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08/02/2007 | NIGER | N°07-020-C

Niger | Niger, Cour suprême, Chambre judiciaire, 08 février 2007, 07-020-C


Texte (pseudonymisé)
REPUBLIQUE DU NIGER

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Cour Suprême
Chambre Judiciaire

La Cour Suprême, Chambre Judiciaire, statuant pour les affaires civiles en son audience publique ordinaire du jeudi huit février deux mille sept, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

ENTRE :
Dame Ai Aa Af, ménagère domiciliée à Ae concluante à l'organe de Maître Omar Michel Keita, avocat à la Cour Niamey ;
D'une part

ET :
Ag Ac Ab, commerçant à Ae, BP 2388, assisté de Maître Kader Chaibou, avocat à la Cour Niamey ;
D'autre part


Après lecture du rapport de Monsieur Adamou Amadou, conseiller rapporteur, les conclusions de Monsieur l...

REPUBLIQUE DU NIGER

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Cour Suprême
Chambre Judiciaire

La Cour Suprême, Chambre Judiciaire, statuant pour les affaires civiles en son audience publique ordinaire du jeudi huit février deux mille sept, tenue au palais de ladite Cour, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

ENTRE :
Dame Ai Aa Af, ménagère domiciliée à Ae concluante à l'organe de Maître Omar Michel Keita, avocat à la Cour Niamey ;
D'une part

ET :
Ag Ac Ab, commerçant à Ae, BP 2388, assisté de Maître Kader Chaibou, avocat à la Cour Niamey ;
D'autre part
Après lecture du rapport de Monsieur Adamou Amadou, conseiller rapporteur, les conclusions de Monsieur le Procureur Général et après en avoir délibéré conformément à la loi :

Statuant sur le pourvoi en cassation suivant acte de greffe n° 18 du 22 mars 2005 de Maître Michel Keita, conseil constitué de la dame Ai Aa contre l'arrêt de référé n° 78 du 16 juin 2004 de la Cour d'appel de Niamey laquelle statuait en ces termes:
-Reçoit l'appel de Ac Ab régulier en la forme;
-Infirme l'ordonnance attaquée sur la compétence;
-Se déclare compétent;
-Ordonne le déguerpissement de dame Ai Aa Af de tous occupants de son chef de ladite maison;
-Confirme l'ordonnance attaquée sur ses autres dispositions;
-Condamne dame Ai Aa Ad dépens;

Vu la loi n° 2000-10 du 14 août 2000 sur la Cour Suprême;
Vu l'article 809 du Code de Procédure Civile;
Vu l'article 4 du Code de Procédure Pénale;
Vu l'acte de pourvoi;
Vu les mémoires produits par les parties;
Vu les pièces du dossier;
Vu les conclusions du Procureur Général;

EN LA FORME
Attendu que le pourvoi est intervenu dans les forme et délai prévus par la loi; qu'il y a lieu de le déclarer recevable;

AU FOND
Attendu que courant année 2003, dame Ai Aa Af, ménagère domiciliée à Ae, contactait son voisin Ben Aj Ah en lui manifestant son désir de vendre son immeuble sis au quartier Ak; que muni d'une procuration et de titres de ladite maison, Ben Aj Ah trouva un acquéreur en la personne de Ag Ac Ab avec lequel il concluait une vente moyennant la somme de 12228000 francs; que la dame Ai Aa Af dont aucun franc résultant de ladite vente n'est tombé dans ses mains portait plainte contre Ben Aj Ah, en lui reprochant d'avoir confectionné une procuration de vente en son nom, d'avoir vendu son immeuble à son insu à une somme nettement inférieure à la fourchette de prix qu'elle a fixée (17000000 à 20000000) francs;
Attendu que Ben Aj Ah est inculpé d'abus de confiance, puis placé sous mandat de dépôt depuis janvier 2004; que son dossier est pendant au 1er cabinet d'instruction du Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Niamey;
Attendu que courant mars 2004, l'acquéreur Ac Ab initiait une procédure de référé en demandant le déguerpissement de la dame Ai Aa de l'immeuble à lui vendu qu'elle continuait d'occuper; que delà est né un autre litige, cette fois-ci civil, porté devant le même tribunal de Niamey; que c'est cette affaire qui est également portée devant la Cour d'appel de Niamey et devant la chambre judiciaire;
Attendu que la requérante soulève deux moyens de cassation à l'appui de son pourvoi;
Premier moyen de cassation tiré de la violation de l'article 809 du Code de Procédure Civile, en ce que le juge des référés n'est pas compétent pour statuer sur la propriété actuelle de l'immeuble litigieux tant que le juge répressif n'aura pas vidé sa saisine;
Attendu que pour la requérante, le juge des référés ne doit pas préjuger la décision pénale, en statuant sur la demande de déguerpissement, surtout si l'on sait qu'il y a contestation sérieuse sur la vente de l'immeuble; qu'en ordonnant son déguerpissement, le juge des référés règle définitivement le sort de la vente en violant le principe préétabli selon lequel «les ordonnances sur référé ne feront aucun préjudice au principal»;
Attendu que le défendeur rétorque que son adversaire confond le rôle du juge d'instruction chargé d'instruire le délit d'abus de confiance dont il est saisi et le rôle du juge de fond; que le juge des référés est bien compétent pour connaître de la question de déguerpissement; que l'abus de confiance ne portant que sur des meubles et non sur des immeubles, la requérante ne réclamait que la somme détournée par son mandataire sans remettre en cause l'opération de vente;
Attendu qu'il est de principe reconnu et consacré par la jurisprudence de la Cour de céans que «les ordonnances sur référé ne feront aucun préjudice au principal»; que le juge des référés, dans la limite de sa compétence peut certes connaître d'un litige même comportant des contestations sérieuses dès lors que la solution qu'il aura à prendre ne préjudiciera pas au fond; que dans le cas d'espèce, le problème de la vente de l'immeuble litigieux se pose réellement; qu'on ne saurait d'avance l'issue de l'instruction qui peut aboutir à une requalification ou à une disqualification des faits, à la mise en cause de l'une ou l'autre des parties;
Attendu qu'en se prononçant sur le déguerpissement, sur la base de certaines pièces du dossier nécessitant vérifications, en l'occurrence l'acte de procuration dont l'authenticité est contestable, le juge d'appel des référés vide le litige de sa substance; qu'il attribue implicitement l'immeuble litigieux au défendeur en pourvoi, en considérant celui-ci comme un acquéreur de bonne foi; qu'en procédant comme elle l'a fait la juridiction d'appel des référés a fait préjudice au principal, et donc a violé la loi; qu'il y a lieu de recevoir le premier moyen comme fondé;
Deuxième moyen de cassation tiré de la violation de l'article 4 du Code de Procédure Pénale; en ce que le juge d'appel des référés a violé le principe selon lequel «le criminel tient le civil en l'état»;
Attendu que la requérante précise que dans cette affaire, l'action publique a été mise en mouvement avant l'exercice de l'action civile; que la deuxième (le référé) date du 10 février 2004, alors que pour la première le réquisitoire introductif du procureur de la république est du 23 janvier 2004, suivi de l'ouverture d'une information le 27 janvier de la même année; que toutes les conditions se trouvent réunies pour recevoir application;
Attendu que le défendeur réplique que la règle «le criminel tient le civil en l'état»ne peut trouver son application dans une action à des fins civiles, comme il en est dans le cas d'espèce; que l'action de Ac Ab n'a rien d'une action civile stricto sensu, mais elle est simplement de nature civile; qu'il demande à la Cour d'écarter ce deuxième moyen en concluant au rejet du pourvoi;
Attendu que pour écarter le sursis à statuer, le juge d'appel des référés s'exprime en ces termes:
«Mais attendu que la règle «le criminel tient le civil en l'état»est inapplicable en matière de référé qui est une décision provisoire et dépourvue de l'autorité de la chose jugée»;
Mais attendu que cette affirmation n'est plausible que si le juge des référés se limite à son rôle naturel de juge de l'évidence et des mesures provisoires; que du moment où il fait préjudice au principal, en vidant le fond du litige dans son intégralité comme c'est le cas d'espèce, seule la règle «le criminel tient le civil en l'état» a valeur de garde-fous; que le défendeur reconnaît lui-même, à l'opposé de l'arrêt attaqué que ce principe est applicable devant le juge civil, à condition selon lui que l'action soit civile stricto sensu; qu'il va jusqu'à affirmer que «l'action de Ac Ab n'a rien d'une action civile», en oubliant que c'est de cette action qu'il a initié le référé en saisissant le juge civil et en recourant à la chambre civile de la Cour d'appel (juridiction d'appel des référés);
Attendu que comme pour regagner le premier moyen, le sursis à statuer s'impose du moment où, même la procuration de vente (et autres) dont la juridiction d'appel se prévalait pour asseoir sa décision est contestable, et donc, seul le pénal donnera la lumière; que le deuxième moyen est également fondé;

PAR CES MOTIFS

Déclare le pourvoi recevable;

Casse et annule l'arrêt n° 78 du 16-6-2004 de la Cour d'appel de Niamey;

Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel de Zinder;

Condamne Ag Ac Ab aux dépens;

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.

ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.

ARRÊT N° 07-020/C
Du 8 février 2007

MATIERE : Civile

DEMANDEUR :
Dame Ai Aa Af
Me Omar Michel Keita

A :
Ag Ac Ab
Me Kader Chaibou

PRESENTS :
Dillé Rabo
Président
Adamou Amadou ; Ghousmane Abdourahamane
Conseillers
Abdou Aouta Aminou
Ministère Public
Me Gado Fati Founou
Greffier

RAPPORTEUR
Adamou Amadou


Synthèse
Formation : Chambre judiciaire
Numéro d'arrêt : 07-020-C
Date de la décision : 08/02/2007
Civile

Parties
Demandeurs : Dame Ramatou Alkeidi Touré Me Omar Michel Keita
Défendeurs : Elhadji Abdoulkader Abouba Me Kader Chaibou

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ne;cour.supreme;arret;2007-02-08;07.020.c ?
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