ème étage, 17 BP 289 Abidjan 17,
en cassation de l’arrêt n° 836 rendu le 11 juillet 2006 par la Cour d’Appel d’Abidjan, et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort ;
En la forme : - Déclare recevable l’appel de la société ALPI Côte d’Ivoire régulièrement relevé de
l’ordonnance de référé n° 491/2006 rendue le 04/05/2006 par la juridiction présidentielle du Tribunal de Première Instance d’Abidjan ;
Au fond : - L’y dit bien fondée ; - Infirme l’ordonnance en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau, - Rejette comme non fondée l’action de la Société Négoce et Représentation Commerciale en
Côte d’Ivoire (NRCCI) tendant à l’annulation des saisies litigieuses, et à la restitution des objets saisis ;
- Condamne l’intimée aux dépens. » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation tels qu’ils figurent à « l’exploit de pourvoi en cassation » annexé au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Juge Doumssinrinmbaye BAHDJE :
Vu les dispositions des articles 13, 14 et 15 du Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de Procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure, qu’agissant en recouvrement d’une créance, la société ALPI Côte d’Ivoire dite ALPICI a procédé à la saisie-vente des biens de la société Négoce et Représentation Commerciale en Côte d’Ivoire dite NRCCI, par exploit du 24 février 2006 ; que le 15 mars 2006, elle a procédé à une saisie complémentaire ; que la NRCCI a reçu une sommation d’assister à la vente des biens saisis, vente fixée au 14 avril 2006 ; qu’estimant que la procédure de vente forcée de ses biens a été entachée d’irrégularités, la société NRCCI a saisi le juge des référés du Tribunal de Première Instance d’Abidjan, pour obtenir l’annulation des saisies pratiquées, et par conséquent, l’annulation de la vente elle-même ; que par ordonnance n° 491/06 du 04 mai 2006, la juridiction présidentielle de Première Instance d’Abidjan a annulé la vente forcée des biens de la société NRCCI
intervenue le 14 avril 2006, ainsi que la saisie-vente complémentaire pratiquée le 15 mars 2006 ; que sur appel de la société ALPICI, la Cour d’Appel d’Abidjan a, par arrêt civil contradictoire n° 836/06 rendu le 11 juillet 2006, infirmé l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, rejeté comme non fondée l’action en annulation des saisies litigieuses et à la restitution des objets saisis ; que sur pourvoi de la société NRCCI, la Cour Suprême de Côte d’Ivoire, par arrêt n° 262/07 du 03 mai 2007, s’est dessaisie du dossier de l’affaire au profit de la Cour de céans, après avoir relevé que ladite affaire soulève des questions relatives à l’application de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;
Attendu que par son mémoire en réponse du 17 octobre 2007 déposé au greffe de la Cour Suprême de Côte d’Ivoire initialement saisie du pourvoi en cassation formé par la société NRCCI, la société ALPICI a soulevé l’incompétence de ladite juridiction de cassation nationale à connaître des mérites d’un pourvoi soulevant des questions relatives à l’application d’un Acte uniforme de l’OHADA ; que la Cour Suprême de Côte d’Ivoire ayant admis cette exception, s’est dessaisie du dossier de l’affaire au profit de la Cour de céans ;
Attendu que le Greffier en chef de la Cour de céans, par lettre n° 47/2008/G2 du 18 janvier 2008, a informé la société ALPICI qu’elle disposait d’un délai d’un mois à compter de la date de réception pour transmettre à la Cour toutes ses écritures et pièces utiles ; que malgré la décharge de cette lettre par son Conseil Maître Franck ORLY ZAGO, le 23 janvier 2008, la défenderesse au pourvoi n’a pas cru devoir produire d’autres écritures à la Cour, hormis la copie du mémoire en réponse déposée devant la Cour Suprême de Côte d’Ivoire ; qu’il convient donc de dire le dossier en état d’être jugé ;
Sur le premier moyen
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, d’avoir violé l’article 46 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, en ce que la Cour a déclaré bonne et valable la vente du 14 avril 2006, au motif que même si elle est intervenue en violation de ce texte, le débiteur saisi n’a pas prouvé que ladite violation lui a causé un préjudice, alors que, selon le moyen, la vente des biens constitue elle-même un préjudice pour le débiteur ; que toujours selon le moyen, du fait de la vente de ses biens, le débiteur saisi a perdu son patrimoine et que le fait que cette perte soit le résultat d’une procédure irrégulière incontestable suffit à entraîner la nullité de ladite vente, sans qu’il soit besoin de prouver l’existence d’un préjudice qui résulte de la vente elle-même ; que toujours selon le moyen, en statuant comme elle l’a fait, la Cour ne donne pas de base légale à sa décision, qui encourt de ce fait la cassation ;
Mais attendu que ledit article se rapporte plutôt aux conditions de l’exécution forcée, en précisant les jours et heures pendant lesquels ladite exécution doit être entreprise et non pas au préjudice qui résulterait d’une procédure de saisie-vente irrégulière telle que spécifiée par la requérante dans le moyen ; qu’en déclarant bonne et valable la vente des biens saisis faite le 14 avril 2006, la Cour d’Appel n’a en rien violé le texte visé au moyen ; qu’il suit que ce premier moyen doit être rejeté parce que non fondé ;
Sur le deuxième moyen
Attendu que le pourvoi reproche à l’arrêt attaqué d’avoir violé les articles 49 et 100 alinéa 8 de l’Acte uniforme précité, en ce que la Cour a déclaré régulier le procès-verbal de saisie-vente du 24 février 2006 alors que, selon le moyen, cet exploit ne respectait pas les dispositions des articles 49 et 100 alinéa 8 de l’Acte uniforme précité, selon lesquelles [le juge
compétent] est « le magistrat de la juridiction statuant en matière de référé ou le magistrat délégué par lui » et « l’acte de saisie contient, à peine de nullité … 8/ la désignation de la juridiction devant laquelle sont portées les contestations relatives à la saisie-vente » ; que toujours selon le moyen, la saisie-vente du 24 février 2006 ne contient pas la désignation de la juridiction devant laquelle les contestations relatives à la saisie-vente doivent être portées, ce qui rend la saisie nulle ; « que l’arrêt attaqué doit être cassé pour ce fait » ;
Mais attendu qu’aux termes de l’article 144 de l’Acte uniforme précité, « la nullité de la saisie pour vice de forme ou de fond autre que l’insaisissabilité des biens compris dans la saisie peut être demandée par le débiteur jusqu’à la vente des biens saisis » ; qu’en l’espèce, la vente des biens saisis a eu lieu le 14 avril 2006, selon le procès-verbal dressé le même jour par Maître Berthé SEINDOU ; que ce n’est qu’après cette vente que la requérante a demandé son annulation au juge des référés du Tribunal d’Abidjan ; que ce faisant, elle a agi après coup et en méconnaissance des dispositions de l’article 144 précité, qui sont d’ordre public ; que l’invocation des articles 49 et 100 alinéa 8 du même Acte uniforme est inopérante ; qu’il suit que la Cour d’Appel, en infirmant en toutes ses dispositions l’ordonnance n° 491/06 du 04 mai 2006 et en rejetant l’action de la société NRCCI tendant à l’annulation des saisies litigieuses, n’a pas violé les textes visés au moyen ; d’où il suit que ce deuxième moyen doit être également rejeté parce que non fondé ;
Attendu que la société Négoce et Représentation Commerciale en Côte d’Ivoire dite NRCCI ayant succombé, doit être condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré ;
- Rejette le pourvoi formé par la société Négoce et Représentation Commerciale en Côte d’Ivoire dite NRCCI contre l’arrêt n° 836 rendu le 11 juillet 2006 par la Cour d’Appel d’Abidjan ;
- Condamne la requérante aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus, et ont signé :
Le Président Le Greffier
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