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17/05/2001 | MONACO | N°6507

Monaco | Tribunal du travail, 17 mai 2001, f HA c/ r FL


Abstract

Rupture anticipée d'un contrat à durée déterminée pour faute grave - Insultes envers un supérieur hiérarchique - Licenciement pour faute grave justifié - Majoration de salaire prévue par l'article 8 de l'ordonnance loi n° 677 modifiée - Conditions d'application non réunies

Résumé

Le contrat de travail à durée déterminée ne peut cesser avant le terme par la volonté d'une seule partie qu'a certaines conditions, notamment en cas de faute grave constituée par des insultes adressées à un supérieur hiérarchique en réponse à des remontrances jus

tifiées.

Un agent de sécurité embauché par contrat à durée déterminée commençant le 21 jui...

Abstract

Rupture anticipée d'un contrat à durée déterminée pour faute grave - Insultes envers un supérieur hiérarchique - Licenciement pour faute grave justifié - Majoration de salaire prévue par l'article 8 de l'ordonnance loi n° 677 modifiée - Conditions d'application non réunies

Résumé

Le contrat de travail à durée déterminée ne peut cesser avant le terme par la volonté d'une seule partie qu'a certaines conditions, notamment en cas de faute grave constituée par des insultes adressées à un supérieur hiérarchique en réponse à des remontrances justifiées.

Un agent de sécurité embauché par contrat à durée déterminée commençant le 21 juillet pour se terminer le 31 août voit celui-ci rompu le 28 août pour « fautes graves » constituées notamment par des insultes et une insubordination. Le salarié a attrait son employeur devant le Tribunal du travail en demandant paiement d'heures supplémentaires majorées, d'un solde de salaires dus jusqu'au terme du contrat et de dommages et intérêts. Le demandeur soutient qu'alors qu'il faisait normalement son travail, li aurait reçu des réflexions injustifiées avec menaces ayant suscité en réponse les propos incriminés. L'employeur estime, de son coté, que le comportement adopté par l'agent de sécurité constitue bien une faute grave, justifiant la rupture anticipée, au vu des pièces versées aux débats.

Le Tribunal du travail, sur la question des heures supplémentaires alléguées, estime insuffisamment probantes les annotations manuscrites apposées par le salarié lui-même sur les plannings de travail établis par la direction, en l'absence d'attestations ou de relevés de fiches de pointage. La majoration de salaire prévue par les dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n° 677 modifiée implique des heures effectuées au-delà d'une durée de travail de 39 heures par semaines ou de la durée du travail considérée comme équivalente, soit pour le type de travail du salarié, 49h par semaine. Cette condition n'est pas réunie en l'espèce. S'agissant des demandes relatives à la rupture anticipée du contrat de travail, celui-ci peut cesser, par la volonté d'une seule partie, avant le terme, en application de l'article 12 de la loi n° 729, notamment en cas de faute grave. Celle-ci est caractérisée en l'occurrence, le salarié ne pouvant sérieusement prétendre avoir été victime d'un abus d'autorité de la part du chef de poste précisément habilité à constater le non-respect des consignes et à adresser à son subordonné les observations appropriées.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu la requête introductive d'instance en date du 21 septembre 2000 ;

Vu les convocations à comparaître par-devant le Bureau de Jugement du Tribunal du travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception en date du 10 octobre 2000 ;

Vu les conclusions déposées par Monsieur f HA, en personne, en date des 16 novembre 2000, 21 décembre 2000 et 1er février 2001 ;

Vu les conclusions déposées par Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur, au nom de Madame r FL, en date du 1er février 2001 ;

Après avoir entendu Monsieur f HA, comparaissant en personne, en ses observations et explications ;

et Maître Jérôme MOREL, avocat au barreau de Nice, au nom de Madame r FL, en sa plaidoirie ;

Lesdits partie et avocat ayant repris et maintenu ce jour leurs conclusions en l'état de la composition différente du Tribunal ;

Vu les pièces du dossier ;

f HA a été embauché par r FL, exploitant l'entreprise à l'enseigne « BOSS SÉCURITÉ », en qualité d'agent de sécurité pour une durée déterminée ayant commencé à courir le 21 juillet 2000 pour se terminer le 31 août 2000 soit un total de 210 heures payées sur la base d'un taux horaire de 42,02 F outre 5 % monégasque.

Ce contrat de travail a été rompu quelques jours avant son terme et plus précisément le 28 août 2000 à l'initiative de r FL pour les « fautes graves » suivantes :

– manquements à vos obligations de réserve,

– insultes envers notre client devant témoins,

– non-respect des consignes de travail et insubordination.

Soutenant d'une part qu'il n'avait pas été rempli de ses droits au cours de l'exécution de son contrat de travail, et d'autre part que la rupture anticipée des relations contractuelles à l'initiative de l'employeur revêtait un caractère abusif, f HA, ensuite d'un procès-verbal de non-conciliation en date du 9 octobre 2000, a attrait son ancien employeur devant le Bureau de Jugement du Tribunal du travail, afin d'obtenir l'allocation à son profit des sommes suivantes :

1) Sommes dues au titre de l'exécution du contrat de travail

* 378,18 F, représentant les quarts d'heures effectués chaque jour et non rémunérés,

* 60,90 F, représentant les heures supplémentaires effectuées par ses soins, « payées mais non majorées ».

2) Sommes dues au titre de la rupture du contrat de travail

* 1.176,56 F, représentant les salaires dus jusqu'au terme du contrat,

* 40.000,00 F, à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier.

À la date fixée par les convocations les parties ont comparu, en personne en ce qui concerne f HA et par l'intermédiaire de son conseil, en ce qui concerne r FL.

Après trois renvois contradictoires intervenus à leur demande l'affaire a été contradictoirement débattue lors de l'audience du 29 mars 2001, et le jugement mis en délibéré pour être prononcé ce jour 17 mai 2001.

f HA fait valoir, à l'appui de ses prétentions, que l'incident qui l'a effectivement opposé le 26 août 2000 au chef de poste « Sûreté » du Grimaldi FORUM ne peut constituer une faute grave, justifiant la résiliation anticipée du contrat à durée déterminée dont il était titulaire, dans la mesure où il est consécutif à un abus d'autorité et de pouvoir de la part de ce dernier.

Il soutient à cet effet qu'alors qu'il faisait normalement son travail, il aurait été harcelé par Monsieur p BI qui lui aurait adressé des réflexions injustifiées avec menaces ; qu'en conséquence les propos qu'il a tenus, en réponse, sont justifiées et excusées par ces provocations.

Il estime pour le surplus qu'en l'état des compliments qui lui ont été adressés tant par la directrice du Grimaldi FORUM que par le responsable sécurité de cet établissement, il ne peut lui être sérieusement reproché ni d'avoir manqué à son obligation de réserve, ni d'avoir contrevenu aux consignes de travail qui lui étaient données ; que de même son insubordination n'est pas davantage caractérisée.

Il prétend, en second lieu, avoir effectué, tout au long de l'exécution de son contrat de travail un quart d'heure supplémentaire chaque jour qui ne lui a pas été payé.

Il soutient enfin avoir accompli entre le 21 juillet 2000 et le 28 août 2000, 4 heures 55 qui lui ont été payées au tarif normal, alors qu'elles auraient dû l'être au taux majoré.

Il demande, en conséquence, au Tribunal du travail de faire droit à l'intégralité des prétentions contenues dans sa requête introductive d'instance, telles qu'elles ont été exposées et détaillées ci-dessus.

Estimant pour sa part que le comportement adopté le 26 août 2000 par f HA, tel qu'il est établi par les attestations produites aux débats, qu'il s'agisse du non-respect des consignes de travail ou des propos injurieux, constitue bien une faute grave justifiant la rupture anticipée du contrat de travail, r FL conclut à l'entier débouté des demandes formées à son encontre.

SUR CE,

1) Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat du travail

a) « Quart d'heure journalier non compté »

Il appartient à f HA, qui prétend avoir accompli chaque jour un temps de travail supérieur à celui sur la base duquel il a été rémunéré, d'en administrer la preuve.

Force est de constater toutefois que cette preuve n'est pas suffisamment rapportée en l'espèce.

En l'absence en effet d'attestations émanant de collègues de travail, ou de relevés de fiches de pointage établissant que f HA a effectivement terminé son service, chaque jour, un quart d'heure après l'heure prévue par les plannings établis par la Direction, les mentions manuscrites apposées sur ce document par le salarié lui-même sont dénuées de tout caractère probant et ne peuvent dès lors emporter la conviction du Tribunal.

b) Majoration de salaires au titre des heures supplémentaires

En application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance loi n° 677 modifiée, n'ouvrent droit au bénéfice des majorations de 25 % et 50 % que les heures effectuées au-delà d'une durée de travail de 39 heures par semaine ou de la durée de travail considérée comme équivalente.

Pour pouvoir prétendre à la majoration de salaire qu'il réclame, il appartient donc à f HA d'établir qu'il a effectué, au cours de la ou des semaines civiles couvertes par sa réclamation, plus de 49 heures de travail, durée retenue comme équivalente à 39 heures pour le personnel occupé à des opérations de gardiennage, de surveillance ou de service d'incendie, compte tenu des périodes d'inaction inhérentes à cette profession par l'Arrêté Ministériel n° 80-93 du 28 janvier 1980 et la loi n° 1.067 du 28 décembre 1983.

Cette condition n'étant, au vu des « plannings » et des fiches de paie versés aux débats, nullement remplie en l'espèce, la demande formée à ce titre sera également rejetée.

2) Sur les demandes relatives à la cessation du contrat de travail

En application des dispositions de l'article 12 de la loi n° 729, le contrat de travail à durée déterminée ne peut cesser avant le terme par la volonté d'une seule partie que pour de justes motifs ou dans les cas de faute grave, de force majeure ou dans ceux prévus au contrat ou déterminés par le règlement intérieur.

En l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats par r FL que le 26 août 2000 le chef de poste sûreté du Grimaldi FORUM a constaté, à trois reprises, en effectuant ses rondes que f HA était occupé à lire le journal, assis derrière le comptoir d'accueil, au lieu de se trouver au poste de travail qui lui avait été assigné ; qu'en réponse à l'observation qui lui avait été à juste titre adressée par le chef de poste, f HA a indiqué à ce dernier qu'il n'avait pas d'ordre à lui donner, avant de l'insulter grossièrement en présence de Messieurs r MA et e CH, qui ont tous deux attesté en ce sens.

Dès lors que Monsieur BI, en sa qualité de chef de poste sûreté du Grimaldi FORUM, avait précisément pour attribution de placer les agents de sécurité affectés sur le site par l'entreprise à l'enseigne BOSS SÉCURITÉ et de leur donner les consignes de travail, il était, à l'évidence, habilité non seulement à constater le non-respect par f HA des ordres qui lui avaient été donnés mais également à adresser à ce dernier les observations et remarques qui s'imposaient.

f HA ne peut donc sérieusement prétendre avoir été victime d'un « abus d'autorité ou de pouvoir ».

En indiquant, en réponse aux remontrances justifiées qui lui avaient été adressées, au sujet de son travail, à Monsieur BI qu'il « n'avait pas d'ordre à recevoir de lui », puis en l'insultant en des termes grossiers, le traitant notamment selon ses propres écritures, d' « emmerdeur et de vicieux », f HA a fait preuve d'une insubordination caractérisée, constitutive d'une faute grave.

Un tel comportement autorisait incontestablement l'employeur à mettre un terme, immédiatement, au contrat de travail.

Dans ces conditions la résiliation anticipée du contrat à durée déterminée conclu entre r FL et f HA, à l'initiative de l'employeur, ne revêt aucun caractère abusif.

f HA ne peut dès lors prétendre ni au paiement des salaires restant dus jusqu'au terme du contrat ni encore moins à l'allocation de dommages et intérêts.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort après en avoir délibéré.

Déboute f HA de l'intégralité de ses prétentions.

Le condamne aux entiers dépens.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6507
Date de la décision : 17/05/2001

Analyses

Rupture du contrat de travail ; Conditions de travail ; Contentieux (Social)


Parties
Demandeurs : f HA
Défendeurs : r FL

Références :

Arrêté Ministériel n° 80-93 du 28 janvier 1980
loi n° 1.067 du 28 décembre 1983


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.du.travail;arret;2001-05-17;6507 ?

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