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30/06/1976 | MONACO | N°27508

Monaco | Tribunal Suprême, 30 juin 1976, sieur G. c/ Ministre d'État


Abstract

Actes administratifs

Actes législatifs

Dispositions d'application prévues par des actes législatifs - Absence - Possibilité pour le Gouvernement de prendre, sous le contrôle du juge, les dispositions propres à assurer le bon fonctionnement du service public

Actes de gouvernement

Types - Actes liés aux relations internationales - Contrôle juridictionnel (non)

Droits et libertés constitutionnels

Égalité devant la loi - Champ d'application - Personnes se trouvant dans des situations identiques - Priorité des Monégasques pour l

'accession aux emplois publics et privés - Conditions - Double condition que l'emploi en cause soit va...

Abstract

Actes administratifs

Actes législatifs

Dispositions d'application prévues par des actes législatifs - Absence - Possibilité pour le Gouvernement de prendre, sous le contrôle du juge, les dispositions propres à assurer le bon fonctionnement du service public

Actes de gouvernement

Types - Actes liés aux relations internationales - Contrôle juridictionnel (non)

Droits et libertés constitutionnels

Égalité devant la loi - Champ d'application - Personnes se trouvant dans des situations identiques - Priorité des Monégasques pour l'accession aux emplois publics et privés - Conditions - Double condition que l'emploi en cause soit vacant et que le candidat possède les titres requis pour accéder à cet emploi

Motifs

Le Tribunal Suprême

Siègeant et délibérant en section administrative,

Vu la requête présentée par le sieur G., Professeur de Philosophie et de Lettres Modernes au C.E.S.T. de Monaco-Ville, le 24 novembre 1975 tendant à l'annulation avec conséquences de droit de la décision de S. Exc. Le Ministre d'État en date du 23 septembre 1975, refusant au requérant l'ouverture de vacance de la deuxième chaire de philosophie au Lycée Albert 1er et refusant sa titularisation dans les fonctions de professeur de philosophie dans les établissements d'enseignement public de Monaco,

Ce faire, attendu que :

* la décision fondée sur le motif que le requérant n'aurait pas qualité pour enseigner dans les classes terminales n'étant pas titulaire l'agrégation ou du certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré (C.A.P.E.S.) est prise en violation de l'article 25 de la Constitution de la Principauté, des articles 27 et 31 de la loi du 14 août 1967 sur l'enseignement et de l'article 4 de l'Ordonnance du 7 mai 1935 ;

* l'article 25 de la Constitution confère la priorité aux monégasques pour l'accession aux emplois publics ;

* l'ordonnance prévue à l'article 31 de la loi du 14 août 1967 n'a jamais été prise de sorte que le Ministre d'État ne peut décider que l'enseignement de la philosophie au Lycée de Monaco doit être réservé exclusivement à un professeur pourvu de l'agrégation ou du C.A.P.E.S. ;

* l'article 4 de l'Ordonnance du 7 mai 1935 rendant exécutoire la Convention franco-monégasque relative aux emplois publics permet de demander le rappel par le Gouvernement français d'un fonctionnaire détaché si un sujet monégasque a les aptitudes nécessaires pour occuper le poste ;

* la décision attaquée est prise en violation de l'article 17 de la Constitution et des critères français dont se prévaut le Ministre d'État ;

* Que dans des circonstances identiques celui-ci a procédé à la titularisation d'enseignants ayant une qualification analogue à celle du requérant ;

* Vu la contre-requête en date du 23 janvier 1976 par laquelle le Ministre d'État conclut au rejet de la requête et à la condamnation de G. aux entiers dépens par les motifs que :

* le refus de déclarer vacante la seconde chaire de philosophie est justifié par le fait qu'elle est pourvue d'un titulaire et que l'article 4 de la convention franco-monégasque du 28 juillet 1930 rendue exécutoire par l'Ordonnance du 7 mai 1935 ne permet que le remplacement d'un fonctionnaire français détaché et non son éviction ;

* la priorité assurée aux monégasques pour l'accession aux emplois publics par l'article 25 de la Constitution est subordonnée à la double condition qu'il y ait un emploi à pourvoir et que l'impétrant remplisse les conditions légales et réglementaires requises pour le dit emploi ;

* en l'espèce l'emploi n'est pas vacant, et, d'autre part, le sieur G. ne possède pas l'agrégation ou le C.A.P.E.S., titres exigés par la délibération du Gouvernement Princier, en date du 20 décembre 1972 ;

* le requérant n'a jamais demandé sa titularisation dans ses fonctions de professeur de philosophie dans les enseignements publics de Monaco ;

* Vu la réplique du requérant en date du 23 février 1976 persistant dans ses conclusions par les motifs que :

* la réduction du service de l'intéressé au C.E.S.T. de Monaco-Ville constitue une rupture abusive de son contrat de travail, le transfert de la classe de terminale B au Lycée impliquant que, le professeur français détaché assurait déjà un temps complet d'enseignement, il y a bien violation de l'article 25 de la Constitution ;

* le Gouvernement Princier pouvait, sur la base de l'accord franco-monégasque du 19 octobre 1919 modifié le 25 septembre 1946, demander que le professeur français fût remis à la disposition du Gouvernement français ;

* l'absence de titres du requérant ne peut être invoquée alors que l'ordonnance prévue à l'article 31 de la loi du 14 août 1967 n'est jamais intervenue ;

* l'exigence du C.A.P.E.S. ou de l'agrégation, titres français, dépend du nombre de places mises à ces concours par le Gouvernement français, alors surtout que les candidats monégasques ne se trouvent pas, au regard de ces concours, dans la situation de leurs collègues français ;

* les règles posées par la délibération du Conseil de Gouvernement du 20 décembre 1972 permettent de considérer que le requérant répond aux conditions requises pour été titularisé ;

* il a effectivement demandé à être titularisé dans les établissements d'enseignement public de Monaco, un membre de phrase de sa requête ayant, disparu par suite d'une erreur de frappe dans la copie dactylographiée ;

* l'administration monégasque recrute des titulaires sur titres et références et le requérant possède ces titres et références, notamment il a fait l'objet d'un excellent rapport d'inspection ;

* Vu la duplique en date du 24 mars 1976 par laquelle le Ministre d'État persiste en ses conclusions par le motif que :

* le droit de priorité reconnu aux monégasques par l'article 25 de la Constitution ne peut être invoqué que lorsque le poste est vacant et la demande éventuelle de remplacement qui pourrait être formulée par le Gouvernement Princier échappe à tout contrôle juridictionnel ;

* la classe terminale B n'a pas été transférée au Lycée Albert 1er et il s'agit seulement d'un regroupement de classes motivé par le faible effectif scolaire de chacune des deux classes terminales du C.E.S.T. de Monaco-ville ;

* le sieur G. n'est pas dépossédé de son emploi alors qu'il a été recruté en 1971 comme professeur de philosophie à temps partiel ;

* l'intéressé ne peut réclamer le bénéfice de la dérogation prévue à titre transitoire par la délibération du Conseil de Gouvernement du 20 décembre 1972 alors que le prétendu rapport d'inspection dont il se prévaut n'a pas été dressé par un inspecteur d'Académie mais par une religieuse chargée de visiter à titre officieux les établissements placés sous la direction de sa communauté ;

* la violation du principe d'égalité institué par l'article 17 de la Constitution n'a d'effet qu'à l'égard de personnes se trouvant dans des conditions identiques alors que le cas de la dame F. invoqué par le requérant est différent puisque celle-ci a fait l'objet d'un rapport favorable d'un inspecteur désigné par le directeur de l'Éducation Nationale, d'une proposition de son Chef d'établissement et d'un avis favorable du Directeur de l'Éducation Nationale ;

Vu la décision attaquée ;

* Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

* Vu l'Ordonnance constitutionnelle du 19 décembre 1962, notamment ses articles 17, 25, 89 à 92 ;

* Vu l'Ordonnance Souveraine du 7 mai 1935 rendant exécutoire la Convention franco-monégasque du 28 juillet 1930 ;

* Vu l'Ordonnance Souveraine du 11 octobre 1949 sur le statut des fonctionnaires ;

* Vu la loi du 14 août 1967 sur l'enseignement et notamment ses articles 27 et 31 ;

* Vu la délibération du Conseil de Gouvernement en date du 20 décembre 1972 ;

* Vu l'Ordonnance Souveraine modifiée du 16 avril 1963 sur l'Organisation et le Fonctionnement du Tribunal Suprême ;

* Vu l'Ordonnance de M. le Président du Tribunal Suprême en date du 27 mars 1976 par laquelle le Président a ordonné le renvoi de la cause en section administrative ;

Ouï M. Roland Drago, Membre du Tribunal Suprême en son rapport ;

Ouï Maîtres Hélène Marquilly, avocat défenseur près la Cour d'Appel et G. H. George, avocat au Conseil d'État français et à la Cour de cassation, en leurs observations.

Ouï Monsieur le Procureur Général en ses conclusions ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision refusant la nomination du sieur G. au lycée Albert 1er :

Considérant que pour demander cette annulation, le requérant invoque l'article 25, alinéa 2 de la Constitution qui dispose que : « la priorité est assurée aux monégasques pour l'accession aux emplois publics et privés dans les conditions prévues par la loi et les conventions internationales » ;

Considérant que la priorité ainsi reconnue aux monégasques s'exerce à la double condition que l'emploi en cause soit vacant et que le candidat possède les titres requis pour accéder à cet emploi ;

Considérant d'une part qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté que la deuxième chaire de philosophie au Lycée Albert-1er de Monaco pour laquelle le sieur G. demande une déclaration de vacance d'emploi est régulièrement occupée et que le moyen manque en fait ;

Considérant que, si le sieur G. soutient que le Gouvernement Princier devait intervenir auprès du Gouvernement français en vue de rendre ce poste vacant, une telle prétention concerne les relations de la Principauté avec une puissance étrangère ; que ces relations échappent, en raison de leur nature, à tout contrôle juridictionnel ;

Considérant d'autre part, qu'en l'absence de l'Ordonnance Souveraine prévue par l'article 31 de la loi du 14 août 1967 pour l'application de l'article 27 de ladite loi, il appartenait au Conseil de Gouvernement, par sa délibération en date du 20 décembre 1972, de prendre, sous le contrôle du juge, les dispositions propres à assurer le bon fonctionnement du service public de l'enseignement ; que ces prescriptions pouvaient comporter légalement l'obligation, pour enseigner dans les classes du second degré, d'être titulaire de l'agrégation ou du C.A.P.E.S. délivrés en France, les concours d'accession à ces titres étant ouverts à titre étranger aux candidats monégasques qui sont, comme tous les candidats étrangers, admis en surnombre ; que c'est par suite à bon droit que le Ministre d'État, faisant application de la délibération précitée, s'est prononcé, dans l'exercice de ses pouvoirs normaux d'administration, sur la demande du sieur G. et a rejeté cette demande par le motif qu'il ne possédait pas ces titres ;

Sur les conclusions du sieur G. tendant à être titularisé dans ses fonctions de professeur de philosophie dans les établissements d'enseignement public de Monaco :

Considérant d'une part qu'il ressort de ce qui précède que le sieur G. ne possédait pas les titres requis pour bénéficier d'une nomination comme professeur titulaire dans les établissements d'enseignement public de Monaco ;

Considérant d'autre part, qu'à supposer que le requérant puisse, comme il le prétend, être candidat à un concours d'adjoint d'enseignement de philosophie, il résulte de l'instruction qu'aucun concours n'a été ouvert pour le recrutement d'adjoints d'enseignement pour cette discipline ; que le principe d'égalité des citoyens devant la loi, inscrit dans l'article 17 de la Constitution, n'a d'effet qu'à l'égard de personnes se trouvant dans des conditions identiques ; que dès lors, les concours ouverts pour le recrutement d'adjoints d'enseignement concernant d'autres disciplines, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le refus qui lui a été opposé a porté atteinte à l'article 17 de la Constitution ;

Considérant enfin que si la délibération du 20 décembre 1972 a prévu la titularisation exceptionnelle des enseignants temporaires, compte tenu de leur valeur pédagogique, il résulte de l'instruction que le requérant n'avait ni fait l'objet d'une inspection réglementaire à la date de la décision attaquée, ni bénéficié d'une proposition de titularisation de la part de son chef d'établissement, conditions exigées par ladite délibération ; que cette titularisation ne pourra intervenir que selon la procédure suivie par cette délibération ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le sieur G. n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée serait entachée d'excès de pouvoir.

Dispositif

DÉCIDE :

Article 1er

La requête est rejetée ;

Article 2

Les dépens sont mis à la charge du sieur G. ;

Article 3

Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d'État.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 27508
Date de la décision : 30/06/1976

Analyses

Loi et actes administratifs unilatéraux ; Fonction publique


Parties
Demandeurs : sieur G.
Défendeurs : Ministre d'État

Références :

article 4 de l'Ordonnance du 7 mai 1935
article 31 de la loi du 14 août 1967
article 17 de la Constitution
Vu l'Ordonnance constitutionnelle du 19 décembre 1962
Ordonnance Souveraine du 11 octobre 1949
Ordonnance du 7 mai 1935
articles 27 et 31 de la loi du 14 août 1967
loi du 14 août 1967
article 25 de la Constitution


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.supreme;arret;1976-06-30;27508 ?

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