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02/12/2022 | MONACO | N°TS/2021-10

Monaco | Tribunal Suprême, 2 décembre 2022, Mme A. K. veuve N. c/ État de Monaco, TS/2021-10


Principauté de Monaco

TRIBUNAL SUPRÊME

TS 2021-10

Affaire :

Madame A. K. veuve N.

Contre :

État de Monaco

DÉCISION

Audience du 23 septembre 2022

Lecture du 7 octobre 2022

Recours en annulation pour excès de pouvoir de la décision du 24 février 2020 du Directeur de la Sûreté publique rejetant sa première demande de carte de séjour de résident et de la décision du 23 novembre 2020 du Conseiller de Gouvernement – Ministre de l'intérieur rejetant son recours hiérarchique.

En la cause de :

Madame A.

K. veuve N. ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Régis BERGONZI, Avocat-Défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par...

Principauté de Monaco

TRIBUNAL SUPRÊME

TS 2021-10

Affaire :

Madame A. K. veuve N.

Contre :

État de Monaco

DÉCISION

Audience du 23 septembre 2022

Lecture du 7 octobre 2022

Recours en annulation pour excès de pouvoir de la décision du 24 février 2020 du Directeur de la Sûreté publique rejetant sa première demande de carte de séjour de résident et de la décision du 23 novembre 2020 du Conseiller de Gouvernement – Ministre de l'intérieur rejetant son recours hiérarchique.

En la cause de :

Madame A. K. veuve N. ;

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Régis BERGONZI, Avocat-Défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Gaston CARRASCO, Avocat au barreau de Nice ;

Contre :

L'État de Monaco, représenté par le Ministre d'État, ayant pour Avocat-Défenseur Maître Christophe SOSSO et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIE, Avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation de France ;

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LE TRIBUNAL SUPRÊME

Siégeant et délibérant en Assemblée plénière

Vu la requête, présentée par Madame A. K. veuve N., enregistrée au Greffe Général de la Principauté de Monaco le 25 janvier 2021 sous le numéro TS 2021-10, tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 24 février 2020 du Directeur de la Sûreté publique rejetant sa première demande de carte de séjour de résident et de la décision du 23 novembre 2020 du Conseiller de Gouvernement – Ministre de l'intérieur rejetant son recours hiérarchique contre cette décision, au besoin, à ce que le Tribunal Suprême, par une décision avant dire droit, invite le Ministre d'État à faire connaître les motifs de fait et de droit fondant le rejet de sa demande, ainsi qu'à la condamnation de l'État aux entiers dépens ;

Vu la décision du 12 juillet 2022 par laquelle le Tribunal Suprême a prescrit avant dire droit et en application de l'article 32 de l'Ordonnance Souveraine du 16 avril 1963 modifiée, sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême, une mesure d'instruction en invitant le Ministre d'État à produire dans le délai d'un mois tous éléments permettant au Tribunal Suprême d'exercer son contrôle de légalité sur les décisions attaquées ;

Vu le mémoire, enregistré au Greffe Général le 16 août 2022, par lequel le Ministre d'État conclut au rejet de la requête par les mêmes moyens que la contre-requête ;

Attendu que le Ministre d'État indique être au regret de ne pouvoir donner suite à la demande du Tribunal Suprême ; qu'il fait valoir que les éléments de moralité concernant la requérante sur lesquels se fondent les décisions attaquées proviennent directement d'informations classifiées communiquées par les services partenaires d'États tiers ; que ces informations sont confidentielles ; que l'État de Monaco ne saurait les divulguer, y compris dans le cadre de procédures juridictionnelles, lesquelles sont nécessairement contradictoires, sans méconnaître ses engagements internationaux et porter gravement atteinte à la confiance des services monégasques dans leur capacité à gérer des informations classifiées ;

Attendu que le Ministre d'État entend rappeler, par ailleurs, que si l'article 6 de la loi 1.312 du 29 juin 2006 relative à la motivation des actes administratifs dispense l'État de l'obligation de motivation concernant un refus d'établissement d'une personne physique sur le territoire, l'Administration exerce ce pouvoir discrétionnaire avec modération et discernement sur le fondement de réels motifs ; que la preuve en est fournie par le nombre extrêmement faible de décisions de rejet de demande de délivrance de première carte de séjour au cours des trois dernières années ; que l'État a procédé en 2019 à 24 rejets de première carte pour 1.033 demandes de délivrance, ce qui représente 1,85 % de refus, en 2020, à 26 rejets pour 1.053 demandes, soit un taux de rejet de 2,46 %, et en 2021 12 rejets pour 1.229 demandes, soit un taux de rejet de 0,97 % ;

Attendu que le Ministre d'État souligne, enfin, que dans l'exposé des motifs du projet de loi relatif à la motivation des actes administratifs, il est rappelé que l'exception à l'obligation de motivation pour les décisions de refus d'établissement de personnes physiques sur le territoire de la Principauté « se justifie en raison du fait, d'une part, que ce domaine relève éminemment de la Souveraineté nationale et, d'autre part, que nos engagements internationaux en la matière obligent réciproquement les autorités monégasques à consulter les autorités françaises ou à être consultées par elles, selon les stipulations de la convention franco-monégasque de voisinage du 18 mai 1963 (…) » ; que, de même, la Commission de Législation estimait, dans son rapport, que cette exception paraissait justifiée par le fait qu'il « ne sera pas toujours possible de mettre en avant des critères objectifs qui justifient que l'on refuse à une personne de s'établir de manière permanente en Principauté » ;

Vu le mémoire, enregistré au Greffe Général le 14 septembre 2022, par lequel Mme K. veuve N. tend aux mêmes fins que la requête et par les mêmes moyens ;

Attendu que la requérante fait valoir, tout d'abord, que le Ministre d'État n'apporte aucune preuve de ce que les décisions attaquées seraient fondées sur des informations classifiées communiquées par des services d'États tiers partenaires et qu'il ne saurait divulguer ces informations sans méconnaître les engagements internationaux de la Principauté ; que le rejet de la demande de la requérante était fondé, dans la contre-requête et la réplique, sur un prétendu pouvoir discrétionnaire de l'Administration en la matière ; que le Ministre d'État invoque des « éléments de moralité », sans préciser lesquels, ni leur nature, alors qu'elle a justifié de sa moralité dans ses écritures ; qu'en particulier, elle est étrangère à l'oligarchie liée au Président Poutine qu'elle ne connaît pas et avec lequel elle n'a aucun rapport ; qu'elle n'est nullement concernée personnellement par les sanctions adoptées par l'Union européenne visant plus d'une centaine d'entités et plus de 1.160 personnes ; qu'elle n'est pas concernée par les restrictions à l'exportation ou à l'importation ; que voyageant dans le monde entier et en particulier dans toute l'Europe pour les besoins de sa société, elle n'a jamais éprouvé la moindre difficulté à circuler librement ; que dès lors qu'elle est autorisée à séjourner et à travailler en France depuis 1992, il y a lieu de supposer que la France est dans l'ignorance des « éléments de moralité » invoqués par l'État monégasque, ce qui paraît invraisemblable, ou que ces éléments ne sont qu'une invention ;

Attendu que Mme K. veuve N. soutient, ensuite, qu'en droit international, il est toujours possible à un État ayant eu communication d'informations classifiées par un autre État de demander à ce dernier la déclassification des informations reçues ou d'une partie de celles-ci ; qu'en l'espèce, il n'est nullement fait état qu'une procédure d'autorisation de déclassification ait été engagée par l'État monégasque, ce qui ajoute à l'invraisemblance des faits avancés par l'Administration monégasque ; que le Ministre d'État invoque, sans la nommer, la raison d'État pour agir au-dessus de la morale et du droit, au prétexte de ne pas porter « atteinte à la confiance des services monégasques dans leur capacité à gérer des informations » prétendument classifiées ; qu'on ne saurait soutenir que porter « atteinte à la confiance des services monégasques dans leur capacité à gérer des informations » prétendument classifiées serait de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la Principauté de Monaco, surtout lorsqu'il est manifeste qu'aucune procédure de déclassification n'a été engagée ; que la requérante fait ainsi face à une accusation invisible qu'elle est dans l'impossibilité de contester ; que la Cour européenne des droits de l'homme condamne de tels procédés ; qu'elle juge, en effet, que pour s'assurer du caractère équitable d'une procédure, « il y a lieu de se demander en particulier si le requérante a eu la possibilité de contester l'authenticité des preuves et de s'opposer à leur utilisation » (CEDH, 25 septembre 2012, E. H. c/ Belgique, n° 649/08) ; que l'élément avancé par le Ministre d'État ne permet pas de garantir le droit à un procès équitable ;

Attendu, enfin, selon la requérante, que les chiffres présentés par le Ministre d'État concernant le nombre de décisions de rejet de demandes de première carte de séjour, d'une part, et l'évocation de l'absence d'obligation de motivation de ces décisions de rejet, d'autre part, sont sans rapport avec la mesure d'instruction réalisée par le Tribunal Suprême ; qu'ainsi, le Ministre d'État persiste à refuser de faire connaître les motifs des décisions attaquées ; qu'il place la requérante dans l'impossibilité de se défendre et le Tribunal Suprême dans l'impossibilité d'exercer son contrôle de légalité ;

SUR CE,

Vu les décisions attaquées ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la Constitution, notamment le 1° du B de son article 90 ;

Vu l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963 modifiée, sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême ;

Vu l'Ordonnance Souveraine n° 3.153 du 19 mars 1964 modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers dans la Principauté ;

Vu la loi n° 1.430 du 13 juillet 2016 relative à la préservation de la sécurité nationale ;

Vu l'arrêté ministériel n° 2016-723 du 12 décembre 2016 modifié, portant diverses mesures relatives à la préservation de la sécurité nationale et fixant les niveaux de classification des informations ;

Vu l'Ordonnance du 27 juillet 2022 par laquelle le Président du Tribunal Suprême a renvoyé la cause à l'audience de ce Tribunal du 23 septembre 2022 ;

Vu le procès-verbal de clôture de Madame le Greffier en Chef en date du 15 septembre 2022 ;

Ouï Monsieur Didier RIBES, Vice-président du Tribunal Suprême, en son rapport ;

Ouï Maître Gaston CARRASCO, Avocat au barreau de Nice, pour Madame K. veuve N. ;

Ouï Maître François MOLINIE, Président de l'Ordre des Avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation de France, pour le Ministre d'État ;

Ouï Monsieur le Procureur Général en ses conclusions tendant à ce qu'il soit fait droit à la requête de Madame K. veuve N. ;

La parole ayant été donnée en dernier aux parties ;

Motifs

APRÈS EN AVOIR DÉLIBÉRÉ

1. Considérant que Mme A. K. veuve N., ressortissante russe résidant en France, demande au Tribunal Suprême d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 24 février 2020 par laquelle le Directeur de la Sûreté publique a rejeté sa première demande de carte de séjour de résident ainsi que la décision du 23 novembre 2020 du Conseiller de Gouvernement – Ministre de l'intérieur rejetant son recours hiérarchique contre cette décision ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'Ordonnance Souveraine du 19 mars 1964 modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers dans la Principauté : « L'étranger qui sollicite, pour la première fois, une carte de séjour de résident doit présenter, à l'appui de sa requête : / – soit un permis de travail, ou un récépissé en tenant lieu, délivré par les services compétents ; / – soit les pièces justificatives de moyens suffisants d'existence, s'il n'entend exercer aucune profession. / La durée de validité de la carte de résident temporaire ne peut dépasser la durée de validité des documents et visas exigés pour entrer et séjourner dans la Principauté. / La carte de résident temporaire ne peut être renouvelée que si l'étranger satisfait aux conditions prévues aux alinéas ci-dessus. / Elle peut lui être retirée à tout moment, s'il est établi qu'il cesse de remplir ces mêmes conditions ou si les autorités compétentes le jugent nécessaires » ;

3. Considérant que si le rejet de la première demande de carte de séjour de résident opposé à Mme K. veuve N. n'avait pas à être motivé, il appartient au Tribunal Suprême de contrôler l'exactitude et la légalité des motifs d'une telle décision ; qu'en réponse aux conclusions tendant à l'annulation des décisions attaquées, le Ministre d'État s'est borné à énoncer dans sa contre-requête que la délivrance d'une première carte de séjour de résident est discrétionnaire ; que par décision du 12 juillet 2022, le Tribunal Suprême a invité le Ministre d'État à produire dans le délai d'un mois à compter de la notification de cette décision tous éléments de nature à lui permettre d'exercer son contrôle de légalité sur les décisions attaquées ; qu'en réponse à cette mesure d'instruction, le Ministre d'État a refusé de communiquer ces éléments au motif que les éléments de moralité relatifs à la requérante sur lesquels sont fondées les décisions attaquées proviennent directement d'informations classifiées communiquées par les services partenaires d'États tiers et sont, par suite, confidentiels ;

4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1er de la Constitution : « La Principauté de Monaco est un État souverain et indépendant dans le cadre des principes généraux du droit international et des conventions particulières avec la France. / Le territoire de la Principauté est inaliénable » ; que le secret de la sécurité nationale est au nombre des exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts supérieurs de l'État ; qu'il s'oppose à ce que soient communiquées à des personnes non habilitées des informations dont la divulgation serait de nature à compromettre la sécurité nationale de la Principauté ou le respect de conventions conclues avec des États tiers concernant l'échange et la protection d'informations classifiées ;

5. Considérant, d'autre part, que l'article 2 de la Constitution dispose : « Le principe du Gouvernement est la monarchie héréditaire et constitutionnelle. La Principauté est un État de droit attaché au respect des libertés et droits fondamentaux » ; que dans l'accomplissement de la mission qui lui a été confiée par le Prince en vertu de l'article 90 de la Constitution, il appartient au Tribunal Suprême de garantir un exercice effectif des libertés et droits consacrés par le titre III de la Constitution et d'en préciser la portée ; que le droit à un recours juridictionnel effectif est inhérent à l'affirmation constitutionnelle de la Principauté de Monaco en tant qu'État de droit ; que le respect de ce droit participe à la garantie des droits fondamentaux consacrés par le titre III de la Constitution ; que le droit à un recours juridictionnel effectif implique le respect des droits de la défense et le caractère contradictoire de la procédure juridictionnelle ;

6. Considérant, en premier lieu, que le droit à un recours juridictionnel effectif implique que, pour se prononcer sur une requête assortie d'allégations sérieuses, le Tribunal Suprême soit en mesure d'apprécier, à partir d'éléments précis, le bien-fondé du motif invoqué pour justifier l'acte attaqué ; qu'il appartient à l'Administration de verser au dossier, dans le respect des exigences inhérentes à la sauvegarde des intérêts supérieurs de l'État, les éléments d'information nécessaires pour que le juge statue en pleine connaissance de cause ; que ces éléments doivent à tout le moins comporter, même de manière sommaire, la substance des motifs qui justifient l'acte attaqué ; qu'il revient, le cas échéant, au Tribunal Suprême, avant de se prononcer sur la requête, de prescrire, sur le fondement de l'article 32 de l'Ordonnance Souveraine du 16 avril 1963, les mesures d'instruction propres à lui procurer les éléments qui peuvent être versés au débat contradictoire dans le respect des exigences inhérentes à la sauvegarde des intérêts supérieurs de l'État et qui sont de nature à lui permettre d'établir sa conviction ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que le principe du caractère contradictoire de la procédure juridictionnelle interdit, en principe, au juge de se fonder sur des pièces dont les parties n'auraient pu prendre connaissance ; que la garantie du droit à un recours juridictionnel effectif peut toutefois imposer que des éléments ou des pièces couverts par le secret de la sécurité nationale et dont la déclassification n'est pas possible soient communiqués aux seuls membres de la formation de jugement du Tribunal Suprême, le cas échéant après mise en œuvre des procédures appropriées pour leur permettre d'avoir accès à ces éléments ou pièces ;

8. Considérant, en dernier lieu, que lorsque, dans l'un comme dans l'autre cas, l'Administration refuse de communiquer les éléments et pièces nécessaires, elle ne met pas le Tribunal Suprême à même d'exercer son contrôle ; que, dès lors, il y a lieu pour lui d'annuler l'acte attaqué ;

9. Considérant qu'il y a lieu, en l'espèce, de prescrire une mesure d'instruction aux fins d'inviter le Ministre d'État à communiquer, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, soit les éléments qui peuvent être versés au débat contradictoire dans le respect des exigences inhérentes à la sauvegarde des intérêts supérieurs de l'État et qui sont de nature à permettre au Tribunal Suprême d'apprécier la légalité des décisions attaquées, soit les éléments ou pièces demeurant couverts par le secret de la sécurité nationale à la seule destination des membres de la formation de jugement du Tribunal Suprême ;

Dispositif

DÉCIDE :

Article 1er

Le Ministre d'État est invité à prendre, selon les modalités précisées dans les motifs de la présente décision, les mesures appropriées pour permettre au Tribunal Suprême d'exercer son contrôle de légalité des décisions attaquées.

Article 2

Les dépens sont réservés.

Article 3

Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d'État.

Composition

Ainsi délibéré et jugé par le Tribunal Suprême de la Principauté de Monaco, composé de Messieurs Didier LINOTTE, Officier de l'Ordre de Saint-Charles, Président, Didier RIBES, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Vice-président, rapporteur, Philippe BLACHER, Stéphane BRACONNIER, Membres titulaires, et Madame Magali INGALL-MONTAGNIER, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Membre suppléant, et prononcé le sept octobre deux mille vingt-deux en présence du Ministère public, par Monsieur Didier RIBES, assisté de Madame Virginie SANGIORGIO, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles, Greffier en Chef.

Le Greffier en Chef, Le Vice-Président, par délégation du Président.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : TS/2021-10
Date de la décision : 02/12/2022

Analyses

L'article 1er de la Constitution énonce que « La Principauté de Monaco est un État souverain et indépendant dans le cadre des principes généraux du droit international et des conventions particulières avec la France. / Le territoire de la Principauté est inaliénable », cette disposition implique que le secret de la sécurité nationale est au nombre des exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts supérieurs de l'État et que des personnes non habilitées ne peuvent se voir communiquer des informations qui seraient de nature à compromettre la sécurité nationale de la Principauté. Quant à son article 2, il prévoit que : « Le principe du Gouvernement est la monarchie héréditaire et constitutionnelle. La Principauté est un État de droit attaché au respect des libertés et droits fondamentaux », il appartient dans ce cadre au Tribunal Suprême de garantir un exercice effectif des libertés.Mme K., ressortissante russe résidant en France, demande au Tribunal Suprême d'annuler pour excès de pouvoir la décision par laquelle le Directeur de la Sûreté publique a rejeté sa première demande de carte de séjour de résident, ainsi que la décision du Conseiller de Gouvernement - Ministre de l'intérieur rejetant son recours hiérarchique contre cette décision. Dans une première décision du 7 octobre 2022, le Tribunal Suprême a enjoint le Ministre d'État à lui fournir les éléments lui permettant d'assurer un contrôle de légalité. Par la présente décision, le Tribunal constate que le Ministre d'État n'a pris aucune mesure d'exécution de la décision ou produit de mémoire ou de pièces supplémentaires. Par conséquent, il annule les décisions du 24 février 2020 du Directeur de la Sûreté publique et du 23 novembre 2020 du Conseiller de Gouvernement - Ministre de l'intérieur.

Droit des étrangers  - Défense - sécurité.

Recours pour excès de pouvoir - Étrangers - Droits fondamentaux - État de droit - Droit à un recours juridictionnel effectif - Droit de la défense - Caractère contradictoire de la procédure - Demande de résidence sur le territoire de la Principauté - Sécurité nationale - Intérêt supérieur de l'État - Appréciation par le juge - Contrôle de légalité - Obstacle (oui) - Annulation (oui).


Parties
Demandeurs : Mme A. K. veuve N.
Défendeurs : État de Monaco

Références :

loi n° 1.430 du 13 juillet 2016
Ordonnance Souveraine n° 3.153 du 19 mars 1964
Vu la Constitution
Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963
article 90 de la Constitution
article 2 de la Constitution
arrêté ministériel n° 2016-723 du 12 décembre 2016
article 1er de la Constitution


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.supreme;arret;2022-12-02;ts.2021.10 ?

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