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07/04/2014 | MONACO | N°TS/2013-10et2013-19

Monaco | Tribunal Suprême, 7 avril 2014, Dame G. V. épouse C. c/ État de Monaco, TS/2013-10et2013-19


Motifs

TRIBUNAL SUPRÊME

__________

TS 2013-10 et 2013-19

Affaires :

Mme g. VI. épouse CA.

Contre :

Etat de Monaco

DÉCISION

AUDIENCE DU 27 MARS 2014

Lecture du 7 avril 2014

1°/ Recours en annulation, enregistré au Greffe général de la Principauté de Monaco le 10 juin 2013 sous le numéro TS 2013-10, de la décision du directeur de la Direction de l'Habitat en date du 26 février 2013 déclarant soumis au régime locatif de la loi n°1.235 du 28 décembre 2000 modifiée le bien immobilier appartenant à Mme VI.

épouse CA. portant le lot 9 et situé au RDC de l'immeuble sis 5, avenue du Berceau à Monaco, en même temps que du rejet en date du...

Motifs

TRIBUNAL SUPRÊME

__________

TS 2013-10 et 2013-19

Affaires :

Mme g. VI. épouse CA.

Contre :

Etat de Monaco

DÉCISION

AUDIENCE DU 27 MARS 2014

Lecture du 7 avril 2014

1°/ Recours en annulation, enregistré au Greffe général de la Principauté de Monaco le 10 juin 2013 sous le numéro TS 2013-10, de la décision du directeur de la Direction de l'Habitat en date du 26 février 2013 déclarant soumis au régime locatif de la loi n°1.235 du 28 décembre 2000 modifiée le bien immobilier appartenant à Mme VI. épouse CA. portant le lot 9 et situé au RDC de l'immeuble sis 5, avenue du Berceau à Monaco, en même temps que du rejet en date du 8 avril 2013 du recours gracieux formé le 19 mars 2013 et de la mise en demeure adressée le 31 mai 2013 aux fins de régularisation de la situation locative dudit bien immobilier.

2°/ Recours en annulation, enregistré au Greffe général de la Principauté de Monaco le 13 septembre 2013 sous le numéro TS 2013-19, des décisions du directeur de la Direction de l'Habitat en date du 10 février 2012 et du 22 mars 2012 déclarant soumis au régime locatif de la loi n°1.235 du 28 décembre 2000 modifiée le bien immobilier appartenant à Mme VI. épouse CA. portant le lot 9 et situé au RDC de l'immeuble sis 5, avenue du Berceau à Monaco.

En la cause de :

Madame g. VI. épouse CA., née le 14 septembre 1944 à Monaco, de nationalité française, demeurant X - 90000 MONACO,

Ayant élu domicile en l'étude de Maître Christine PASQUIER-CIULLA, Avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, et plaidant par ledit Avocat défenseur.

Contre :

S. E. M. le Ministre d'Etat de la Principauté de Monaco, ayant pour Avocat-défenseur Maître Christophe SOSSO et plaidant par la SCP PIWNICA-MOLINIE, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation de France.

LE TRIBUNAL SUPREME

Siégeant et délibérant en assemblée plénière

1°/ Vu la requête présentée par Madame G. V. épouse C., enregistrée au Greffe général de la Principauté de Monaco le 10 juin 2013 sous le numéro TS 2013-10, tendant à l'annulation de la décision de la décision du directeur de la Direction de l'Habitat en date du 26 février 2013 déclarant soumis au régime locatif de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée le bien immobilier lui appartenant portant le lot 9 et situé au RDC de l'immeuble sis 5, avenue du Berceau à Monaco, en même temps que du rejet en date du 8 avril 2013 du recours gracieux formé le 19 mars 2013 et de la mise en demeure adressée le 31 mai 2013 aux fins de régularisation de la situation locative dudit bien immobilier, ainsi qu'à la condamnation de l'État aux dépens ;

Ce faire :

Attendu que, selon la requête, Madame C. a reçu, par dévolution successorale de ses parents, feux Henri et Y. V., un bien immobilier portant le lot 9 et situé au RDC de l'immeuble sis 5, avenue du Berceau à Monaco ; que ces derniers avaient été locataires dudit bien immobilier entre 1943 et 1972, avant d'en faire l'acquisition à titre onéreux des mains de leur bailleur selon acte notarié du 6 octobre 1972 ; qu'au décès de feu Henri V. le 13 mai 2006, feue Y. V. étant prédécédée le 21 juin 2004, ledit bien immobilier, devenu vacant, a ensuite été occupé par Monsieur P. C., fils de la requérante ; que, par lettre en date du 10 février 2012, réitérée le 22 mars 2012, la Direction de l'Habitat a notifié à Mme V. épouse C. que son appartement était soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, de sorte que la requérante a prolongé, par avenant, de deux à six ans la durée du bail consenti à son fils ; que par acte sous seing privé en date du 18 janvier 2013, Mme V. épouse C. a consenti bail à loyer sur le même appartement à Monsieur et Madame D. S. pour une durée de deux années à compter du 1er janvier 2013 ; que par une lettre en date du 26 février 2013, le directeur de la Direction de l'Habitat a indiqué à Mme V. épouse C. qu'étant soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, son bien immobilier ne pouvait être loué qu'à une personne protégée au sens de ladite loi et l'invitait à régulariser la situation dans les meilleurs délais ; que par une lettre en date du 19 mars 2013 adressée à la Direction de l'Habitat, Mme V. épouse C. a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision ; que par une lettre en date du 8 avril 2013, la Direction de l'Habitat a confirmé les termes de sa première lettre et rejeté le recours ; et que par une lettre recommandée en date du 31 mai 2013, la Direction de l'Habitat a mis en demeure Mme V. épouse C. de régulariser la situation locative du bien considéré ;

Attendu que Mme V. épouse C. soutient, pour obtenir l'annulation des décisions attaquées du 26 février, du 8 avril et du 31 mai 2013, que la Direction de l'Habitat a, en premier lieu, entaché sa décision du 26 février 2013, de même que les décisions subséquentes des 8 avril et du 31 mai 2013, d'un défaut de motivation au regard des exigences de l'article 1er de la loi n° 1.312 du 29 juillet 2006 sur la motivation des actes administratifs, en tant qu'elle ne comporte aucun motif ;

Attendu que Mme V. épouse C. prétend, en second lieu, que la Direction de l'Habitat a entaché ses décisions d'une erreur de droit en tant qu'elle a déclaré son bien soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée et refusé de la faire bénéficier de l'exception prévue à l'article 1er, 2e tiret, pour les biens « qui, antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi, ont été libérés par le départ du dernier occupant, lorsque plus de deux ans avant le jour où son occupation a pris fin, celui-ci en était propriétaire par dévolution successorale ou les avait acquis à titre gratuit ou onéreux et n'était pas entré dans les lieux par l'exercice d'un droit de rétention ou de reprise », alors que le bien immobilier considéré a été libéré par son dernier occupant, feu Henri V., le 13 mai 2006, soit antérieurement à l'entrée en vigueur le 4 juin 2011 de la dernière version dudit article issue de la loi n° 1.377 du 18 mai 2011 et que la date à retenir ne saurait être, sans contrevenir au principe général de non-rétroactivité de la loi, celle du 12 juillet 2002 à laquelle l'article 1er a été refondu par la loi n° 1.256 du 12 juillet 2002 ;

Vu la contre requête enregistrée le 9 août 2013 au Greffe Général par laquelle S.E. M. le Ministre d'État conclut au rejet de la requête ainsi qu'à la condamnation de la requérante aux entiers dépens ;

Attendu, d'abord, que la requête est irrecevable comme dirigée contre une décision insusceptible de faire grief, la décision du 26 février 2013 étant confirmative des décisions des 10 février et 22 mars 2012, devenues définitives faute de recours, par lesquelles la Direction de l'Habitat a notifié à la requérante que son appartement était soumis au régime de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée ;

Attendu, subsidiairement au fond, que la décision du 26 février 2013 n'entre pas dans les prévisions de l'article 1er de la loi n° 1.312 du 29 juin 2006 relative à la motivation des actes administratifs, en dépit de ce qu'elle peut être regardée comme présentant un caractère défavorable, et qu'en tout état de cause, elle est suffisamment motivée en droit comme en fait, dès lors qu'elle précise que le logement en cause « est soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée » et qu'il « ne peut être loué qu'à une personne protégée remplissant les conditions prévues aux articles 3 et 4 de la loi susvisée » ;

Attendu enfin que les dispositions de l'article 1er, deuxième tiret, de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée dans sa version issue de la loi du 12 juillet 2001 comme dans celle issue de la loi du 18 mai 2011, s'appliquent aux logements vacants au 12 juillet 2002, la modification législative intervenue le 18 mai 2011 n'ayant pas pour objet de modifier la date de référence à prendre en compte, mais seulement à préciser que l'« ancien occupant » s'entendait du « dernier occupant » ;

Vu la réplique enregistrée le 13 septembre 2013 au Greffe Général par laquelle Mme V. épouse C. tend aux mêmes fins que la requête et par les mêmes moyens, et sollicite en outre la jonction de la présente requête avec celle introduite le 13 septembre 2013 à l'encontre des décisions du directeur de la Direction de l'Habitat en date des 10 février et 22 mars 2012 ou, à défaut, demande au tribunal de surseoir à statuer sur la requête dans l'attente de la décision à intervenir sur ce recours formé à l'encontre des décisions du directeur de la Direction de l'Habitat en date des 10 février et 22 mars 2012, au besoin par renvoi de l'examen de l'affaire prononcé à l'audience en application de l'article 30 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 ;

Attendu, sur la recevabilité, que Mme V. épouse C. soutient que son recours est recevable, faute pour les décisions des 10 février et 22 mars 2012 d'être devenues définitives, et rappelle qu'elle a introduit contre elles une requête le 13 septembre 2013 à fin d'annulation, sollicitant la jonction de ce recours avec la présente requête, une requête en réduction de délais en application de l'article 26 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963 ayant parallèlement été déposée afin que ce recours puisse être jugé en même temps que la présente requête compte tenu de leur connexité. Elle demande qu'en tout état de cause, le tribunal décide de surseoir à statuer sur la présente requête en l'attente de sa décision sur le recours introduit le 13 septembre 2013 compte tenu du caractère confirmatif invoqué à l'égard des décisions attaquées dans la présente instance. Elle fait valoir que les décisions attaquées ne sauraient demeurer valables en cas d'annulation des décisions précédemment prises en 2012 qu'elles sont censées confirmer ;

Attendu que, sur la légalité externe des décisions attaquées, la décision du 26 février 2013 constitue une décision administrative individuelle imposant des sujétions au sens du 4° de l'article 1er de la loi n° 1.312 du 29 juin 2006 sur la motivation des actes administratifs, en tant qu'elle lui indique que son bien est soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée et partant à toutes les sujétions afférentes (restriction du choix du locataire, imposition de la durée du bail, droit au renouvellement du locataire, limitation du montant du loyer, etc.). La requérante ajoute que la décision lui impose de « régulariser » le bail jugé non-conforme aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée qu'elle a conclu avec les époux S., autrement dit de résilier ledit bail, ce qui emporte une perte de revenus locatifs et une responsabilité éventuellement encourue vis-à-vis de ces locataires ;

Attendu encore, sur la légalité interne des décisions attaquées, que la classification du bien en catégorie 3A relève de l'exception prévue par le premier tiret de la loi n° 1.235 applicable aux biens soumis au régime dérogatoire de la loi n° 887, cette dernière, et elle seule, faisant référence aux catégories prévues par l'article 2 de l'Ordonnance Souveraine n° 77 du 2 septembre 1949 (à laquelle appartient la catégorie 3A) et la classification d'un bien dans l'une ou l'autre de ses catégories étant inopérante pour l'application de l'exception relevant du deuxième tiret de l'article 1er de la loi n° 1.235 sur lequel est fondé le recours ;

Vu la duplique enregistrée le 17 octobre 2013 au Greffe Général, par laquelle S.E. M. le Ministre d'État conclut au rejet de la requête par les mêmes moyens que la contre-requête ;

Attendu qu'il ajoute tout d'abord que, dans la seconde instance afférente aux décisions des 10 février 22 mars 2012, il démontrera que celles-ci sont devenues définitives, ce qui conduira à rejeter comme irrecevables les deux requêtes successives de la requérante ;

Attendu que le Ministre d'État maintient que la lettre du 26 février 2013 se borne à rappeler à la requérante que son bien immobilier est soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée sans créer des sujétions qui ne découleraient pas de ce texte législatif ;

Attendu, quant à la légalité interne de la décision du 26 février 2013, que le Ministre d'État fait valoir que la classification d'un bien en catégorie 3A ne relève pas de l'exception prévue au premier tiret de l'article 1er de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée et que cette classification est inopérante s'agissant de l'annulation de la décision attaquée dont la légalité interne dépend exclusivement du point de savoir si ce logement entre ou non dans l'exception prévue par le second tiret de ce même article ;

2°/ Vu la requête présentée par Madame G. V. épouse C., enregistrée au Greffe général de la Principauté de Monaco le 13 septembre 2013 sous le numéro TS 2013-19, tendant à l'annulation des décisions du directeur de la Direction de l'Habitat en date du 10 février 2012 et du 22 mars 2012 déclarant soumis au régime locatif de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée le bien immobilier lui appartenant portant le lot 9 et situé au RDC de l'immeuble sis 5, avenue du Berceau à Monaco, ainsi qu'à la condamnation de l'État aux dépens ;

Ce faire :

Attendu qu'elle a reçu, par dévolution successorale de ses parents, feux H. et Y. V., un bien immobilier portant le lot 9 et situé au RDC de l'immeuble sis 5, avenue du Berceau à Monaco ; que ces derniers avaient été locataires dudit bien immobilier entre 1943 et 1972, avant d'en faire l'acquisition à titre onéreux des mains de leur bailleur selon acte notarié du 6 octobre 1972 ; qu'au décès de feu H. V. le 13 mai 2006, feue Y. V. étant prédécédée le 21 juin 2004, ledit bien immobilier, devenu vacant, a ensuite été occupé par Monsieur P. C., fils de la requérante ; que par lettre en date du 10 février 2012, réitérée le 22 mars 2012, la Direction de l'Habitat a notifié a Mme V. épouse C. que son appartement était soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, de sorte que la requérante a prolongé, par avenant, de deux à six ans la durée du bail consenti à son fils ; que par acte sous seing privé en date du 18 janvier 2013, Mme V. épouse C. a consenti bail à loyer sur le même appartement à Monsieur et Madame Davide S. pour une durée de deux années à compter du 1er janvier 2013 ; que par une lettre en date du 26 février 2013, le directeur de la Direction de l'Habitat a indiqué à Mme V. épouse C. qu'étant soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, son bien immobilier ne pouvait être loué qu'à une personne protégée au sens de ladite loi et l'invitait à régulariser la situation dans les meilleurs délais ; que par une lettre en date du 19 mars 2013 adressée à la Direction de l'Habitat, Mme V. épouse C. a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision ; que par une lettre en date du 8 avril 2013, la Direction de l'Habitat a confirmé les termes de sa première lettre et rejeté le recours ; et que par une lettre recommandée en date du 31 mai 2013, la Direction de l'Habitat a mis en demeure Mme V. épouse C. de régulariser la situation locative du bien considéré ; que par une requête déposée au greffe du Tribunal de céans le 10 juin 2013 et enregistrée sous le numéro TS 2013-10, Mme V. épouse C. a formé à l'encontre des trois décisions précitées un recours aux fin d'annulation ; que par contre-requête notifiée le 31 août 2013, Monsieur le Ministre d'État a conclu à l'irrecevabilité du recours au motif que les décisions attaquées seraient confirmatives des deux décisions susvisées du 10 février et du 22 mars 2012, devenues définitives et jamais contestées ; qu'en l'état de ces éléments, Mme V. épouse C. a formé le 13 septembre 2013 un recours en annulation à l'encontre de ces deux décisions et sollicité parallèlement, par requête distincte aux fins de réduction de délai en application de l'article 26 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963, la réduction de moitié des délais fixés à l'article 17 de ladite Ordonnance Souveraine pour le dépôt des réplique et duplique dans le cadre du recours introduit le 13 septembre 2013 compte tenu de l'avancement du recours n° TS 2013-10 ;

Attendu qu'à l'appui de sa requête, Mme V. épouse C. soutient, pour obtenir l'annulation des décisions attaquées du 10 février et du 22 mars 2012, que son recours est recevable, dès lors qu'aucune d'entre elles ne lui a été notifiée, signifiée ou publiée, que le délai de recours n'a pu, suivant l'article 13 alinéa 1er de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963, courir sur la base de la seule date mentionnée sur ces décisions qui n'est qu'une date d'envoi. Elle ajoute qu'il ne saurait être prétendu qu'elle aurait manifesté sa connaissance desdites décisions au sens de l'alinéa 2 de l'article 13 de ladite ordonnance Souveraine en régularisant le 6 mars 2012 un avenant au bail en cours sur son bien faisant référence à la seule décision du 10 février 2012. De plus, aucune de ces deux décisions ne comportait une mention relative à la faculté d'introduire un recours à leur encontre, encore moins relative aux délais pour ce faire, de sorte qu'elle a pu se méprendre sur leur portée ;

Attendu que, dans ce contexte, la requérante fait valoir que prononcer l'irrecevabilité du présent recours porterait atteinte à son droit fondamental d'accès à un tribunal garanti par l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dans la mesure où ces décisions, dépourvues de toute motivation, se sont présentées comme un simple rappel d'une situation acquise, ne lui demandaient que de modifier la durée du bail de son fils, sans que toutes les conséquences de ce rappel apparaissent alors, et étaient dépourvues de toute mention des voies et délais de recours ;

Attendu, quant au fond, que la requérante prétend que la Direction de l'Habitat a, en premier lieu, entaché ses décisions du 10 février et du 22 mars 2012 d'un défaut de motivation au regard des exigences de l'article 1er de la loi n° 1.312 du 29 juillet 2006 sur la motivation des actes administratifs, en tant qu'elles ne comportent aucun motif ;

Attendu que Mme V. épouse C. soutient, enfin, que la Direction de l'Habitat a entaché ses décisions d'une erreur de droit en tant qu'elle a déclaré son bien soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée et refusé de lui faire bénéficier de l'exception prévue à l'article 1er, 2e tiret, pour les biens « qui, antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi, ont été libérés par le départ du dernier occupant, lorsque plus de deux ans avant le jour où son occupation a pris fin, celui-ci en était propriétaire par dévolution successorale ou les avait acquis à titre gratuit ou onéreux et n'était pas entré dans les lieux par l'exercice d'un droit de rétention ou de reprise », alors que le bien immobilier considéré a été libéré par son dernier occupant, feu H. V., le 13 mai 2006, soit antérieurement à l'entrée en vigueur le 4 juin 2011 de la dernière version dudit article issue de la loi n° 1.377 du 18 mai 2011 et que la date à retenir ne saurait être, sans contrevenir au principe général de non-rétroactivité de la loi, celle du 12 juillet 2002 à laquelle l'article 1er a été refondu par la loi n° 1.256 du 12 juillet 2002.

Vu la contre requête enregistrée le 15 novembre 2013 au Greffe Général par laquelle S.E. M. le Ministre d'État conclut au rejet de la requête ainsi qu'à la condamnation de la requérante aux entiers dépens ;

Attendu, d'abord, que la requête est irrecevable comme tardive, dès lors que la requérante a manifesté sa connaissance des décisions attaquées en régularisant le 6 mars 2012 l'avenant au bail consenti à son fils, en se référant à la lettre du 10 février 2012 ; que c'est donc au plus tard à cette date qu'elle doit être regardée comme ayant acquis connaissance « des décisions en cause, la lettre du 22 mars étant une lettre de rappel ; que le défaut de mention des voies et délais de recours ne fait pas obstacle à la connaissance acquise, non plus que les stipulations de l'article 61 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu, subsidiairement au fond, que le Ministre d'État estime que les décisions attaquées n'entrent pas dans les prévisions de l'article 1er de la loi n° 1.312 du 29 juin 2006 relative à la motivation des actes administratifs, en dépit de ce qu'elles peuvent être regardées comme présentant un caractère défavorable, et qu'en tout état de cause, elles sont suffisamment motivées en droit comme en fait, dès lors qu'elles précisent que le logement en cause » est soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée « et qu'il ne peut en conséquence être loué qu'à une personne protégée remplissant les conditions prévues aux articles 3 et 4 de la loi susvisée ;

Attendu enfin que les dispositions de l'article 1er, deuxième tiret, de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée dans sa version issue de la loi du 12 juillet 2001 comme dans celle issue de la loi du 18 mai 2011, s'appliquent aux logements vacants au 12 juillet 2002, la modification législative intervenue le 18 mai 2011 n'ayant pas pour objet de modifier la date de référence à prendre en compte, mais seulement à préciser que l'»  ancien occupant « s'entendait du » dernier occupant « ;

Vu la réplique enregistrée le 3 décembre 2013 au Greffe Général par laquelle Mme V. épouse C. tend aux mêmes fins que la requête et par les mêmes moyens, et sollicite en outre la jonction de la présente requête avec celle introduite le 13 septembre 2013 à l'encontre des décisions du directeur de la Direction de l'Habitat en date des 10 février et 22 mars 2012 ou, à défaut, demande au tribunal de surseoir à statuer sur la requête dans l'attente de la décision à intervenir sur ce recours formé à l'encontre des décisions du directeur de la Direction de l'Habitat en date des 10 février et 22 mars 2012, au besoin par renvoi de l'examen de l'affaire prononcé à l'audience en application de l'article 30 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 ;

Attendu, sur la recevabilité, que Mme V. épouse C. soutient qu'outre l'hypothèse où le recours d'un administré est fondé sur un simple » fait « lui causant grief, les décisions de l'administration doivent être notifiées ou signifiées, voire publiées, sans quoi le délai de recours contentieux ne court pas Elle ajoute que le caractère sibyllin des termes de ces décisions fait obstacle à la connaissance acquise de celles-ci au sens de l'article 13 de l'Ordonnance Souveraine susvisée du 16 avril 1963. Elle fait valoir, au demeurant, que si l'auteur de ces décisions avait eu l'intention d'appliquer réellement à son bien la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 dans toute sa rigueur, il lui aurait demandé de mettre immédiatement un terme à l'occupation dudit bien par son fils, et non seulement à modifier la durée du bail, de procéder à une déclaration de vacance et de conclure un bail répondant aux conditions prévues par ladite loi avec la personne protégée prioritaire ayant candidaté à l'offre de location de son bien. Elle ajoute que son état dépressif alors, entraînant des troubles de l'attention et de la mémoire, exclut qu'elle puisse être regardée comme ayant acquis la connaissance de ces décisions ;

Attendu que, sur la légalité externe des décisions attaquées, Mme V. épouse C. prétend que les décisions du 10 février et du 22 mars 2012 constituent des décisions administratives individuelles imposant des sujétions au sens du 4° de l'article 1er de la loi n° 1.312 du 29 juin 2006 sur la motivation des actes administratifs, en tant qu'elles lui indiquent que son bien est soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée et partant à toutes les sujétions afférentes (restriction du choix du locataire, imposition de la durée du bail, droit au renouvellement du locataire, limitation du montant du loyer, etc.). La requérante ajoute qu'en lui demandant de » régulariser « le bail jugé non-conforme aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée qu'elle a conclu au bénéfice de son fils, la Direction de l'Habitat lui a imposé de modifier ledit bail pour en porter la durée à six années ;

Attendu encore, sur la légalité interne des décisions attaquées, que la classification du bien en catégorie 3A relève de l'exception prévue par le premier tiret de la loi n° 1.235 applicable aux biens soumis au régime dérogatoire de la loi n° 887, que cette dernière faisant référence aux catégories prévues par l'article 2 de l'Ordonnance Souveraine n° 77 du 2 septembre 1949 (à laquelle appartient la catégorie 3A) et la classification d'un bien dans l'une ou l'autre de ses catégories étant inopérante pour l'application de l'exception relevant du deuxième tiret de l'article 1er de la loi n° 1.235 sur lequel est fondé le recours ;

Vu la duplique enregistrée le 18 décembre 2013 au Greffe Général, par laquelle S.E. M. le Ministre d'État conclut au rejet de la requête par les mêmes moyens que la contre-requête ;

Attendu, que sur la recevabilité, le Ministre d'État ajoute que Mme V. épouse C. n'a pu être trompée sur la portée des décisions attaquées par le fait que celles-ci aient » rappelé « et non » décidé « que le logement en cause était soumis au régime locatif de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée dès lors que la régularisation demandée était la mise en œuvre des prescriptions de cette loi, que l'article 35-1 de ladite loi prévoit que le propriétaire peut le faire occuper par une personne qui lui est familialement proche sans offre de mise en location préalable, et que les restrictions apportées à l'exercice du droit de recours par l'article 13 de l'Ordonnance souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963 qui fixe à deux mois à compter de la connaissance acquise des décisions le délai dans lequel il est possible de les contester devant le Tribunal Suprême sont proportionnées au but poursuivi, celui d'assurer la sécurité juridique et d'éviter que des décisions puissent être indéfiniment contestées ;

Attendu, subsidiairement au fond, que le rappel par les décisions attaquées que le logement se trouve soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée n'emporte, par lui-même, aucune » sujétion « au sens de la loi sur la motivation des actes administratifs ;

Attendu enfin que le fait, à le supposer établi, que le classement du logement en catégorie 3A relèverait du premier tiret de l'article premier de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 justifierait une annulation des décisions attaquées est inopérant, alors que la légalité de ces dernières dépend exclusivement du point de savoir si ce logement entre ou non dans l'exception prévue par le second tiret de cet article premier de ladite loi ;

SUR CE,

Vu les décisions attaquées ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 90B ;

Vu l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963 modifiée, sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême ;

Vu la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment en son article 6-1 ;

Vu la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 relative aux conditions de location de certains locaux à usage d'habitation construits ou achevés avant le 1er septembre 1947 ;

Vu la loi n° 1.256 du 12 juillet 2002 portant modification de certaines dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 relative aux conditions de location de certains locaux à usage d'habitation construits ou achevés avant le 1er septembre 1947 ;

Vu la loi n° 1.377 du 18 mai 2011 modifiant la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 relative aux conditions de location de certains locaux à usage d'habitation construits ou achevés avant le 1er septembre 1947 ;

Vu la loi n° 1.312 du 29 juin 2006 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu l'Ordonnance du 10 juin 2013 par laquelle M. le Président du Tribunal Suprême a désigné Madame Martine LUC-THALER, Membre titulaire, comme rapporteur dans l'affaire TS 2013-10 ;

Vu l'Ordonnance du 19 septembre 2013 par laquelle M. le Président du Tribunal Suprême a désigné Madame Martine LUC-THALER, Membre titulaire, comme rapporteur dans l'affaire TS 2013-19 ;

Vu l'Ordonnance du Président du Tribunal de céans rendue le 24 septembre 2013, réduisant les délais de moitié pour produire les réplique et duplique dans le cadre du recours TS 2013-19, au vu de ce que les recours TS 2013-10 et TS 2013-19 ont pour objet des décisions de même cause, connexes et relatives à l'application de la loi n° 1.235 concernant des biens appartenant à Mme V. épouse C. et que leur évocation au cours d'une même audience procède d'une bonne administration de la justice ;

Vu les Ordonnances du 24 janvier 2014 par lesquelles M. Président du Tribunal Suprême a renvoyé les causes à l'audience de ce Tribunal du 27 mars 2014 ;

Ouï Madame Martine LUC-THALER, Membre titulaire du Tribunal Suprême, en son rapport ;

Ouï Maître Christine PASQUIER-CIULLA, Avocat défenseur près la Cour d'appel de Monaco pour Mme V. épouse C. ;

Ouï Maître Jacques MOLINIE, Avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation de France pour l'État de Monaco ;

Ouï le Ministre Public en ses conclusions.

Après en avoir délibéré

Considérant que les requêtes susvisées présentent à juger des questions connexes ; qu'elles ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une même décision ;

Sur la recevabilité des requêtes :

Considérant, en premier lieu, s'agissant de la recevabilité de la requête dirigée contre les décisions du 10 février et du 22 mars 2012, que, aux termes de l'article 13 alinéa 2 de l'Ordonnance n° 2.984 du 16 avril 1963 modifiée sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême, en toute autre hypothèse que celles de la notification, de la signification ou de la publication de l'acte attaqué, » le recours doit, à peine d'irrecevabilité, être formé dans les deux mois à partir du jour où le fait sur lequel il est fondé, a été connu de l'intéressé. En cas de contestation, la preuve de cette connaissance incombe à la partie défenderesse « ;

Considérant qu'en s'appuyant sur le bail conclu le 6 mars 2012 entre la requérante et son fils, enregistré le 23 mars suivant, par lequel ceux-ci ont convenu de modifier la durée du bail conclu le 5 janvier 2012, portée à six années à compter du 1er janvier 2012, et ce » pour tenir compte de la lettre adressée, le 10 février 2012, par la Direction de l'Habitat à Madame G. V. «, le Ministre d'État apporte la preuve que la requérante a eu connaissance à cette date de la décision attaquée du 10 février 2012, confirmée par celle du 22 mars suivant ;

Considérant que l'article 13 alinéa 2 de l'Ordonnance n° 2.984 a notamment pour objet de concilier les exigences de la sécurité juridique avec celles d'une bonne administration de la justice ; qu'il respecte ainsi les prescriptions de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ; que le défaut de toute obligation de mentionner les voies et délais de recours n'a eu ni pour objet ni pour effet de priver la requérante de son droit de saisir le Tribunal Suprême dans les délais prévus par l'article 13 alinéa 2 précité d'une décision dont elle a manifesté qu'elle avait eu connaissance et en avait mesuré toute la portée ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6-1 susvisé ne peut donc qu'être écarté ; qu'il s'ensuit que la requête n° TS 2013-19, formée postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux, est de ce fait irrecevable ;

Considérant, en second lieu, s'agissant de la recevabilité de la requête dirigée contre les décisions du 26 février 2013, du 8 avril et du 31 mai 2013, que seules sont susceptibles d'être déférées au Tribunal Suprême, en vue de leur annulation, les décisions ou mesures faisant grief au requérant ;

Considérant par ailleurs qu'une décision qui se borne à réaffirmer une décision antérieure devenue définitive, en l'absence de modification des circonstances de fait ou de droit ayant une incidence sur l'appréciation des droits du requérant est purement confirmative et ne peut ouvrir un nouveau délai de recours contentieux ;

Considérant que, par ses deux décisions du 10 février et du 22 mars 2012, M. le directeur de la Direction de l'Habitat a invité Mme V. épouse C. à régulariser la durée du bail conclu avec son fils, le bien immobilier en cause étant soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée lesquelles prescrivent une durée de bail de six années ; que ces décisions sont devenues définitives ;

Considérant que, par ses décisions du 26 février 2013, du 8 avril et du 31 mai 2013, M. le directeur de la Direction de l'Habitat a certes rappelé que le bien immobilier en cause était soumis aux dispositions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, mais a invité Mme V. épouse C. à régulariser la situation non conforme à ladite loi née de la location de l'appartement à compter du 18 janvier 2013 aux époux S., soit à des personnes autres que celles protégées remplissant les conditions prévues aux articles 3 et 4 de la loi susvisée ; que ces décisions n'ont ainsi pas eu le même objet ni la même portée que les précédentes ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le recours n° TS 2013-10 est forme à l'encontre de décisions qui, contrairement à ce qu'affirme M. le Ministre d'État, ne sont pas purement confirmatives des décisions prises le 10 février et 22 mars 2012, et est de ce fait recevable ;

Sur les conclusions à fins d'annulation des décisions des 26 février, 8 avril et 31 mai 2013 :

Considérant que Mme V. épouse C. demande l'annulation de la décision du 26 février 2013 par laquelle la Direction de l'Habitat l'a invitée à régulariser la situation non conforme à la loi susvisée du 28 décembre modifiée née de la location de l'appartement à compter du 18 janvier 2013 aux époux S., personnes autres que celles protégées remplissant les conditions prévues aux articles 3 et 4 de ladite loi, en même temps que la décision du 8 avril 2013 rejetant le recours gracieux formé contre la première décision et la mise en demeure de régulariser la situation adressée le 31 mai 2013 à la requérante ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 1.312 du 29 juin 2006 relative à la motivation des actes administratifs : » Doivent être motivées à peine de nullité les décisions administratives à caractère individuel qui : 1° – restreignent l'exercice des libertés publiques ou constituent une mesure de police ; 2° – infligent une sanction ; 3° – refusent une autorisation ou un agrément ; 4° – subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; 5° – retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; 6° – opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ; 7° – refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; 8° – accordent une dérogation, conformément à des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur « ; que les décisions par lesquelles la Direction de l'Habitat invite les propriétaires d'un bien immobilier dédié à la location à se conformer aux prescriptions de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée relative aux conditions de location de certains locaux à usage d'habitation construits ou achevés avant le 1er septembre 1947, notamment en réservant aux seules personnes dites protégées la conclusion de baux par les propriétaires des biens considérés, impose des sujétions à ces derniers au sens de l'article 1er de la loi susvisée du 29 juin 2006 ; que, dès lors, ces décisions sont au nombre de celles qui doivent être motivées en vertu des dispositions précitées de l'article 1er de la loi du 29 juin 2006 ; que cette motivation doit, aux termes de l'article 2 de la même loi, être » écrite et comporter, dans le corps de la décision, l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent son fondement « ;

Considérant qu'en l'espèce, par la décision du 26 février 2013, le directeur de l'Habitat a invité Mme V. épouse C. à régulariser la situation locative du bien lui appartenant, jugée non conforme à la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, dont il lui était rappelé que ce dernier relève, en tant que le bail a été consenti le 18 janvier 2013 aux époux D. S. alors qu'il ne pouvait l'être qu'à une personne protégée remplissant les conditions prévues aux articles 3 et 4 de ladite loi ; que ces considérations de droit et de fait constituant le fondement légal de la décision, celle-ci doit être regardée comme étant suffisamment motivée au regard des exigences des articles 1er et 2 précités de la loi du 29 juin 2006 ; que, de surcroît, la décision du 8 avril 2013 rejetant le recours gracieux formé contre la décision précitée précise que le local s'est trouvé vacant le 13 mai 2006 alors que l'exception à la loi ne vaut que pour les locaux vacants avant le 12 juillet 2002 ; qu'il suit de là que Mme V. épouse C. n'est pas fondée à demander, sur le fondement du défaut de motivation, l'annulation des décisions du 26 février et 8 avril 2013, ni celle du 31 mai 2013 la mettant en demeure de régulariser la situation ;

Considérant, en second lieu, que la loi n° 1.256 du 12 juillet 2002 susvisée a inséré un deuxième tiret à l'article 1er de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée, exonérant du régime d'exception les biens immobiliers » dont l'ancien occupant, antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi, était propriétaire par dévolution successorale ou pour les avoir acquis, à titre gratuit ou onéreux, plus de deux ans avant le jour où son occupation a pris fin, et n'était pas entré dans les lieux par l'exercice d'un droit de rétention ou de reprise « ; que la date d'entrée en vigueur de cette disposition demeure celle de la loi du 12 juillet 2002, nonobstant l'adoption de la loi n° 1.377 du 18 mai 2011 aux termes de laquelle la rédaction du deuxième tiret de l'article 1er de la loi susvisée du 28 décembre 2000 a été modifiée pour préciser que » l'ancien occupant « s'entendait du » dernier occupant ", sans modifier la date d'entrée en vigueur du régime d'exception ;

Considérant, en l'espèce, que le dernier occupant, H. V., n'est pas entré dans le logement par l'exercice d'un droit de rétention ou de reprise ; qu'il l'a acquis à titre onéreux le 6 octobre 1972 avec son épouse, décédée le 21 juin 2004, de sorte que l'acquisition est bien intervenue plus de deux ans avant le jour où l'occupation a pris fin le 13 mai 2006 du fait de son décès ; que, cependant, ayant ainsi été libéré par le départ du dernier occupant postérieurement au 12 juillet 2002, ledit logement n'entre pas dans les prévisions du deuxième tiret de l'article 1er de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000 modifiée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en estimant que le logement détenu par Mme V. épouse C. relevait des dispositions de la loi susvisée du 28 décembre 2000 et en l'invitant puis en la mettant en demeure en conséquence de régulariser la situation locative du bien lui appartenant, la Direction de l'Habitat n'a pas entaché ses décisions d'une erreur de droit ; que, par suite, Mme V. épouse C. n'est pas fondée à demander pour ce motif leur annulation.

Dispositif

DÉCIDE

Article 1er : Les deux requêtes sont jointes.

Article 2 : Les requêtes de Mme V. épouse C. sont rejetées.

Article 3 : Mme V. épouse C. est dispensée du paiement des dépens.

Composition

Ainsi jugé et délibéré par le Tribunal Suprême de la Principauté de Monaco, composé de M. Didier LINOTTE, Chevalier de l'Ordre de Saint Charles, Président, M. José SAVOYE Chevalier de l'Ordre de Saint Charles, Rapporteur, Mme Martine LUC-THALER, Chevalier de l'Ordre de Saint Charles, Membres titulaires, M. Frédéric ROUVILLOIS et Mme Magali INGALL MONTAGNIER Membres suppléants.

et prononcé le sept avril deux mille quatorze en présence du Ministère Public par Monsieur Didier LINOTTE, assisté de Madame Béatrice BARDY, Greffier en Chef, Chevalier de l'Ordre de Saint-Charles,.

Le Greffier en Chef, le Président,

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : TS/2013-10et2013-19
Date de la décision : 07/04/2014

Analyses

Baux commerciaux  - Contrat - Effets  - Immeuble à usage d'habitation  - Garanties et responsabilité.

CompétenceContentieux administratif - Recours en annulation - Acte administratif individuel.


Parties
Demandeurs : Dame G. V. épouse C.
Défendeurs : État de Monaco

Références :

loi du 29 juin 2006
article 1er de la loi n° 1.312 du 29 juin 2006
article 26 de l'Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963
Vu la Constitution
Ordonnances du 24 janvier 2014
article 1er de la loi du 29 juin 2006
article 13 de l'Ordonnance souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963
loi n° 1.312 du 29 juin 2006
loi du 12 juillet 2002
loi du 12 juillet 2001
article 1er de la loi n° 1.312 du 29 juillet 2006
Ordonnance Souveraine n° 2.984 du 16 avril 1963
article 2 de l'Ordonnance Souveraine n° 77 du 2 septembre 1949
loi n° 1.256 du 12 juillet 2002
Ordonnance du 19 septembre 2013
article premier de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000
Ordonnance du 10 juin 2013
loi n° 1.377 du 18 mai 2011
loi du 18 mai 2011
loi n°1.235 du 28 décembre 2000
article 1er de la loi n° 1.235 du 28 décembre 2000


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.supreme;arret;2014-04-07;ts.2013.10et2013.19 ?

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