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04/07/2002 | MONACO | N°614042

Monaco | Tribunal du travail, 4 juillet 2002, b RO c/ la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING


Abstract

Licenciement économique - Nécessité de justifier le motif devant le tribunal en cas d'énonciation de celui-ci lors de la notification de la rupture

Résumé

L'employeur qui n'est pas obligé d'énoncer le motif du licenciement lors de la notification de la rupture doit cependant être en mesure d'en justifier devant le Tribunal, s'il a choisi de l'énoncer.

Un chef comptable est licencié en raison de la réorganisation de l'entreprise liée à la réduction d'activités maritimes et à des pertes financières. À l'appui d'une demande de rappel de sala

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Abstract

Licenciement économique - Nécessité de justifier le motif devant le tribunal en cas d'énonciation de celui-ci lors de la notification de la rupture

Résumé

L'employeur qui n'est pas obligé d'énoncer le motif du licenciement lors de la notification de la rupture doit cependant être en mesure d'en justifier devant le Tribunal, s'il a choisi de l'énoncer.

Un chef comptable est licencié en raison de la réorganisation de l'entreprise liée à la réduction d'activités maritimes et à des pertes financières. À l'appui d'une demande de rappel de salaires et paiement d'indemnités de congédiement et licenciement, outre des dommages et intérêts pour licenciement abusif, il soutient devant le bureau de jugement du Tribunal du Travail où il a attrait son employeur que son salaire aurait dû être au moins égal à celui de la position IIIC définie par la Convention Collective française des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie. Il estime aussi que les difficultés économiques alléguées n'étaient pas telles qu'elles contraignissent l'employeur à son licenciement et que son reclassement était possible au sein d'une société du groupe. L'employeur, quant à lui, invoque, outre la fin de non-recevoir tirée de la non-dénonciation dans les délais du solde de tout compte et l'irrecevabilité de demandes additionnelles devant le bureau de jugement, la non-application de la Convention collective revendiquée. Il justifie la rupture intervenue notamment par la nécessité de réduire les frais généraux face à une chute brutale des profits.

Le Tribunal du Travail décide que le salarié n'avait plus la possibilité, après le stade de la procédure de conciliation de modifier sa demande sauf à justifier d'une erreur purement matérielle, ce qui n'est pas. Sur la Convention Collective applicable, il ressort de l'analyse de l'activité principale de l'employeur que celle-ci n'est régie par aucune Convention Collective. Sur le licenciement,s'il est vrai que l'employeur n'est pas obligé en droit monégasque d'énoncer le motif du licenciement lors de la notification de la rupture, il doit être en mesure lorsqu'il a choisi de l'énoncer, d'en justifier devant le Tribunal du Travail. En l'espèce cette justification n'est pas apportée. L'indemnité prévue par l'article 2 de la loi n° 845 est due. L'allégation d'un motif fallacieux confère un caractère abusif au licenciement et des dommages et intérêts sont dus à hauteur de 15.000€.

Motifs

Le Tribunal,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu la requête introductive d'instance en date du 24 décembre 1999 ;

Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 18 janvier 2000 ;

Vu les conclusions déposées par Maître Joëlle PASTOR, avocat-défenseur, au nom de Monsieur b RO, en dates des 6 juillet 2000, 1er février 2001 et 10 janvier 2002 ;

Vu les conclusions déposées par Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING, en dates des 12 octobre 2000, 7 juin 2001 et 7 février 2002 ;

Après avoir entendu Maître Danièle RIEU, avocat au barreau de Nice, au nom de Monsieur b RO, et Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, au nom de la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING, en leurs plaidoiries ;

Vu les pièces du dossier ;

*

Embauché à compter du 2 janvier 1996 par la SAM GALAXY MANAGEMENT en qualité de chef comptable, b RO a vu son contrat de travail transféré, à compter du 1er janvier 1998, aux mêmes conditions notamment d'ancienneté et de rémunération, au bénéfice de la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING.

Par lettre en date du 7 octobre 1998, la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING a notifié à b RO son licenciement pour un motif d'ordre économique, dispensant en outre ce dernier de l'exécution de son préavis.

Les raisons de ce congédiement, telles qu'elles sont exposées dans la lettre de notification de la rupture, s'énoncent ainsi :

« La réduction de nos activités maritimes et les pertes financières » soutenues par la GALAXY en 1996/1997 et STARSHIP « CONSTELLATION au cours du premier semestre 1998 nous ont conduit » à fusionner les départements comptables du Groupe GALAXY et à les « réorganiser sous la responsabilité de Monsieur B. ROTHWELL. ».

Soutenant d'une part qu'il n'avait pas été rempli de ses droits au cours de l'exécution de son contrat de travail, d'autre part que le motif d'ordre économique allégué par l'employeur à l'appui de sa décision de licenciement n'était pas avéré et enfin que la rupture revêtait, au regard des circonstances factuelles l'ayant entourée, un caractère manifestement abusif, b RO, ensuite d'un procès-verbal de non-conciliation en date du 17 janvier 2000, a attrait la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, afin d'obtenir l'allocation à son profit, avec intérêts de droit et sous le bénéfice de l'exécution provisoire, des sommes suivantes :

* 381.791,71 F, à titre de rappel de salaire (salaire minima, indemnité monégasque de 5 %, 13e mois),

* 38.179,17 F, au titre des congés payés sur le préavis,

* 1.892,00 F, à titre de complément d'indemnité de congédiement,

* 26.090,00 F, à titre d'indemnité de licenciement,

* 200.000,00 F, à titre de dommages et intérêts.

À l'audience fixée par les convocations, les parties ont régulièrement comparu, puis, après dix-neuf renvois intervenus à la demande des avocats, l'affaire a été contradictoirement débattue lors de l'audience du 6 juin 2002 et le jugement mis en délibéré pour être prononcé ce jour 4 juillet 2002.

b RO expose en premier lieu à l'appui de ses prétentions qu'en application des dispositions de l'article 11 de la loi n° 739 du 16 mars 1963 sur le salaire, le montant de sa rémunération aurait dû être au moins égal à celui pratiqué en vertu de la réglementation ou de Conventions Collectives pour des conditions de travail identiques, dans les mêmes professions commerces ou industries de la région économique voisine.

Qu'eu égard à l'objet de la SAM IAS, tel qu'il figure dans l'extrait d'immatriculation au RCI, à savoir « le négoce, la représentation le courtage, la construction, l'armement de tous navires de marchandises neufs ou d'occasion et la gestion des opérations maritimes s'y rapportant », la Convention Collective de référence est la Convention Nationale Française des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie.

Estimant qu'en l'état de l'importance et de l'étendue des responsabilités qui lui étaient dévolues (chef comptable spécialisé dans la langue et la comptabilité anglo-saxonne ainsi que dans les affaires maritimes), il aurait dû être placé à la position III C définie par ladite Convention, il sollicite pour la période de janvier 1996 à la date d'effet de son licenciement l'allocation des sommes suivantes :

* 303.251,16 F, à titre de rappel de salaires,

* 55.092,40 F, au titre de l'indemnité monégasque de 5 % s'y rapportant,

* 68.513,78 F, au titre des 13e mois des années 1996, 1997 et 1998,

soit un total de 426.857,34 F, auquel il convient d'ajouter l'indemnité de congés payés correspondante, soit une somme de 42.685,73 F.

b RO soutient en second lieu qu'un licenciement ne peut avoir de motif économique valable que s'il résulte d'une suppression d'emploi ou d'une transformation d'emploi, lesquelles doivent elles-mêmes avoir été provoquées par des difficultés économiques ou des mutations technologiques avérées.

Qu'en l'espèce dès lors qu'il a été embauché d'abord par la SAM GALAXY MANAGEMENT puis par la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING, les éventuelles difficultés économiques rencontrées par la SCS ROSMINI et Cie, au sein de laquelle il n'a jamais été affecté, ne peuvent à l'évidence expliquer son licenciement.

Que par ailleurs les documents fragmentaires et incomplets versés aux débats sont en tout état de cause, insuffisants pour justifier l'existence des difficultés économiques rencontrées, sur une période très courte, par la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING.

Qu'en outre et en tout état de cause la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING ne justifie pas, en l'état de son appartenance au groupe GALAXY, que son reclassement au sein d'une des sociétés dépendant de ce groupe se serait avéré impossible.

Qu'enfin à défaut d'avoir versé aux débats son registre d'entrée et de sortie du personnel la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING ne permet pas à la présente juridiction de s'assurer du respect de l'ordre des priorités et notamment de vérifier que Monsieur RO, qui a été conservé au sein de l'effectif, avait bien priorité sur lui.

Soulignant en dernier lieu que le faux prétexte de nature économique allégué par la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING démontre l'usage abusif qui a été fait par l'employeur de son droit de licencier, dans le but de nuire au salarié, lequel non seulement se retrouve sans emploi mais encore a été bafoué, il sollicite en définitive l'allocation, en sus de l'indemnité de licenciement lui revenant à hauteur de la somme de 23.667,53 F (déduction faite de l'indemnité de congédiement reçue à concurrence de la somme de 9.318,00 F), d'une somme de 200.000,00 F, à titre de dommages et intérêts.

Après avoir soulevé dans un premier temps l'irrecevabilité de la demande additionnelle présentée par b RO directement devant le Bureau de Jugement, puis dans un second temps l'irrecevabilité tenant à la non dénonciation dans le délai légal du solde de tout compte, la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING conclut pour le surplus au rejet de l'intégralité des prétentions formées à son encontre.

Elle fait valoir, à ces fins, les moyens suivants :

– En ce qui concerne la fin de non-recevoir tirée de la non-dénonciation du solde de tout compte

Le reçu pour solde de tout compte établi le 7 janvier 1999 n'ayant pas été dénoncé par b RO dans le délai de deux mois qui lui était imparti à cet effet, ce document, conformément à l'article 7 alinéa 1 de la loi du 11 janvier 1958, a produit son plein et entier effet libératoire.

– En ce qui concerne l'irrecevabilité de la demande additionnelle

Si le demandeur peut, en application des dispositions de l'article 42 de la loi n° 446 du 16 mai 1946, devant le Bureau de Conciliation modifier sa demande initiale et même l'augmenter, une telle possibilité, en l'absence de précision identique, ne lui est pas ouverte devant le Bureau de Jugement.

– En ce qui concerne le rappel de salaires

* la Convention Collective de la Métallurgie dont se prévaut b RO n'est pas applicable au sein de la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING, dont l'activité principale et réelle réside dans la gestion de pétroliers,

* l'inspecteur du travail, contacté sur ce point précis, ayant confirmé cette analyse en indiquant dans un courrier en date du 19 septembre 2000 que l'activité de la société défenderesse n'était soumise à aucune Convention Collective, b RO ne peut prétendre au reliquat de salaire qu'il réclame, ni, en l'absence de Convention Collective prévoyant une rémunération minimale, au bénéfice de l'indemnité monégasque de 5 %,

* les sommes réclamées au titre des 13e mois des années 1996 et 1997 ont été versées à hauteur de 18.000,00 F pour 1996 et 19.800,00 F pour l'année 1997, étant observé en outre que les primes annuelles, parmi lesquelles celles de 13e mois, n'ouvrent pas droit au paiement de l'indemnité de congés payés.

– En ce qui concerne le licenciement

* La SCS RO et Cie, qui avait enregistré au cours des exercices 1996 et 1997 des bénéfices nets moyens de l'ordre de 262.000,00 F, a connu une chute brutale de ses profits au cours du premier semestre de l'année 1998,

* après la transformation de cette entité en S.A.M., cette perte s'est considérablement amplifiée pour atteindre en un seul semestre 1.022.098,00 F,

* l'employeur ne pouvait dès lors devant cette situation que prendre les mesures qui s'imposaient en réduisant ses frais généraux, cette restructuration s'étant concrètement traduite par la fusion des départements comptables des sociétés GALAXY MANAGEMENT et INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING sous la seule responsabilité de Monsieur ROTHWELL, expert-comptable,

* dans le cadre de cette réorganisation, parallèlement à la suppression du poste de b RO, la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING ayant également supprimé le poste d'assistante légale aux opérations shipping dévolu à Mademoiselle BR, ces motifs d'ordre conjoncturel établis rendent ainsi le congédiement de b RO parfaitement valable,

* b RO ne peut sérieusement revendiquer le poste occupé par Monsieur RO, alors que :

* la suppression de poste s'apprécie au niveau de l'entreprise et non du groupe,

* les fonctions occupées par ces deux salariés étaient totalement différentes, b RO occupant le poste de chef comptable alors que Monsieur RO exerçait pour sa part les fonctions de Directeur Général,

* b RO, qui a retrouvé un emploi à compter du 6 avril 1999, ne justifie pas de l'importance du préjudice qu'il prétend avoir subi.

* b RO réplique pour sa part à ces divers arguments :

* que les dispositions de l'article 42 de la loi du 16 mai 1946, qui font référence aux demandes et non pas aux montants des demandes, ne font pas obstacle à ce qu'il corrige devant le Bureau de Jugement l'erreur mathématique commise dans la détermination du montant des sommes réclamées,

* que le solde de tout compte a été régulièrement dénoncé par lettre en date du 20 janvier 1999 dont la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING lui a accusé réception le 5 février 1999,

* que le terme de gestion maritime est un terme global et général qui en soi ne donne aucune indication sur l'activité réelle de la société, c'est à dire sur ce qu'elle gère,

* que dès lors que pour gérer des pétroliers, il faut préalablement les avoir, la Convention Collective de la Métallurgie, dont le champ d'application concerne précisément la construction des navires civils et la réparation navale, est bien en l'espèce l'accord collectif de référence,

* les pièces produites par la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING pour justifier du paiement du 13e mois, qui émanent d'une autre personne morale, concernent en réalité la rémunération d'une prestation comptable particulière et ponctuelle réalisée en supplément par ses soins au profit de cette deuxième société.

SUR CE,

1) Sur la fin de non-recevoir tirée de la non dénonciation du solde de tout compte

Le reçu pour solde de tout compte, délivré le 7 janvier 1999 par b RO à son employeur, ayant été régulièrement dénoncé par ce dernier, aux termes d'un courrier en date du 20 janvier 1999, dont la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING lui a accusé réception le 5 février 1999, soit dans les formes et délais prévus par l'article 7 de la loi n° 638 du 11 janvier 1958, aucune irrecevabilité ne peut être valablement opposée à la demande en justice introduite par ce salarié devant la présente juridiction le 24 décembre 1999.

2) Sur l'irrecevabilité de la demande additionnelle formulée directement devant le Bureau de Jugement

Si le demandeur peut certes, en vertu des dispositions de l'article 42 de la loi du 16 mai 1946, devant le Bureau de Conciliation modifier sa demande initiale et même l'augmenter, une telle possibilité, en l'absence de précision identique contenue dans la loi, ne lui est pas ouverte devant le Bureau de Jugement, lequel, conformément à l'article 1er de la loi susvisée, ne peut connaître que des demandes soumises préalablement à la tentative de conciliation, qu'il s'agisse de leur nature ou de leur quantum.

b RO n'avait donc plus la possibilité, après le stade de la procédure de conciliation, sauf à justifier d'une erreur purement matérielle, telle que le déplacement d'une virgule, l'omission d'un chiffre dans un nombre ou le résultat erroné d'une opération dont les termes avaient été justement posés, ce dont il ne justifie nullement en l'espèce, de modifier le montant de sa demande de rappel de salaires devant le Bureau de Jugement.

La demande additionnelle formée par l'intéressé à hauteur d'une somme de 58.890,59 F, soit 8.977,81 €, dans ses conclusions numéro un déposées devant le Bureau de Jugement ne peut dans ces conditions qu'être déclarée irrecevable.

3) Sur la demande de rappel de salaires (salaires proprement dits et indemnité monégasque de 5 %, complément indemnité de congédiement)

Il est constant en droit que pour déterminer si une Convention Collective est applicable aux relations entre les parties à un litige, il convient de rechercher, au-delà du libellé des statuts ou des mentions portées au répertoire du commerce et de l'industrie, l'activité principale déployée dans l'établissement où travaille le salarié, la Convention Collective correspondant à l'activité principale s'appliquant alors à l'ensemble des activités accessoires de l'entreprise considérée.

Il est également constant que la charge de la preuve de l'activité réelle incombe à la partie (employeur ou salarié) qui revendique l'application d'une Convention Collective.

Dès lors, pour pouvoir prétendre conformément aux dispositions de l'article 11 de la loi n° 739 du 16 mars 1963 à l'allocation des salaires minima prévus par la Convention Collective Française de la Métallurgie ainsi que par voie de conséquence au bénéfice de l'indemnité monégasque de 5 %, b RO doit préalablement démontrer que la construction et la réparation de navires civils constituent bien l'activité réelle et principale déployée par la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING.

Force est de constater que cette affirmation péremptoire, qui ne repose que sur un syllogisme justement dénoncé par la société défenderesse (pour pouvoir gérer des pétroliers encore faut-il les avoir), n'est étayée par aucune pièce, de quelque nature que ce soit.

Qu'il résulte au contraire de l'ensemble des éléments d'appréciation soumis à la présente juridiction (extrait d'immatriculation RCI, code NAF, Plaquette de Présentation des Sociétés du Groupe GALAXY), que la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING a pour activité principale le transport et le négoce (importation et exportation) de produits pétroliers.

Dès lors que cette activité principale n'est régie par aucune Convention Collective, b RO, quand bien même la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING exercerait effectivement à titre secondaire, comme cela est indiqué dans son objet social, l'activité annexe de construction ou d'armement de navires de marchandises neufs ou d'occasion, ne peut prétendre se voir appliquer la Convention Collective, même étendue, dont relève uniquement cette activité secondaire.

b RO doit donc être débouté de sa demande de rappel de salaires minima, ainsi que par voie de conséquence de ses demandes d'indemnité monégasque de 5 % et de complément d'indemnité de congédiement.

4) Sur les demandes au titre du 13e mois

Au vu des mentions contenues tant dans la lettre d'embauche du 29 novembre 1995 que dans la correspondance qui lui a été adressée, le 24 décembre 1997, l'informant du transfert de son contrat au profit de la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING, le droit de b RO à bénéficier chaque année d'un treizième mois de salaire n'est pas contestable.

Les demandes formées à ce titre pour les années 1996 et 1997 ne peuvent toutefois être satisfaites, dès lors qu'il ressort des pièces versées aux débats par l'employeur que ces sommes ont été effectivement réglées.

Il importe peu en effet que les versements aient été effectués, pour le compte de la SAM GALAXY MANAGEMENT, par la société ANDROMEDA MANAGEMENT LIMITED, à partir du moment où ces règlements correspondent sans contestation possible au montant exact (hors charges sociales) des sommes revenant, au titre du treizième mois, à b RO (soit 20.693,53 F - 2.693,53 F de retenues = 18.000,00 F pour l'année 1996 et 22.801,55 F - 3.001,55 F = 19.800,00 F pour l'année 1997).

5) Sur le licenciement

Pour justifier sa décision de mettre un terme au contrat de travail de b RO, la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING a indiqué, dans la lettre de notification de la rupture, que sa décision était motivée par la réduction de ses activités maritimes et les pertes financières soutenues par la GALAXY en 1996/1997 et STARSHIP CONSTELLATION au cours du premier semestre 1998, lesquelles avaient nécessité la fusion des départements comptables du Groupe GALAXY et leur réorganisation sous la responsabilité de Monsieur RO.

Si l'employeur n'est certes pas obligé en droit monégasque d'énoncer le motif du licenciement lors de la notification de la rupture, il doit toutefois, lorsqu'il a choisi d'énoncer clairement et précisément les motifs qui ont présidé à sa décision, être en mesure d'en justifier devant le Tribunal du Travail.

Force est de constater que la société défenderesse ne justifie, dans le cadre du présent litige ni de la réduction de ses activités maritimes ni des pertes financières soutenues par la GALAXY en 1996/1997 et STARSHIP CONSTELLATION au cours du premier semestre 1998.

Que si elle se prévaut certes, justificatifs à l'appui, dans les conclusions déposées devant la présente juridiction des difficultés financières, celle-ci ne concernent, ni l'année 1996/1997, ni le premier semestre 1998, mais le deuxième semestre 1998, étant observé que b RO a été licencié dès le 7 octobre 1998.

Qu'au surplus ces pertes financières qui ont affecté les sociétés SCS RO et Compagnie et INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING, ne semblent pas pouvoir être identifiées aux difficultés de la GALAXY en général d'une part et de STARSHIP CONSTELLATION d'autre part.

Par ailleurs, en l'absence de production d'organigrammes antérieurs et postérieurs au licenciement, l'existence de la restructuration alléguée ne saurait résulter uniquement de la concomitance du licenciement d'un autre salarié alors de surcroît que selon les informations contenues dans la plaquette de présentation du Groupe GALAXY versée aux débats, éditée antérieurement au licenciement de b RO l'ensemble des opérations et activités exercées par les différentes sociétés du Groupe qui compte au total près de cinq cent salariés se trouvait déjà dirigées depuis le siège social de MONACO, qu'il s'agisse du management, mais aussi des questions administratives et financières.

Enfin, en ne versant pas aux débats son registre d'entrée et de sortie du personnel, la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING met le Tribunal dans l'impossibilité de vérifier si les critères d'ordre ont bien été respectés en l'espèce.

Le motif d'ordre économique invoqué par la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING n'étant en définitive pas avéré, b RO est en droit d'obtenir paiement de l'indemnité prévue par l'article 2 de la loi n° 845.

Compte tenu de son ancienneté de services et du montant de sa rémunération, la somme lui revenant à ce titre s'élève à : 22.906,62 F : 25 x 36 = 32.985,53 F dont à déduire le montant de l'indemnité de congédiement versée, soit 7.426,06 F = 25.559,47 F correspondant à 3.896,52 €.

6) Sur le caractère abusif du licenciement

En ayant allégué un motif fallacieux à l'appui du licenciement, la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING a fait un usage abusif du droit de rupture unilatéral qui lui est reconnu par la loi.

Si b RO a certes pu retrouver un emploi le 6 avril 1999, il a toutefois subi un préjudice matériel pendant la période où se trouvant au chômage, il n'a bénéficié que des allocations qui lui étaient servies par l'ASSEDIC.

En effet, alors que son salaire net s'élevait en dernier lieu à 19.800 F, il n'a perçu de l'ASSEDIC qu'une somme mensuelle nette de 12.875,70 F, soit une perte de l'ordre de 7.000,00 F par mois.

Ce préjudice matériel, auquel s'ajoute le préjudice moral découlant directement de la rupture, justifie l'allocation au profit de b RO d'une somme de 15.000,00 € à titre de dommages et intérêts.

*

En l'absence d'arguments propres à la justifier, il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort après en avoir délibéré.

Rejette la fin de non-recevoir tirée de la forclusion opposée par la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING aux demandes formées par b RO devant la présente juridiction.

Déclare irrecevable pour n'avoir pas été soumise au préliminaire de conciliation la demande additionnelle formée à hauteur de la somme de 8.977,81 euros par b RO dans ses conclusions numéro un déposées devant le Bureau de Jugement.

Dit que l'activité principale exercée par la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING n'entre pas dans le champ d'application de la Convention Collective Nationale Française de la Métallurgie.

Déboute en conséquence b RO de ses demandes de rappels de salaires, d'indemnité monégasque et de complément d'indemnité de congés payés.

Constate que b RO a été rempli de ses droits à treizième mois, et le déboute dans ces conditions de ses demandes à ce titre.

Dit que le licenciement de b RO n'est pas justifié par un motif valable.

Dit en outre que cette mesure revêt, au regard des circonstances l'ayant entourée, un caractère abusif.

Condamne en conséquence la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING à verser à b RO les sommes suivantes :

* 3.896,52 euros, (trois mille huit cent quatre-vingt-seize euros et cinquante-deux centimes), à titre d'indemnité de licenciement,

* 15.000,00 euros, (quinze mille euros), à titre de dommages et intérêts,

Lesdites sommes portant intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Condamne la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING aux entiers dépens.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 614042
Date de la décision : 04/07/2002

Analyses

Social - Général ; Rupture du contrat de travail


Parties
Demandeurs : b RO
Défendeurs : la SAM INTERNATIONAL ANDROMEDA SHIPPING

Références :

article 42 de la loi du 16 mai 1946
article 7 alinéa 1 de la loi du 11 janvier 1958
article 11 de la loi n° 739 du 16 mars 1963
article 7 de la loi n° 638 du 11 janvier 1958
article 42 de la loi n° 446 du 16 mai 1946


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.du.travail;arret;2002-07-04;614042 ?

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