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13/06/2002 | MONACO | N°26876

Monaco | Tribunal Suprême, 13 juin 2002, Monsieur A. C. c/ Centre hospitalier Princesse Grace de Monaco


Abstract

Compétence

Contentieux administratif - Recours en appréciation de légalité - Acte administratif individuel. Question préjudicielle

Fonctionnaires et Agents publics

Établissement public - Agent public - Sanction - Révocation - Garanties

Principes généraux du droit

Respect des droits de la défense - Obligation - Notification à l'intéressé de l'avis du Conseil de discipline - Motivation de la sanction

Procédure

Recevabilité d'un recours en annulation joint à un recours en appréciation de légalité (non)

Moti

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Le Tribunal Suprême

Siégeant et délibérant en assemblée plénière et statuant en matière administrative,

Vu la requ...

Abstract

Compétence

Contentieux administratif - Recours en appréciation de légalité - Acte administratif individuel. Question préjudicielle

Fonctionnaires et Agents publics

Établissement public - Agent public - Sanction - Révocation - Garanties

Principes généraux du droit

Respect des droits de la défense - Obligation - Notification à l'intéressé de l'avis du Conseil de discipline - Motivation de la sanction

Procédure

Recevabilité d'un recours en annulation joint à un recours en appréciation de légalité (non)

Motifs

Le Tribunal Suprême

Siégeant et délibérant en assemblée plénière et statuant en matière administrative,

Vu la requête présentée par Monsieur A. C., enregistrée au greffe général de la Principauté de Monaco le 3 décembre 2001 et tendant à ce que le Tribunal Suprême déclare, sur renvoi du Tribunal de première instance, que la décision du 8 septembre 1998, par laquelle le directeur du Centre hospitalier Princesse Grace de Monaco l'a révoqué de ses fonctions d'agent d'entretien spécialisé, est illégale et entachée de nullité ;

Ce faire :

Attendu que, selon l'article 58 du statut du personnel du Centre hospitalier Princesse Grace, la sanction aurait dû être notifiée au plus tard un mois après la décision de suspension du 7 août 1998 ; qu'elle ne l'a été que le 8 septembre 1998, après l'expiration de ce délai ; que contrairement à l'article 59 du statut, M. A. C. n'a pas été convoqué devant le conseil de discipline et n'a donc pu ni avoir connaissance de son dossier, ni consulter un avocat, ni présenter des observations orales ou écrites ; qu'en application de l'article 60 du statut le conseil de discipline devait émettre un avis motivé, qui aura dû être communiqué à M. A. C. pour lui permettre, au cas où la sanction prononcée par le directeur était plus sévère que celle proposée par le conseil de discipline de saisir, en vertu de l'article 64, la commission des recours instituée par l'article 29 ; que la lettre adressée le 7 décembre 1998, au directeur du Centre hospitalier, par laquelle M. A. C. a demandé à être entendu, est restée sans réponse ; que M. A. C., immobilisé au Maroc pendant son congé annuel pour raison de santé, n'était pas en situation d'abandon de poste ;

Vu la contre-requête présentée par le Centre hospitalier Princesse Grace de Monaco, ladite contre-requête enregistrée comme ci-dessus le 5 février 2002 et tendant au rejet de la requête :

1° comme irrecevable, par les motifs que cette requête, qui tend à ce que le Tribunal Suprême déclare que la décision attaquée est entachée de nullité, constitue un recours pour excès de pouvoir, qui aurait dû être présenté dans le délai de deux mois suivant la notification de cette décision ;

2° subsidiairement comme non fondée, par les motifs que M. A. C. a été convoqué devant le conseil de discipline par une lettre recommandée du 25 août 1998 adressée à son domicile ; qu'il s'est abstenu de retirer cette lettre ; que c'est parce qu'il n'a pas comparu devant le conseil de discipline qu'il n'a pu prendre connaissance de son avis ; que cet avis se fonde sur le rapport du directeur du Centre hospitalier, dont le requérant aurait eu connaissance s'il était venu consulter son dossier, ainsi qu'il y avait été invité par la convocation devant le conseil de discipline ; que le délai d'un mois prévu par l'article 58 du statut pour la notification de la sanction définitive, ne court qu'à compter de la notification de la suspension ; que la décision de suspension a été prise le 7 août 1998, mais n'a été notifiée que quelques jours plus tard ; que le délai d'un mois n'était donc pas expiré lorsque la révocation a été notifiée le 8 septembre 1998 ;

Vu, enregistrée comme ci-dessus le 5 mars 2002, la réplique présentée par M. A. C. tendant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens et en outre par les motifs que la requête ne tend pas à ce que le Tribunal Suprême annule la décision de révocation, mais à ce qu'il la déclare illégale et entachée de nullité ; qu'en tout état de cause, la requête serait recevable même si elle était analysée comme contenant des conclusions à fin d'annulation ; qu'au fond le principe du contradictoire a bien été méconnu la convocation devant le conseil de discipline ayant été envoyée à une adresse où M. A. C. n'habitait plus à la suite de son divorce ; que le Centre hospitalier qui hébergeait temporairement M. A. C. dans la résidence où les internes sont logés, ne pouvait l'ignorer ; qu'il ressort des explications du Centre hospitalier qu'il n'y a jamais eu d'avis motivé du conseil de discipline ; que le rapport du directeur ne peut en tenir lieu ; que dans la disposition de l'article 58 du statut, aux termes de laquelle « la notification de la sanction définitive doit intervenir un mois au plus tard après celui de la décision de suspension » le pronom masculin « celui » ne peut se rapporter à la notification de la suspension, mais seulement au prononcé de la suspension ; que le délai d'un mois prévu par ce texte a donc bien couru à compter du 7 août 1998 ;

Vu, enregistrée comme ci-dessus le 5 avril 2002, la duplique présentée par le Centre hospitalier Princesse Grace tendant aux mêmes fins que la contre-requête, par les mêmes moyens et en outre par les motifs qu'en demandant au Tribunal Suprême de déclarer que la décision attaquée « est entachée de nullité », M. A. C. a bien présenté des conclusions qui relèvent d'un recours pour excès de pouvoir et non d'un recours en appréciation de validité ; que la convocation à comparaître devant le conseil de discipline a été envoyée à l'adresse de M. A. C. telle qu'elle figurait dans son dossier à la date où la lettre a été expédiée ; que c'est seulement postérieurement à cette date que M. A. C. a demandé au Centre hospitalier, par lettre du 8 décembre 1998, de lui envoyer son courrier à une autre adresse ; que le 5e alinéa de l'article 60 du statut du personnel prévoit que l'avis du conseil de discipline est transmis uniquement au directeur de l'établissement ; que seule la décision prise à la suite de l'avis doit être notifiée à l'agent intéressé ; que, dans l'article 58 du statut, le pronom « celui » ne peut se rapporter au terme « prononcé » qui ne figure pas dans le texte, mais seulement au terme « notification », même si par suite d'une erreur matérielle le masculin « celui » a été utilisé au lieu du féminin « celle » ;

Vu la décision attaquée ;

Vu le jugement en date du 15 juin 2000 par lequel le Tribunal de première instance a renvoyé M. C. à saisir le Tribunal Suprême d'un recours en appréciation de validité de la décision de révocation prise à son encontre par le directeur du Centre hospitalier Princesse Grace le 8 septembre 1998 ;

Vu l'arrêt en date du 9 janvier 2001 par lequel la cour d'appel a confirmé le jugement du 15 juin 2000 du Tribunal de première instance ;

Vu l'arrêt en date du 3 octobre 2001 par lequel la cour de révision a rejeté le pourvoi du Centre hospitalier Princesse Grace contre l'arrêt de la cour d'appel du 9 janvier 2001 ;

Vu l'ordonnance souveraine n° 7464 du 28 juillet 1982 portant statut du personnel de service du Centre hospitalier Princesse Grace ;

Vu la Constitution, notamment son article 90 B 3° ;

Vu l'ordonnance souveraine n° 2984 du 16 avril 1963 modifiée sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême ;

Vu l'ordonnance en date du 18 avril 2002, par laquelle le Président du Tribunal Suprême a renvoyé la cause à l'audience du 13 juin 2002 ;

Ouï M. Michel Bernard, membre du Tribunal Suprême, en son rapport ;

Ouï Maître Licari, avocat-défenseur pour Monsieur A. C. ;

Ouï Maître Michel, avocat-défenseur pour le Centre hospitalier Princesse Grace de Monaco ;

Ouï Monsieur le Procureur Général, en ses conclusions ;

Après en avoir délibéré ;

Considérant qu'avant dire droit sur la demande de dommages-intérêts formée par M. A. C. contre le Centre hospitalier Princesse Grace, à la suite de la décision du 8 septembre 1998 le révoquant de ses fonctions d'agent d'entretien spécialisé, le Tribunal de première instance, par jugement du 15 juin 2000 devenu définitif, a renvoyé M. A. C. à saisir le Tribunal Suprême d'un recours en appréciation de validité de cette décision ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant que le requérant n'est pas recevable à joindre à son recours en appréciation de validité des conclusions tendant à ce que la décision susmentionnée du directeur du Centre hospitalier Princesse Grace soit déclarée nulle ; que ces conclusions n'auraient pu être présentées que par la voie d'un recours pour excès de pouvoir ; qu'il y a lieu seulement pour le Tribunal Suprême de se prononcer sur la question préjudicielle de légalité de cette décision, qui lui a été renvoyée par le Tribunal de première instance ;

Sur la légalité de la décision du directeur du Centre hospitalier Princesse Grace révoquant M. A. C. de ses fonctions.

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que les principes généraux du droit et, notamment, le respect des droits de la défense obligent l'autorité investie du pouvoir disciplinaire à faire connaître à l'intéressé les motifs de la sanction qu'elle est amenée à prendre contre lui ; que M. A. C. n'a pas reçu notification de l'avis motivé du conseil de discipline qui s'est prononcé sur son cas ; que la circonstance que l'intéressé n'ait pas comparu devant le conseil de discipline ne dispensait pas le Centre hospitalier Princesse Grace de procéder à cette notification ; que, dès lors, la décision du directeur de l'établissement prononçant la révocation de M. A. C. est intervenue sur une procédure irrégulière et est, par suite, illégale ;

Dispositif

DÉCIDE :

Article 1er

- Il est déclaré que la décision du directeur du Centre hospitalier Princesse Grace du 8 septembre 1998 est entachée d'illégalité.

Article 2

- Les conclusions de la requête de M. A. C. tendant à ce que la décision susmentionnée soit déclarée nulle sont rejetées.

Article 3

- Les dépens sont mis à la charge du Centre hospitalier Princesse Grace.

Article 4

- Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d'État et au Centre hospitalier Princesse Grace.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26876
Date de la décision : 13/06/2002

Analyses

Fonction publique ; Établissement de santé ; Pouvoir disciplinaire


Parties
Demandeurs : Monsieur A. C.
Défendeurs : Centre hospitalier Princesse Grace de Monaco

Références :

ordonnance souveraine n° 2984 du 16 avril 1963
Vu la Constitution
ordonnance souveraine n° 7464 du 28 juillet 1982


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.supreme;arret;2002-06-13;26876 ?

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