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28/09/2021 | MONACO | N°20082

Monaco | Tribunal du travail, 28 septembre 2021, Monsieur a. K. c/ la SOCIÉTÉ D'ÉTUDES ET DE RÉALISATIONS INFORMATIQUES en abrégé S.E.R.I.


Motifs

Le Tribunal du travail,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu la requête introductive d'instance en date du 6 juin 2018, reçue le 7 juin 2018 ;

Vu la procédure enregistrée sous le numéro 6-2018/2019 ;

Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 10 juillet 2018 ;

Vu les conclusions de Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur au nom de Monsieur a. K. en date des 6 décembre 2018, 11 juillet 2019, 12 décembre

2019 et 22 octobre 2020 ;

Vu les conclusions de Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur au nom de ...

Motifs

Le Tribunal du travail,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu la requête introductive d'instance en date du 6 juin 2018, reçue le 7 juin 2018 ;

Vu la procédure enregistrée sous le numéro 6-2018/2019 ;

Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 10 juillet 2018 ;

Vu les conclusions de Maître Arnaud ZABALDANO, avocat-défenseur au nom de Monsieur a. K. en date des 6 décembre 2018, 11 juillet 2019, 12 décembre 2019 et 22 octobre 2020 ;

Vu les conclusions de Maître Christophe SOSSO, avocat-défenseur au nom de la S.A.M. SOCIÉTÉ D'ÉTUDES ET DE RÉALISATIONS INFORMATIQUES (S.E.R.I.), en date des 9 mai 2019, 17 octobre 2019, 9 juillet 2020 et 11 janvier 2021 ;

Après avoir entendu Maître Arnaud CHEYNUT, avocat près la Cour d'appel de Monaco, pour Monsieur a. K. et Maître Aurianne DE LACOSTE, avocat au Barreau de Grasse, pour la S.A.M. SOCIÉTÉ D'ÉTUDES ET DE RÉALISATIONS INFORMATIQUES (S.E.R.I.), en leurs plaidoiries ;

Vu les pièces du dossier ;

Monsieur a. K. a été embauché par la S.A.M. C.P.M. à compter du 1er avril 1989, d'abord en contrat à durée déterminée puis en contrat à durée indéterminée, en qualité de Chef de Service Maintenance.

À compter du 1er juillet 1998, les services technique et informatique de la société C.P.M. ont été affectés à une société « fille », la S.A.M. SOCIETE D'ÉTUDES ET DE RÉALISATIONS INFORMATIQUES (ci-après société S.E.R.I.).

Le contrat de travail de Monsieur a. K. s'est poursuivi avec la S.A.M. S.E.R.I. à compter de cette date.

Le 28 décembre 2012, Monsieur a .K. a été victime d'un accident du travail.

Le salarié a été en arrêt de travail jusqu'au 10 mars 2015 puis a repris ses fonctions en mi-temps thérapeutique.

Le 11 mars 2015, le médecin du travail a délivré à Monsieur a. K. un avis d'inaptitude définitive à son poste assorti d'une demande de reclassement.

Le 3 avril 2015, l'employeur a informé le salarié de l'absence de possibilité de reclassement au sein de l'entreprise, ainsi que de la société O.C.P., tant à Monaco qu'en France et qu'il envisageait dès lors son licenciement.

Par décision en date du 23 avril 2015, la Commission instituée par l'article 6 de la loi n° 1.348 du 25 juin 2008 relative au reclassement des salariés déclarés inaptes par le Médecin du Travail s'est opposée au licenciement de Monsieur a. K. estimant qu'un reclassement serait possible dans l'entreprise.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 20 mai 2015, l'employeur a convoqué Monsieur a. K. à un entretien préalable en vue de son licenciement, et ce pour le 29 mai suivant.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 2 juin 2015, Monsieur a. K. a été licencié pour inaptitude.

Par requête reçue au greffe le 7 juin 2018, Monsieur a. K. a saisi le Tribunal du travail en conciliation des demandes suivantes :

* dire et juger que son licenciement ne respecte pas les dispositions de la loi n° 1.348 du 25 juin 2008,

* En conséquence,

* condamner la S.A.M. S.E.R.I. à lui verser les sommes suivantes :

* solde d'indemnité de licenciement sur le fondement de l'article F3 de la Convention collective nationale de la Répartition pharmaceutique du 7 janvier 1992 : 28.377,79 euros,

* dommages et intérêts pour licenciement abusif tous préjudices confondus : 550.000 euros,

* dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la tentative de conciliation,

* ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Aucune conciliation n'ayant pu intervenir, le dossier a fait l'objet d'un renvoi devant le bureau de jugement.

Monsieur a. K. a déposé des conclusions les 6 décembre 2018, 11 juillet et 12 décembre 2019, 22 octobre 2020 dans lesquelles il fait essentiellement valoir que :

Sur le licenciement :

* le licenciement étant intervenu le 2 juin 2015, seules les dispositions de la loi n° 1.348 du 25 juin 2008 relative au reclassement des salariés déclarés inaptes par le Médecin du Travail et l'Ordonnance Souveraine n° 1.742 du 1er août 2008 portant application de ladite loi sont applicables, à l'exclusion de la loi n° 1.451 du 4 juillet 2017 entrée en vigueur le 15 juillet 2018,

* l'employeur doit donc justifier des démarches actives et sérieuses qu'il a menées en vue de formuler des propositions de reclassement crédibles et concrètes,

* la société S.E.R.I. n'a pas respecté cette obligation,

* il est établi qu'au 20 juillet 2015, alors que son licenciement était effectif, l'employeur ne disposait pas du rapport du médecin du travail,

* la commission instituée par l'article 6 de la loi n° 1.348 a émis un avis défavorable à son licenciement et l'employeur n'a procédé à aucune démarche complémentaire pour tenir compte de cet avis,

* devant la Commission, pour justifier des prétendues recherches de reclassement, l'employeur a produit six échanges d'e-mails intervenus avec les Directeurs Régionaux du groupe O.C.P.,

* le groupe O.C.P. est constitué de 44 établissements regroupés autour de 6 Directions Régionales,

* chaque Direction Régionale rassemble ainsi entre 5 et 7 établissements et en moyenne 350 salariés,

* l'employeur ne produit aucun élément permettant d'apprécier concrètement les démarches effectuées auprès des différents établissements du groupe,

* les courriels ne sont accompagnés d'aucune pièce ni d'aucune information concernant tant le poste envisagé eu égard à ses capacités physiques,

* la chronologie même des échanges produits par l'employeur démontre l'absence de sérieux dans les réponses apportées par les Directeurs,

* la société S.E.R.I. fait partie d'un groupe d'envergure nationale qui emploie plus de 3.200 salariés,

* il est inconcevable qu'aucune offre d'emploi sur tout le territoire français n'ait été disponible,

* le véritable motif de son licenciement apparaît à la lecture du compte rendu de l'entretien préalable du 29 mai 2015 établi par le délégué du personnel l'ayant assisté,

* la société S.E.R.I. faisait ainsi l'objet d'une restructuration et en conséquence, son poste n'était plus nécessaire,

* c'est donc pour des raisons totalement étrangères à son inaptitude mais purement économiques que son poste a été supprimé,

* la suite de son licenciement, son poste a été supprimé,

* le tableau de la variation des effectifs produit par l'employeur est dénué de toute force probante dans la mesure où il n'est étayé par aucune pièce,

* les structures monégasques ont perdu 50 % de leurs effectifs en douze ans,

* compte-tenu de ses fonctions d'encadrement, il percevait un salaire mensuel brut de 5.695,97 euros,

* or, il apparaît que Messieurs C. et V. perçoivent respectivement une rémunération mensuelle brute de 2.860 euros et 2.200 euros,

* le poste de Chef de Service Maintenance n'existe plus,

* la suppression de son poste a permis à la société S.E.R.I. de réaliser une économie annuelle de près de 60.000 euros,

* cette démonstration pourrait être confortée par la production des bilans et comptes de résultats de 2012 à 2017 que l'employeur refuse de communiquer,

* le refus de l'employeur est abusif et place le salarié dans l'impossibilité de démontrer plus amplement le caractère fallacieux des motifs qui ont présidé à son licenciement,

* le comportement abusif de l'employeur révèle une indiscutable intention de nuire,

* il a ainsi droit à la réparation de son entier préjudice tant matériel que moral,

* le préjudice matériel est constitué d'une part par la perte de revenu inhérente au chômage et d'autre part, par la perte de revenus auquel il va devoir faire face entre la fin de l'indemnisation chômage et le 16 avril 2028 date à laquelle il pourra faire valoir ses droits à la retraite,

* il a subi en outre un préjudice moral très important,

Sur le solde de l'indemnité de licenciement :

* l'employeur n'a pas appliqué les dispositions de l'article F3 pour les cadres de la Convention collective nationale française de la Répartition pharmaceutique du 7 janvier 1992,

* son inaptitude est la conséquence de l'accident du travail dont il a été victime,

* il lui reste ainsi dû un solde de 28.377,79 euros.

La société S.E.R.I. a déposé des conclusions les 9 mai et 17 octobre 2019, 9 juillet 2020 et 11 janvier 2021 dans lesquelles elle s'oppose aux prétentions émises à son encontre et soutient essentiellement que :

Sur le licenciement :

* depuis l'avis d'inaptitude définitive rendu le 11 mars 2015, elle a scrupuleusement suivi la procédure en :

* procédant à des recherches de reclassement loyales et sérieuses, allant au-delà de ses obligations en élargissant le périmètre des recherches,

* saisissant la commission adéquate de manière sérieuse en se présentant à l'entretien et en lui fournissant toutes les pièces utiles,

* mettant en œuvre la procédure de licenciement permettant à Monsieur a.K.de faire valoir ses observations,

* pour autant, la poursuite de la relation contractuelle s'avérait impossible, aucun poste de reclassement ne pouvant être identifié et proposé au salarié,

* le seul fait que l'avis de la commission se soit révélé être défavorable au licenciement ne permet pas de conférer un caractère abusif au licenciement,

* Monsieur M. a été licencié pour insuffisance professionnelle le 2 juin 2015 de sorte que son positionnement doit être remis en cause,

* les effectifs des sociétés S.E.R.I. et C.P.M. sont très éloignés de ceux que Monsieur a. K. présente péremptoirement,

* les contraintes budgétaires invoquées par le demandeur à l'appui de baisses drastiques de personnel sont inexistantes et le pseudo motif économique sous-jacent totalement artificiel,

* la suppression alléguée de son poste n'est pas réelle et en tout état de cause, une telle suppression ne saurait nécessairement recouvrir une cause économique,

* elle verse spontanément aux débats les éléments suivants qui permettent de le démontrer :

* les livres d'entrée et de sortie du personnel des sociétés S.E.R.I. et C.P.M.,

* les bulletins de salaire de deux techniciens de maintenance, à savoir Messieurs C. et V.

* le compte-rendu de la Commission Technique d'Hygiène, de Sécurité et de Protection de l'Environnement en suite de la visite du 31 mai 2016,

* la demande de production des bilans et comptes de résultats sur une période de cinq années des sociétés S.E.R.I. et C.P.M. n'a pas lieu d'être. Cela reviendrait à renverser la charge de la preuve et ainsi, à pallier la carence du demandeur et non à assurer un débat loyal,

* Monsieur a. K. ne produit aucun élément relatif à une éventuelle recherche d'emploi,

* le différé de prise en charge par Pôle Emploi s'explique par le montant des sommes perçues par le demandeur au titre de la rupture du contrat de travail, de sorte que la perte effective de 114.364,23 euros ne saurait lui être imputable,

* le demandeur fait état d'un préjudice futur et hypothétique tenant à la perte de chance de conserver son emploi et ses revenus jusqu'à sa retraite, lequel ne peut ainsi être indemnisé,

* le motif tiré de l'inaptitude de Monsieur a. K. constitue bien le motif qui a présidé au licenciement. Faute de reclassement possible, elle n'avait d'autre solution que de licencier le demandeur, ce qui ne saurait entraîner un quelconque préjudice moral,

* les certificats médicaux produits se rattachent à la prise en charge d'une douleur physique et qui ne peut lui être imputée,

Sur le solde de l'indemnité de licenciement :

* l'accident du travail dont Monsieur a. K. a été victime le 28 décembre 2012 a été déclaré comme étant consolidé et les avis d'arrêt de travail qui ont suivi ont, à compter du 1er octobre 2014, été déclarés comme étant injustifiés,

* aussi, l'inaptitude constatée le 11 mars 2015 est déconnectée de tout lien avec l'accident du travail, de sorte que Monsieur a. K. est pleinement rempli de ses droits.

SUR CE,

Sur le solde de l'indemnité de licenciement

Monsieur a. K. sollicite l'application des dispositions de l'article F3 de la Convention collective nationale française de la Répartition pharmaceutique du 7 janvier 1992 en ce qu'elles prévoient en son dernier alinéa :

« (...).

Si cette inaptitude est due à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié percevra le double de l'indemnité légale de licenciement ou, si elle est plus favorable et dès lors qu'il remplit les conditions d'ancienneté, l'indemnité conventionnelle de licenciement «.

L'indemnité légale de licenciement est prévue par l'article 2 de la loi n° 845 du 27 juin 1968, lequel prévoit en outre qu'elle est limitée à six mois de salaire.

Les dispositions de la Convention collective étant plus favorables au salarié, il convient de retenir le calcul y figurant.

Il apparaît encore à la lecture des différentes fiches d'aptitude au travail intervenues postérieurement à l'accident du travail dont a été victime Monsieur a. K. le 28 décembre 2012 que l'inaptitude définitive rendue par la Médecine du travail le 11 mars 2015 est en lien directe avec ledit accident.

En effet, le 23 décembre 2013, le Docteur MOSTACCI indique :

» Apte sans effort physique important au niveau de l'épaule gauche pendant 1 mois ; à revoir après contrôle du spécialiste 17/01/2014 «.

La fiche précise en outre la nature de la visite, à savoir » reprise après accident du travail «.

S'en suivront plusieurs visites à la Médecine du Travail, toutes en lien avec les suites de l'accident du travail en date du 28 décembre 2012.

Enfin, la fiche d'inaptitude définitive avec demande de reclassement en date du 11 mars 2015 vise également la reprise après accident du travail.

Il en résulte que Monsieur a. K. doit bénéficier du doublement de l'indemnité Conventionnelle de Licenciement tel que prévu par la Convention Collective visée supra.

La somme de 28.377,79 euros sera retenue en l'absence de contestation de l'employeur sur le mode de calcul du salarié et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 9 juillet 2018, date de la tentative de conciliation.

Sur la validité du licenciement

Le salarié déclaré médicalement inapte à son poste de travail bénéficie aux termes de la loi n° 1.348 du 25 juin 2008 d'une obligation de reclassement ; que le licenciement n'est alors possible qu'en cas d'impossibilité établie de reclassement ou en cas de refus par le salarié du reclassement.

En vertu de l'article 3 de la loi n° 1.348 du 25 juin 2008, » Au vu du rapport établi par le médecin du travail, l'employeur propose au salarié un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé. Pour ce faire, il peut mettre en œuvre des mesures telles que des mutations, des transformations de postes, des formations adaptées à l'emploi proposé et internes à l'entreprise ou des aménagements du temps de travail «.

L'article 3 de la loi n° 1.348 du 25 juin 2008 impose à l'employeur de prouver l'impossibilité où il se trouve de reclasser le salarié en établissant avoir recherché les éventuelles mutations, transformations de postes, formations adaptées ou aménagements du temps de travail, en fonction des conclusions et indications figurant dans le rapport que le Médecin dresse indépendamment de sa déclaration d'inaptitude définitive à l'emploi.

Il résulte de l'exposé des motifs de cette loi que » le texte s'attache à faire du reclassement une option concrète et crédible « et que l'article 3 précité impose à l'employeur » au vu des indications du médecin du travail, de rechercher un nouveau poste approprié aux capacités du salarié «, le poste proposé après ces recherches devant » correspondre, autant faire se peut, aux compétences de l'intéressé «.

Le rapporteur de ce texte au Conseil National a également été amené à préciser que » quant à l'employeur, si le texte ne l'oblige pas à reclasser les salariés déclarés inaptes, il sera néanmoins tenu de rechercher de façon active toutes les possibilités de reclassement au sein de l'entreprise « et que la liste des mesures susceptibles d'être prises par l'employeur à cet égard n'est pas exhaustive.

Si l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur est une obligation de moyen, il reste que pour pouvoir procéder régulièrement au licenciement, il lui appartient au préalable de rapporter la preuve de l'impossibilité où il se trouve de reclasser le salarié, et ce, nécessairement, après avoir étudié les possibilités existantes ou pouvant exister au sein de l'entreprise en fonction des préconisations de la médecine du travail (CA, 9 octobre 2012, même affaire), » en établissant avoir recherché les éventuelles mutations, transformations de postes, formations adaptées ou aménagements du temps de travail, en fonction des conclusions et indications figurant dans le rapport que le médecin dresse indépendamment de sa déclaration définitive d' inaptitude à l'emploi « (Cour de révision, 31 octobre 2013, même affaire).

Seul le Médecin du Travail, a le pouvoir de déclarer l'inaptitude du salarié ; à cette fin, la déclaration d'inaptitude définitive comprend ses indications sur les aptitudes du salarié, lesquelles s'analysent comme un conseil avisé destiné à l'employeur. Il y est joint un rapport dans lequel ce médecin, qui dispose d'une parfaite connaissance de l'environnement dans lequel évolue le salarié par les visites de contrôle qu'il est amené à effectuer dans l'année dans l'entreprise, formule ses conclusions et des indications sur l'aptitude éventuelle du salarié à exercer une des tâches existant dans l'entreprise.

La Médecine du Travail a déclaré, le 11 mars 2015, Monsieur a. K. inapte définitivement à son poste de travail avec demande de reclassement, en précisant :

» APTE avec AMÉNAGEMENT de son poste de TRAVAIL ou MUTATION de poste ou CRÉATION DE POSTE :

Sans effort PHYSIQUE IMPORTANT au niveau de l'épaule gauche, pas de gestes ni de postures sollicitant l'épaule gauche, pas de maintenance lourde (sup ou = 8kg) «.

L'employeur notifiait à Monsieur a. K. son licenciement par courrier en date du 2 juin 2015, en ces termes :

» Monsieur,

À la suite de la convocation que nous vous avons adressée le 20 mai 2015, nous avons eu un entretien préalable le 29 mai 2015 en présence de Viviane G. délégué du personnel qui vous assistait.

Au cours de cet entretien, nous vous avons fait part des motifs nous conduisant à envisager à votre encontre une mesure de licenciement. Nous vous informons par la présente de notre décision de vous licencier pour le motif suivant :

Impossibilité de vous reclasser suite à l'inaptitude physique à votre poste de travail constatée par la médecine du travail.

(...) ».

La Cour d'appel considère, depuis un arrêt rendu le 30 juin 2020 (SAM PARTNER'S SERVICE/BE.), « que la déclaration définitive d'inaptitude ne peut à elle-seule constituer un véritable motif valable de licenciement, l'état de santé ou le handicap n'étant pas une cause de rupture du contrat de travail.

Que la validité du licenciement d'un salarié malade est subordonnée d'une part à la reconnaissance de son inaptitude physique définitive par le médecin du travail, d'autre part à l'impossibilité démontrée par l'employeur de procéder à son reclassement ou au refus du reclassement proposé par le salarié ».

En l'espèce, la lettre de rupture fonde le licenciement de Monsieur a. K. sur l'impossibilité de le reclasser suite à son inaptitude définitive à son poste de travail.

Il convient dans ces circonstances de rechercher si l'employeur a respecté son obligation de reclassement telle que reprise supra.

Le rapport établi par le Médecin du Travail à la suite de la déclaration d'inaptitude est une reprise mot pour mot de la fiche d'aptitude susvisée, de sorte qu'il n'est d'aucun intérêt ; en effet, le rapport établi par le Médecin du Travail à la suite de l'avis d'inaptitude doit permettre d'éclairer l'employeur sur les possibilités de reclassement du salarié.

Il apparaît cependant que l'employeur n'a pas reçu ce rapport ainsi qu'il résulte d'un courrier par lui adressé à Monsieur a. K. le 20 juillet 2015 :

« (...).

En effet, s'il est fait référence dans un courrier de l'OMT au « Rapport du Médecin du Travail » daté du 11 mars 2015 (cf. pièce jointe), ce document ne vous a pas été adressé, secret professionnel oblige (...) «.

L'employeur commet ainsi une erreur, l'article 3 de la loi n° 1.348 prévoyant que les recherches de reclassement sont faites à la lecture dudit rapport.

Ce faisant, il appartenait à l'employeur de s'adresser à la médecine du travail pour obtenir la communication de ce document et éventuellement toutes précisions complémentaires s'il estime que le rapport n'est pas suffisamment précis.

La Commission instituée par l'article 6 de la loi n° 1.348 du 25 juin 2008 relative au reclassement des salariés déclarés inaptes par le Médecin du Travail, a, aux termes de son procès-verbal du 23 avril 2015, indiqué :

» Après avoir pris connaissance du rapport établi le 12 mars 2015 par le Docteur Isabelle MOSTACCI, qui précise que monsieur a. K. est apte avec aménagement de son poste de travail ou mutation de poste ou création de poste, sans effort physique important au niveau de l'épaule gauche, pas de gestes ni de postures sollicitant l'épaule gauche, pas de maintenance lourde supérieure ou égale à 8 kilos.

Après avoir entendu les parties dans leurs explications, la Commission estime qu'eu égard à la grande compétence de Monsieur a. K. qui est capable d'assurer intellectuellement la bonne marche des systèmes tant électroniques qu'informatiques et d'évaluer tous les problèmes qui pourraient survenir au sein de la société SERI, société qui l'emploie depuis le 1er avril 1989 en qualité de chef de maintenance, pourrait lui aménager un poste tenant compte des restrictions émises par le Médecin du Travail.

Monsieur a. K. pourrait ainsi apporter une contribution non négligeable de son savoir-faire à la personne qui serait appelée à le remplacer pour la partie technique qu'il ne peut plus assumer du fait de son accident du travail survenu en 2012.

En conséquence, les membres constatent qu'un reclassement serait possible dans l'entreprise, aussi la Commission s'oppose au licenciement de monsieur a. K. «.

Il résulte des dispositions développées ci-dessus que l'employeur, auquel incombe une obligation de recherche de solutions de reclassement en cas d'inaptitude définitive d'un salarié à son poste de travail, doit justifier des démarches actives et sérieuses qu'il a menées en vue d'effectuer des propositions crédibles et concrètes.

Si l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur est une obligation de moyen, il reste que pour pouvoir procéder régulièrement au licenciement, il lui appartient au préalable de rapporter la preuve de l'impossibilité où il se trouve de reclasser le salarié, et ce, nécessairement, après avoir étudié les possibilités existantes ou pouvant exister au sein de l'entreprise en fonction des préconisations de la médecine du travail.

Les possibilités de reclassement doivent s'apprécier au regard de la taille de l'entreprise et de la nature des emplois occupés.

L'employeur doit justifier des démarches actives en établissant avoir recherché les éventuelles mutations, transformations de postes, formations adaptées ou aménagements du temps de travail, en fonction des conclusions et indications figurant dans le rapport que le Médecin dresse indépendamment de sa déclaration d'inaptitude définitive à l'emploi et démontrer les recherches sérieuses qu'il a menées en vue d'effectuer des propositions crédibles et concrètes.

La société S.E.R.I. se contente de procéder par voie d'affirmations, alors que :

* elle n'a donné aucune précision sur la nature des différents postes existants dans l'entreprise et surtout les contraintes imposées afin de permettre une comparaison utile et réelle avec le travail susceptible d'être fourni par Monsieur a.K.au regard des restrictions dégagées.

* elle n'a ciblé ses recherches que parmi les emplois disponibles dans l'entreprise et les différents établissements du groupe, sans envisager la mise en œuvre de mesures telles que transformations, mutations de postes ou formations.

* enfin, elle a écarté toute possibilité d'aménagement du temps de travail.

L'information à transmettre aux établissements d'un groupe ou d'une société doit faire état de la situation du salarié dont le reclassement est recherché.

Ainsi, outre le poste occupé et les éventuelles précisions figurant dans l'avis d'inaptitude, il faut prévoir de détailler :

* l'identité, l'âge, la situation de famille du salarié ;

* son ancienneté ;

* son niveau, ses compétences ;

* sa rémunération.

En l'espèce, le Tribunal relève que les mèls adressés par l'employeur aux différents établissements ne comportent aucune information sur la situation personnelle de Monsieur a. K. de sorte qu'aucune recherche sérieuse de reclassement par les directions des établissements sollicités ne peut être effective et efficiente.

Bien plus, ce même courriel limite la recherche de reclassement par les postes disponibles, sans envisager la mise en œuvre de mesures telles que transformations, mutations de postes ou formations.

De plus, la société S.E.R.I. ne fournit aucun document sur la nature des emplois existants dans les différentes structures du groupe, ce qui ne permet pas au Tribunal d'avoir une vue objective de la situation générale de l'entreprise.

En s'abstenant d'avoir procédé à une recherche sérieuse et loyale de reclassement et faute d'avoir établi que le reclassement s'avérait impossible, le licenciement de Monsieur a. K. ne repose pas sur une cause valable.

Sur le caractère abusif de la rupture

Constitue un licenciement abusif l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister notamment dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ; qu'il appartient au salarié qui se prévaut du caractère abusif de la rupture d'en rapporter la preuve.

Il appartient à celui qui réclame des dommages et intérêts, de prouver outre le préjudice subi, l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister, dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ou dans la précipitation, la brutalité ou la légèreté blâmable avec lesquelles le congédiement a été donné.

En application de l'article 13 de la loi n° 729 du 16 mars 1963, toute rupture abusive du contrat de travail peut donner lieu à des dommages et intérêts.

Au cas particulier, Monsieur a. K. sollicite d'être indemnisé à hauteur de la somme de 550.000 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Le licenciement qui ne repose pas sur un motif valable n'ouvre droit à la réparation du préjudice matériel en résultant que lorsque l'employeur a commis un abus dans la prise de décision, soit par exemple en invoquant des motifs fallacieux ou encore en prononçant la rupture malgré l'absence de tout fondement légal, ce qui ne s'avère pas être le cas en l'espèce.

L'analyse qui précède a permis de constater que le grief énoncé dans la lettre de licenciement s'est avéré infondé.

Pour autant le motif fallacieux se caractérise par la fausseté du grief invoqué combinée à la volonté de tromperie et de nuisance de celui qui l'invoque.

Pour justifier un licenciement, le motif invoqué doit être valable, c'est-à-dire » présenter les conditions requises pour produire son effet « et par extension être » acceptable, admissible, fondé «.

Un licenciement peut être considéré comme abusif (qu'il ait été reconnu valable ou non) si l'employeur a avancé pour le justifier un faux motif, c'est-à-dire un motif qui n'était pas le motif réel qui l'a conduit à prendre cette décision et qui voulait »  tromper «.

Un faux motif n'est pas en soi considéré comme fallacieux s'il n'est pas démontré l'intention de tromper ou de nuire de l'employeur.

S'agissant d'un motif non valable, il n'est pas, pour autant, automatiquement fallacieux.

Par ailleurs, le faux motif ne peut caractériser de facto l'abus de l'employeur ; à défaut, cela reviendrait à utiliser la notion française de » cause réelle et sérieuse «.

En effet, en droit français, un licenciement sans cause réelle et sérieuse (fondé sur un faux motif) est abusif et entraîne automatiquement l'allocation de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

En droit monégasque, un licenciement fondé ou non sur des motifs valables peut ne pas être considéré comme abusif.

Tenant ces considérations, l'absence de recherche de reclassement par l'employeur ne saurait fonder l'abus de la rupture du contrat de travail, cet élément fondant la validité de ladite rupture.

Reprendre ce même motif pour caractériser un abus de l'employeur dans sa décision de rompre le contrat de travail reviendrait à retenir la notion française de cause réelle et sérieuse, dont l'absence entraîne de facto l'allocation de dommages et intérêts.

En l'espèce, Monsieur a. K. soutient que le véritable motif de son licenciement serait d'ordre économique.

Pour en justifier, il se fonde sur le rapport de l'entretien préalable au licenciement établi par Madame G.

Déléguée du Personnel et les extraits suivants (déclarations de Monsieur M. Directeur) :

» les procédures ont changé avec l'intégration du groupe B. au sein du groupe OCP, en précisant qu'il répète ce qu'il a déjà dit lors de la commission de reclassement, que les décisions ne sont plus automatiquement prises à Monaco comme c'était le cas auparavant. Elles sont prises à Paris. La tâche de Monaco consiste à faire parvenir à Paris plusieurs devis concernant les travaux à prévoir, pour évaluation.

Il n'y a plus le besoin de concevoir ou de créer des outils comme avant «.

» (...) actuellement le personnel [était] très limite, et qu'un effort particulier [était] demandé à l'ensemble de celui-ci. Il aurait besoin de techniciens à 100 % opérationnels et qu'un détachement d'une personne pour travailler en doublon s'avère très difficile, voire impossible ".

Monsieur a. K. considère encore que la diminution du nombre de salariés au sein de l'entité monégasque depuis plusieurs années est un signe de difficultés économiques.

Le Tribunal ne saurait retenir l'argumentation du demandeur.

En effet, les déclarations de Monsieur M.ne permettent en aucun cas de retenir ou de déduire des difficultés économiques rendant le licenciement de Monsieur a.K.et la suppression de son poste indispensable pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise.

Il est seulement fait état d'une centralisation décisionnaire à Paris et de la nécessité d'avoir, au sein de la société S.E.R.I., un technicien pleinement opérationnel.

Ce faisant, il résulte du registre d'entrée et de sortie du personnel de la société S.E.R.I. que Monsieur a. K. a été remplacé, le service maintenance étant toujours composé de deux salariés.

Monsieur V. a ainsi été embauché en qualité de Technicien de Maintenance à compter du 1er septembre 2015, soit postérieurement au licenciement querellé.

Le fait que le salarié remplaçant n'ayant pas l'expérience et la fonction de Chef de Service ne saurait être retenu pour considérer que le poste de Monsieur a. K. a été supprimé.

Dans ces circonstances, Monsieur a. K. qui a la charge de la preuve à ce titre, ne démontre pas que le licenciement serait intervenu pour une autre cause que celle visée dans la lettre de licenciement.

Il ne démontre pas plus la volonté de nuire ou de tromper de l'employeur.

Dès lors, aucune faute de l'employeur ne peut ouvrir droit à l'indemnisation d'un préjudice matériel et financier résultant du licenciement.

Le demandeur soutient que la mise en œuvre du licenciement est également abusive.

Il apparaît que l'employeur a agi avec précipitation et légèreté blâmable dans la mesure où :

* il a procédé au licenciement de Monsieur a. K. sans être en possession du rapport établi par le Médecin du Travail, suite à l'avis d'inaptitude définitive à son poste de travail,

* il a licencié Monsieur a. K. sans tenir compte de l'avis de la Commission instituée par l'article 6 de la loi n° 1.348 du 25 juin 2008. Même s'il s'agit d'un simple avis, la société S.E.R.I. ne justifie aucunement avoir tenté de reclasser le demandeur selon les recommandations de ladite commission,

* il n'a pu apporter aucune réponse concrète et précise à Monsieur a. K. lors de l'entretien préalable, ainsi qu'il résulte du compte-rendu produit aux débats.

Le licenciement de Monsieur a. K. doit dès lors être déclaré abusif, justifiant l'allocation de dommages et intérêts au salarié en réparation de son préjudice moral.

En effet, il est de principe que toute demande de dommages et intérêts formée du chef d'un abus dans les conditions de mise en œuvre de la rupture, et non d'un abus dans la prise de décision, ne peut être admise qu'en ce qui concerne le préjudice moral qui résulte du contexte ayant présidé à sa mise en œuvre, et ce, à l'exclusion du préjudice matériel qui serait résulté d'un licenciement abusif dans son principe.

Les difficultés financières dont il est fait état sont en effet le résultat de la diminution de revenu, provoquée par la perte d'emploi et non la conséquence de la brutalité et de l'abus qui, à les supposer établis, auraient caractérisé le licenciement. De plus, le demandeur n'établit nullement en quoi ces difficultés matérielles auraient été provoquées par les circonstances fautives ayant entouré le licenciement, lesquelles n'ont d'ailleurs pas été retenues par le Tribunal. Elles ne peuvent être de nature à établir l'existence d'une faute dans la mise en œuvre de la rupture (Cour de révision, 26 mars 2014, n° 2013-17).

Monsieur a. K. ne saurait ainsi prétendre qu'à l'indemnisation de son préjudice moral lié à la faute de l'employeur telle que relevée supra .

Ainsi compte-tenu des éléments d'appréciation dont dispose le Tribunal et notamment l'âge de Monsieur a. K. lors de la notification de son licenciement (52 ans) et de son ancienneté de service (26 ans), le préjudice moral subi par celui-ci, consécutivement à la rupture de son contrat de travail et en rapport avec les fautes dont s'est rendu coupable l'employeur, sera équitablement réparé par l'allocation à son profit d'une somme de 85.000 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Sur l'exécution provisoire

Il n'est pas justifié pour le surplus des conditions nécessaires au prononcé de l'exécution provisoire autre que l'exécution provisoire de droit prévue par les dispositions de l'article 60 de la loi n° 446 du 16 mai 1946.

Sur les dépens

La S.A.M. SOCIÉTÉ D'ÉTUDES ET DE RÉALISATIONS INFORMATIQUES qui succombe sera condamnée aux dépens.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et après en avoir délibéré,

Dit que le licenciement de Monsieur a. K. par la S.A.M. SOCIÉTÉ D'ÉTUDES ET DE RÉALISATIONS INFORMATIQUES n'est pas fondé sur un motif valable et revêt un caractère abusif ;

Condamne la S.A.M. SOCIÉTÉ D'ÉTUDES ET DE RÉALISATIONS INFORMATIQUES à payer à Monsieur a. K. les sommes suivantes :

* 28.377,79 euros (vingt-huit mille trois cent soixante-dix-sept euros et soixante-dix-neuf centimes) à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 9 juillet 2018, date de la tentative de conciliation ;

* 85.000 euros (quatre-vingt-cinq mille euros) à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

Déboute Monsieur a. K. du surplus de ses demandes ;

Condamne la S.A.M. SOCIÉTÉ D'ÉTUDES ET DE RÉALISATIONS INFORMATIQUES aux dépens du présent jugement.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 20082
Date de la décision : 28/09/2021

Analyses

Si le montant de l'indemnité légale de licenciement, prévue par l'article 2 de la loi n° 845 du 27 juin 1968, est limité à six mois de salaire, il y a lieu d'appliquer les dispositions plus favorables de la Convention collective nationale française de la répartition pharmaceutique du 7 janvier 1992 prévoyant son doublement en cas d'inaptitude physique due à un accident du travail ou à une maladie professionnelle. Tel est le cas du salarié déclaré inapte physiquement après un accident du travail qui doit ainsi bénéficier du doublement de l'indemnité légale de licenciement.Le licenciement du salarié, déclaré inapte après un accident du travail, ne repose pas sur une cause valable dès lors que l'employeur s'est abstenu de procéder à une recherche sérieuse et loyale de reclassement et n'établit pas que ce reclassement s'avérait impossible. Il ne démontre pas avoir effectué de démarche active, il n'a donné aucune précision sur la nature des différents postes existants dans l'entreprise et les contraintes imposées afin de permettre une comparaison utile et réelle avec le travail susceptible d'être fourni par le salarié, chef de service maintenance, au regard des restrictions médicales. Il n'a ciblé ses recherches que parmi les emplois disponibles dans l'entreprise et les différents établissements du groupe, sans envisager la mise en œuvre de mesures telles que transformations, mutations de postes ou formations, et il a écarté toute possibilité d'aménagement du temps de travail. Ses mails adressés aux différents établissements ne comportent aucune information sur la situation personnelle du salarié de sorte qu'aucune recherche sérieuse de reclassement par les directions des établissements sollicités ne pouvait être effective et efficiente. Enfin, il ne fournit aucun document sur la nature des emplois existants dans les différentes structures du groupe, ce qui ne permet pas au Tribunal d'avoir une vue objective de la situation générale de l'entreprise.Un faux motif de licenciement n'est pas en soi considéré comme fallacieux s'il n'est pas démontré l'intention de tromper ou de nuire de l'employeur. S'agissant d'un motif non valable, il n'est pas, pour autant, automatiquement fallacieux. Par ailleurs, le faux motif ne peut caractériser de facto l'abus de l'employeur. À défaut, cela reviendrait à utiliser la notion française de cause réelle et sérieuse de licenciement. Or en droit monégasque, un licenciement fondé ou non sur des motifs valables peut ne pas être considéré comme abusif. En l'espèce, le salarié prétend avoir fait en réalité l'objet d'un licenciement pour motif économique. Il n'établit cependant pas l'existence de difficultés économiques de l'entreprise. En outre, son poste n'a pas été supprimé, peu important que le technicien de maintenance qui l'a remplacé n'ait pas son expérience et n'occupe pas sa fonction de chef de service. Il n'est donc pas démontré que le licenciement serait intervenu pour une autre cause que celle visée dans la lettre de licenciement et par là-même reposerait sur un motif fallacieux.Le licenciement du salarié est abusif, l'employeur ayant agi avec précipitation et légèreté blâmable dans la mesure où il a procédé au licenciement sans être en possession du rapport établi par le médecin du travail, suite à l'avis d'inaptitude définitive du salarié à son poste de travail, et sans tenir compte de l'avis de la Commission instituée par l'article 6 de la loi n° 1.348 du 25 juin 2008. Même s'il s'agit d'un simple avis, il ne justifie aucunement avoir tenté de reclasser le salarié selon les recommandations de ladite commission. Enfin, il n'a pu apporter aucune réponse concrète et précise au salarié lors de l'entretien préalable, ainsi qu'il résulte du compte-rendu produit aux débats. Il y a lieu d'allouer au salarié des dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral lié à la faute de l'employeur, soit la somme de 85 000 euros, eu égard à son âge (52 ans) et à son ancienneté de service (26 ans).

Social - Général  - Contrats de travail  - Rupture du contrat de travail.

Contrat de travail - Licenciement - Indemnité légale - Accident du travail - Montant - Application de la convention collective française - Doublement de l'indemnité de licenciement.


Parties
Demandeurs : Monsieur a. K.
Défendeurs : la SOCIÉTÉ D'ÉTUDES ET DE RÉALISATIONS INFORMATIQUES en abrégé S.E.R.I.

Références :

article 6 de la loi n° 1.348 du 25 juin 2008
loi n° 1.451 du 4 juillet 2017
loi n° 1.348 du 25 juin 2008
article 2 de la loi n° 845 du 27 juin 1968
article 13 de la loi n° 729 du 16 mars 1963
article 60 de la loi n° 446 du 16 mai 1946
Ordonnance Souveraine n° 1.742 du 1er août 2008
article 3 de la loi n° 1.348 du 25 juin 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.du.travail;arret;2021-09-28;20082 ?

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