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10/11/1994 | MONACO | N°26223

Monaco | Tribunal Suprême, 10 novembre 1994, Union des Syndicats de Monaco c/ État de Monaco


Abstract

Procédure

Qualité pour agir - Personne morale de droit privé - Action en justice - Intentée par l'organe exécutif dûment autorisé par l'organe délibérant - Condition de forme

Motifs

Le Tribunal Suprême

Siégeant et délibérant en Assemblée Plénière ;

Vu la requête présentée le 14 mars 1994, après rejet d'un recours gracieux, par l'Union des Syndicats de Monaco agissant par son Secrétaire Général, Madame A. B., et tendant à l'annulation de l'Ordonnance Souveraine n° 11-145 du 5 janvier 1994 portant application de la l

oi n° 822 du 23 juin 1967 sur le repos hebdomadaire,

Ce faire, attendu que :

L'Ordonnance attaquée a été prise...

Abstract

Procédure

Qualité pour agir - Personne morale de droit privé - Action en justice - Intentée par l'organe exécutif dûment autorisé par l'organe délibérant - Condition de forme

Motifs

Le Tribunal Suprême

Siégeant et délibérant en Assemblée Plénière ;

Vu la requête présentée le 14 mars 1994, après rejet d'un recours gracieux, par l'Union des Syndicats de Monaco agissant par son Secrétaire Général, Madame A. B., et tendant à l'annulation de l'Ordonnance Souveraine n° 11-145 du 5 janvier 1994 portant application de la loi n° 822 du 23 juin 1967 sur le repos hebdomadaire,

Ce faire, attendu que :

L'Ordonnance attaquée a été prise en violation des règles de forme et de procédure puisque la loi du 23 juin 1967 impose la consultation préalable du Conseil Économique et que celui-ci n'a été que saisi d'un texte comportant vingt-quatre catégories de dérogations alors que le texte définitif en comporte vingt-cinq ;

L'Ordonnance est en second lieu entachée de violation de la loi puisque le nombre et l'importance des entreprises qui font l'objet de dérogations à la règle du repos hebdomadaire aboutit à en dénaturer l'esprit et en vide le contenu ;

L'Ordonnance est, en outre, entachée de détournement de pouvoir puisqu'elle vise à satisfaire l'intérêt privé de certains. Enfin, elle porte atteinte aux libertés et droits fondamentaux consacrés par la Constitution tels le caractère de religion d'État de la religion catholique, le principe d'égalité et le droit au respect de la vie privée et familiale ;

Vu la contre-requête déposée le 16 mai 1994 par laquelle le Ministre d'État conclut au rejet de la requête pour les motifs que :

* ladite requête est irrecevable car Mme B. n'a pas été régulièrement habilitée par le Bureau Fédéral de l'Union ;

* à titre subsidiaire, à propos de non-respect des formes et de la procédure, il suffisait que le Gouvernement saisisse le Conseil Économique des questions faisant l'objet du nouveau texte sans que l'intégralité du texte définitif lui fût soumise ;

* le moyen tiré de la violation de la loi n'est pas fondé puisque l'extension des catégories d'entreprises pouvant avoir recours à la dérogation est justifiée par les transformations économiques de la Principauté depuis 1968 et les besoins du tourisme ; le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi car la critique s'apparente plutôt à une revendication sociale ; l'atteinte aux droits et libertés reconnus par la Constitution n'est pas établie car l'Ordonnance ne porte pas atteinte à la liberté des cultes, elle ne porte pas atteinte au principe d'égalité, puisque les personnes appartenant aux catégories déterminées par l'Ordonnance se trouvent dans une situation justifiant un traitement dérogatoire et qu'il ne peut être prouvé qu'elle porte atteinte à la vie privée et familiale.

Vu la réplique déposée par l'Union requérante le 20 juin 1994 persistant dans ses conclusions pour le motif que :

* le Secrétaire Général a été habilité à ester en justice par une délibération du Comité Fédéral en date du 10 février 1994 ainsi qu'en témoigne une attestation établie par le Président de l'Union ;

* l'avis du Conseil Économique devait porter impérativement sur la liste de toutes les catégories d'entreprises qui peuvent déroger à la loi ;

* l'extension des dérogations ne correspond à aucun motif d'intérêt public et, au contraire de la réglementation existant en France, ne comporte aucune précision ; la loi a, en fait, été directement violée par l'Ordonnance qui se substitue à elle ; les droits reconnus par la Constitution ne pourront, en fait, plus être pleinement exercés.

Vu la duplique, en date du 25 juillet 1994, par laquelle le Ministre d'État persiste dans ses conclusions pour les motifs que :

* le recours n'est pas recevable puisque la délibération dont se prévaut l'Union n'a pas été versée aux débats ;

* le Conseil Économique a été effectivement consulté sur les « questions traitées » par l'Ordonnance ;

* les dérogations sont justifiées par les besoins du public et la comparaison avec la législation française est inopérante ; par son argumentation, l'Union remet en question la loi elle-même et n'établit pas les atteintes prétendues aux libertés et droits fondamentaux.

Vu l'Ordonnance attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu l'Ordonnance-Loi du 6 octobre 1944 modifiée autorisant la création de syndicats ;

Vu l'Ordonnance n° 2942 du 4 décembre 1944 portant règlement de la formation et du fonctionnement des syndicats ;

Vu la loi du 23 juin 1967 sur le repos hebdomadaire ;

Vu l'Ordonnance Constitutionnelle du 19 décembre 1962, notamment ses articles 89 à 92 ;

Vu l'Ordonnance Souveraine modifiée du 16 avril 1963 sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal Suprême ;

Vu l'Ordonnance, en date du 9 octobre 1994, par laquelle le Président du Tribunal Suprême a ordonné le renvoi de la cause ;

Ouï Monsieur Roland Drago, Vice-Président du Tribunal Suprême, en son rapport ;

Ouï Maître Danielle Rieu, avocat au Barreau de Nice, et Maître Emmanuel Piwnica, avocat au Conseil d'État et à la Cour de Cassation ;

Ouï Monsieur le Procureur Général en ses conclusions ;

Considérant que toute action en justice présentée par une personne morale de droit privé doit être intentée, sauf dispositions contraires de la loi ou des statuts, par l'organe exécutif dûment autorisé par l'organe délibérant à ester en justice dans le litige en cause ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 de l'Ordonnance-Loi n° 399 du 6 octobre 1944 susvisée, chaque fédération de syndicats est dirigée et administrée par un bureau fédéral élu pour un an, à la majorité des voix, par les représentants des syndicats adhérents en assemblée générale « ;

Les bureaux fédéraux se composent : - d'un Secrétaire Général, - d'un Trésorier Général, qui devront être de nationalité monégasque ; - d'un nombre variable de conseillers qui pourront être de nationalité autre que la nationalité monégasque à la condition que la majorité des conseillers soit de nationalité monégasque ou française.

Les membres des bureaux fédéraux devront remplir les conditions exigées au deuxième alinéa de l'article 4 de la présente Ordonnance-Loi... ; qu'aux termes de l'article 13 de la même ordonnance, » les fédérations de syndicats jouissent des droits conférés aux syndicats professionnels par le chapitre II de la présente Ordonnance-Loi « ; qu'aux termes de l'article 8 figurant au chapitre II de la même ordonnance, » les syndicats jouissent de la personnalité civile. Ils ont le droit d'ester en justice... « ; qu'il résulte de ces dispositions que la décision d'ester en justice au nom d'une fédération de syndicats doit être prise par le bureau fédéral de celle-ci ;

Considérant qu'aux termes de l'article 17 alinéa 1er de l'Ordonnance n° 2942 du 4 décembre 1944 portant règlement de la formation et du fonctionnement des syndicats, » le Secrétaire Général... exécute les décisions du bureau sur mandat formel ; il représente le syndicat dans toutes les manifestations de la vie syndicale tant en justice que dans les relations contractuelles « ... ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la décision d'ester en justice au nom d'une fédération de syndicats doit être prise par le bureau fédéral de celle-ci ;

Considérant qu'aux termes de l'article XX des statuts de l'Union des Syndicats de Monaco, approuvés par l'arrêté ministériel n° 85-324 du 31 mai 1985 susvisé, » Dans l'intervalle des Congrès et des Comités généraux, l'Union des Syndicats de Monaco est administrée et dirigée par un Comité fédéral obligatoirement composé d'un Secrétaire Général et d'un Trésorier général conformément aux dispositions de l'article 12 de l'Ordonnance-Loi n° 399 du 9 octobre 1994 modifiée par la loi n° 541 du 15 mai 1951 et d'un nombre variable de membres qui sera fixé par le Comité Général et qui devront répondre aux conditions d'éligibilité prévues à l'article 4 de l'Ordonnance-Loi n° 399 du 9 octobre 1944 « ; que le Comité fédéral de l'Union des Syndicats de Monaco constitue le bureau fédéral prévu par l'article 12 de l'Ordonnance-Loi du 9 octobre 1944 susvisée ; qu'il lui appartient de délibérer sur les actions en justice intentées au nom de l'Union des Syndicats de Monaco ;

Considérant que, si l'Union des Syndicats de Monaco a intérêt à poursuivre l'annulation de l'Ordonnance Souveraine n° 11-145 du 5 janvier 1994, Mme B., Secrétaire Général de l'Union des Syndicats de Monaco, a produit, pour justifier sa qualité pour agir au nom de l'Union, non pas une délibération du Comité fédéral, mais seulement une attestation du Président de l'Union des syndicats de Monaco, membre du Comité fédéral, certifiant que » Madame A. B., Secrétaire Général a été habilitée le 10 février 1994 par le Comité fédéral à ester en justice aux fins de demander l'annulation de l'Ordonnance Souveraine n° 11-145 du 5 janvier 1994 " ; qu'une attestation n'équivaut pas à la délibération nécessaire pour habiliter Mme B. à ester en justice ; qu'en raison de l'insuffisance de la justification fournie, il y a lieu d'ordonner au Secrétaire Général de l'Union des Syndicats de Monaco de produire la délibération du Comité fédéral l'habilitant à attaquer l'Ordonnance Souveraine n° 11-145 du 5 janvier 1994 telle qu'elle figure dans le registre des délibérations du Comité fédéral ainsi que tous les éléments de preuve établissant son adoption ;

Dispositif

DÉCIDE :

Article 1er

Avant dire droit, il est ordonné à l'Union des Syndicats de Monaco de produire dans un délai de quinze jours à compter de la lecture de la présente décision le registre des délibérations de son comité fédéral, contenant la délibération du 10 février 1994 ainsi que tous les éléments de preuve établissant son adoption.

Article 2

Les dépens sont réservés.

Article 3

Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d'État.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26223
Date de la décision : 10/11/1994

Analyses

Procédures - Général


Parties
Demandeurs : Union des Syndicats de Monaco
Défendeurs : État de Monaco

Références :

article 12 de l'Ordonnance-Loi n° 399 du 6 octobre 1944
article 12 de l'Ordonnance-Loi du 9 octobre 1944
article 4 de l'Ordonnance-Loi n° 399 du 9 octobre 1944
loi n° 541 du 15 mai 1951
Ordonnance n° 2942 du 4 décembre 1944
arrêté ministériel n° 85-324 du 31 mai 1985
Ordonnance Souveraine n° 11-145 du 5 janvier 1994
loi du 23 juin 1967
Vu l'Ordonnance Constitutionnelle du 19 décembre 1962
article 12 de l'Ordonnance-Loi n° 399 du 9 octobre 1994
loi n° 822 du 23 juin 1967
Ordonnance-Loi du 6 octobre 1944


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.supreme;arret;1994-11-10;26223 ?

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