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25/11/2014 | MONACO | N°TS/2014-03

Monaco | Tribunal Suprême, 25 novembre 2014, Hoirs CO c/ État de Monaco, TS/2014-03


Motifs

TRIBUNAL SUPRÊME

__________

TS 2014-03

Affaire :

Hoirs CO.

Contre :

Etat de Monaco

DÉCISION

AUDIENCE DU 17 NOVEMBRE 2014

Lecture du 25 novembre 2014

Requête de MM. CO. en annulation de la décision de Monsieur le Directeur de l'Habitat du 22 novembre 2013 déclarant soumis au régime locatif de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, le bien immobilier leur appartenant situé au 4ème étage de l'immeuble « SIM PALACE » sis 8, Boulevard du Jardin Exotique, ainsi que subséquemment l'annulation d

e ses décisions antérieures des 4 décembre 2009, 15 décembre 2011 et 13 février 2012 tendant aux mêmes fins.

En la cause de :

M....

Motifs

TRIBUNAL SUPRÊME

__________

TS 2014-03

Affaire :

Hoirs CO.

Contre :

Etat de Monaco

DÉCISION

AUDIENCE DU 17 NOVEMBRE 2014

Lecture du 25 novembre 2014

Requête de MM. CO. en annulation de la décision de Monsieur le Directeur de l'Habitat du 22 novembre 2013 déclarant soumis au régime locatif de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, le bien immobilier leur appartenant situé au 4ème étage de l'immeuble « SIM PALACE » sis 8, Boulevard du Jardin Exotique, ainsi que subséquemment l'annulation de ses décisions antérieures des 4 décembre 2009, 15 décembre 2011 et 13 février 2012 tendant aux mêmes fins.

En la cause de :

M. p. CO., né le 9 juin 1970 à Monaco, de nationalité française, demeurant X à 06800 CAGNES-SUR-MER (France).

M. j-m. CO., né le 20 mai 1968 à VIENTIANE (Laos), de nationalité française, demeurant X à 24820 ASSAS (France)

Ayant tous deux élu domicile en l'étude de Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

Contre

S. E. M. le Ministre d'Etat de la Principauté de Monaco, ayant pour avocat-défenseur Maître Christophe SOSSO et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIE, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation de France.

LE TRIBUNAL SUPREME

Siégeant et délibérant en assemblée plénière

Vu la requête, enregistrée au Greffe Général de la Principauté de Monaco le 22 janvier 2014 sous le numéro TS 2014-03 par laquelle MM. p. et j-m. CO., propriétaires indivis, concluent à l'annulation de la décision de M. le Directeur de l'Habitat en date du 22 novembre 2013 déclarant soumis au régime locatif de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, le bien immobilier leur appartenant situé au 4e étage de l'immeuble « SIM PALACE » sis 8 Bld du Jardin Exotique, et par voie de conséquence de ses décisions antérieures des 4 décembre 2009, 15 février 2011 et 13 février 2012 tendant aux mêmes fins.

Ce faire :

Attendu que MM. p. et j-m. CO. sont propriétaires indivis, pour l'avoir reçu de leurs parents par dévolution successorale, d'un bien immobilier acquis par feu pi. CO. le 27 mars 1952 consistant en un appartement de 4 pièces, ainsi que de 2 chambres de bonne, au 4e étage de l'immeuble « SIM PALACE » sis 8, Bld du Jardin Exotique à Monaco ;

Attendu que dans le cadre d'une demande d'informations, la Direction de l'Habitat indiquait dès son courrier du 4 décembre 2009 que ledit bien immobilier relevait des dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, position qu'elle maintenait par courriers des 15 juin 2011 et 13 février 2012 au motif que ledit bien avait fait l'objet d'une location antérieurement à son acquisition ;

Attendu que par courrier du 22 octobre 2013, M. p. CO. soutenait que le bien de l'indivision était soumis au régime dérogatoire de la loi n° 887 du 25 juin 1970 pour relever, selon l'expertise privée qu'il avait fait diligenter par le Cabinet BATICONSEIL, de la catégorie 2A au sens de l'Ordonnance n° 77 du 22 septembre 1949 ;

Attendu que par courrier du 22 novembre 2013 la Direction de l'Habitat affirmait au contraire que ledit immeuble relevait de la catégorie 2C comme en témoigneraient un extrait du Journal de Monaco du 3 octobre 1949 et un décompte de prix du loyer d'un autre appartement situé dans le même immeuble et confirmait par conséquent sa décision de placement dudit bien immobilier sous le régime de la loi n° 1.235, d'où la présente requête ;

Attendu qu'il est allégué que ce serait vainement que M. le Ministre d'État opposerait l'irrecevabilité de la requête, motif pris du caractère confirmatif de la décision du 22 décembre 2013 dès lors qu'il est constant que la modification des circonstances de fait ou de droit ouvre un nouveau délai de recours ; qu'en l'espèce, il a été établi postérieurement aux décisions des 4 décembre 2009, 15 juin 2011 et 13 février 2012 que le bien litigieux devait être classé en catégorie 2A selon rapport établi par le cabinet BATICONSEIL ; que cette classification présente incontestablement le caractère d'une circonstance nouvelle puisqu'elle permet de conclure à l'applicabilité du régime dérogatoire de la loi n° 887 et non à celui de la loi n° 1.235 tel que l'indique erronément la décision attaquée ;

Qu'au surplus, cette classification sous le régime dérogatoire de la loi n°887 est confortée par la production d'un décompte du prix du loyer d'un autre appartement de l'immeuble faisant étant d'une classification « 2A + 2B/2 » ;

Attendu qu'aux termes de l'article 1er, premier tiret, de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée « les locaux à usage d'habitation construits ou achevés avant le 1er septembre 1947 sont soumis aux dispositions de la présente loi à l'exception… de ceux qui relèvent de la loi n° 887 du 25 juin 1970 » ;

Attendu que les articles 1er et 2e de la loi n° 887 du 25 juin 1970 disposent :

« Art. 1er : À compter du 1er octobre 1970, les dispositions des articles 3, 4, 5 et 14 à 23 inclus de l'Ordonnance-loi n° 669 du 17 décembre 1959 modifiant et codifiant la législation relative aux conditions de location des locaux à usage d'habitation cesseront d'être applicables, sous réserve de l'article 3 ci-après, aux locaux qui, à la date de la publication de la présente loi seront classés dans la première catégorie prévue à l'article 2 de l'Ordonnance Souveraine n° 77 du 22 septembre 1949, lorsque ces locaux seront vacants :

* s'ils sont nouvellement affectés à la location,

* si la vacance résulte soit du décès ou du départ volontaire du locataire ou de l'occupant, soit de son expulsion en raison du non-paiement régulier du loyer ou de l'inobservation d'autres obligations légales ou conventionnelles.

Art 2 : Les mêmes dispositions recevront effet …. en ce qui concerne les locaux qui …seront classés dans la deuxième catégorie, sous-catégorie A et sous-catégorie B prévues à l'article 3 de l'Ordonnance Souveraine n° 77 du 21 septembre 1949 » ;

Attendu qu'il est soutenu que le bien immobilier des requérants remplit toutes les conditions permettant sa classification sous le régime dérogatoire de la loi n° 887 dès lors qu'il résulte du rapport établi par le cabinet BATICONSEIL qu'il doit être classé en catégorie 2A au regard des critères de l'Ordonnance n° 77 du 22 septembre 1949 ;

Attendu que la Direction de l'Habitat se borne à produire l'extrait du Journal de Monaco du 3 octobre 1949 publiant une « liste des d'immeubles types » au sein de laquelle figure l'immeuble « SIM PALACE » sous la catégorie 2C, alors que l'avis relatif aux modalités d'application de l'Ordonnance Souveraine n° 77 du 22 septembre 1949 selon lequel ladite liste a été publiée, indique très clairement :

« Dans le but de faciliter … le classement de l'immeuble (ou de fraction d'immeuble), le Service du logement… a établi la liste suivante d'immeubles types avec l'indication d'un classement ; ce classement n'engage ni les intéressés, ni la Commission Arbitrale chargée de les départager ; il n'a pour but que de faciliter les accords amiables en donnant des éléments de comparaison. Les immeubles types peuvent également être divisés en fractions et donner lieu à des classements dans les catégories différentes. Le Service n'a tenu compte que du classement qui lui a paru correspondre à la fraction la plus importante de l'immeuble » ;

Qu'il est donc clair, d'une part que cette liste n'a qu'un caractère purement indicatif, et d'autre part qu'il est précisé qu'un immeuble peut être divisé en fractions donnant lieu à des classements dans des catégories différentes ;

Attendu qu'il est soutenu que le bien immobilier litigieux consistant en un appartement au 4e étage avec vue mer se trouve bien classé en catégorie 2A, nonobstant la classification indicative de l'entier immeuble qui l'abrite en catégorie 2C ;

Attendu qu'aucune conclusion ne saurait être tirée du courrier du 9 juin 1950 établissant un décompte de loyer selon les critères de l'Ordonnance n° 77 dès lors qu'il concerne un autre appartement de l'immeuble aux caractéristiques différentes ;

Que d'ailleurs les requérants produisent le décompte d'un autre appartement de l'immeuble « SIM PALACE » établissant que l'appartement situé au 1er étage, a été classé en catégorie « 2A + 2B/2 », alors que celui des exposants se situe au 4e étage avec vue mer ;

Attendu au surplus qu'il est souligné que la situation locative du bien litigieux en 1946 et 1948 invoquée par le Direction de l'Habitat est totalement inopérante au regard de sa classification dès lors que le Tribunal Suprême, dans une décision en date du 17 juin 2011 a précisé, s'agissant des dispositions de la loi n° 887 du 25 juin 1970, que le régime dérogatoire au secteur protégé qu'elle institue n'était applicable qu'aux locaux « nouvellement affectés à la location », c'est-à-dire si leur propriétaire choisit de le relouer à compter du 1er octobre 1971 ;

Qu'enfin, il est affirmé de plus fort que le bien immobilier litigieux relève du régime dérogatoire de la loi n° 887 en application de l'article 1er de ladite loi dès lors que sa vacance résulte bien du décès de son dernier occupant, la Dame Veuve pi. CO. ;

Qu'il est dès lors conclu à l'annulation de la décision attaquée ;

Vu la contre-requête enregistrée au Greffe Général du Tribunal Suprême le 21 mars 2014, dans laquelle M. le Ministre d'État, après avoir rappelé les mêmes faits et la procédure, commence par soulever l'irrecevabilité de la requête en ce qu'elle serait dirigée contre une décision purement confirmative dès lors que le rapport d'expertise établi par le cabinet BATICONSEIL ne peut être tenu pour une circonstance nouvelle, pas plus qu'il ne saurait constituer une circonstance de fait ; qu'il n'a point modifié la situation juridique du bien immobilier litigieux ;

Que dès lors, la décision attaquée du 22 novembre 2013 étant, sans aucun doute, purement confirmative des 3 décisions des 4 décembre 2009, 15 juin 2011 et 15 février 2012, la requête formée à son encontre est par suite irrecevable ;

Attendu à titre subsidiaire sur le fond que c'est vainement que les requérants affirment en se fondant sur les énonciations du rapport établi à leur demande par le cabinet BATICONSEIL que cet appartement relèverait par application des critères de l'Ordonnance n° 77 du 22 septembre 1949, de la catégorie 2A régie par les dispositions dérogatoires de la loi n° 887 du 25 juin 1970 ;

Que c'est tout aussi vainement qu'il est allégué que la « liste d'immeubles types » publiée au Journal de Monaco du 3 octobre 1949 joint par la Direction de l'Habitat à la décision attaquée, serait purement indicative et réserverait, en tout état de cause, la possibilité d'un classement différencié pour des fractions d'immeubles ;

Attendu en effet, qu'il résulte de la combinaison des dispositions de l'article 1er de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, des articles 1er et 2 de la loi n° 887 du 25 juin 1970, éclairée par la décision du Tribunal Suprême du 17 juin 2011, que la législation monégasque « fait coexister trois régimes de location de locaux à usage d'habitation construits ou achevés antérieurement à 1947 : le régime de droit commun…le régime d'exception de l'Ordonnance-loi n° 669….remplacée par la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, et le régime dérogatoire au régime d'exception institué par la loi n° 887 » ;

Que dès lors, pour que les locaux à usage d'habitation bénéficient du régime dérogatoire au régime d'exception de la loi n° 1.235, il est nécessaire qu'ils soient classés, à la date de publication de la loi n° 887 du 25 juin 1970 « dans la deuxième catégorie, sous-catégorie A et sous-catégorie B prévues à l'article 3 de l'Ordonnance Souveraine n° 77 du 21 septembre 1949 » (art. 2 loi n° 887) ;

Attendu que les conclusions du rapport d'expertise privé établi à la seule demande des requérants, ne sont pas susceptibles de remettre en cause le classement existant à cette date de référence que traduit la « liste d'immeuble types » publiée au Journal de Monaco le 3 octobre 1949 ;

Attendu que les aménagements possibles de cette liste concernent exclusivement les rapports entre propriétaires et locataires pour la détermination du « prix de location », qu'ils n'affectent pas le classement lui-même, d'où il ressort que l'immeuble « SIM PALACE » est classé dans cette liste de 1949 en catégorie 2C ;

Que même s'il a fait l'objet depuis cette date de travaux, notamment de ravalement, il demeure classé dans cette catégorie pour l'application de l'article 2 de la loi n° 887 du 25 juin 1970, tout comme les appartements qui le composent, ainsi que le confirment les deux documents joints à la décision attaquée, soit pour le premier daté du 9 juin 1950 (avant la date de référence) un classement par la commission arbitrale en catégorie « 2C plus un tiers, entre les catégories 2B et 2 C », et pour le second un classement en catégorie 2C pour le nouveau décompte du prix du loyer établi le 20 janvier 1979 (après la date de référence) ;

Attendu dès lors que c'est de façon exacte que la décision attaquée a confirmé le classement de cet appartement dans la sous-catégorie 2C et que dès lors les deux autres conditions posées par l'article 2 de la loi n° 887, savoir que l'appartement serait nouvellement affecté à la location et que sa vacance résulterait du décès du dernier occupant, sont dès lors inopérants ;

Qu'ainsi la requête ne peut qu'être rejetée ;

Vu la réplique enregistrée au Greffe Général le 24 avril 2014 par laquelle MM. p. et j-m. CO. concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens, et tout d'abord à la recevabilité de leur requête puisque la décision du 22 novembre 2013 ne saurait être considérée comme une décision confirmative dès lors qu'elle s'attache pour la première fois à la question du classement du bien immobilier tout en produisant pour la première fois, à l'appui de la décision attaquée, un certain nombre de pièces destinées à étayer sa position selon laquelle le bien ne serait être classé qu'en catégorie 2C, ce dont les décisions des 4 décembre 2009, 15 juin 2011 et 13 février 2012 n'ont jamais fait état ; qu'au surplus le simple fait que le rapport BATICONSEIL n'ait pas été réalisé contradictoirement ne permet pas de nier son existence en tant que fait nouveau s'imposant aux parties d'autant que la Direction de l'Habitat, en dépit de la demande expresse qui lui avait été faite en ce sens, a refusé aux requérants l'accès aux archives permettant d'établir la situation administrative et locative du bien dont il s'agit ;

Attendu au surplus que M. le Ministre d'État admet qu'au nombre des trois régimes de location de locaux à usage d'habitation construits ou achevés antérieurement à 1947 que fait coexister le droit monégasque, figure un régime dérogatoire au régime de la loi n° 1.235 institué par la loi n° 887 pour les locaux de catégorie 1 et 2 A-B devenant vacants à compter du 1er octobre 1970 ou 1971, régime dont dépend le bien des requérants ;

Attendu que M. le Ministre d'État ne conteste pas que le bien immobilier des requérants soit devenu vacant du fait du décès de son dernier occupant et qu'il ait bien été nouvellement affecté à la location à compter du 1er octobre 1971 ;

Attendu que s'il conteste cependant la classification en catégorie 2A c'est au motif que le rapport BATICONSEIL serait postérieur à la date de référence posée par la loi n° 887 et qu'il ne pourrait remettre en cause le classement préexistant de l'immeuble résultant des pièces produites par la Direction de l'Habitat à l'appui de sa décision du 22 novembre 2013 ;

Attendu que le bien des requérants a été classé avant l'entrée en vigueur de la loi n° 887 du 25 juin 1970 puisqu'il ressort des pièces versées aux débats qu'il a été loué à usage d'habitation au moins jusqu'en 1952 sous l'empire de la loi n° 497 et avait dû, à ce titre, faire l'objet d'un classement ;

Que l'esprit de la loi n° 887 était de faire sortir du régime locatif un certain nombre de biens qui, bien que construits avant 1947, présentaient néanmoins un certain standing, sous réserve d'un certain nombre de sujétions imposées au propriétaire ; que le bien des requérants répond en tous points aux vœux du législateur ;

Attendu que l'avis paru au Journal de Monaco n'a qu'un caractère purement indicatif du classement de l'immeuble en son ensemble et non du bien des requérants en particulier ;

Attendu d'ailleurs que l'Administration n'a aucune vocation à arrêter elle-même le classement d'un bien immobilier, cette faculté n'appartenant qu'aux parties à la location, voire au Juge à défaut d'accord entre-elles ;

Attendu que le fait que le rapport BATICONSEIL ait été établi en 2013 se trouve sans incidence dès lors qu'il s'agit de déterminer la catégorie dans laquelle l'appartement des requérants a été nécessairement classé avant l'entrée en vigueur de la loi n° 887 ;

Attendu qu'on ne voit pas comment M. le Ministre d'État peut contester le classement en catégorie 2A opéré par le rapport BATICONSEIL sans avoir visité ou fait visiter par ses services ledit bien en vue de son classement ;

Que si le Tribunal concevait le moindre doute sur la pertinence des conclusions dudit rapport BATICONSEIL, il est conclu à titre subsidiaire qu'Il ordonne une mesure d'instruction au contradictoire pour l'éclairer sur les caractéristiques permettant de définir le classement du bien en cause ;

Vu la duplique déposée au Greffe Général le 28 mai 2014 par laquelle M. le Ministre d'État maintient que la décision attaquée du 22 novembre 2013 n'est qu'une décision confirmative de ses précédentes décisions des 4 décembre 2009, 15 juin 2011 et 13 février 2012 dès lors qu'elles ont pour unique objet d'indiquer pour la première et de confirmer pour les trois autres que le logement litigieux relève des dispositions de la loi n° 1235 du 28 décembre 2000 modifiée ;

Que, même si les motifs de la décision attaquée sont plus explicites que ceux des décisions antérieures, ils sont fondamentalement identiques étant ajouté que, ni la situation de droit, ni la situation de fait, n'ont changé entre la première décision du 4 décembre 2009 et la décision attaquée et que dès lors la requête est irrecevable ;

Attendu que les requérants admettent que le logement litigieux avait été loué jusqu'en 1952 et qu'il était donc régi par les dispositions de la loi n° 497 du 25 mars 1949 d'où ils déduisent, en se fondant sur l'article 1er de l'Ordonnance 77 du 22 septembre 1949, que le logement a été classé avant l'entrée en vigueur de la loi n° 887 du 25 juin 1970 ; qu'on ne voit pas en quoi un tel raisonnement démontrerait que le logement des requérants devrait être classé en catégorie 2 A alors que l'ensemble de l'immeuble « SIM PALACE » dans lequel il se situe est classé en catégorie 2C à la date de référence, c'est-à-dire à la date de publication de la loi n° 887 du 25 juin 1970 ;

Attendu que si la « liste d'immeubles types » publiée au Journal de Monaco le 3 octobre 1949 n'exclut pas la possibilité de diviser ces immeubles types en fractions donnant lieu à des classements en des catégories différentes, ces aménagements éventuels concernent exclusivement les rapports entre bailleurs et locataires pour la détermination du prix de location ; que dès lors que l'immeuble « SIM PALACE » était effectivement classé en catégorie 2C, il en allait nécessairement de même du logement des requérants situé dans cet immeuble ; qu'il y a donc lieu de rejeter la requête ;

SUR CE,

Vu les décisions attaquées ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu l'article 90 B de la Constitution ;

Vu l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963 modifiée, sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême ;

Vu la loi n° 497 du 25 mars 1949 relative aux conditions de location des locaux à usage d'habitation ;

Vu la loi n° 887 du 25 juin 1970 portant limitation du champ d'application de l'Ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959 ;

Vu la loi n° 888 du 25 juin 1970 modifiant et complétant l'Ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959 relative aux conditions de location des locaux à usage d'habitation ;

Vu la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée relative aux conditions de location de certains locaux à usage d'habitation construits ou achevés avant le 1er septembre 1947 ;

Vu l'Ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959 modifiant et codifiant la législation relative aux conditions de location des locaux à usage d'habitation ;

Vu l'Ordonnance n° 77 du 22 septembre 1949 relative au classement et au prix de location des immeubles d'habitation ;

Vu l'Ordonnance du 24 janvier 2014 par laquelle M. le Président du Tribunal Suprême a nommé M. José SAVOYE, Membre Titulaire, comme Rapporteur ;

Vu le procès-verbal de clôture de la procédure du 17 juillet 2014 ;

Vu l'Ordonnance en date du 6 octobre 2014 par laquelle M. le Président du Tribunal Suprême a renvoyé la cause à l'audience du 17 novembre 2014 ;

Ouï M. José SAVOYE, Membre Titulaire du Tribunal Suprême, en son rapport ;

Ouï Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur pour MM. p. et j-m. CO. ;

Ouï Maître Jacques MOLINIÉ, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation de France, pour le Ministre d'État ;

Ouï le Ministère Public en ses conclusions ;

Après en avoir délibéré

Sur la recevabilité

Considérant qu'est recevable la requête dirigée contre une décision qui n'est pas confirmative d'une décision antérieure ;

Considérant que la décision du Directeur de l'Habitat en date du 22 novembre 2013 indiquant que l'appartement, propriété des requérants au 4e étage de l'immeuble « SIM PALACE » sis 8 Bld Jardin Exotique à Monaco, est soumis au régime locatif de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, précise pour la première fois que celui-ci est classé à ce titre en catégorie 2C et invite les requérants à fournir la déclaration de vacance prévue par l'article 35 de ladite loi ; que dès lors, contrairement à ce que soutient le Ministre d'État, la décision attaquée du 22 novembre 2013 ne peut être regardée comme purement confirmative ;

Qu'ainsi la requête est recevable ;

Sur la légalité

Considérant que la législation fait coexister trois régimes de location de locaux à usage d'habitation construits ou achevés antérieurement à 1947 : le régime de droit commun auquel ont été rendus les locaux de toutes les catégories affectés pour la première fois à la location à compter du 25 juin 1970 par la loi n° 888, le régime d'exception issu de l'Ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959 remplacée par la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, et le régime dérogatoire au régime d'exception institué par loi n° 887 du 25 juin 1970 pour les locaux de catégorie 1 et 2A et 2B devenant vacants à compter du 1er octobre 1970 ou 1971 ;

Considérant que le Directeur de l'Habitat a justifié la soumission de l'appartement litigieux au régime de la loi n° 1.235 par le fait que celui-ci serait classé en catégorie 2C, alors que le classement revendiqué par les requérants en catégorie 2A l'aurait fait échapper à un tel régime par application de la loi n° 887 ; qu'il tire en effet ce prétendu classement en catégorie 2C tant de la présence de l'immeuble SIM PALACE dont relève ledit appartement sur la liste d'immeubles types publiée au journal de Monaco du 3 Octobre 1949, que du classement dans cette même catégorie de 2 autres appartements du même immeuble ; qu'un tel fondement est doublement erroné dès lors d'une part que l'avis du 3 octobre 1949 auquel la liste d'immeubles types est annexée énonce lui-même que cette liste n'a qu'une valeur indicative, et qu'il résulte d'autre part des dispositions de l'article 1er de l'Ordonnance n°77 du 22 septembre 1949 que les appartements d'un même immeuble peuvent faire l'objet de classement dans des catégories différentes ; que d'ailleurs les requérants produisent un autre décompte relatif à un troisième appartement du même immeuble faisant apparaître un classement en catégorie 2A + 2B/2 ;

Qu'il en résulte qu'en déduisant des éléments ci-dessus que l'appartement propriété des hoirs CO. était soumis au régime de la Loi 1.235 à raison de son classement en catégorie 2C, alors qu'il ne tire par ailleurs d'aucun texte le pouvoir de procéder à un tel classement, le Directeur de l'habitat a entaché d'erreur de droit la décision attaquée du 22 novembre 2013.

Dispositif

DÉCIDE :

Article 1er : La décision du Directeur de l'Habitat du 22 novembre 2013 est annulée.

Article 2 : Les dépens sont mis à la charge de l'État.

Article 3 : Expédition de la présente décision sera transmise à S.E. M. le Ministre d'État et aux Hoirs CO.

Composition

Ainsi jugé et délibéré par le Tribunal Suprême de la Principauté de Monaco, composé de M. Didier LINOTTE, Chevalier de l'Ordre de Saint Charles, Président, M. Jean-Michel LEMOYNE de-FORGES, Officier de l'Ordre de Saint Charles, Vice-président, M. José SAVOYE Chevalier de l'Ordre de Saint Charles, Rapporteur, Mme Martine LUC-THALER, Chevalier de l'Ordre de Saint Charles, membres titulaires, Mme Magali INGALL-MONTAGNIER, Chevalier de l'Ordre de Saint Charles, membre suppléant,

et prononcé le vingt-cinq novembre deux mille quatorze en présence de Monsieur Jean pi. DRÉNO, Procureur général par Monsieur Didier LINOTTE, assisté de Madame Béatrice BARDY, greffier en chef, chevalier de l'ordre de Saint-Charles.

Le Greffier en Chef, le Président,

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : TS/2014-03
Date de la décision : 25/11/2014

Analyses

Baux  - Immeuble à usage d'habitation.

Compétence.


Parties
Demandeurs : Hoirs CO
Défendeurs : État de Monaco

Références :

article 2 de l'Ordonnance Souveraine n° 77 du 22 septembre 1949
Ordonnance n° 77 du 22 septembre 1949
loi n° 1.235 du 28 décembre 2000
loi n° 888 du 25 juin 1970
loi n° 1235 du 28 décembre 2000
loi n° 887 du 25 juin 1970
article 1er de l'Ordonnance n°77 du 22 septembre 1949
article 1er de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000
article 2 de la loi n° 887 du 25 juin 1970
loi n° 497 du 25 mars 1949
Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963
article 90 B de la Constitution
article 3 de l'Ordonnance Souveraine n° 77 du 21 septembre 1949
Ordonnance du 24 janvier 2014
Ordonnance-loi n° 669 du 17 décembre 1959
Ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959
articles 1er et 2 de la loi n° 887 du 25 juin 1970


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.supreme;arret;2014-11-25;ts.2014.03 ?

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