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13/02/2003 | MONACO | N°6563

Monaco | Tribunal du travail, 13 février 2003, r AL c/ la Société Anonyme Monégasque EUROPA ASSURANCES


Abstract

Qualification de la rupture - Licenciement ou départ en retraite - Charge de la preuve pesant sur l'employeur -Accessoires de salaires impayés

Résumé

En cas de doute sur l'initiative, il appartient à l'employeur de démontrer le caractère volontaire du départ du salarié

Lorsqu'un salarié soutient avoir été licencié par son employeur qui estime pour sa part que le salarié a pris l'initiative d'un départ en retraite, il appartient à l'employeur de démontrer par tous moyens que ce départ du salarié revêtait un caractère volontaire. À défa

ut, la rupture est requalifiée en licenciement.

En l'espèce, divers documents établissent le ...

Abstract

Qualification de la rupture - Licenciement ou départ en retraite - Charge de la preuve pesant sur l'employeur -Accessoires de salaires impayés

Résumé

En cas de doute sur l'initiative, il appartient à l'employeur de démontrer le caractère volontaire du départ du salarié

Lorsqu'un salarié soutient avoir été licencié par son employeur qui estime pour sa part que le salarié a pris l'initiative d'un départ en retraite, il appartient à l'employeur de démontrer par tous moyens que ce départ du salarié revêtait un caractère volontaire. À défaut, la rupture est requalifiée en licenciement.

En l'espèce, divers documents établissent le caractère volontaire de la rupture à l'initiative du salarié : (attestations de collègues sur sa volonté de prendre sa retraite, attestation d'un salarié d'un cabinet comptable ayant renseigné le salarié sur ses droits acquis en cas de départ à la retraite, extrait de presse relatant la réception organisée à l'occasion du départ à la retraite du salarié). Le salarié qui n'avait pas, en outre, soutenu la qualification de licenciement lors de la dénonciation du solde de tout compte doit voir sa demande de requalification rejetée.

Diverses sommes lui sont cependant allouées, à titre d'accessoires de salaires, sur le fondement de la convention collective, ainsi que des dommages intérêts pour non-paiement, en temps voulu, de ces sommes.

Motifs

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu la requête introductive d'instance en date du 7 juin 2001, reçue le 8 juin 2001 ;

Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 26 juin 2001 ;

Vu les conclusions déposées par Monsieur r AL, en personne, en date des 4 octobre 2001, 14 mars 2002 et 10 octobre 2002 ;

Vu les conclusions déposées par Maître Étienne LEANDRI, avocat-défenseur, au nom de la Société Anonyme Monégasque EUROPA ASSURANCES, en date des 20 décembre 2001, 31 janvier 2002 et 2 mai 2002 ;

Ouï Monsieur r AL, en personne, en ses observations et explications ;

Ouï Maître Etienne LEANDRI, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, au nom de la Société Anonyme Monégasque EUROPA ASSURANCES,

Lesdits partie et avocat-défenseur ayant repris et maintenu ce jour leurs conclusions en l'état de la composition différente du Tribunal ;

Vu les pièces du dossier ;

Embauché selon contrat de travail en date du 27 décembre 1990 par la SAM EUROPA ASSURANCES à compter du 14 janvier 1991, en qualité de producteur salarié, r AL a cessé ses fonctions au sein de cette société le 31 mai 2000.

Soutenant d'une part qu'à partir du moment où il n'avait jamais manifesté son intention de faire valoir ses droits à la retraite, la rupture de son contrat de travail s'analysait en réalité en un licenciement dépourvu de motif valable et au surcroît abusif et d'autre part qu'il n'avait pas été intégralement rempli de ses droits au cours de l'exécution dudit contrat, r AL, ensuite d'un procès-verbal de non-conciliation en date du 25 juin 2001, a attrait la SAM EUROPA ASSURANCES son ancien employeur devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, à l'effet d'obtenir paiement, sous le bénéfice de l'exécution provisoire et avec intérêts au taux légal, des sommes suivantes :

1) prime d'ancienneté : 33.341,60 F ;

2) treizième mois : 53.177,93 F ;

3) commissions : 23.881,00 F ;

4) congés payés : 39.470,93 F ;

5) prime de vacances : 31.403,40 F;

6) délai congé (indemnité de préavis de départ) : 32.687,44 F ;

7) congés payés sur préavis : 3.268,74 F ;

8) indemnité de licenciement (motif non valable) : 73.873,61 F ;

9) dommages et intérêts pour rupture abusive : 98.062,32 F ;

10) dommages et intérêts pour refus de paiement des salaires : 200.000,00 F.

À l'audience fixée par les convocations les parties ont régulièrement comparu.

Puis après neuf renvois intervenus à leur demande l'affaire a été contradictoirement débattue le 9 janvier 2003 et le jugement mis en délibéré pour être prononcé ce jour 13 février 2003.

r AL fait valoir en premier lieu à l'appui de ses prétentions que s'il s'est certes, à l'approche de son soixantième anniversaire, renseigné pour connaître l'étendue prévisible de ses droits à la retraite, il n'a en revanche jamais manifesté son intention de quelque manière que ce soit de cesser son activité le 31 mai 2000.

Il estime en conséquence que la rupture des relations contractuelles à l'initiative de l'employeur s'analyse en un licenciement intervenu au surplus sans aucune justification d'ordre économique ou personnel autre que son âge.

Soutenant que le fait pour un salarié d'atteindre l'âge de soixante ans ne constitue pas un motif valable de rupture de son contrat de travail, il sollicite l'allocation à son profit, en sus du préavis (27.273,84 F) et des congés payés y afférents (2.727,38 F), au titre de l'indemnité prévue par les articles 36 de la Convention Collective Nationale des Cabinets de Courtage d'Assurances et 9 de l'annexe II concernant les salariés producteurs, d'une somme s'élevant, dans le dernier état de ses écritures, à 120.000,00 F.

Estimant en outre qu'au regard des circonstances particulières qui ont entouré la rupture, et notamment de l'absence de tout formalisme, son licenciement revêt un caractère abusif, r AL réclame à son ancien employeur l'allocation de dommages et intérêts dont il a fixé le montant en dernier lieu à la somme de 81.821,52 F.

Se prévalant tout d'abord des dispositions de la Convention Collective Nationale Française de travail des Cabinets de Courtage, puis à la suite des objections formulées par son employeur des dispositions de l'annexe II de l'accord collectif susvisé, r AL prétend d'autre part ne pas avoir été intégralement rempli de ses droits au cours de l'exécution du contrat de travail.

Il sollicite, en conséquence, l'allocation à son profit, à concurrence des sommes ci-dessous mentionnées, des primes d'ancienneté, de vacances, de 13e mois, prévues par les articles 23, 25 et 26 de la Convention Collective Nationale, étant observé que les réclamations présentées à ces divers titres d'une part tiennent compte de la prescription quinquennale applicable en matière de salaires et d'autre part ont été calculées, conformément aux dispositions de l'article 7-2 de l'annexe II, sur la base des seuls appointements fixes :

* prime d'ancienneté : 33.341,60 F ;

* treizième mois : 49.173,33 F ;

* prime de vacances : 24.586,66 F.

Il demande également, sur le fondement de la loi n° 619 du 26 juillet 1956, dont les dispositions d'ordre public priment celles de l'accord collectif susvisé, la condamnation de son employeur au paiement, pour les cinq années non couvertes par la prescription, d'un rappel de congés payés chiffré dans ses dernières conclusions à la somme de 14.588,98 F.

Après avoir rappelé qu'aux termes de son contrat de travail sa rémunération était constituée non seulement d'un traitement de base fixe, mais également d'un intéressement égal à 25 % de la commission perçue par la SAM EUROPA ASSURANCES pour toute nouvelle affaire, il sollicite en dernier lieu paiement, au titre des commissions lui restant dues, d'une somme de 23.881,00 F.

Soutenant enfin n'avoir pu consécutivement au non-paiement de ces diverses sommes ni « consommer, ni épargner comme il pouvait légitimement y aspirer », et avoir en outre été contraint de subir au quotidien le mépris et l'arrogance de son employeur, il demande que l'important préjudice, tant financier que moral, subi par ses soins soit réparé par l'allocation à son profit d'une somme de 200.000,00 F, à titre de dommages et intérêts.

*

Après avoir liminairement d'une part soulevé l'irrecevabilité des demandes de r AL au motif que ce dernier ne pouvait valablement modifier le fondement de sa réclamation originaire et d'autre part demandé à la présente juridiction d'écarter des débats la pièce n° 3 communiquée le 8 janvier 2002 par r AL, en ce qu'elle constituerait un document interne à la société que l'intéressé aurait détenu de façon irrégulière et qui au demeurant n'apporterait aucun élément aux débats, la SAM EUROPA ASSURANCES conclut pour le surplus au rejet de l'intégralité des prétentions formées à son encontre par ce dernier.

Elle fait valoir en substance à cet effet les moyens suivants :

En ce qui concerne la rupture du contrat de travail

L'ensemble des pièces versées aux débats par ses soins démontrent que r AL n'a pas été licencié mais a au contraire volontairement fait valoir ses droits à la retraite.

L'intéressé ne peut dès lors prétendre à l'allocation des indemnités de préavis, de congés payés sur préavis et de licenciement qu'il sollicite, ni à l'octroi de quelconque dommages et intérêts.

En ce qui concerne les demandes au titre de l'exécution du contrat de travail

• Prime d'ancienneté de vacances de 13e mois :

* aucune des primes revendiquées par r AL ne sont prévues par l'annexe II à la Convention Collective Nationale des Cabinets de Courtage, laquelle est seule applicable en l'espèce au regard de la qualification de salarié producteur du demandeur,

* l'inspecteur du travail, dans une correspondance en date du 13 mars 1990, a confirmé cette analyse de la situation en indiquant expressément que « pour le cas particulier des salariés liés par un contrat écrit spécial de production, l'annexe II dérogeant à la Convention Collective Nationale, le paiement d'un 13e mois n'était pas prévu par le texte »,

* r AL n'a jamais formulé, au cours de l'exécution de son contrat de travail, aucune demande à ces divers titres.

• Congés payés

Les congés payés ont été calculés par le cabinet comptable de la SAM EUROPA ASSURANCES, et rien ne permet de démontrer une erreur quelconque qui aurait pu être commise de ce chef.

• Commissions

Le relevé produit aux débats au soutien de la demande est non seulement dénué de toute valeur probante, mais est en outre affecté de multiples vices et d'erreurs grossières.

• Dommages et intérêts pour non-paiement de ces diverses sommes

Dès lors d'une part que r AL ne peut prétendre au bénéfice des indemnités diverses réclamées et d'autre part qu'il n'a jamais élevé aucune contestation sur le montant et le calcul de son salaire lors de la délivrance de ses bulletins de paie, sa demande de dommages et intérêts doit être rejetée.

SUR CE,

1) Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail

Alors que r AL soutient avoir été licencié par son employeur, la SAM EUROPA ASSURANCES estime pour sa part que le salarié a pris l'initiative de la rupture, par son départ volontaire advenant le 31 mai 2000.

Il est constant en droit que le départ volontaire du salarié à la retraite constitue un mode spécifique de cessation du contrat de travail, distinct du licenciement et de la démission.

En l'absence de tout écrit établissant de façon certaine que r AL ait pris l'initiative de la rupture de son contrat de travail, il appartient à l'employeur de démontrer par tous moyens que le départ à la retraite de ce salarié revêtait bien un caractère volontaire, à défaut de quoi la rupture devra être requalifiée en un licenciement.

Pour rapporter cette preuve, la SAM EUROPA ASSURANCES verse aux débats :

* deux attestations émanant de salariés de cette entreprise aux termes desquelles les intéressés déclarent que r AL non seulement leur avait fait part depuis avril 1999 pour l'une et le début de l'année 2000 pour l'autre de son intention de partir à la retraite, mais en outre « faisait le point des mois qui lui restaient avant de partir »,

* une attestation émanant d'un employé du cabinet comptable TOMATIS, aux termes de laquelle celui-ci indique avoir renseigné à plusieurs reprises r AL sur les conditions et droits acquis relatifs à son départ à la retraite,

* un extrait du Journal Nice Matin en date du 18 août 2000, ainsi que de « AS Magazine n° 13 », relatant, photographie à l'appui, la réception organisée au Yacht Club par la SAM EUROPA ASSURANCES le 9 juin 2000, à l'occasion du départ à la retraite de r AL,

* les factures correspondant à cette manifestation (LOSANGE D'OR et Isabelle ROUQUETTE),

* les documents divers remis les 31 mai et 26 juin 2000 à r AL pour faire valoir ses droits auprès de l'AGIRC et de l'AMRR.

Force est de constater que ces divers documents ne sont pas utilement contestés par r AL, lequel ne verse pour sa part aux débats aucune pièce de nature à établir que ce départ lui ait été imposé par son employeur.

Qu'au surplus ce dernier, qui a accepté de participer à la réception organisée à l'occasion de la cessation de ses fonctions, n'a jusqu'à l'introduction le 7 juin 2001 de la présente procédure, soit plus d'une année après la fin de ses fonctions, jamais soutenu avoir été licencié, sollicitant au contraire dans ses deux lettres de dénonciation du solde de tout compte, adressées les 11 juin et 18 juillet 2000 à son employeur, le bénéfice d'une indemnité de départ à la retraite correspondant à 15 % du salaire mensuel par année de présence.

Qu'en conséquence, les demandes tardivement formulées par l'intéressé tendant à voir requalifier la rupture en un licenciement, et à obtenir par suite le bénéfice de l'indemnité de préavis, des congés payés sur le préavis, de l'indemnité de licenciement et enfin l'allocation de dommages et intérêts pour licenciement abusif, ne pourront qu'être rejetées.

2) Sur les demandes au titre de l'exécution du contrat de travail

a) Commissions

Si le principe du droit à commissions de r AL n'est certes en lui-même pas contestable, au vu notamment des stipulations de son contrat de travail (article rémunération), il n'en demeure pas moins que ce dernier, qui revendique le règlement de commissions qui ne lui auraient pas été payées par son employeur, doit rapporter la preuve du bien fondé de ses prétentions.

Qu'il lui appartient ainsi d'établir au premier chef que ses demandes concernent bien des affaires nouvelles apportées par ses soins à la société.

Le relevé manuscrit unilatéralement établi par ses soins étant à cet égard non seulement dépourvu de toute valeur probante, mais en outre émaillé d'erreurs manifestes, r AL doit être débouté de sa demande tendant à obtenir paiement à ce titre de la somme de 23.881,00 F.

b) Indemnité d'ancienneté prime de vacances, 13e mois

Dès lors que r AL ne s'explique pas sur les conditions dans lesquelles il est entré en possession de la correspondance en date du 17 février 1993 adressée par Monsieur BE à l'expert ORECCHIA, dont il n'aurait normalement pas dû avoir connaissance eu égard à la nature des fonctions, cette pièce doit être écartée purement et simplement des débats.

Pour le surplus, compte tenu d'une part de la nature des fonctions de salarié producteur exercées par r AL au sein de la SAM EUROPA ASSURANCES et d'autre part de l'existence entre les parties d'une convention spéciale écrite de production avec subordination à l'employeur, c'est à juste titre que la société défenderesse soutient que seules doivent recevoir application en l'espèce les dispositions de l'annexe II à la Convention Collective Nationale des Cabinets de Courtage d'Assurances et/ou de Réassurances.

Il résulte toutefois des dispositions de l'article 10 de ladite annexe, intitulée « dispositions de la CCNT applicable aux salariés producteurs » que :

1) la CCNT s'applique aux producteurs salariés à l'exception des titres VI (embauchage), VII (employés temporaires), VIII (essai – titularisation), IX (durée du travail), X (retards), XII (classification) et XV (congés payés) auxquels sont substituées les dispositions de la présente annexe.

2) Pour l'application des titres XIII (ancienneté), XV (congés payés) et XVI (maternité, maladie, accidents) les modalités de la présente annexe dérogent aux dispositions de la CCNT.

Les trois primes ou indemnités dont r AL sollicite le bénéfice étant prévues par le titre XIII de la Convention Collective Nationale, il convient de faire application en l'espèce des dispositions dérogatoires de l'annexe II, et plus précisément de son article 7.

Force est de constater toutefois que ledit article, contrairement à ce que soutient erronément l'employeur, ne prive nullement les salariés producteurs du bénéfice des primes d'ancienneté, de vacances et de 13e mois.

Qu'en effet sa lecture attentive révèle au contraire que les organisations signataires de ladite annexe, en indiquant que : « les appointements fixes sont substitués au salaire mensuel réel pour le calcul des primes prévues par les articles 23, 25, 26 de la CCNT, n'ont entendu déroger aux dispositions de la Convention Collective Nationale qu'en ce qui concerne la base de calcul de ces indemnités. »

Qu'en conséquence, par application combinée des dispositions des articles 23, 25 et 26 de la Convention Collective Nationale, 7 et 10 de l'annexe II, r AL est en droit d'obtenir l'allocation à son profit des sommes suivantes, lesquelles ont été déterminées en tenant compte d'une part de ses seuls appointements fixes et d'autre part de la prescription quinquennale applicable en matière de traitements et salaires, à savoir :

au titre de la prime d'ancienneté (article 23)

* 1er juin 1996 au 31 décembre 1996 : (67.760 x 5) / 100 = 3.388,00 F ;

* 1er janvier 1997 au 31 décembre 1997 : (116.160 x 6) / 100 = 6.969,60 F ;

* 1er janvier 1998 au 31 décembre 1998 : (120.000 x 7) / 100 = 8.400,00 F ;

* 1er janvier 1999 au 31 décembre 1999 : (120.000 x 8) / 100 = 9.600,00 F ;

* 1er janvier 2000 au 31 décembre 2000 : (50.000 x 9) / 100 = 4.500,00 F ;

soit un total de : 32.857,60 F soit 5.009,11 €.

Au titre de la prime de vacances (article 25)

* prime payable le 31 mai 1997 : 9.680 : 2 = 4.840,00 F ;

* prime payable le 31 mai 1998 : 9.813 : 2 = 4.906,66 F ;

* prime payable le 31 mai 1999 : 10.000 : 2 = 5.000,00 F ;

* prime payable le 31 mai 2000 : 10.000 : 2 = 5.000,00 F ;

soit un total de : 19.746,66 F, soit 3.010,36 €.

Au titre de la prime de 13e mois

* prorata année 1996 (juin à décembre 1996) : 5.646,66 F,

* année 1997 : 9.680,00 F ;

* année 1998 : 10.000,00 F ;

* année 1999 : 10.000,00 F ;

* année 2000 (prorata temporis) : 4.166,66 F ;

soit un total de : 39.493,32 F, soit 6.020,72 €.

La SAM EUROPA ASSURANCES doit être par suite condamnée à payer à r AL, à titre de rappel de primes d'ancienneté, de vacances, et de 13e mois la somme totale de 14.040,15 €, laquelle produira intérêts au taux légal à compter de la convocation en conciliation du 8 juin 2001, laquelle vaut mise en demeure.

c) Congés payés

Un contrat de travail ou une convention collective ne peut, aux termes de l'article 14 de la loi n° 629 du 26 juillet 1956, déroger aux dispositions des articles 10 à 13 de ladite loi qu'à la condition d'assurer aux salariés concernés des indemnités d'un montant plus élevé.

Dès lors que les articles 29 de la Convention Collective Nationale des Cabinets de Courtage d'Assurances et 7 de l'annexe II à cet accord collectif allouent aux salariés producteurs des indemnités de congés payés calculées seulement sur les appointements fixes, alors que l'article 10 de la loi n° 619 mentionne comme base de calcul la rémunération totale perçue par le salarié au cours de la période de référence, laquelle inclut par suite nécessairement non seulement les commissions, mais aussi la prime d'ancienneté, les dispositions de l'accord collectif et de son annexe II susvisée ne peuvent recevoir application en l'espèce.

Sur la base des dispositions de l'article 10 de la loi du 26 juillet 1956 r AL est en conséquence fondé à obtenir l'allocation des sommes suivantes :

au titre de la période de référence juin 1996 – mai 1997

1/10e de (116.160 + 64.400,46 + 6.292 + 17.435,54)

(fixe) + (commissions) + (prime d'ancienneté) + (indemnité congés payés année précédente)

soit une indemnité de : 204.288 / 10 = 20.428,80 F.

Au titre de la période de référence juin 1997 – mai 1998

1/10e de (117.760 + 66.237,18 + 7.565,60 + 20.428,80)

(fixe) + (commissions) + (prime d'ancienneté) + (indemnité congés payés année précédente)

soit une indemnité de : 211.911,58 / 10 = 21.199,15 F.

Au titre de la période de référence juin 1998 – mai 1999

1/10e de (120.000 + 50.655,60 + 8.900 + 21.199,15)

(fixe) + (commissions) + (prime d'ancienneté) + (indemnité congés payés année précédente)

soit une indemnité de : 200.754,75 / 10 = 20.075,47 F.

Au titre de la période de référence juin 1999 – mai 2000

1/10e de (120.000 + 43.643,09 + 10.100 + 20.075,47)

(fixe) + (commissions) + (prime d'ancienneté) + (indemnité congés payés année précédente)

soit une indemnité de : 193.818,56 / 10= 19.381,85 F.

Soit une indemnité totale pour toute la période couverte par la réclamation, de 81.085,27 F, dont il y a lieu de déduire la somme de 65.399,62 F versée par l'employeur, soit au final un solde en faveur du salarié s'élevant à 15.685,65 F.

Le Tribunal ne pouvant toutefois statuer ultra petita, il sera alloué à r AL la somme réclamée par ce dernier, soit 14.420,86 F correspondant à 2.198,45 €, laquelle produira intérêts de retard au taux légal à compter de la convocation en conciliation du 8 juin 2001, laquelle vaut mise en demeure.

a) Dommages et intérêts pour non-paiement en temps voulu des sommes allouées à titre de rappel de salaires et de congés payés

En ne réglant pas à son salarié en temps et en heure les différents éléments de rémunération auxquels celui-ci était en droit de prétendre, la SAM EUROPA ASSURANCES lui a indiscutablement causé un important préjudice matériel.

Par ailleurs, dès lors d'une part que r AL démontre, par la production aux débats de la fiche de paie de Monsieur LE, que des salariés exerçant au sein de la même entreprise des fonctions identiques aux siennes (producteur salarié) percevaient l'indemnité d'ancienneté dont il a pour sa part été privé, et d'autre part que des décisions antérieurement rendues par ce Tribunal et par sa juridiction d'appel avaient consacré le droit du salarié producteur à percevoir le bénéfice des primes de vacances et de treizième mois (Tribunal du Travail 14 octobre 1993 – Tribunal de Première Instance 15 décembre 1994 BE c/ SAM EUROPA ASSURANCES), l'attitude discriminatoire et la mauvaise foi de l'employeur, génératrices d'un préjudice moral complémentaire sont incontestablement établies.

Le double préjudice ainsi subi par r AL justifie en conséquence, au vu des différents éléments d'appréciation dont dispose la présente juridiction, l'allocation au profit de ce dernier d'une somme de 15.000 € à titre de dommages et intérêts.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et après en avoir délibéré.

Écarte des débats le courrier adressé le 17 février 1993 par Monsieur BERTHELOT à l'expert ORECCHIA, constituant la pièce n° 3 de la communication en date du 8 janvier 2002.

Condamne la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE EUROPA ASSURANCES à payer à r AL les sommes suivantes :

• 14.040,15 euros, (quatorze mille quarante euros et quinze centimes), à titre de rappel de primes d'ancienneté, de vacances et de 13e mois,

• 2.198,45 euros, (deux mille cent quatre-vingt-dix-huit euros et quarante-cinq centimes), à titre de rappel d'indemnité de congés payés, ces deux sommes produisant intérêts de retard au taux légal à compter de la convocation en conciliation du 8 juin 2001, laquelle vaut mise en demeure.

• 15.000,00 euros, (quinze mille euros), à titre de dommages et intérêts pour non paiement en temps voulu de ses salaires et accessoires de salaires, cette dernière somme produisant pour sa part intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Déboute r AL du surplus de ses prétentions.

Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du présent jugement.

Condamne la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE EUROPA ASSURANCES aux entiers dépens.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6563
Date de la décision : 13/02/2003

Analyses

Rupture du contrat de travail ; Protection sociale


Parties
Demandeurs : r AL
Défendeurs : la Société Anonyme Monégasque EUROPA ASSURANCES

Références :

article 14 de la loi n° 629 du 26 juillet 1956
loi n° 619 du 26 juillet 1956
article 10 de la loi du 26 juillet 1956


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.du.travail;arret;2003-02-13;6563 ?

Source

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