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27/09/2018 | MONACO | N°17303

Monaco | Tribunal du travail, 27 septembre 2018, Mme c. CO. c/ Société anonyme monégasque dénommée INTERNATIONAL UNIVERSITY OF MONACO


Motifs

TRIBUNAL DU TRAVAIL

JUGEMENT DU 27 SEPTEMBRE 2018

En la cause de Madame c CO., demeurant « X1, X1 » à MONACO ;

Demanderesse, ayant élu domicile en l'étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, substituée et plaidant par Maître Clyde BILLAUD, avocat-stagiaire ;

D'une part ;

Contre :

La société anonyme monégasque dénommée INTERNATIONAL UNIVERSITY OF MONACO en abrégé I. U. M. dont le siège social se situe 2 avenue Albert II à MONACO ;

Défenderesse, ayant élu domicile en l'étud

e de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Sophie MARQUET, av...

Motifs

TRIBUNAL DU TRAVAIL

JUGEMENT DU 27 SEPTEMBRE 2018

En la cause de Madame c CO., demeurant « X1, X1 » à MONACO ;

Demanderesse, ayant élu domicile en l'étude de Maître Patricia REY, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, substituée et plaidant par Maître Clyde BILLAUD, avocat-stagiaire ;

D'une part ;

Contre :

La société anonyme monégasque dénommée INTERNATIONAL UNIVERSITY OF MONACO en abrégé I. U. M. dont le siège social se situe 2 avenue Albert II à MONACO ;

Défenderesse, ayant élu domicile en l'étude de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par Maître Sophie MARQUET, avocat près la même Cour ;

D'autre part ;

Le Tribunal,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu la requête introductive d'instance en date du 25 novembre 2015, reçue le 26 novembre 2015 ; Vu la procédure enregistrée sous le numéro 40-2015/2016 ;

Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 15 décembre 2015 ;

Vu les conclusions de Maître Patricia REY, avocat-défenseur au nom de Madame c. C. en date des 7 janvier 2016, 6 octobre 2016, 2 novembre 2017 et 8 mars 2018 ;

Vu les conclusions de Maître Olivier MARQUET, avocat-défenseur au nom de la S.A.M. L'INTERNATIONAL UNIVERSITY OF MONACO en abrégé I.U.M., en date des 14 avril 2016, 6 avril 2017 et 11 janvier 2018 ;

Après avoir entendu Maître Clyde BILLAUD, avocat-stagiaire pour Madame c. C. et Maître Sophie MARQUET, avocat près la Cour d'appel de Monaco pour la S.A.M. INTERNATIONAL UNIVERSITY OF MONACO en abrégé I.U.M., en leurs plaidoiries ;

Vu les pièces du dossier ;

Madame c. C. a été engagée par la société anonyme monégasque INTERNATIONAL UNIVERSITY OF MONACO (ci-après I.U.M.) en contrat à durée indéterminée à compter du 3 novembre 2003 en qualité de Professeur.

Par courriel en date du 8 juin 2015, l'employeur convoque Madame c. C. pour «  faire le point sur l'avenir de notre collaboration ».

Par courrier en date du 19 juin 2015, Monsieur B. Inspecteur du Travail, convoque Madame c. C. à la réunion de la Commission de licenciement prévue par la loi n° 459 du 19 juillet 1947, et ce pour le 3 juillet suivant.

La Commission a refusé le licenciement de la salariée.

Le 31 août 2015, l'employeur convoque une nouvelle fois Madame c. C. à un entretien «  pour refaire un point avec vous sur l'année écoulée et l'avenir de notre collaboration », et ce, pour le 2 septembre 2015.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 4 septembre 2015, Madame c. C. est licenciée pour insuffisance professionnelle.

Par requête en date du 25 novembre 2015 reçue au greffe le 26 novembre 2015, Madame c. C. a saisi le Tribunal du travail en conciliation des demandes suivantes :

« - dire et juger que le licenciement de Madame c. C. n'est pas fondé sur un motif valable,

* dire et juger que le licenciement de Madame c. C. est abusif,

* dire et juger que Madame c. C. occupait l'emploi de Professeur au sein de l'International University of Monaco - I.U.M. du 3 novembre 2003 au 4 novembre 2015,

* par conséquent, condamner l'International University of Monaco au paiement des sommes suivantes :

* indemnité de licenciement : ........................................... 24.151,74 euros,

* déduction de l'indemnité de congédiement : .................. 11.292,47 euros, 12.859,27 euros,

* dommages et intérêts pour licenciement abusif :

* préjudice financier,

* préjudice moral compte tenu des difficultés pour celle-ci de retrouver un emploi compte tenu de son âge et des conséquences dommageables sur sa vie académique et personnelle : 84.000 euros,

* délivrance des bulletins de salaire, de certificat de travail, d'attestation Pôle Emploi et du solde de tout compte conformes,

* exécution provisoire du jugement à intervenir,

* intérêts de droit au taux légal à compter de la présente citation et jusqu'à parfait paiement : mémoire,

* total sauf mémoire : 96.859,27 euros ».

Aucune conciliation n'ayant pu intervenir, le dossier a fait l'objet d'un renvoi devant le bureau de jugement.

Madame c. C. a déposé des conclusions les 7 janvier 2016, 6 octobre 2016, 2 novembre 2017 et 8 mars 2018 dans lesquelles elle fait essentiellement valoir que :

* l'I.U.M. a été rachetée dans un premier temps par le groupe américain C.E.C. via le groupe I.N.S.E.E.C., lequel a été revendu en 2013 au groupe français A.P.A.X. PARTNERS,

* le 8 juillet 2013, l'employeur a adressé à l'ensemble du personnel un courrier lui précisant les nouvelles règles applicables,

* ces nouvelles règles imposaient des objectifs irréalisables en l'absence de moyens concrets pour les mener,

* les demandes de publication et la nouvelle qualification d'enseignant-chercheur qui lui ont été imposées doivent s'analyser en une modification d'un élément essentiel de son contrat de travail,

* cette modification n'a jamais été acceptée,

* dès sa nomination en qualité de déléguée du personnel en février 2014, elle va, avec ses collègues délégués, prendre la défense de ses collègues professeurs en contestant les mesures imposées par la direction,

* elle n'était astreinte à aucune obligation de publication dans la mesure où elle n'était pas enseignant-chercheur,

* son permis de travail mentionne comme profession : professeur,

* la Commission de licenciement a refusé la rupture pour insuffisance professionnelle,

* l'employeur n'est pas en mesure de fournir la preuve d'un nouveau poste qu'elle aurait accepté et ainsi d'une obligation de publication la concernant,

* sans être tenue de produire des contributions intellectuelles par contrat, elle a largement dépassé le seuil de production imposé par l'employeur à ses enseignants-chercheurs, malgré les entraves de celui-ci pour ce faire,

* elle n'a jamais reconnu les objectifs imposés par l'I.U.M. dans la mesure où ils ne lui étaient pas applicables,

* les évaluations de 2013 et 2014 sont unilatérales ; l'évaluateur remplit le formulaire de manière unilatérale sans laisser la possibilité à l'évalué de faire des commentaires,

* la signature apposée par l'évalué ne doit pas être considérée comme une acceptation des commentaires et fausses affirmations y contenus mais comme une preuve de la tenue de l'entretien,

* les objectifs que l'I.U.M. tentait d'imposer n'étaient ni réalisables, ni atteignables,

* Madame H. a attesté à son encontre dans un esprit revanchard dans la mesure où elle ne lui avait pas donné satisfaction dans sa demande de report de la date d'une étude de cas,

* elle a toujours eu des retours positifs sur ses cours et l'employeur n'est pas en mesure de démontrer le contraire,

* elle produit de nombreux éléments démontrant la qualité de son travail,

* il faut rappeler qu'elle est seule à l'origine du Master en management du luxe qui a permis à l'I.U.M. de sortir de la crise dans laquelle elle se trouvait,

* l'I.U.M. a reçu son accréditation A.M.B.A., en partie grâce au succès du M.B.A. luxe dont elle est à l'origine,

* l'I.U.M. ne s'est pas conformée aux termes de son offre d'embauche et lui a demandé d'enseigner d'autres matières que le marketing et le marketing de luxe,

* elle a été l'objet d'un véritable harcèlement moral et d'un stress important au travail,

* elle a alerté la direction sur ce point en mars 2008, puis en 2010 et 2012,

* ces difficultés n'ont pas été sans conséquences sur sa santé,

* en 2008, elle a fait l'objet d'un arrêt maladie pour « état d'épuisement, syndrome dépressif en rapport avec des difficultés professionnelles »,

* en 2012 et 2013, elle a fait l'objet d'une dysphonie due à un forçage vocal en raison de l'augmentation du nombre d'étudiants par classe, du rythme intensif d'enseignement imposé et de l'absence de microphone dans les salles de cours,

* en 2013 et 2014, elle a été traitée pour « état dépressif sévère »,

malgré ces conditions de travail difficiles, elle a toujours parfaitement accompli sa tâche de professeur.

Elle indique que les pièces dont il est sollicité le rejet par l'employeur ne sont pas des attestations mais des lettres de recommandation ou des courriels reçus de ses étudiants.

L'I.U.M. a déposé des conclusions les 14 avril 2016, 6 avril 2017 et 11 janvier 2018 dans lesquelles elle demande au Tribunal de :

« - écarter des débats les pièces adverses 26 à 34, 133, 134 et 169 ne respectant pas les prescriptions de l'article 324 du Code de procédure civile,

* écarter des débats les pièces adverses n° 84, 87, 89, 103 à 115, 142, 143, 154, 155, 156, 173, 174, 175-3, 175-4, 180 pour défaut de traduction assermentée en langue française,

* constater que Madame c. C. a été entièrement remplie de ses droits au titre de l'exécution de son contrat de travail,

* dire et juger que le licenciement de Madame c. C. repose sur un motif valable,

* dire et juger que le licenciement de Madame c. C. ne présente aucun caractère abusif,

* en conséquence, débouter Madame c. C. de toutes ses demandes, fins et conclusions ».

L'I.U.M. expose essentiellement que :

* il n'y a eu aucune modification du contrat de travail de Madame c. C.

* la salariée reconnaît que les tâches de recherche ont toujours fait partie de ses attributions au même titre que ses tâches d'enseignement,

* c'est en cette qualité que Madame c. C. a postulé au sein de l'I.U.M. en 2003,

* Madame c. C. confond modification du contrat de travail et fixation d'objectifs,

* le fait d'assigner des objectifs (publication dans des revues étoilées) ne constitue pas une modification du contrat de travail,

* Madame c. C. a été embauchée en qualité d'Enseignant-Chercheur avec un nombre d'heures d'enseignement limité à 270 heures de cours par an contre les 360 heures incombant aux enseignants sans activité de recherche,

* c'est également en se prévalant de ce statut qu'elle a demandé devant le Tribunal du travail le paiement de frais de participation à des conférences et séminaires de recherche,

* la demanderesse a également demandé une diminution de ses heures d'enseignement pour se consacrer davantage à son activité de recherche,

* le changement d'actionnariat intervenu en 2010 n'a entraîné aucune modification ni de la situation juridique de l'I.U.M. ni des contrats de travail de ses salariés,

* Madame c. C. a toujours été évaluée sur ses publications, et ce bien avant le changement d'actionnariat,

* en 2008, elle a alerté la salariée de l'insuffisance de son travail, notamment en termes de publications scientifiques et sur la possible fin de la relation de travail à défaut d'amélioration,

* le mécontentement des salariés réside dans la seule mise en place de critères d'évaluations plus stricts des travaux de recherche et dans les possibles conséquences de l'absence de réalisation des objectifs de recherche,

* la commission de licenciement a refusé le licenciement de Madame c. C. au seul motif que la rupture viserait à sanctionner cette dernière du fait de son ancien mandat de Déléguée du Personnel,

* à titre subsidiaire, et si le Tribunal devait reconnaître une modification, celle-ci ne constituerait qu'un changement des conditions de travail qui s'impose au salarié,

* les salariés de l'I.U.M. n'ayant pas de contrat de travail écrit, c'est au sein des formulaires d'évaluations annuelles qu'un objectif leur a été clairement fixé,

* Madame c. C. a contresigné ses évaluations,

* la fixation d'objectifs relève, sous réserve d'avoir été portée à la connaissance du salarié, du pouvoir de direction de l'employeur et n'est pas subordonnée à l'acceptation de celui-ci,

* le 11 décembre 2013, elle alerte Madame c. C. sur le fait qu'elle n'a pas atteint ses objectifs de deux étoiles sur deux ans. La salariée ne le conteste pas et justifie son insuffisance par le contexte et ses arrêts maternité et maladie,

* l'évaluation de Madame c. C. de septembre 2014 constatait une nouvelle insuffisance de la salariée dans son travail,

* l'insuffisance de résultat est constituée par l'incapacité de Madame c. C. à atteindre la norme de publication minimale pour les enseignants-chercheurs, à savoir deux étoiles sur deux ans, soit une étoile par an en moyenne,

* ces objectifs étaient fixés annuellement à la salariée dans le cadre de ses évaluations,

* un délai supplémentaire a été accordé à Madame c. C. pour concrétiser ses travaux de recherches, en vain,

* la participation de Madame c. C. à des conférences n'a abouti à aucune publication scientifique,

* les objectifs qui ont été assignés à la demanderesse représentent la norme de publication minimale attendue du corps professoral rattaché au laboratoire de recherches universitaires,

* les résultats attendus ressortent des grilles d'évaluation académique établies au niveau national et européen,

* ces objectifs sont donc réalisables,

* sur onze enseignants-chercheurs, Madame c. C. est la seule à ne jamais avoir obtenu de publication dans des revues classées,

* les six enseignants-chercheurs qui ont aussi bénéficié d'un délai supplémentaire ont dûment justifié de la réalisation de leurs travaux de recherches pendant le délai supplémentaire, alors que Madame c. C. s'est contentée d'adresser un mail le jour même de l'entretien en invoquant un décès dans sa famille et des projets d'articles en cours d'écriture,

* elle a mis à disposition de Madame c. C. les moyens nécessaires pour atteindre les objectifs assignés,

* Madame c. C. a bénéficié d'un plan de charge allégé pour ses activités de recherches,

* celle-ci lui a même reproché dans un courriel du 4 septembre 2013 de lui avoir retiré l'enseignement de certains cours pour l'année académique 2013/2014,

* malgré les moyens mis à sa disposition, Madame c. C. n'a soumis aucun article à une revue classée pendant trois ans,

* l'insuffisance reprochée à Madame C. est non seulement qualitative mais également quantitative,

* la demanderesse est censée consacrer plus de la moitié de son temps de travail à la réalisation de travaux de recherches, travaux qui doivent aboutir sur des résultats concrets,

* la productivité de Madame c. C. s'est limitée à deux contributions pédagogiques en douze années,

* il est également reproché à Madame c. C. des manquements dans ses tâches d'enseignement,

* lors de la dernière évaluation annuelle de septembre 2014, la salariée a été alertée sur des retombées négatives de plusieurs étudiants,

* Madame c. C. a été alertée sur le fait qu'elle ne respectait pas les procédures et supports d'enseignement de l'établissement,

* en contravention avec la pratique de l'établissement, Madame c. C. n'a pas hésité à la fin de l'année 2013 à exiger de l'ensemble de ses étudiants de remplir des anciens formulaires d'évaluation non anonymes pour s'en prévaloir ensuite auprès de sa hiérarchie,

* ce manquement professionnel a fait l'objet d'un rappel à l'ordre en novembre 2013,

* les étudiants ne peuvent évaluer objectivement le niveau professionnel d'un enseignant,

* Madame c. C. ne procédait pas à la mise à jour de sa plateforme de cours en ligne que les enseignants sont tenus de réactualiser chaque année,

* sur les années 2013/2014, Madame c. C. a été avertie à plusieurs reprises sur des retards fréquents dans ses cours et absence injustifiée lors de formations obligatoires pour l'ensemble du corps enseignant,

* Madame c. C. a toujours réagi aux remarques de son employeur en rejetant la faute sur ses collègues de travail ou en l'accusant de harcèlement,

* la demanderesse ne démontre aucune corrélation entre ses différents arrêts maladie depuis 2008 (antérieurs au prétendu changement de ses conditions de travail intervenu selon elle en 2013) et un quelconque comportement abusif de l'employeur,

* aucun abus ne peut être reproché à l'employeur dans la mise en œuvre du licenciement.

L'employeur sollicite également le rejet des débats, dans le corps de ses écritures, de la pièce n° 178 produite par la demanderesse.

L'irrecevabilité des demandes de Madame c. C. ayant été soulevée à l'audience, en complément des écritures déposées par l'I.U.M. dans lesquelles cette dernière en faisait état, il a été accordé à la demanderesse un délai jusqu'au 7 septembre 2018 pour déposer une note en délibéré sur ce point.

Madame c. C. s'est exécutée dans le délai requis et précise à ce titre :

* une lecture attentive des écritures adverses permet de constater que si l'I.U.M. estime que Madame c. C. aurait fait preuve d'une duplicité de stratégie qui serait contraire au principe d'unicité de l'instance, ce qui n'est par ailleurs pas le cas, elle n'indique pas que les demandes de Madame c. C. sont irrecevables, ni dans le corps de ses écritures, ni dans le par ces motifs. La question de l'irrecevabilité ne se pose donc pas,

* en tout état de cause, la présente procédure n'a pas été introduite aux mêmes fins et ne repose pas sur les mêmes fondements juridiques que la première demande, s'agissant d'une contestation de licenciement, donc d'une demande dont la cause est née et n'a été connue d'elle que postérieurement à l'introduction de la première demande.

L'employeur a ensuite répliqué alors qu'aucune autorisation ne lui avait été donnée pour ce faire, de sorte que la note en délibérée par lui déposée ne sera pas retenue.

SUR CE,

Sur le principe de l'unicité de l'instance

L'article 59 de la loi n° 446 du 16 mai 1946 dispose :

« Toutes les demandes dérivant du contrat de travail entre les mêmes parties doivent avoir fait l'objet d'une seule instance, à peine d'être déclarées non recevables, à moins que le demandeur ne justifie que les causes des demandes nouvelles ne sont nées à son profit ou n'ont été connues de lui que postérieurement à l'introduction de la demande primitive.

Sont toutefois recevables les nouveaux chefs de demandes tant que le tribunal du travail ne se sera pas prononcé en premier ou en dernier ressort sur les chefs de la demande primitive ; il ordonnera la jonction des instances et se prononcera sur elles par un seul et même jugement ».

En l'espèce il résulte des pièces produites aux débats que Madame c. C. a successivement introduit deux instances devant le Tribunal du travail, dérivant toutes deux de l'exécution du même contrat de travail et l'opposant toutes deux à l'I.U.M. :

* la première, par une requête en date du 3 novembre 2014 parvenue au secrétariat le 5 novembre 2014 et enrôlée sous le numéro 59-2014/2015, tendant à voir condamner l'I.U.M. à lui payer diverses sommes au titre de notes de frais, de frais de transport, des royalties versées par E.C.C.I. sur les ventes du cas « Monte-Carlo S.B.M. » et de ses produits associés, d'heures supplémentaires et de dommages et intérêts, ayant donné lieu à un jugement rendu le 23 mars 2017.

Madame c. C. a relevé appel de ladite décision, l'arrêt étant en cours de délibéré.

* la seconde, par une requête en date du 25 novembre 2015 parvenue au secrétariat le 26 novembre 2015, enrôlée sous le numéro 40-2015/2016, en contestation du licenciement dont elle a été l'objet le 4 septembre 2015.

Pour que ces deux instances puissent être jugées séparément la demanderesse, conformément aux dispositions de l'article 59 alinéa 1er de la loi susvisée, doit justifier que les causes de la deuxième demande, dite demande nouvelle, sont nées ou ont été connues d'elle postérieurement à l'introduction de sa demande primitive.

Tel est le cas, dès lors que le licenciement de Madame c. C. est intervenu postérieurement à l'introduction de la première requête

Les conditions exigées par l'alinéa 1 de l'article 59 étant réunies, les deux instances successivement introduites par Madame c. C. peuvent être jugées séparément.

Sur le rejet de débats de la pièce n° 178 produite par Madame c. C.

L'employeur motive sa demande en soutenant que le document a été communiqué de manière parcellaire, ce qui ne permet pas de distinguer le destinataire de ce qui semble être un email pas plus que la date d'envoi.

Le document en question semble en effet être un courriel adressé par Madame c. C. à « Nadine ». La seule date figurant sur celui-ci a été rajoutée à la main.

Il s'agit de toute évidence d'une communication partielle dès lors qu'un mèl comporte obligatoirement la date, l'heure d'envoi et l'adresse électronique du destinataire.

Ce faisant, la pièce n° 178 sera rejetée des débats.

Sur les pièces n° 26 à 34, 133, 134 et 169 produites par Madame c. C.

L'I.U.M. soutient qu'elles ne respecteraient pas les prescriptions de l'article 324 du Code de procédure civile. Aux termes de l'article 324 du Code de procédure civile, « l'attestation doit, à peine de nullité :

1° être établie par une personne remplissant les conditions requises pour être entendue comme témoin ;

2° être écrite, datée et signée de la main de son auteur ;

3° mentionner les nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur, ainsi que l'existence ou l'absence de liens de parenté, d'alliance, de subordination ou d'intérêt avec les parties ;

4° préciser si son auteur a quelque intérêt au procès ;

5° indiquer qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur sait qu'une fausse attestation l'exposerait aux sanctions prévues par l'article 103 du Code pénal ;

6° être accompagnée de tout document officiel, en original ou en photocopie, justifiant de l'identité de son auteur et comportant sa signature ».

L'attestation en pièce n° 26 respecte l'ensemble des dispositions de l'article 234 susvisé.

Les pièces n° 27 à 34 sont constituées par des documents dactylographiés d'anciens étudiants de Madame c. C. et portant des appréciations sur ses qualités professionnelles.

Ils portent la mention « lettre de recommandation », certaines ayant été établies avant le licenciement, d'autres après, et enfin certaines ne portant aucune date.

Le Tribunal relève à ce titre que les courriers rédigés avant la rupture ont été sollicités par la salariée après la saisine de la Commission de licenciement, de sorte que Madame c. C. préparait d'ores et déjà son dossier en vue d'un éventuel litige.

Aux termes des dispositions de l'article 323 du Code de procédure civile :

« Lorsque la preuve testimoniale est admissible, le tribunal peut recevoir des tiers les déclarations de nature à l'éclairer sur les faits litigieux auxquels ils ont assisté ou qu'ils ont personnellement constatés.

Les déclarations sont faites par attestation ou recueillies par voie d'enquête ».

Dans ces circonstances, les faits auxquels font références les attestants dans ces documents sont destinés, sans contestation, à éclairer la solution du litige, de sorte qu'il s'agit d'attestations devant répondre aux prescriptions de l'article 324 susvisé.

La violation de ces dernières dispositions doit entraîner la nullité des attestations litigieuses.

La pièce n° 133 est constituée par une attestation respectant l'ensemble des dispositions de l'article 324 du Code de procédure civile.

La pièce n° 134 est constituée par une attestation ne respectant pas l'ensemble des dispositions de l'article 324 du Code de procédure civile.

Il n'est donné aucune précision sur un quelconque lien de subordination avec les parties.

Il est admis que les mentions exigées par l'article 324 du Code de procédure civile ne doivent pas nécessairement être reproduites à l'identique de la rédaction dudit article et que certaines informations telles notamment que l'intérêt au litige et l'existence d'un lien de subordination peuvent s'apprécier par le contenu même de l'attestation.

La régularité de l'attestation ne saurait être discutée en ce qu'elle précise que leur auteur est sans emploi ce qui induit l'absence de tout lien de subordination avec l'une ou l'autre des parties.

Par ailleurs, le troisièmement de l'article 324 du Code de procédure civile oblige l'auteur d'une attestation à mentionner sa demeure, précision absente dans le document litigieux.

La pièce d'identité y annexée ne comporte pas plus de précision sur l'adresse de Madame T. de sorte que l'absence de cette mention obligatoire doit entraîner la nullité de l'attestation.

La pièce n° 169 est constituée par une attestation respectant l'ensemble des dispositions de l'article 324 du Code de procédure civile.

Sur les pièces n° 84, 87, 89, 103 à 115, 142, 143, 154, 155, 156, 173, 174, 175-3, 175-4, 180 produites par Madame c. C.

L'employeur en sollicite le rejet pour défaut de traduction assermentée en langue française.

La pièce n° 84 est constituée d'un courrier en langue anglaise non accompagnée de sa traduction en langue française.

Elle sera dans ces circonstances rejetée des débats.

La pièce n° 87 est accompagnée d'une traduction libre en pièce n° 87-1.

En vertu de l'article 8 de la Constitution, aux termes duquel la langue française est la langue officielle de l'État de Monaco, les débats devant les juridictions monégasques doivent être menés dans cette langue et les pièces produites en langue étrangère dument traduites.

La Cour de révision dans un arrêt rendu le 14 octobre 2015 (Pourvoi n° 2014-52) exige une traduction certifiée.

Ainsi, toute pièce produite rédigée en langue étrangère doit être accompagnée de sa traduction par un traducteur assermenté, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

La pièce n° 87 sera dans ces circonstances écartée des débats.

La pièce n° 89 est rédigée en langue anglaise avec une traduction libre et partielle en langue française. Pour les mêmes motifs que ci-dessus, ce document sera écarté des débats.

Il en sera de même et pour les mêmes motifs pour les pièces n° 103 à 115.

Il s'agit en outre également de traduction partielle ce qui ne permet pas au tribunal d'avoir une vue objective de l'intégralité du document.

La pièce n° 142 est rédigée en langue anglaise avec une traduction libre en langue française. Cette pièce sera écartée des débats pour les mêmes motifs que ci-dessus.

La pièce n° 143 est rédigée en langue anglaise avec une traduction libre et partielle en langue française. Cette pièce sera écartée des débats pour les mêmes motifs que ci-dessus.

Les pièces n° 154, 155, 156, 175-3, 175-4 et 180 sont rédigées en langue anglaise avec une traduction libre en langue française.

Ces pièces seront écartées des débats pour les mêmes motifs que ci-dessus.

Les pièces n° 173, 174 sont rédigées en langue anglaise avec une traduction libre et partielle en langue française.

Ces pièces seront écartées des débats pour les mêmes motifs que ci-dessus.

Sur le motif de la rupture

Il appartient à l'employeur d'établir la réalité et la validité des motifs invoqués à l'appui de sa décision de licenciement.

En l'espèce, Madame c. C. a été licenciée par lettre du 4 septembre 2015, laquelle reproche à la salariée une insuffisance professionnelle.

La lecture de ce courrier montre que le grief évoqué par l'employeur est une insuffisance de résultats, l'incapacité de Madame c. C. à réaliser les tâches qui lui incombent « en votre qualité d'enseignant rattaché au laboratoire de recherche malgré les mesures prises par l'I.U.M. – délai supplémentaire, allègement de votre plan de charge de cours – pour vous aider à y parvenir », consistant en la non-réalisation des objectifs qui lui étaient assignés.

Ce faisant, l'employeur développe dans ses écritures une argumentation fondée sur une insuffisance professionnelle générale portant à la fois sur ses activités de recherche, le non-respect de la pédagogie arrêtée par l'I.U.M. dans ses tâches d'enseignement et un refus systématique de remise en question de son travail malgré les manquements relevés.

Force est de constater que ces griefs ne figurent pas dans la lettre de licenciement.

L'employeur n'étant pas lié par le motif énoncé dans la lettre de licenciement est en droit d'invoquer des griefs non mentionnés dans celle-ci à la condition que ceux-ci soient également à l'origine de la rupture.

Il appartient ainsi à l'employeur de démontrer que ce nouveau grief, non visé dans la lettre de rupture, aurait également été à l'origine du licenciement.

Le courrier susvisé comprend notamment le paragraphe suivant :

« (...) Ainsi, outre des manquements constatés dans l'exercice de vos tâches d'enseignement... ».

Ainsi, ce grief est visé dans la lettre de rupture, l'employeur détaillant ensuite dans ses écritures les manquements reprochés à la salariée à ce titre.

Il sera dès lors retenu.

Le Tribunal relève à ce titre que la lettre de licenciement fait état non seulement d'une insuffisance professionnelle, mais également d'une insuffisance de résultat (n'a pas atteint les objectifs qui lui ont été confiés).

Il n'est pas contesté que l'appréciation des aptitudes professionnelles et de l'adaptation à l'emploi relève du pouvoir patronal et le Juge ne peut prétendre y substituer son appréciation ; néanmoins, il convient pour celui-ci de vérifier que ses exigences étaient justifiées.

Pour constituer une cause de licenciement, l'insuffisance professionnelle doit être caractérisée par des faits objectifs et matériellement vérifiables. Il revient au Juge de vérifier l'incompétence alléguée par l'employeur, laquelle ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de celui-ci mais doit reposer sur des éléments concrets pour constituer un motif valable de licenciement.

Il incombe en conséquence à l'employeur d'apporter au Juge des éléments objectifs à l'appui des faits qu'il invoque comme propres, selon lui, à caractériser l'insuffisance professionnelle dont il se prévaut.

Par ailleurs, l'insuffisance de résultats ne constitue pas en soi une cause de licenciement, le juge doit vérifier que les objectifs étaient fixés et réalistes, et que les mauvais résultats procèdent d'une faute ou d'une insuffisance professionnelle imputable au salarié.

Elle ne résulte pas nécessairement d'un comportement volontaire mais révèle l'inaptitude du salarié à assumer ses fonctions, son incompétence.

En outre, l'insuffisance de résultats doit être constatée sur une certaine durée.

L'insuffisance professionnelle se trouve caractérisée par l'inaptitude du salarié à exercer sa prestation de travail dans des conditions que l'employeur pouvait légitimement attendre en application du contrat et devait reposer sur des éléments matériels précis et objectifs imputables au salarié ; elle se manifeste dans les répercussions en tant qu'elle perturbe la bonne marche de l'entreprise.

Madame c. C. conteste dans un premier temps les objectifs mis à sa charge par l'employeur au motif que seuls les enseignants-chercheurs y étaient astreints, ce qui n'est pas son cas, simple professeur.

Il convient dès lors de rechercher les fonctions réellement exercées par la demanderesse. Il n'existe pas de contrat de travail écrit entre les parties.

L'autorisation d'embauchage en date du 21 novembre 2003 prévoit que Madame c. C. est embauchée en qualité de Professeur.

Il s'agit du terme générique appliqué à tous les enseignants de l'I.U.M., la spécialité de chacun (matière enseignée, chercheur) n'étant pas mentionnée.

Cette affirmation est confirmée par les éléments suivants :

* pièce n° 20 : l'embauche de Madame c. C. fait suite à une lettre de candidature qu'elle a adressée à l'I.U.M. le 26 juin 2003 dans laquelle elle précisait : « (...) Aujourd'hui, je recherche un poste permanent d'enseignant-chercheur qui me permette de poursuivre l'exercice de cette vocation, de développer mes activités de recherche et de m'impliquer au sein de l'Université de Monaco »,

* pièce n° 2 produite par Madame c. C. : un courriel adressé par Madame s. R-C. suite à l'entretien d'embauche avec la première dans lequel il est mentionné que la future salariée devra réaliser des travaux de recherche,

* pièce n° 20 produite par Madame c. C. : l'évaluation de la salariée pour sa première année d'activité précise que Madame c. C. a publié un livre et travaille sur d'autres papiers. Elle ajoute ensuite le commentaire suivant : « Je ne comprends pas ce commentaire de fin d'année. 1) un commentaire de fin d'année devrait rappeler les bons résultats concernant l'enseignement, les publications et la construction des programmes... »,

* pièce n° 41 : dans son C.V., Madame c. C. indique :

« Objectif : occuper un poste à responsabilités dans l'Enseignement et la Recherche en marketing et management du luxe.

(...)

Activités continue de recherche depuis la thèse : ...

Intérêt professionnel : Dans le champ du marketing et du management stratégique du luxe notamment. Travaux de recherche en cours menés sur des sujets d'actualité et dans tous les secteurs du luxe...

Expérience professionnelle :

(...)

Depuis 2003 : International University of Monaco (IUM), Monaco,

(...)

Publications (voir plus loin le paragraphe « contributions intellectuelles »)

(...)

Contributions intellectuelles :

(...)

Articles dans des revues académiques à comité de lecture,

(articles en 2009 et 2007) (...)

Communication/proceedings dans des conférences académiques à comité de lecture

(entre 2002 et 2012), (...)

Étude de cas pour la Centrale de cas et de média pédagogique de Paris (C.C.M.P.) et la Centrale de cas européenne (E.C.C.H.),

(en 2009) (...)

Création de revue académique spécialisée (en développement),

International Journal of Luxury - the first Luxury business review - n° 1, mars 2009 Autres présentations,

(en juin et novembre 2006 à Monaco),

Autres séminaires et conférences,

(en 2003 à Seattle, 2006 à Paris, 2009 à Monaco, 2011 à Paris), (...)

Working paper pour le CEROG de l'IAE d'Aix en Provence,

(article accepté en communication à l'AIMS 2002)... ».

Il résulte de ce C.V. que Madame c. C. a exercé une activité de recherche par des publications et des participations à des conférences dès son entrée au service de l'I.U.M..

* pièce n° 16 : un courriel adressé par Madame D. L. à Monsieur Jean-Philippe M. (Directeur Général de l'I.U.M.), le 31 mars 2014, concernant les inscriptions des chercheurs de Monaco aux formations de juillet 2014, le nom de Madame c. C. figurant sur la liste transmise,

* pièce n° 17 : un courriel de Madame c. C. en date du 9 mai 2014 adressé à Madame C. V. ainsi libellé :

« Bonjour C.,

Étant donné que je suis inscrite aux trois formations, tu peux me prendre le billet aller dimanche de préférence et le billet retour le dimanche d'après de préférence... ».

* pièce n° 18 : un courriel de Monsieur Jean-Philippe M. à Madame c. C. en date du 6 septembre 2013 dans lequel il lui rappelle son entretien annuel d'évaluation le mardi suivant au cours duquel « nous aurons l'occasion d'évoquer vos objectifs et votre activité pour l'année à venir »,

* pièces n° 22 et 25 : les évaluations de Madame c. C. pour les années universitaires 2012/2013 et 2013/2014 font état d'objectifs, Madame c. C. n'en contestant pas le bien fondé,

* pièce n° 23 : un courriel de Monsieur Jean-Louis C. Marketing Professor, adressé à Madame c. C. le 11 décembre 2013, ainsi libellé :

« Bonjour Corinne,

J'ai bien reçu votre fiche de publication 2012-2013 et je vous en remercie. Voici la lettre d'évaluation.

Bien cordialement ».

Dans cette lettre d'évaluation, Monsieur Jean-Louis C. indique :

« Chère c.

Au cours des années civiles 2012-2013, vous n'avez pas publié d'article dans des revues scientifiques classées.

Vous n'atteignez donc pas deux étoiles sur deux ans, la norme de publication minimale que le groupe INSEEC et l'IUM s'engagent à respecter et dont dépend l'habilitation de leurs diplômes et les accréditations Européennes et Internationales.

Cependant, compte tenu du fait que vous avez proposé plusieurs articles de publication et par dérogation, je propose votre maintien pendant une année dans le laboratoire avec la charge de 196 heures de cours.

Cependant, si l'année prochaine vous êtes à nouveau en dessous de la norme de publication, je proposerai que votre charge de cours passe à 396 heures ».

* pièce n° 24 : un courriel de Monsieur Jean-Louis C. adressé à Madame c. C. le 12 octobre 2013 dans lequel il accuse réception de la fiche de publication de celle-ci. Il lui demande à ce titre de confirmer l'absence de toute publication dans les revues classées pour la période 2011-2012.

Madame c. C. répondra le 5 novembre 2013 en ces termes :

« Bonjour j-l.

Je viens seulement de prendre connaissance de votre mail du samedi 12 octobre ?!

Je ne sais pas pourquoi je ne l'avais pas vu. L'Outlook web par conversation n'est pas toujours clair. Désolée pour la réponse tardive.

Je vous confirme donc 0 étoile pour la période 2011-2012 qui s'explique par le contexte et en plus, se situe entre mes arrêts maternité et maladie ».

Là encore, Madame c. C. ne conteste pas le bien-fondé de son obligation de publication :

* pièce n° 48 : un courriel adressé par Madame c. C. le 20 mars 2012 à Madame M. dans lequel elle reconnaît exercer l'activité d'enseignant chercheur,

* pièce n° 47 : la fiche d'aptitude au travail en date du 25 avril 2013 déclare Madame c. C. apte à la reprise après maladie avec les commentaires suivants :

« Nécessite de disposer d'un microphone pour faire les cours

Privilégier la recherche, les publications et l'encadrement serait bénéfique pour Mme C. ».

Si le Médecin du Travail préconise de privilégier la recherche, cela induit nécessairement que Madame c. C. réalisait déjà des travaux à ce titre et en a fait part à celui-là :

* pièce n° 98 produite par Madame c. C. : elle demande ainsi à l'employeur dans un courrier en date du 30 décembre 2013 : « ... Je me permets de vous rappeler que le médecin du travail a confirmé la recommandation de mon médecin ORL concernant un rythme de cours allégé en demandant à ce que les deux autres activités d'un professeur, recherche et encadrement, soient privilégiées... ».

Il résulte ainsi de l'ensemble des éléments développés supra que Madame c. C. exerçait l'activité d'Enseignant Chercheur au sein de l'I.U.M..

Il apparait encore qu'à partir de 2013 les conditions relatives aux publications réalisées par les enseignants chercheurs ont été modifiées, ce qui ne peut en aucune manière s'analyser en une modification du contrat de travail, les fonctions de Madame c. C. étant identiques.

Le Tribunal relève encore que la salariée n'a jamais contesté son obligation de publication jusqu'à la mise en place de ces nouvelles conditions encadrantes lesdites publications.

Le changement des conditions de travail relève du pouvoir unilatéral de l'employeur : le pouvoir de direction s'exerce donc normalement sur les conditions de travail.

En procédant à un changement des conditions de travail, l'employeur ne fait qu'exercer son pouvoir de direction. Le salarié doit donc se soumettre. S'il ne le fait pas, il commet une faute pouvant entraîner son licenciement.

En l'espèce, les pièces produites par l'employeur démontrent que Madame c. C. n'a pas atteint les objectifs qui lui avaient été assignés en terme de publication, et ce, dès l'année universitaire 2011/2012 et par conséquent avant la mise en place des nouvelles conditions de publication pour la rentrée de septembre 2013 (pièce n° 24 visée supra).

L'année universitaire 2012/2013 ne verra aucune amélioration ainsi qu'il résulte de la pièce n° 23 (cf. ci-dessus).

L'évaluation annuelle pour la période 2012/2013 comporte par ailleurs les objectifs pour l'année suivante, Madame c. C. pouvant y apporter tous les commentaires qu'elle jugeait utile ; ce qu'elle a d'ailleurs fait en ces termes :

« Je n'ai pas pu travailler pendant cette année universitaire en raison de mon congé maladie. Juste avant le début de mon congé maladie, j'ai présenté les publications ou actes suivants : ... ». L'évaluation comporte en outre un paragraphe « objectifs pour l'année prochaine » :

« Accepte les attentes/objectifs définis pour l'année prochaine :

Pour l'enseignement. Faire (mot illisible) enseignements et le plan de (mot illisible) (phrase illisible) dans le domaine de la spécialité marketing/luxe.

Pour les contributions intellectuelles.

Concrétiser l'activité de recherche pour des publications dans des revues classées - au moins une publication étoilée en 2013-2014 est attendue ».

Le Tribunal relève que la salariée n'a formulé aucune observation sur ces différents objectifs et a signé l'évaluation, en acceptant ainsi les termes.

L'argumentation de la salariée tendant à assimiler sa signature comme une preuve de la tenue de l'entretien ne saurait être retenue dès lors que le formulaire comporte des cases « commentaires » destinées au salarié évalué, Madame c. C. ayant d'ailleurs formulé certaines observations dans le document produit.

Les pièces produites par la demanderesse en n° 79, 80 et 81 montrent qu'elle a procédé à diverses publications pour l'année 2012 mais aucune dans des revues classées.

Madame c. C. a également formulé des observations sur l'évaluation pour la période 2013/2014 et notamment sur ses publications, en ces termes :

« Cette surcharge en termes d'heures d'enseignement et les heures supplémentaires induites à cause des classes surchargées ont ralenti mon travail de recherche ».

Madame c. C. a été déboutée de sa demande au titre des heures supplémentaires réclamées par un jugement de ce siège en date du 23 mars 2017, de sorte que la justification de sa carence par l'exécution desdites heures n'est pas valable.

Le paragraphe « objectifs pour l'année prochaine » de cette évaluation est ainsi libellé :

« Accepte les attentes/objectifs définis pour l'année prochaine :

Pour l'enseignement : un plan de charges de 192 heures de cours comme proposé par le Directeur de la recherche afin de permettre l'activité de recherche et d'atteindre l'objectif de publications étoilées (2 étoiles sur deux ans) (suite illisible).

Pour les contributions intellectuelles :

(illisible) parvenir à la norme minimale pour un enseignant-chercheur (2 étoiles sur (illisible) ) - cf. charte des enseignants-chercheurs ».

Madame c. C. en a accepté les termes par l'apposition de sa signature et l'absence de tout commentaire sur les objectifs ainsi fixés.

Il s'est avéré par la suite que la salariée n'avait toujours pas atteint le seuil de deux étoiles sur deux ans, ainsi qu'il résulte d'un courriel de l'employeur en date du 3 décembre 2014 (pièce n° 28) :

« Bonjour c.

J'ai bien reçu votre fiche de publication 2013-2014 et je vous en remercie.

Je constate qu'elle est vide de publication dans les revues classées, comme c'était le cas pour les 4 années précédentes.

Par conséquent vous êtes à nouveau en dessous de la norme de publication.

Ma lettre d'évaluation indiquera donc, comme je vous le précisais déjà dans la lettre d'évaluation de l'année dernière, que votre charge de cours passe à 396 heures et que vous ne serez plus membre du centre de recherche tant que vous n'aurez pas atteint la norme de publication du CEFDG ».

Ce qui a conduit l'employeur à en faire état dans sa lettre d'évaluation en date du 12 décembre 2014 (pièce n° 26) :

« Chère c.

Au cours des années civiles 2013-2014, vous n'avez pas publié d'article dans les revues scientifiques classées. Vous n'avez pas non plus réalisé de publications dans les revues classées en 2011 et en 2012.

Vous n'atteignez donc pas deux étoiles sur deux ans, la norme de publication minimale que l'INSEEC s'est engagée à respecter devant la CEFDG et dont dépend l'habilitation de ses diplômes.

Nous allons devoir par conséquent nous rapprocher de la Direction générale afin d'examiner votre situation ».

C'est à partir de ce courrier que Madame c. C. a commencé à contester son statut d'Enseignant-Chercheur et à invoquer divers dysfonctionnements dans l'établissement dans son courrier en date du 6 février 2015.

Par la suite, et conformément aux objectifs assignés, l'employeur demandera à Madame c. C. par courriel en date du 14 mai 2015 (pièce n° 31) un état de ses publications et soumissions pendant la période de délai supplémentaire qui lui avait été accordé, à savoir jusqu'au 31 mai 2015 ; Monsieur Jean-Louis C. ajoutant :

« Pouvez-vous me faire parvenir, pour lundi 19 mai, un bilan pour les 5 premiers mois de 2015 ainsi qu'un planning prévisionnel concernant nos soumissions en cours ? Cela sera utile pour préparer une réunion sur ce sujet qui se déroulera sous la forme d'une conférence téléphonique à la fin du mois en présence de Jean Philippe M. ».

Loin de contester toute obligation de publication, Madame c. C. sollicitera un délai supplémentaire par mèl du 15 mai 2015, lequel lui sera accordé jusqu'à la fin du mois de mai.

Ainsi, le 26 mai 2015, la salariée adressait un mèl à Monsieur Jean-Louis C. ayant pour objet « publications en cours », en ces termes (pièce n° 33)

« Bonjour j-l.

Suite à un décès dans mon entourage proche, je n'ai pas pu revenir vers vous avant aujourd'hui.

Je suis à l'IUM et sors à l'instant d'une soutenance de thèse de BSBA.

Concernant mes recherches personnelles en cours, le bilan est un peu précoce mais je peux vous informer sur trois articles en cours qui ont de bonnes chances d'être publiés dans des journaux étoilés dans les semaines à venir...

Nous pensons soumettre les versions finales de ces papiers dans les prochains jours et avoir de bonnes chances d'être publiées dans des journaux à 1 et 2 étoiles... ».

Malgré l'engagement de la salariée, aucune publication n'interviendra, ce qui conduira l'employeur à convoquer la salariée à un entretien préalable, par courriel en date du 8 juin 2010 :

« Bonjour c.

Nous faisons suite à l'entretien d'évaluation relatif aux résultats de vos activités de recherche qui s'est déroulé le 26 mai dernier avec le professeur j-l. C. directeur de la recherche du laboratoire du groupe INSEEC, le professeur Pierre Louis D.et moi-même et au courrier vous ayant été adressé à l'issue de ce rendez-vous par le directeur de la recherche du laboratoire du groupe INSEEC.

Après analyse des éléments que vous avez apportés quand à vos projets de recherches, il ressort que vous n'avez obtenu aucune publication étoilée pendant la période qui vous a été fixée ni même soumis aucun article susceptible d'être publié à moyenne échéance auprès de revues classées.

Il apparaît ainsi nécessaire de faire un point avec vous sur l'avenir de notre collaboration.

Je vous remercie de bien vouloir vous présenter le lundi 15 juin, à 11h30 dans mon bureau afin d'en discuter. Cordialement ».

Il convient encore de constater que la salariée ne conteste pas l'absence de publications dans des revues étoilées mais se contente de le justifier en soutenant, uniquement depuis le mois de février 2015, qu'aucune obligation ne pèse sur elle à ce titre.

Il a été largement démontré supra qu'il n'en était rien.

La demanderesse invoque également le manque de moyens mis à disposition des enseignants-chercheurs mais ne produit aucun élément pour démontrer ses allégations.

Le pièce n° 140 est constituée d'un document dactylographié sans en-tête, sans signature et sans date, et ne peut dans ces circonstances être retenu.

L'insuffisance de résultats reprochée à Madame c. C. est dès lors démontrée.

Les pièces produites tant par l'employeur que par la salariée démontrent une charge de cours réduite pour cette dernière, en comparaison à ses collègues chercheurs et non chercheurs.

L'employeur produit à ce titre en pièces n° 72 à 76 les courriers adressés à l'employeur par des collègues enseignants-chercheurs de la demanderesse et dans lesquels ils justifient de leurs travaux de recherche et de publication auprès de revues étoilées, et ce, dans le délai qui leur avait été accordé.

Les revendications de Madame c. C. sur une supposée surcharge de travail ne sont dès lors pas démontrées.

Sur l'insuffisance professionnelle

L'employeur reproche à Madame c. C. une insuffisance professionnelle générale portant à la fois sur ses activités de recherche, le non-respect de la pédagogie arrêtée par l'I.U.M. dans ses tâches d'enseignement et un refus systématique de remise en question de son travail malgré les manquements relevés.

Pour justifier les griefs reprochés à la salariée à ce titre, l'employeur produit de nombreux courriers et courriels qui ont fait l'objet d'une réponse et d'une contestation de la part de Madame c. C.

Il apparaît cependant que Madame c. C. n'a jamais réussi à atteindre les objectifs de publication qui lui était donnés et ce, malgré les aménagements, les délais accordés et les moyens mis en place par l'employeur pour ce faire, ce qui dénote une insuffisance professionnelle certaine et une inaptitude de la salariée à assumer ses fonctions.

Il résulte ainsi des explications développées supra que le licenciement de Madame c. C. est fondé sur un motif valable.

La salariée sera dans ces circonstances déboutée de sa demande d'indemnité de licenciement.

Sur le caractère abusif du licenciement

Tout licenciement fondé sur un motif valable peut néanmoins présenter un caractère abusif si le salarié, auquel incombe la charge de cette preuve, démontre que l'employeur a méconnu certaines dispositions légales lors de la mise en œuvre de la rupture ou si les conditions matérielles ou morales de sa notification présentent un caractère fautif ou révèlent une intention de nuire ou la légèreté blâmable de l'employeur.

Un licenciement peut être considéré comme abusif (qu'il ait été reconnu valable ou non) si l'employeur a avancé pour le justifier un faux motif, c'est-à-dire un motif qui n'était pas le motif réel qui l'a conduit à prendre cette décision et qui voulait « tromper », ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Il appartient à celui qui réclame des dommages-intérêts, de prouver outre le préjudice subi, l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ou dans la précipitation, la brutalité ou la légèreté blâmable avec lesquelles le congédiement a été donné.

En application de l'article 13 de la loi n° 729 du 16 mars 1963, toute rupture abusive du contrat de travail peut donner lieu à des dommages et intérêts.

Au cas particulier, Madame c. C. sollicite d'être indemnisée à hauteur de la somme de 84.000 euros en réparation de son préjudice financier et moral.

L'analyse qui précède a permis de constater que les griefs énoncés dans la lettre de licenciement se sont avérés fondés.

À ce titre, la jurisprudence monégasque considère que le licenciement fondé sur un faux motif ou un motif fallacieux constitue un abus. Par ailleurs, la jurisprudence civile relative à l'abus de droit en caractérise également l'existence en l'absence de motif légitime à exercer le droit.

Pour autant, le motif fallacieux se caractérise par la fausseté du grief invoqué combinée à la volonté de tromperie et de nuisance de celui qui l'invoque.

Force est de constater que Madame c. C. qui a la charge de la preuve à ce titre, ne démontre pas que le licenciement serait intervenu pour une autre cause que celle visée dans la lettre de licenciement.

Dans ces circonstances, la décision de rupture n'est pas fondée sur un motif fallacieux et ne présente donc pas en elle-même un caractère fautif ; ainsi, aucune faute de l'employeur ne peut ouvrir droit à l'indemnisation d'un préjudice matériel et financier résultant du licenciement.

Madame c. C. invoque la brutalité de la rupture dans la mesure où l'I.U.M. lui a fait croire qu'elle continuerait ses activités de professeur.

Elle produit pour le démontrer des courriels en pièces n° 48 à 52 dans le cadre de la rentrée universitaire 2015/2016.

Il apparaît néanmoins que ces mèls ont été adressés à l'ensemble du corps enseignant et du « staff », ce qui ne permet pas dès lors de retenir une quelconque intention de nuire.

Les pièces du dossier montrent que :

* l'employeur a tenté de licencier Madame c. C. pendant la période de protection, celle-ci étant déléguée du personnel,

* il l'a convoquée à un entretien préalable par courrier du 8 juin 2015,

* la Commission de licenciement a refusé le licenciement,

* malgré ce, Madame c. C. a demandé à des étudiants et anciens étudiants l'établissement de lettres de recommandation dès le 15 juin 2015 (date de l'entretien préalable) ; elle a ainsi commencé à constituer un dossier dans le cadre d'une rupture éventuelle,

* à l'issue de sa période de protection, l'employeur a de nouveau convoqué la demanderesse à un entretien par mèl en date du 31 août 2015, en ces termes :

« Bonjour c.

Faisant suite à notre entretien du 15 juin dernier, nous souhaitons refaire un point avec vous sur l'année écoulée et l'avenir de notre collaboration.

Je vous remercie de bien vouloir vous présenter le mercredi 2 septembre à 11h30 dans mon bureau afin d'en discuter.

Cordialement ".

Même si l'éventualité d'une rupture n'est pas précisée, le renvoi à l'entretien du 15 juin 2015 au terme duquel la volonté de rompre le contrat avait été notifiée à la salariée ne pouvait laisser planer aucun doute sur les intentions de l'employeur.

Il ne peut dès lors être retenu un quelconque abus dans les circonstances entourant la rupture.

Madame c. C. sera dans ces circonstances déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Succombant dans ses prétentions, la demanderesse sera condamnée aux dépens.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et après en avoir délibéré,

Rejette l'exception d'irrecevabilité tenant à l'unicité de l'instance ;

Rejette des débats les pièces n° 178, 84, 87, 89, 103 à 115, 142, 143, 154, 155, 156, 173, 174, 175-3, 175-4 et 180 produites par Madame c. C. ;

Prononce la nullité des attestations produites par Madame c. C. en pièces n° 27 à 34 et 134 ;

Dit que le licenciement de Madame c. C. par la société anonyme monégasque L'INTERNATIONAL UNIVERSITY OF MONACO repose sur une cause valable et ne revêt pas un caractère abusif ;

Déboute Madame c. C. de toutes ses demandes ; Condamne Madame c. C. aux dépens.

Composition

Ainsi jugé par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, Monsieur Daniel BERTI, Madame Carol MILLO, membres employeurs, Monsieur Robert TARDITO, Madame Anne-Marie PELAZZA, membres salariés, et prononcé en audience publique du Tribunal du Travail de la Principauté de Monaco, au Palais de Justice, le vingt-sept septembre deux mille dix-huit, par Monsieur Michel SORIANO, Juge de Paix, Président du Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, en présence de Messieurs Daniel BERTI, Robert TARDITO, Madame Carol MILLO et Madame Anne-Marie PELAZZA, étant empêchée, assistés de Madame Christèle SETTINIERI, Secrétaire adjoint.

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Synthèse
Numéro d'arrêt : 17303
Date de la décision : 27/09/2018

Analyses

Il appartient à l'employeur d'établir la réalité et la validité des motifs invoqués à l'appui de sa décision de licenciement.Il n'est pas contesté que l'appréciation des aptitudes professionnelles et de l'adaptation à l'emploi relève du pouvoir patronal et le Juge ne peut prétendre y substituer son appréciation ; néanmoins, il convient pour celui-ci de vérifier que ses exigences étaient justifiées.Pour constituer une cause de licenciement, l'insuffisance professionnelle doit être caractérisée par des faits objectifs et matériellement vérifiables. Il revient au Juge de vérifier l'incompétence alléguée par l'employeur, laquelle ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de celui-ci mais doit reposer sur des éléments concrets pour constituer un motif valable de licenciement.Il incombe en conséquence à l'employeur d'apporter au Juge des éléments objectifs à l'appui des faits qu'il invoque comme propres, selon lui, à caractériser l'insuffisance professionnelle dont il se prévaut.Par ailleurs, l'insuffisance de résultats ne constitue pas en soi une cause de licenciement, le juge doit vérifier que les objectifs étaient fixés et réalistes, et que les mauvais résultats procèdent d'une faute ou d'une insuffisance professionnelle imputable au salarié.Elle ne résulte pas nécessairement d'un comportement volontaire mais révèle l'inaptitude du salarié à assumer ses fonctions, son incompétence.En outre, l'insuffisance de résultats doit être constatée sur une certaine durée.L'insuffisance professionnelle se trouve caractérisée par l'inaptitude du salarié à exercer sa prestation de travail dans des conditions que l'employeur pouvait légitimement attendre en application du contrat et devait reposer sur des éléments matériels précis et objectifs imputables au salarié ; elle se manifeste dans les répercussions en tant qu'elle perturbe la bonne marche de l'entreprise.Le changement des conditions de travail relève du pouvoir unilatéral de l'employeur : le pouvoir de direction s'exerce donc normalement sur les conditions de travail.En procédant à un changement des conditions de travail, l'employeur ne fait qu'exercer son pouvoir de direction. Le salarié doit donc se soumettre. S'il ne le fait pas, il commet une faute pouvant entraîner son licenciement.Tout licenciement fondé sur un motif valable peut néanmoins présenter un caractère abusif si le salarié, auquel incombe la charge de cette preuve, démontre que l'employeur a méconnu certaines dispositions légales lors de la mise en œuvre de la rupture ou si les conditions matérielles ou morales de sa notification présentent un caractère fautif ou révèlent une intention de nuire ou la légèreté blâmable de l'employeur.Un licenciement peut être considéré comme abusif (qu'il ait été reconnu valable ou non) si l'employeur a avancé pour le justifier un faux motif, c'est-à-dire un motif qui n'était pas le motif réel qui l'a conduit à prendre cette décision et qui voulait « tromper », ce qui n'est pas le cas en l'espèce.Il appartient à celui qui réclame des dommages-intérêts, de prouver outre le préjudice subi, l'existence d'une faute commise par l'employeur dans l'exercice de son droit de mettre fin au contrat de travail, laquelle peut consister dans l'allégation d'un motif de rupture fallacieux ou dans la précipitation, la brutalité ou la légèreté blâmable avec lesquelles le congédiement a été donné.En application de l'article 13 de la loi n° 729 du 16 mars 1963, toute rupture abusive du contrat de travail peut donner lieu à des dommages et intérêts.La jurisprudence monégasque considère que le licenciement fondé sur un faux motif ou un motif fallacieux constitue un abus. Par ailleurs, la jurisprudence civile relative à l'abus de droit en caractérise également l'existence en l'absence de motif légitime à exercer le droit.Pour autant, le motif fallacieux se caractérise par la fausseté du grief invoqué combinée à la volonté de tromperie et de nuisance de celui qui l'invoque.

Social - Général  - Rupture du contrat de travail  - Conditions de travail.

Contrat de travail - Licenciement - Motif de la rupture - Insuffisance professionnelle (oui) - Indemnité de licenciement (non) - Rupture abusive (non) - Dommages-intérêts (non).


Parties
Demandeurs : Mme c. CO.
Défendeurs : Société anonyme monégasque dénommée INTERNATIONAL UNIVERSITY OF MONACO

Références :

article 59 de la loi n° 446 du 16 mai 1946
article 103 du Code pénal
article 8 de la Constitution
loi n° 459 du 19 juillet 1947
article 323 du Code de procédure civile
article 324 du Code de procédure civile
article 13 de la loi n° 729 du 16 mars 1963


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.du.travail;arret;2018-09-27;17303 ?

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