Abstract
Contrat de travail - Salaire - Requalification d'un contrat à temps partiel en contrat à temps complet (non) - Exécution de mauvaise foi du contrat de travail (non) - Licenciement pour mésentente persistante - Validité du motif de rupture (non) - Caractère abusif du licenciement (non) - Dommages et intérêts (non)
Résumé
La salariée, engagée en qualité d'Assistante développement de marché zone Europe, présente différentes demandes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.
Elle soutient d'abord que l'employeur n'a pas respecté ses obligations en matière de paiement des salaires et des charges, qu'il l'a reléguée à des tâches subalternes et qu'elle a travaillé à temps complet alors que son autorisation d'embauchage vise un contrat à temps partiel. La cour écarte des débats les documents en langue italienne ou dépourvus de toute force probante. Les éléments qu'elle produit ne permettent pas au Tribunal de déterminer la répartition de son temps de travail sur toute la période en cause, ni le nombre d'heures de travail effectif (et donc d'heures supplémentaires), et faire droit à la demande afférente au calcul d'un rappel de salaire pour 9,80 heures de travail journalier ou même 49 heures hebdomadaire. Elle n'établit pas davantage qu'elle a effectué les heures supplémentaires revendiquées à la demande de l'employeur ou qu'elle a dû dépasser l'horaire de travail normal en raison de l'importance de sa charge de travail. Elle est donc déboutée de ses demandes au titre des heures supplémentaires.
Si l'employeur a déclaré tardivement l'intéressée au Service de l'Emploi, elle a régulièrement été réglée de ses salaires et son dossier comporte les bulletins de salaire correspondants. Elle ne démontre pas avoir sollicité la régularisation de sa situation à plusieurs reprises comme elle le prétend, ni avoir été contrainte de signer la demande d'autorisation d'embauchage alors que cette dernière ne correspondait pas à la réalité de l'emploi occupé. Sa première contestation est tardive et elle ne précise pas le préjudice qu'elle aurait pu subir en lien avec l'unique faute de l'employeur. Sa demande indemnitaire au titre de l'exécution fautive de son contrat de travail est en conséquence rejetée.
Le licenciement ne repose pas sur un motif valable dès lors que la mésentente est par nature très subjective et que l'employeur ne produit aucune pièce démontrant la mésentente persistante invoquée dans la lettre de rupture. En l'absence d'invocation de faits objectifs imputables à l'intéressée de nature à nuire au bon fonctionnement de l'entreprise, l'employeur ne peut soutenir qu'il aurait énoncé un motif de licenciement susceptible d'être jugé valable. L'allégation d'une incompatibilité, qui vise par définition à la fois le comportement de l'employeur et du salarié, ne constitue pas à elle seule un motif valable de rupture du contrat de travail au sens de l'article 2 de la loi n° 845 du 27 juin 1968.
L'employeur est ainsi tenu de lui verser l'indemnité de licenciement d'un montant de 357,30 euros.
Si la salariée allègue avoir été licenciée de manière brutale et avec une légèreté blâmable, elle ne produit aucun élément accréditant ses allégations. L'entretien préalable, n'est pas obligatoire en droit du for et son ancienneté particulièrement faible ne justifie en aucune manière la tenue d'un tel entretien. Le Tribunal la déboute de ses prétentions indemnitaires relatives au caractère abusif de son licenciement.
Motifs
TRIBUNAL DU TRAVAIL
JUGEMENT DU 7 MARS 2019
* En la cause de Madame g. DI N., demeurant X1 à MODENA (41121 - Italie) ;
Demanderesse, bénéficiaire de l'assistance judiciaire selon décision n°XX du 21 avril 2016, ayant élu domicile en l'étude de Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;
d'une part ;
Contre :
* La société à responsabilité limitée dénommée A, dont le siège social se situe X2 à MONACO ;
Défenderesse, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Frédéric BOURGUET-MAURICE, avocat au barreau de Nice ;
d'autre part ;
LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu la requête introductive d'instance en date du 17 février 2017, reçue le 20 février 2017 ;
Vu la procédure enregistrée sous le numéro 65-2016/2017 ;
Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 14 mars 2017 ;
Vu les conclusions de Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur au nom de Madame g. DI N. en date des 6 avril 2017 et 1er février 2018 ;
Vu les conclusions de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur au nom de la SARL A en date du 2 novembre 2017 ;
Ouï Maître Frédéric BOURGUET-MAURICE, avocat au barreau de Nice pour la SARL A en sa plaidoirie ;
Vu les pièces du dossier ;
* * * *
Madame g. DI N. a été embauchée par la société à responsabilité limitée A à compter du 19 janvier 2015.
La demande d'autorisation d'embauchage a été établie le 8 août 2015, faisant apparaître un travail à temps partiel de 84,50 heures mensuelles.
Par courrier en date du 24 septembre 2015, Madame g. DI N. a sollicité l'intervention de l'Inspection du Travail, estimant que ses conditions de travail ne correspondaient pas à la demande d'autorisation d'embauchage.
Le 12 octobre 2015, la salariée a adressé un courrier à l'employeur dans lequel elle dénonçait l'exécution de mauvaise foi du contrat de travail par celui-ci.
Par courrier en date du 14 octobre 2015, Madame g. DI N. a été licenciée pour « mésentente persistante » et dispensée d'exécuter son préavis.
Par requête en date du 17 février 2017 reçue au greffe le 20 février 2017, Madame g. DI N. a saisi le Tribunal du travail en conciliation des demandes suivantes :
* rappel de salaires pour un temps plein : 4.505,87 euros,
* paiement heures supplémentaires : 5.245,80 euros,
* congés payés sur la base d'un temps plein : 581,89 euros,
* dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail : 6.496,32 euros,
* indemnité de licenciement : 584,66 euros,
* dommages et intérêts pour licenciement abusif : 6.496,32 euros,
* montant correspondant à la différence entre l'allocation chômage perçue et celle que Madame g. DI N. aurait dû percevoir au titre d'un contrat à temps plein : 2.560 euros,
* intérêts au taux légal à compter de la citation en conciliation,
* exécution provisoire.
Aucune conciliation n'ayant pu intervenir, le dossier a fait l'objet d'un renvoi devant le bureau de jugement.
Madame g. DI N. a déposé des conclusions les 6 avril 2017 et 1er février 2018 dans lesquelles elle demande au Tribunal, dans le dernier état de ses écritures, de :
* condamner la SARL A à lui payer les sommes suivantes :
* * rappel de salaires pour un temps plein : 4.505,87 euros,
* * paiement heures supplémentaires : 5.245,80 euros,
* * congés payés sur la base d'un temps plein : 581,89 euros,
* * manque à gagner au titre de l'allocation de retour à l'emploi qu'elle aurait dû percevoir au titre d'un contrat à temps plein : 2.500 euros,
* * dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail de Madame g. DI N.: 6.496,32 euros,
* * indemnité de licenciement : 584,66 euros,
* * dommages et intérêts pour licenciement abusif : 6.496,32 euros,
* condamner la SARL A au paiement des intérêts au taux légal à compter de la citation en conciliation,
* prononcer l'exécution provisoire de la décision à intervenir,
* condamner la SARL A aux dépens.
Madame g. DI N. fait essentiellement valoir que :
sur l'exécution de mauvaise foi du contrat de travail par l'employeur :
* l'employeur s'est abstenu de toute démarche pour obtenir un permis de travail dans l'intérêt de sa salariée,
* elle a sollicité depuis sa prise de poste le 19 janvier 2015 la signature d'un contrat de travail, en vain,
* elle était payée 1.000 euros en espèces pour 49 heures de travail hebdomadaire, sans fiche de paye,
* elle s'est adressée au Service de l'Emploi pour obtenir la régularisation de sa situation,
* elle a été contrainte de signer le formulaire de demande d'autorisation d'embauchage sous l'insistance de l'employeur, mais a continué d'effectuer les mêmes horaires,
* l'employeur a imposé tant à ses employés qu'à sa stagiaire une durée hebdomadaire supérieure aux maxima légaux,
* elle a été embauchée en qualité d'assistante de développement de marché pour la zone Europe mais a été rapidement reléguée à des tâches étrangères à son poste,
sur le licenciement :
* la lettre de licenciement n'est pas suffisamment précise quant aux faits qui lui sont reprochés,
* dans ses écritures, l'employeur invoque des insultes et une situation de conflit et de violence avec le mari de Madame I K.
* l'employeur ne produit aucun élément à ce titre,
* son seul tort est d'avoir voulu régulariser sa situation en obtenant d'abord un permis de travail, puis un contrat de travail correspondant à la réalité des horaires effectués,
* elle a ainsi été licenciée pour un motif fallacieux,
* l'employeur a en outre fait preuve de brutalité et de légèreté blâmable,
* elle a reçu un simple courriel le 12 octobre 2015 de sa collègue de travail lui demandant de ne pas venir travailler le lendemain,
* le 13 octobre 2015, elle s'est rendue à son travail et Madame I K. et son mari lui ont ordonné de partir sur le champ,
* il s'agit d'un comportement brutal et vexatoire de l'employeur,
* elle s'est retrouvée dans une situation financière délicate,
* elle est toujours en recherche d'emploi et ne perçoit plus aucune allocation,
* son préjudice moral et financier est donc parfaitement établi.
La SARL A a déposé des conclusions le 2 novembre 2017 dans lesquelles elle s'oppose aux prétentions émises à son encontre et soutient que :
* Madame g. DI N. n'avait pas d'expérience dans le domaine de la mode mais prétendait pouvoir aider au développement de l'activité par ses compétences et sa formation. Il a ainsi été prévu qu'elle effectuerait un stage de formation,
* Madame g. DI N. a commencé à travailler à la boutique à temps partiel à compter du 19 janvier 2015 et son contrat a été régularisé sur la base de 84,50 heures mensuelles,
* Madame g. DI N. a systématiquement refusé toute tâche manuelle, estimant qu'elle devait uniquement se limiter au développement de marché,
* la demanderesse n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses demandes de rappel de salaire et d'heures supplémentaires,
* Madame g. DI N. a immédiatement démontré ses limites et son incapacité à procéder à des tâches de développement pour la zone Europe et le développement de marché,
* la salariée a refusé de travailler et de se présenter à son poste en refusant d'effectuer les tâches qui lui étaient confiées,
* le contrat de travail a été exécuté de bonne foi et l'employeur a payé l'intégralité des salaires dus,
* c'est la salariée qui a demandé le paiement de son salaire en espèces,
* Madame g. DI N. ne justifie d'aucun préjudice justifiant l'allocation de dommages et intérêts.
SUR CE,
* Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail :
En application des dispositions de l'article 989 du Code civil, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.
Il résulte des pièces produites par les parties que Madame g. DI N. n'a fait l'objet d'une déclaration aux services de l'emploi qu'à compter du 3 août 2015, date de la demande d'autorisation d'embauchage et de permis de travail.
Ce document, signé par les deux parties, prévoit que Madame g. DI N. est embauchée en qualité d'Assistante développement de marché zone Europe (Allemagne, Italie) et traductrice, à compter du 20 juillet 2015, avec une période d'essai de trois mois et un horaire mensuel de 84,50 heures.
Cependant, la date d'embauche ne correspond pas à la réalité puisqu'il résulte des documents de fin de contrat que Madame g. DI N. a intégré la SARL A à compter du 19 janvier 2015.
Il est encore produit par la demanderesse les feuilles de salaire à compter de cette même date, faisant état de 84,50 heures par mois, pour un salaire brut de 812,04 euros.
Ainsi, il apparaît que l'employeur, bien que n'ayant pas déclaré Madame g. DI N. au Service de l'Emploi, a établi des bulletins de salaire et payé les charges sociales correspondants à l'emploi de sa salariée.
Madame g. DI N. soutient encore qu'elle a été rapidement reléguée à des tâches étrangères à son poste, telles que le rangement de la boutique et de la maison de couture et l'intendance de manière générale.
Les pièces nos 25 et 26 qu'elle produit pour en justifier sont en langue italienne sans aucune traduction en langue française, langue officielle en Principauté de Monaco.
Ces documents ne seront dès lors pas retenus.
La pièce n° 27 est intitulée « conversation W Taches manuelles » mais est établie sur une feuille libre sans aucune impression de l'écran du téléphone portable concerné, de sorte qu'elle ne sera pas plus retenue.
Madame g. DI N. ne démontre dans ces circonstances en aucune manière ses allégations quant à ce chef de prétention.
La demanderesse soutient que l'employeur lui a fait signer la demande d'autorisation d'embauchage faisant apparaître un contrat à temps partiel alors qu'elle effectuait un temps complet.
En application des dispositions de l'article 1162 du Code civil, en son alinéa premier, « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver » .
Pour démontrer qu'elle a travaillé à temps plein entre le 19 janvier 2015 et le 13 octobre 2015, Madame g. DI N. produit les éléments suivants :
une attestation établie par Madame m-c. V. ancienne collègue de travail, qui indique que la journée de travail commençait à 9 heures et se terminait vers 18 heures, « quelques fois même plus tard, avec une pause déjeuné de 30 minutes (du lundi au vendredi), tandis que le samedi les horaires était 11 h jusqu'à 18h. ».
Madame m-c. V. n'ayant travaillé que deux mois au sein de la SARL A ne peut dès lors témoigner pour la période totale revendiquée par Madame g. DI N. à savoir du 19 janvier au 13 octobre 2015.
De plus, les déclarations de celle-ci sont en partie contredites par les pièces produites par Madame g. DI N. et analysées infra .
des courriers qu'elle a adressés à l'Inspection du Travail le 24 septembre 2015 et à l'employeur le 12 octobre 2015, dans lesquels elle fait état de ses revendications à ce titre.
Ces lettres émanant de la demanderesse ne peuvent suffire et constituer une preuve dans la mesure où nul ne peut se pré-constituer de preuve à soi-même.
des courriels en pièces n° 21 qui démontrent que Madame g. DI N. a utilisé sa messagerie professionnelle sur une amplitude qui ne permet en aucune manière de conclure à l'existence d'une relation de travail à temps complet, non seulement sur les quelques jours concernés, mais encore et surtout sur toute la période revendiquée par la salariée.
En effet, le Tribunal ne retient que les mèls adressés par la demanderesse à son employeur et non ceux envoyés par ce dernier, soit à la pause de midi, soit le soir, et pour lesquels aucune réponse n'a été apportée par Madame g. DI N. dans l'instant.
Ainsi :
* * le 25 mars 2015, la demanderesse a envoyé trois mèls à Madame I K. à 9 h 02, 10 h 22 et 15 h 46,
* * le 7 avril 2015, la demanderesse a envoyé trois mèls à Madame I K. à 10 h 49, 12 h 20 et 12 h 51,
* * le 8 avril 2015, la demanderesse a envoyé un mèl à Madame I K. à 7 h 22,
* * le 9 avril 2015, la demanderesse a envoyé deux mèls à Madame I K. à 6 h 46 et 9 h 18,
* * le 10 avril 2015, la demanderesse a envoyé deux mèls à Madame I K. à 10 h 27 et 4 h 44.
des échanges de messages par l'intermédiaire de l'application W avec Madame c. B. collègue de travail, en pièce n° 22. Le Tribunal ne retient à ce titre que les messages ayant trait à l'activité de la société.
Ainsi :
* * le 25 avril 2015, les échanges purement professionnels ont eu lieu entre 17 h 58 et 18 h 05,
* * le 18 février 2015, les échanges purement professionnels ont eu lieu entre 10 h 06 et 12 h 43 le matin, et 14 h 30 et 17 h 31 l'après-midi.
Le Tribunal relève que les mèls et messages repris ci-dessus ne concernent que sept jours sur les dix mois revendiqués par Madame g. DI N. de sorte qu'ils ne peuvent démontrer une relation de travail à temps complet pendant toute cette période.
Ces éléments ne démontrent pas une présence constante et un travail effectif de Madame g. DI N. à temps plein, non seulement sur les jours considérés, mais également et surtout sur la période revendiquée par la salariée.
En outre, lesdits échanges (mèls et messages) ne corroborent pas les déclarations de Madame m-c. V. sur la pause déjeuner limitée à trente minutes. En effet, Madame g. DI N. produit des courriels qui lui ont été adressés par Madame I K. entre douze heures et quatorze heures et pour lesquels la salariée n'a apporté aucune réponse immédiate pour la majorité, ce qui démontre que ladite pause dépassait les trente minutes invoquées par Madame m-c. V.
Enfin, Madame g. DI N. n'a jamais revendiqué un travail le samedi, contrairement aux allégations de Madame m-c. V.
La demande présentée par Madame g. DI N. au titre de la requalification en contrat à temps plein sera dans ces circonstances rejetée, ainsi que ses demandes financières subséquentes, en celle compris la somme de 2.500 euros en réparation du préjudice subi du fait du calcul des indemnités chômage sur la base d'un contrat à temps partiel.
Madame g. DI N. invoque encore l'exécution de nombreuses heures supplémentaires dont elle demande paiement.
Il appartient au salarié de rapporter la preuve de l'existence des heures supplémentaires dont il revendique le paiement et, ce préalable étant rempli, à l'employeur de fournir les éléments qu'il détient et qui sont de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Seules les heures supplémentaires accomplies avec l'accord de l'employeur peuvent donner lieu à rémunération.
Pour pouvoir prétendre au paiement, dans le cadre de la présente instance, des heures supplémentaires effectuées par ses soins, Madame g. DI N. doit produire un décompte établi par semaine civile et mentionnant, conformément aux dispositions de l'article 8 de l'Ordonnance loi du 2 décembre 1959, pour chacune des semaines couvertes par sa réclamation :
* - le nombre total d'heures de travail effectivement accomplies au cours de la semaine considérée,
* - le nombre d'heures effectuées au-delà de 39 heures,
* - le taux horaire de base applicable,
* - le taux horaire majoré (+ 25 % pour les huit premières + 50 % pour les heures suivantes).
Madame g. DI N. a détaillé dans ses écritures les heures supplémentaires revendiquées en application des dispositions ci-dessus reprises.
Cependant, les éléments versés aux débats par la demanderesse ne peuvent caractériser la réalité d'un travail journalier de 9,80 heures (base de la réclamation), dans la mesure où :
* - les mails et les messages produits visent différentes heures, dont l'amplitude n'excède jamais le temps de travail normal et ne démontrent pas plus, ainsi qu'il a été jugé supra un travail à temps complet,
* - la pièce n° 23 correspondant au salon « Y » ne démontre pas davantage l'exécution d'heures supplémentaires au-delà des 39 heures comme revendiquées par Madame g. DI N.
Ainsi :
* * le vendredi 4 septembre 2015, Madame g. DI N. a adressé un mail en lien avec cet événement à 15 h 04,
* * le lundi 7 septembre 2015, Madame g. DI N. a adressé et reçu cinq mails en lien avec cet événement à 9 h 43, 10 h 47, 12 h 44, 12 h 45 et 12 h 53,
* l'attestation de Monsieur l. B. semble démontrer la présence de Madame g. DI N. à l'occasion de trois défilés, sans pour autant donner des précisions sur l'amplitude de travail en cause, la demanderesse ne donnant pas plus d'information sur ce point.
Le Tribunal ne peut ainsi déterminer la répartition du temps de travail de la salariée sur toute la période en cause, ni le nombre d'heures de travail effectif (et donc d'heures supplémentaires), et faire droit à la demande afférente au calcul d'un rappel de salaire pour 9,80 heures de travail journalier ou même 49 heures hebdomadaire.
Enfin, la salariée ne prouve pas que les heures supplémentaires revendiquées ont été réalisées à la demande de l'employeur ou que la charge de travail était telle qu'elle a été dans l'obligation de dépasser l'horaire de travail normal.
Dans ces circonstances, Madame g. DI N. sera déboutée de ses demandes au titre des heures supplémentaires.
* Sur les dommages et intérêts sollicités par Madame g. DI N. pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail :
Il résulte de l'argumentation développée supra que la seule faute commise par l'employeur consiste en une déclaration tardive de la salariée au Service de l'Emploi.
En effet, il n'est aucunement contesté par la SARL A que Madame g. DI N. a débuté ses fonctions le 19 janvier 2015, alors que la demande d'autorisation d'embauchage n'a été régularisée que le 3 août 2015.
Cependant, Madame g. DI N. a régulièrement été réglée de ses salaires et son dossier comporte les bulletins de salaire correspondants.
En outre, la demanderesse ne démontre aucunement avoir sollicité la régularisation de sa situation à plusieurs reprises comme elle le prétend, ni avoir été contrainte de signer la demande d'autorisation d'embauchage alors que cette dernière ne correspondait pas à la réalité de l'emploi occupée.
La première contestation apparaît dans un courrier en date du 24 septembre 2015 adressé à l'Inspection du Travail.
Le Tribunal relève enfin que Madame g. DI N. ne détaille aucunement le préjudice qu'elle aurait pu subir en lien avec la carence de l'employeur telle que relevée ci-dessus.
Elle sera dans ces circonstances déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
* Sur le motif de la rupture :
Il appartient à l'employeur d'établir la réalité et la validité des motifs invoqués à l'appui de sa décision de licenciement.
La lettre de licenciement en date du 13 octobre 2015 est ainsi libellée :
« Madame,
Après l'expression de votre insatisfaction à votre poste et le changement de vos conditions de travail.
J'ai le regret de vous notifier la décision de vous licencier pour mésentente persistante.
Votre préavis est d'un mois, ne sera pas effectué mais vous sera rémunéré.
Avec votre dernier bulletin, je vous présenterai le solde de tout compte et je vous remettrai le certificat de travail et l'attestation UNEDIC.
Veuillez agréer, Madame, en l'assurance de mes sentiments distingués. ».
Pour justifier un licenciement, le motif invoqué doit être valable, c'est-à-dire « présenter les conditions requises pour produire son effet » et par extension être « acceptable, admissible, fondé » .
L'incompatibilité (la mésentente en l'espèce), par nature très subjective, ne peut constituer en elle-même une cause valable de licenciement.
Le Tribunal relève que l'employeur ne produit aucune pièce démontrant la mésentente persistante invoquée dans la lettre de rupture.
En s'abstenant d'invoquer, sous couvert d'une incompatibilité, des faits objectifs imputables au salarié de nature à nuire au bon fonctionnement de l'entreprise, l'employeur ne peut soutenir qu'il aurait énoncé un motif de licenciement susceptible d'être jugé valable.
L'allégation d'une incompatibilité, qui vise par définition à la fois le comportement de l'employeur et du salarié, ne constitue pas à elle seule un motif valable de rupture du contrat de travail au sens de l'article 2 de la loi n° 845 du 27 juin 1968.
Il résulte des explications développées supra que le licenciement de Madame g. DI N. ne repose pas sur une cause valable.
Conformément à l'article 2 de la loi n° 845 du 27 juin 1968, l'indemnité de licenciement à laquelle peut prétendre la salariée est égale à autant de journées de salaire (soit 25) que le travailleur compte de mois de service dans l'entreprise (soit 11 en l'espèce) : 32,48 euros par jour sur la base du salaire moyen de 812,04 euros = 357,30 euros.
Il sera dans ces circonstances fait droit à la demande de la salariée à ce titre à hauteur de la somme de 357,30 euros, calculée sur la base du contrat à temps partiel conclu entre les parties, avec intérêts au taux légal à compter de la date de la présente décision.
* Sur le caractère abusif du licenciement :
Constitue un licenciement abusif l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister notamment dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ; qu'il appartient au salarié qui se prévaut du caractère abusif de la rupture d'en rapporter la preuve.
Il appartient à celui qui réclame des dommages et intérêts, de prouver outre le préjudice subi, l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ou dans la précipitation, la brutalité ou la légèreté blâmable avec lesquelles le congédiement a été donné.
En application de l'article 13 de la loi n° 729 du 16 mars 1963, toute rupture abusive du contrat de travail peut donner lieu à des dommages et intérêts.
Le licenciement qui ne repose pas sur un motif valable n'ouvre droit à la réparation du préjudice matériel en résultant que lorsque l'employeur a commis un abus dans la prise de décision, soit par exemple en invoquant des motifs fallacieux ou encore en prononçant la rupture malgré l'absence de tout fondement légal, ce qui ne s'avère pas être le cas en l'espèce.
L'analyse qui précède a permis de constater que le grief énoncé dans la lettre de licenciement s'est avéré infondé.
Pour autant, le motif fallacieux se caractérise par la fausseté du grief invoqué combinée à la volonté de tromperie et de nuisance de celui qui l'invoque.
Un licenciement peut être considéré comme abusif (qu'il ait été reconnu valable ou non) si l'employeur a avancé pour le justifier un faux motif, c'est-à-dire un motif qui n'était pas le motif réel qui l'a conduit à prendre cette décision et qui voulait « tromper ».
Force est de constater que Madame g. DI N. qui a la charge de la preuve à ce titre, ne démontre pas que le licenciement serait intervenu pour une autre cause que celle visée dans la lettre de licenciement.
En effet, elle évoque ses revendications pour obtenir la régularisation de sa situation et la résistance abusive de l'employeur sans pour autant démontrer ses allégations, lesquelles n'ont pas été retenues supra au titre de l'exécution du contrat de travail.
La seule faute de l'employeur, consistant en une déclaration tardive de la relation salariale au service de l'emploi n'ayant entraîné aucun préjudice pour la demanderesse.
La salariée soutient que le licenciement a été exercé avec brutalité et légèreté blâmable.
Elle reproche l'absence d'entretien préalable, lequel n'est pas obligatoire en droit du for . Bien plus, l'ancienneté particulièrement faible de Madame g. DI N. au sein de la SARL A ne justifie en aucune manière la tenue d'un tel entretien.
Aucune légèreté ne peut dès lors être mise à la charge de l'employeur dans les circonstances ayant entouré la rupture.
Les déclarations de Madame g. DI N. dans ses écritures, non contestées par l'employeur, montrent qu'elle a été priée par un mèl du 12 octobre 2015 de ne pas se présenter sur son lieu de travail le lendemain.
Les parties sont ensuite en désaccord sur l'attitude par elles adoptées lorsque Madame g. DI N. s'est rendue à son travail le 13 octobre 2015.
Il appartient à la salariée de démontrer ses allégations à ce titre.
Le Tribunal constate qu'aucun élément n'est produit permettant de donner un quelconque crédit à ses accusations de sorte qu'aucune brutalité ne pourra être retenue à l'encontre de l'employeur.
Madame g. DI N. sera dans ces circonstances déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive.
* Sur l'exécution provisoire :
Il n'est pas justifié pour le surplus des conditions nécessaires au prononcé de l'exécution provisoire autre que l'exécution provisoire de droit prévue par les dispositions de l'article 60 de la loi n° 446 du 16 mai 1946.
* Sur les dépens :
Chacune des parties succombant partiellement en ses demandes, il sera fait masse des dépens qui seront partagés par moitié entre elles, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions applicables en matière d'assistance judiciaire.
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL DU TRAVAIL, statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et après en avoir délibéré,
Dit que le licenciement de Madame g. DI N. ne repose pas sur une cause valable et n'est pas abusif ;
Condamne la société à responsabilité limitée A à payer à Madame g. DI N. la somme de 357,30 euros (trois cent cinquante-sept euros et trente centimes) à titre d'indemnité de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter de la date de la présente décision ;
Déboute Madame g. DI N. du surplus de ses demandes ;
Fait masse des dépens et dit qu'ils seront partagés par moitié entre les parties et lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions applicables en matière d'assistance judiciaire ;
Composition
Ainsi jugé par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, Messieurs José GIANNOTTI, Daniel CAVASSINO, membres employeurs, Messieurs Serge ARCANGIOLINI, Rino ALZETTA, membres salariés, et prononcé en audience publique du Tribunal du Travail de la Principauté de Monaco, au Palais de Justice, le sept mars deux mille dix-neuf, par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, en présence de Messieurs José GIANNOTTI, Daniel CAVASSINO, Serge ARCANGIOLINI et Rino ALZETTA, assistés de Madame Christèle SETTINIERI, Secrétaire adjoint.
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