La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/2004 | MONACO | N°6699

Monaco | Tribunal du travail, 6 mai 2004, r PA-BU c/ SAM Centre d'hémodialyse privé de Monaco


Abstract

Licenciement pour motif personnel - Lettre de rupture ne fixant pas les limites du litige - Promesse d'embauche acceptée

Résumé

Il est constant en droit positif monégasque que l'employeur n'est pas lié par les motifs exposés dans la lettre de rupture.

Un infirmier recruté par un établissement privé médical le 2 janvier 2002, est licencié le 29 novembre de la même année pour une attitude outrageante à l'égard de la surveillante de l'établissement, des difficultés relationnelles avec ses collègues, des observations désobligeantes formulées

par certains patients et une campagne de dénigrement qu'il aurait mené à l'encontre de l'é...

Abstract

Licenciement pour motif personnel - Lettre de rupture ne fixant pas les limites du litige - Promesse d'embauche acceptée

Résumé

Il est constant en droit positif monégasque que l'employeur n'est pas lié par les motifs exposés dans la lettre de rupture.

Un infirmier recruté par un établissement privé médical le 2 janvier 2002, est licencié le 29 novembre de la même année pour une attitude outrageante à l'égard de la surveillante de l'établissement, des difficultés relationnelles avec ses collègues, des observations désobligeantes formulées par certains patients et une campagne de dénigrement qu'il aurait mené à l'encontre de l'établissement. Contestant les motifs de la rupture et alléguant n'avoir pas reçu intégralement paiement de son temps de travail, ni été payé du treizième mois prévu par la promesse d'embauche, il avait attrait son employeur devant le bureau de jugement du Tribunal du Travail en paiement de rappel de salaires, indemnité de licenciement et dommages et intérêts pour rupture abusive.

L'employeur, quant à lui, se référait à la promesse d'embauche acceptée qui ne prévoyait le treizième mois qu'à compter de la deuxième année d'ancienneté et estimait non rapportée la preuve d'heures supplémentaires. Il tenait le licenciement pour suffisamment fondé d'autant que la lettre de rupture ne fixe pas les limites du litige en droit monégasque.

Le Tribunal du Travail rejette la demande de treizième mois, rappelant le principe du consensualisme en vigueur qui valide la force de la promesse d'embauche acceptée qui peut d'ailleurs être modifiée tant que l'offre n'a pas été acceptée, et ce, sans qu'il soit besoin de contrat rédigé. En l'occurrence, l'offre acceptée n'accorde le bénéfice du treizième mois qu'à compter de la deuxième année d'ancienneté. L'infirmier ne remplissait donc pas les conditions pour l'obtenir. Les heures supplémentaires ne sont pas démontrées, en raison des arrivées tardives sur son lieu de travail et du refus du salarié de participer à des séances de coordination. Enfin, les motifs exposés dans la lettre de rupture ne lient pas l'employeur et celui-ci peut faire état d'autres griefs, dès lors que ceux-ci existaient au moins en germe, lors du licenciement. Les pièces versées aux débats démontrent la légitimité du licenciement intervenu après deux avertissements. Le salarié est débouté de ses demandes de paiement d'indemnités.

Motifs

Le Tribunal,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu la requête introductive d'instance en date du 20 janvier 2003 et reçue le 21 janvier 2003 ;

Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 4 mars 2003 ;

Vu les conclusions déposées par Monsieur r PA-BU, en personne, en date des 10 avril 2003, 26 juin 2003 et 20 novembre 2003 ;

Vu les conclusions déposées par Maître Jacques SBARRATO, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, au nom de la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO, en date des 22 mai 2003, 16 octobre 2003 et 18 décembre 2003 ;

Ouï Monsieur r PA-BU, en personne, en ses observations et explications ;

Ouï Maître Jacques SBARRATO, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, au nom de la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO, en sa plaidoirie ;

Vu les pièces du dossier ;

*

Recruté par la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO, aux termes d'une proposition d'embauche en date du 12 octobre 2001 acceptée le 24 octobre 2001, en qualité d'infirmier à compter du 2 janvier 2002, moyennant paiement d'un salaire brut de base de 14.000 F, r PA-BU a été licencié de cet emploi le 29 novembre 2002.

Les motifs de ce licenciement, tels qu'ils sont exposés dans la lettre de rupture, s'énoncent comme suit :

«  Monsieur,

»  Je fais suite à l'entretien du 26 novembre dernier, si toutefois je peux « utiliser ce terme, car pour toute réponse à mes propos, vous m'avez » renvoyé à votre courrier posté le 25 novembre 2002.

«  Je viens de prendre connaissance de ce courrier qui ne mérite » certainement pas une réponse point par point, en vous laissant la « responsabilité de votre appréciation des faits et de l'éclairage pour le » moins personnel que vous y apportez.

«  Je retiens que vous avez été rappelé à l'ordre pour des retards qui » perturbent le service et les patients, de même que je retiens une absence « injustifiée pour le 20 novembre 2002.

»  Vous prétendez être attaché à la qualité des soins, mais vous négligez « le respect élémentaire des horaires de travail, politesse minimale vis-à-vis des patients, et vous vous absentez sans accepter d'en justifier de » manière suffisante, ce qui vous a valu une sanction disciplinaire justifiée.

«  Ma vision de la qualité des soins et du respect des malades qui n'est » pas compatible avec votre désinvolture vis-à-vis des patients « notamment, m'amène à décider aujourd'hui de mettre fin à votre contrat » de travail pour que cessent les difficultés relationnelles avec vos « collègues de travail ainsi que les observations désobligeantes de certains » patients dont vous vous êtes occupé.

«  Vos propos relatifs à notre établissement et à son équipe soignante » ont fortement pesé sur la décision que je vous notifie par la présente.

«  Votre contrat de travail prendra fin au terme d'un préavis d'un mois » qui commencera à courir dès présentation du présent courrier, et se « terminera le 31 décembre 2002 ».

Estimant d'une part ne pas avoir été intégralement rempli de ses droits au cours de l'exécution de son contrat de travail, et soutenant d'autre part que son licenciement était non seulement dépourvu de motif valable mais revêtait en outre un caractère abusif, r PA-BU, ensuite d'un procès-verbal de défaut en date du 3 mars 2003, a attrait la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO, devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, à l'effet d'obtenir l'allocation à son profit, « toutes causes confondues » d'une somme de 41.340 € se décomposant comme suit :

– rappel de salaires 997,00 €,

– « indemnité de licenciement, préjudice moral, légèreté blâmable, préjudice financier et professionnel et licenciement abusif » 40.343,00 €.

À l'audience fixée par les convocations les parties ont régulièrement comparu.

Puis, après sept renvois intervenus à leur demande, l'affaire a été contradictoirement débattue le 1er avril 2004 et le jugement mis en délibéré pour être prononcé ce jour 6 mai 2004.

r PA-BU expose en premier lieu, à l'appui de ses prétentions, après avoir liminairement sollicité la communication par la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO sous astreinte de son règlement intérieur, qu'il n'a pas été intégralement rempli de ses droits au cours de l'exécution de son contrat de travail dans la mesure où d'une part il n'a pas reçu paiement du temps de travail quotidiennement consacré à la transmission orale des consignes à ses collègues de travail, à savoir un quart d'heure par matinée de présence, et où d'autre part le prorata du treizième mois prévu par la promesse d'embauche initiale ne lui a pas été réglé par son employeur.

Il sollicite, en conséquence, le paiement par la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO :

1) d'une somme de 199,20 €, au titre du treizième mois de salaire,

2) d'une somme de 359,10 €, au titre des heures supplémentaires, calculée comme suit :

84 ¼ d'heure, soit 21 heures, au taux horaire majoré de 17,10 €.

r PA-BU soutient, en second lieu, que les différents griefs invoqués à son encontre par son ancien employeur dans la lettre de rupture, laquelle fixe les limites du présent litige, ne constituent pas un motif valable de licenciement.

Il fait valoir, en substance, à cet effet :

– que ses éventuels retards, tout comme l'absence exceptionnelle du 21 novembre 2002, ont déjà été sanctionnés par les deux avertissements qui lui ont été successivement infligés les 14 novembre et 21 novembre 2002,

– qu'aucun élément nouveau n'est intervenu postérieurement au 21 novembre 2002,

– que les dispositions de l'article 6 de la Convention Collective Nationale du Travail n'ont, en tout état de cause, pas été respectées en l'espèce,

– que le courrier adressé par ses soins au cours du mois de janvier à la DASS, « dans un intérêt de santé publique », ne peut être valablement invoqué à l'appui du licenciement par le CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO, dès lors d'une part que son caractère calomnieux n'est pas établi et d'autre part et surtout, qu'il s'avère largement postérieur à la rupture du contrat de travail :

– que les attestations censées établir les difficultés relationnelles avec ses collègues de travail et sa désinvolture à l'égard des patients sont non seulement dépourvues de valeur juridique, eu égard aux irrégularités de forme qu'elles comportent, mais s'avèrent en outre entachées de rancunes et de contrevérités.

Il demande en conséquence à la présente juridiction de sanctionner la non validité du motif de rupture allégué par la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO en lui allouant, au titre de l'indemnité prévue par l'article 2 de la loi n° 845, la somme de 1.477,44 €.

Prétendant enfin que la légèreté blâmable et la brutalité dont son ancien employeur a fait preuve confèrent, combinées avec l'allégation d'un motif de rupture fallacieux, au licenciement intervenu un caractère abusif, r PA-BU sollicite enfin que l'importante atteinte portée à sa réputation et à son honneur d'une part, et le préjudice à caractère matériel subi par ses soins d'autre part, soient équitablement réparés par l'allocation à son profit d'une somme de 4.343,04 €, à titre de dommages et intérêts, se décomposant comme suit :

* 3.585,60 €, soit un mois et demi de salaire, en réparation de son préjudice à caractère moral,

* 1.195,20 €, soit un demi mois de salaire, en réparation du préjudice causé par la légèreté blâmable,

* 5.400,00 €, en réparation du préjudice financier et professionnel,

* 28.684,80 €, (soit douze mois de salaire) sanctionnant l'abus dans la mise en œuvre par l'employeur de son droit unilatéral de rupture, le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire.

Estimant quant à elle que r PA-BU, qui a été rempli, pendant l'exécution de son contrat de travail, de tous ses droits, s'est rendu coupable de fautes suffisamment graves pour justifier et fonder valablement la mesure de licenciement prise à son encontre, la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO conclut au rejet de l'intégralité des prétentions formulées à son encontre par son ancien salarié.

Elle invoque, à cette fin, les moyens suivants :

* En ce qui concerne la demande de communication sous astreinte du règlement intérieur

Que cette demande, à défaut d'avoir été soumise au préliminaire de conciliation, n'est pas recevable.

Qu'en tout état de cause, l'employeur se trouve dans l'impossibilité matérielle d'y répondre, le projet de règlement intérieur élaboré par ses soins n'ayant, à ce jour, toujours pas reçu l'agrément de l'inspecteur du travail.

* En ce qui concerne les demandes afférentes à l'exécution du contrat de travail :

– que la proposition d'embauche du 12 octobre 2001, dont r PA-BU a accepté tous les termes sans aucune réserve et qui constitue donc la loi entre les parties, stipulant expressément que le treizième mois ne sera versé qu'à compter de la deuxième année de présence dans l'établissement, l'intéressé, à défaut de remplir la condition d'ancienneté requise, ne peut prétendre à l'allocation d'aucune somme à ce titre,

– que le demandeur ne rapporte pas la preuve de l'existence des dépassements d'horaires dont il se prévaut,

– qu'en outre l'intéressé qui, selon les témoignages versés aux débats, ne participait jamais « aux transmissions des informations à l'équipe suivante » est mal fondé à solliciter le règlement d'heures supplémentaires.

* En ce qui concerne les demandes afférentes à la rupture du contrat de travail :

– qu'à partir du moment où Mesdames BE et CH ont clairement mentionné dans leur témoignage la fonction qu'elles occupaient au sein du CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO, l'erreur commise quant à l'existence du lien de subordination les unissant à cette dernière n'est pas de nature à entacher ces attestations de nullité,

– qu'en tout état de cause la loi « n'exclut pas le témoignage de personnes se trouvant dans un lien de subordination »,

– qu'en droit monégasque la lettre de licenciement n'ayant pour effet que de notifier la décision et de faire courir le délai de préavis ? les motifs éventuellement invoqués par l'employeur dans ce document ne fixent pas les termes du litige entre les parties,

– qu'en l'espèce la décision de licenciement prise par l'employeur se trouve justifiée par les éléments suivants :

* les propos injurieux tenus le 21 novembre 2002 par r PA-BU à l'égard de son supérieur hiérarchique,

* la campagne de dénigrement du CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO entreprise par l'intéressé auprès des autorités compétentes en matière de santé, démontrant sa volonté de déstabiliser le service et de discréditer son employeur,

* les fautes ainsi commises se trouvant au surplus aggravées par l'existence de deux avertissements préalables, sanctionnant des retards réguliers et une absence injustifiée,

– qu'aucune faute n'ayant été commise par l'employeur dans la mise en œuvre de son droit unilatéral de rupture, le licenciement intervenu ne revêt aucun caractère abusif.

SUR CE,

1) Sur la demande tendant à obtenir la communication sous astreinte par la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO de son règlement intérieur

Dès lors qu'il résulte des correspondances échangées entre la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO d'une part et les services de l'inspection du travail d'autre part que le projet de règlement intérieur soumis le 3 avril 2000 par la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO à l'inspection du travail n'avait, à la date du 18 juin 2003, toujours pas reçu l'agrément de cette administration, et ne pouvait donc être valablement appliqué « en l'état », la demande formée par r PA-BU tendant à voir ordonner la communication aux débats, sous astreinte, par son ancien employeur de ce document ne peut être satisfaite.

2 ) Sur les demandes afférentes à l'exécution du contrat de travail

a) prorata de treizième mois

En application des dispositions de l'article 2 de la loi n° 729, le contrat de travail est soumis aux règles du droit civil commun, et peut ainsi, conformément au principe dit du consensualisme, être stipulé dans les formes qu'il convient aux parties d'adopter.

La rencontre des volontés de l'employeur et du salarié, qui n'a donc pas nécessairement à se traduire concrètement par un contrat rédigé en deux exemplaires signé par les parties, peut valablement prendre la forme d'une proposition écrite d'embauche de l'employeur suivie d'une acceptation expresse ou même implicite du salarié.

Il est constant enfin que tant que son offre d'embauche n'a pas été acceptée par le salarié, l'employeur peut en modifier les termes voire même la retirer.

En l'espèce il résulte des correspondances échangées entre les parties que par lettre en date du 27 juillet 2001, la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO a proposé à r PA-BU un emploi d'infirmier moyennant paiement d'un salaire mensuel net de 10.000 F pour 36 heures de travail, auquel s'ajoutaient diverses majorations, primes ou indemnités et notamment un treizième mois payable sans condition d'ancienneté pour moitié en juin et en décembre.

Qu'aucune réponse n'ayant été apportée par r PA-BU à ce courrier, la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO, par lettre en date du 12 octobre 2001, lui a notifié une nouvelle proposition d'embauche, comportant des conditions globalement plus favorables (contrat à durée indéterminée au lieu de contrat à durée déterminée – salaire brut porté à 14.000 F outre une prime de dialyse de 1.680 F), à l'exception du treizième mois, au bénéfice duquel le salarié ne pourrait prétendre « qu'à compter de la deuxième année de présence dans l'établissement ».

Qu'enfin, par un courrier en date du 24 octobre 2001, faisant exclusivement référence à l'offre modifiée du 12 octobre 2001, r PA-BU a accepté la proposition d'embauche qui lui avait été faite par le CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO.

Qu'en conséquence l'engagement de l'intéressé au sein du CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO à compter du 2 janvier 2002 s'est effectué aux conditions prévues par l'offre du 12 octobre 2001, dont il a accepté sans réserve tous les termes.

r PA-BU, dont le contrat de travail a pris fin, préavis d'un mois inclus, le 31 décembre 2002, ne remplissant pas la condition d'ancienneté exigée par l'offre du 12 octobre 2001, qui constitue en l'espèce la loi des parties, pour prétendre au bénéfice de l'indemnité de treizième mois, ce dernier doit être débouté de sa demande de ce chef.

b) heures supplémentaires

La période consacrée à la transmission des consignes entre l'équipe soignante du matin et celle de l'après-midi, dès lors qu'elle a été expressément incluse par l'employeur dans la planification de la journée de travail des équipes d'infirmiers du matin et de l'après-midi (cf. pièces produites en annexe 12 par r PA-BU) constitue incontestablement un temps de travail ouvrant droit à rémunération.

Dès lors toutefois qu'il résulte en l'espèce des indications contenues dans la lettre adressée le 3 octobre 2002 au Directeur du CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO par r PA-BU que ce dernier se refusait à participer à ces séances, au motif que la confidentialité des données et informations médicales n'y était pas respectée, l'intéressé, qui ne démontre pas en tout état de cause, en l'état de ses arrivées tardives fréquentes sur son lieu de travail (cf. lettre de mise en garde du 30 septembre 2002 et avertissement du 14 novembre 2002), avoir accompli une durée hebdomadaire de travail supérieure aux 36 heures pour lesquels il était rémunéré, doit être débouté de sa demande en paiement d'heures supplémentaires.

3) Sur les demandes afférentes à la rupture du contrat de travail

a) validité du motif de rupture

Il est constant, en droit positif monégasque, que l'employeur n'est pas lié par les motifs exposés dans la lettre de notification de la rupture.

Que celui-ci est donc en droit, lorsque la légitimité du licenciement se trouve contestée devant le Tribunal du Travail, de faire état d'autres griefs, non visés dans la lettre de rupture, à partir du moment où ceux-ci existaient ou se trouvaient au moins en germe à la date du congédiement.

En l'espèce, il résulte des termes de la lettre de notification de la rupture et des conclusions déposées par le conseil du CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO devant la présente juridiction que les motifs du licenciement de r PA-BU sont les suivants :

– l'attitude outrageante qu'aurait adoptée ce salarié le 21 novembre 2002 à l'égard de la surveillante de l'établissement,

– les difficultés relationnelles qu'il aurait eues avec ses collègues de travail,

– les observations désobligeantes qu'auraient formulées à son encontre certains patients,

– la campagne de dénigrement qu'il aurait menée à l'égard du CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO et de son responsable légal mais aussi de l'ensemble du personnel.

L'employeur s'étant en outre expressément prévalu des deux avertissements notifiés les 14 et 21 novembre 2002 à l'intéressé, sanctionnant pour le premier des retards réguliers à la prise de service et pour le second une absence injustifiée au travail le 20 novembre 2002.

Si la charge de la preuve de la validité du ou des motifs de rupture incombe certes exclusivement à l'employeur, force est de constater toutefois qu'en versant aux débats :

– la convocation adressée le 21 novembre 2002 à r PA-BU faisant expressément référence à l'incident l'ayant opposé le 21 novembre 2002 à Madame PI-FR ainsi que la correspondance adressée par cette dernière le 17 mars 2003 à Madame NE, Directrice de l'Action Sanitaire et Sociale,

– la lettre adressée le 25 novembre 2002 à son employeur par r PA-BU, en réponse à la convocation susvisée, aux termes de laquelle ce dernier indique littéralement qu'« afin de ne pas continuer à exercer dans la précarité des soins de sa responsabilité professionnelle », il saisit « les autorités compétentes pour les informer sous le respect de la confidentialité… et rétablir à leur discrétion un soin de qualité de rigueur et de responsabilité professionnelle dans le strict intérêt des malades avant l'intérêt économique »,

– les correspondances échangées entre la Direction du CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO et le Directeur de la DASS,

– la copie du rapport d'inspection dressé le 13 février 2003 par le Médecin inspecteur de l'Action Sanitaire et Sociale.

la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO démontre l'existence d'une part de l'attitude outrageante adoptée le 21 novembre 2002 par r PA-BU à l'égard de son supérieur hiérarchique, Madame PI-FR, et d'autre part et surtout des graves critiques portées par ce salarié à l'égard du CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO et de l'ensemble de son personnel dès le 25 novembre 2002, soit antérieurement à la rupture de son contrat de travail.

Le rapport d'inspection dressé le 13 février 2003 par le médecin inspecteur de l'Action Sanitaire et Sociale, ensuite de la dénonciation effectuée par r PA-BU auprès de la direction de la DASS, ayant permis d'établir le caractère infondé de ces critiques, qu'il s'agisse des compétences du personnel soignant, des conditions dans lesquelles sont assurés les soins ainsi que la surveillance et la maintenance du matériel, du respect de la confidentialité des données médicales, etc, la campagne de dénigrement de son employeur, amorcée par l'intéressé dès le 25 novembre 2002 d'une part et l'attitude outrageante dont celui-ci a fait preuve à l'égard de son supérieur hiérarchique le 21 novembre 2002 d'autre part constituent de graves violations par l'intéressé des obligations résultant de son emploi, justifiant incontestablement, en l'état des deux avertissements précédemment notifiés, la mesure de licenciement dont il a fait l'objet.

Le licenciement de r PA-BU reposant ainsi sur un motif valable, ce dernier ne peut prétendre au bénéfice de l'indemnité prévue par l'article 2 de la loi n° 845.

b) sur le caractère abusif du licenciement

Dès lors que la mise en œuvre par l'employeur de son droit unilatéral de rupture a été précédée de deux avertissements, les dispositions de l'article 6 de la Convention Collective Nationale du Travail invoquées par r PA-BU ont bien été respectées, les exigences supplémentaires posées par ce texte, à savoir une mention apposée sur le « registre du délégué » n'ayant qu'un caractère subsidiaire.

La notification du licenciement ayant par ailleurs été précédée d'un entretien préalable, la précipitation dont l'employeur aurait selon r PA-BU, fait preuve, n'est pas davantage établie.

Le motif invoqué à l'appui de la rupture ne revêtant enfin aucun caractère fallacieux, r PA-BU, à défaut d'avoir démontré l'existence de la faute commise par son employeur dans la mise en œuvre de son droit unilatéral de rupture, ne peut prétendre à l'allocation de dommages et intérêts.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort, après en avoir délibéré.

Dit que le licenciement de r PA-BU par la SAM CENTRE D'HÉMODIALYSE PRIVÉ DE MONACO repose sur un motif valable.

Dit en outre que cette mesure ne revêt pas de caractère abusif.

Déboute en conséquence r PA-BU de l'intégralité de ses prétentions.

Condamne r PA-BU aux entiers dépens.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6699
Date de la décision : 06/05/2004

Analyses

Rupture du contrat de travail ; Établissement de santé ; Conditions de travail


Parties
Demandeurs : r PA-BU
Défendeurs : SAM Centre d'hémodialyse privé de Monaco

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.du.travail;arret;2004-05-06;6699 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award