Abstract
Compétence
Arrêté d'expulsion - Référence à un traité international - Interprétation - Incompétence du Tribunal Suprême
Droits et libertés constitutionnels
Liberté individuelle - Etrangers - Expulsion - Mesure de police à laquelle ne peut faire échec le principe de la liberté individuelle - Pouvoir discrétionnaire du Ministre d'État
Procédure
Audience - Demande de renvoi - Nécessité de justifier d'un empêchement légitime
Motifs
Le Tribunal Suprême,
Vu la requête introductive d'instance en date du 25 juin 1949, tendant à l'annulation pour inconstitutionnalité de l'arrêté d'expulsion signifié au sieur T. le 26 avril 1949 ;
Vu le mémoire en réponse en date du 18 juillet 1949, présenté au nom de Son Excellence M. le Ministre d'État et tendant au rejet de ladite requête ;
Ouï en son rapport M. le Conseiller Georges Bondoux, Membre du Tribunal Suprême ;
Ouï Me Solamito et Me Fourcade en leurs observations ;
Ouï M. le Procureur Général Portanier en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant que la demande de renvoi présentée à la barre au nom du sieur T. n'est appuyée de la justification d'aucun empêchement légitime exigé par l'article 19 de l'Ordonnance du 21 avril 1911 ; que dès lors, il y a lieu de passer outre aux débats ;
Sur le fond :
Considérant que le sieur T. défère au Tribunal Suprême aux fins d'annulation un arrêté de Son Excellence M. le Ministre d'État, à lui signifié le 26 avril 1949, qui ordonne son expulsion de la Principauté ; qu'il prétend que cet arrêté porte atteinte aux droits et libertés consacrés par la Constitution en ce que, d'une part, dans son article premier il prononce son expulsion sans en donner le motif et sans se référer à aucun crime, délit ou quasi-délit à lui imputables ce qui constitue une violation du principe de la liberté individuelle consacré par l'article 6 de la Constitution et en ce que, d'autre part, dans son article 2 il déclare qu'aux termes de l'article 21 de la Convention du 10 avril 1912, conclue entre la France et la Principauté de Monaco, il devra immédiatement quitter le territoire des départements des Alpes-Maritimes, du Var et des Basses-Alpes, sous peine de se voir arrêté et poursuivi par les autorités françaises pour infraction à interdiction de séjour, alors qu'étant de nationalité française, le texte dont s'agit, qui ne concerne que les étrangers, autres que les Français, ne lui est pas applicable ;
Considérant en ce qui concerne le premier grief qu'un arrêté d'expulsion est une mesure de police et de sûreté à laquelle ne peut faire échec le principe de la liberté individuelle ;
Que le Ministre d'État chargé de la sécurité de la Principauté, a pouvoir pour éloigner du territoire monégasque les étrangers dont la présence lui paraît constituer un danger pour l'ordre ou la tranquillité publics, qu'il n'a pas à donner les motifs de sa décision, et que le Tribunal Suprême n'a pas à en apprécier l'opportunité ou le bien-fondé ;
Considérant, en ce qui concerne l'article 2 de l'arrêté d'expulsion, que les dispositions relatives à l'interdiction de séjour dans les départements français relèvent exclusivement des autorités françaises ; que le Tribunal Suprême n'a pas à en connaître, et qu'au surplus, la mention, quelque erronée qu'elle soit, des dispositions de la Convention du 10 avril 1912 ne constitue pas une décision de nature à entacher la validité de l'acte attaqué ;
Dispositif
Par ces motifs :
Rejette la requête du sieur T. ;
Le condamne aux dépens.
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