La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (C.C.J.A.), Première Chambre, de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (O.H.A.D.A.), a rendu l’arrêt suivant en son audience publique du 20 novembre 2008, où étaient présents :
Messieurs Jacques M’BOSSO, Président, rapporteur Maïnassara MAIDAGI, Juge Biquezil NAMBAK, Juge
Et Maître ASSIEHUE Acka, Greffier ;
Sur le pourvoi n° 038/2006/PC enregistré au greffe de la Cour de céans le 19 mai 2006 et formé par la SCPA AMON-RAUX et Associés, Avocats à la Cour, demeurant à Abidjan Plateau, 44 Avenue Lamblin, Résidence Eden, 4ème étage, porte 42, 01 BP 11775 Abidjan 01, agissant au nom et pour le compte de Monsieur BOTI BI ZOUA, de nationalité ivoirienne, demeurant à Abidjan Yopougon, dans la cause qui l’oppose à Monsieur DOSSO DJOMAN, technicien en bâtiment, de nationalité ivoirienne, BP 466 DUEKOUE (RCI) ;
en cassation de l’arrêt civil contradictoire n° 80 rendu le 21 janvier 2006 par la Cour d’Appel d’Abidjan, et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de l’appelant et par défaut à l’égard de l’intimé, en matière civile et en dernier ressort ;
Déclare Monsieur BOTI BI ZOUA recevable en son appel relevé du jugement civil n° 688/05
rendu le 09 mars 2005 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan Plateau ; L’y dit cependant mal fondé ; L’en déboute ; Confirme le jugement querellé en toutes ses dispositions ; Condamne l’appelant aux dépens. » ;
Le requérant invoque à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation tel qu’il figure à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur Jacques M’BOSSO, Président :
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique ;
Vu les dispositions du Règlement de Procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA ;
Attendu que la signification du présent recours faite au défendeur par lettre n° 242/2006/G5 en date du 08 juin 2006 du Greffier en chef de la Cour de céans, n’a pas été suivie du dépôt de mémoire en réponse au greffe de ladite Cour dans le délai de trois mois prévu à cet effet par l’article 30 du Règlement de Procédure de ladite Cour ; que le principe du contradictoire ayant été respecté, il échet d’examiner le présent recours ;
Attendu que s’estimant créancier de Monsieur BOTI BI ZOUA Fatalis, ex-directeur gérant de l’Hôtel MON HESSA, d’une somme de 1.622.500 FCFA pour différents travaux de réfection réalisés sur ledit Hôtel, Monsieur DOSSO DJOMAN avait saisi le Président du Tribunal de Première Instance d’Abidjan Plateau, d’une requête aux fins de condamnation de Monsieur BOTI BI ZOUA Fatalis, à lui payer ladite somme ; que par ordonnance n° 1676/2001 du 1er mars 2001, le Président du Tribunal précité accédait à cette requête en condamnant Monsieur BOTI BI ZOUA à payer ladite somme à Monsieur DOSSO DJOMAN ; que par une autre ordonnance n° 5869/2002 rendue le 20 décembre 2002 par le même Président du Tribunal de Première Instance d’Abidjan, celui-ci, au principal, renvoyait BOTI BI ZOUA et DOSSO DJOMAN à se pourvoir ainsi qu’ils aviseront et déclarait nulle la saisie-vente pratiquée par DOSSO DJOMAN au préjudice de BOTI BI ZOUA ; que par le ministère de Maître TIACOH Lambert, Huissier de justice à Abidjan, la décision précitée fut signifiée à DOSSO DJOMAN avec commandement « d’avoir à donner dans les 24 heures, mainlevée de la saisie-vente pratiquée au préjudice de BOTI BI ZOUA ; que sur opposition à ordonnance d’injonction de payer formulée à la requête de BOTI BI ZOUA par Maître TIACOH Lambert, Huissier de justice à Abidjan, le 07 février 2003, le Tribunal de Première Instance d’Abidjan avait rendu le jugement n° 688/05 du 09 mars 2005, qui déclarait irrecevable ladite opposition formée contre l’ordonnance d’injonction de payer n° 1676/2001 rendue le 1er mars 2001 et condamnant Monsieur BOTI BI ZOUA à payer à DOSSO DJOMAN, la somme de 1.622.500 FCFA outre les intérêts et frais ; qu’ayant interjeté appel dudit jugement devant la Cour d’Appel d’Abidjan, celle-ci avait confirmé ledit jugement par arrêt n° 80 du 21 janvier 2006 dont pourvoi ;
Sur le moyen unique
Vu l’article 10 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;
Attendu qu’il est reproché à l’arrêt attaqué, un défaut de base légale résultant de l’erreur dans l’interprétation de l’article 10 de l’Acte uniforme susvisé, en ce que la Cour d’Appel
d’Abidjan, pour statuer comme elle l’a fait, a considéré que « l’objet des dispositions de l’article 10 alinéa 2 de l’Acte uniforme OHADA sur les procédures simplifiées de recouvrement (...) est de garantir le droit à l’information du débiteur, afin qu’il puisse former à temps son recours contre l’ordonnance d’injonction de payer qui l’a condamné ; même s’il n’en a pas reçu personnellement signification, il a eu nécessairement connaissance de l’ordonnance d’injonction de payer en cause, puisque cet acte de saisie y fait expressément référence ; ainsi, le fait que ladite saisie ait été annulée par la suite est indifférent à cet égard », alors que, selon le moyen, « avoir connaissance d’une décision, c’est l’avoir reçue matériellement par tradition manuelle au moyen d’un acte extrajudiciaire, car la connaissance d’une ordonnance d’injonction de payer par le débiteur ne se réalise que par la signification de celle-ci au moyen d’un acte extrajudiciaire, notamment un exploit d’huissier (...) ; qu’ainsi, la prise de connaissance de l’ordonnance d’injonction de payer ne peut résulter du simple visa des références de cette décision dans le procès-verbal de saisie-vente » ; qu’en statuant ainsi, la Cour d’Appel d’Abidjan a exposé sa décision à la cassation ;
Attendu qu’aux termes de l’article 10 de l’Acte uniforme susvisé, « l’opposition doit être formée dans les quinze jours qui suivent la signification de la décision portant injonction de payer. Le délai est augmenté, éventuellement, des délais de distance.
Toutefois, si le débiteur n’a pas reçu personnellement la signification de la décision portant injonction de payer, l’opposition est recevable jusqu’à l’expiration du délai de quinze jours suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou en partie les biens du débiteur. » ;
Attendu qu’il est constant comme résultant de l’examen des pièces du dossier de la procédure, que l’ordonnance d’injonction de payer condamnant Boti BI ZOUA à payer à DOSSO DJOMAN la somme de 1.622.500 FCFA outre les intérêts et frais n’a pas été signifiée personnellement à Boti BI ZOUA, motif pris de ce que le domicile de celui-ci n’était pas connu ; qu’ainsi, la signification a été faite à mairie ; que par ailleurs, l’acte de saisie-vente a été signifié à Boti BI ZOUA le 08 novembre 2002 par le ministère de Maître TOURE Mamadou, Huissier de justice à Abidjan, et l’opposition à ordonnance d’injonction de payer faite par Boti BI ZOUA l’a été le 07 février 2003 ;
Attendu, en l’espèce, que la première mesure d’exécution ayant eu pour effet de rendre indisponible en tout ou en partie les biens de Monsieur BOTI BI ZOUA est l’acte de saisie-vente qui lui a été signifié le 08 novembre 2002 ; que dès lors et en application des dispositions sus énoncées de l’article 10 de l’Acte uniforme susvisé, Monsieur Boti BI ZOUA disposait, conformément aux dispositions de l’article 10 combinées avec celles de l’article 335 du même Acte uniforme, d’un délai franc de quinze jours s’achevant le 24 novembre 2002, pour former son opposition à ordonnance d’injonction de payer de Monsieur DOSSO DJOMAN ; que pour l’avoir fait seulement à la date du 07 février 2003, soit bien après l’expiration du délai sus indiqué, l’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer de Monsieur Boti BI ZOUA doit être déclarée irrecevable ; qu’il suit qu’en confirmant le jugement n° 688/2005 du Tribunal de Première Instance d’Abidjan qui avait prononcé cette irrecevabilité, la Cour d’Appel d’Abidjan n’a en rien erré dans l’interprétation et l’application de l’article 10 de l’Acte uniforme visé au moyen ; que ledit moyen n’étant pas fondé, il échet de le rejeter ainsi que le pourvoi ;
Attendu que Monsieur Boti BI ZOUA ayant succombé, il échet de le condamner aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré ;
- Rejette le pourvoi formé par Monsieur Boti BI ZOUA ; - Le condamne aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus, et ont signé :
Le Président Le Greffier
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