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15/06/2000 | MONACO | N°258050

Monaco | Tribunal du travail, 15 juin 2000, E. c/ Partner's Service


Abstract

Contrat de travail

Conditions de travail : simples changements (lieu...) imposés par l'employeur en vertu de son pouvoir de direction - Absence de modifications substantielles qui nécessiteraient l'accord du salarié - Refus du salarié de se soumettre à ces changements - Manquement justifiant son licenciement

Résumé

Il est constant en l'espèce que par un courrier en date du 15 juillet 1998 la SAM Partner's Service a notifié à M.-A. E. le changement de son lieu et de son horaire de travail.

Contrairement à ce que soutient la demanderesse,

il ne s'agit pas là de modifications d'éléments essentiels de son contrat, mais de simples...

Abstract

Contrat de travail

Conditions de travail : simples changements (lieu...) imposés par l'employeur en vertu de son pouvoir de direction - Absence de modifications substantielles qui nécessiteraient l'accord du salarié - Refus du salarié de se soumettre à ces changements - Manquement justifiant son licenciement

Résumé

Il est constant en l'espèce que par un courrier en date du 15 juillet 1998 la SAM Partner's Service a notifié à M.-A. E. le changement de son lieu et de son horaire de travail.

Contrairement à ce que soutient la demanderesse, il ne s'agit pas là de modifications d'éléments essentiels de son contrat, mais de simples changements de ses conditions de travail, décidés par l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction dans la mesure où :

- le nouveau lieu de travail (Thermes marins de Monte Carlo) se situe également en Principauté, et donc dans le même secteur géographique que le précédent (quartier de Fontvieille) ;

- la durée globale du travail demeure quasiment inchangée ;

- le nouvel horaire décidé n'a pas sensiblement modifié la répartition entre travail de jour et travail de nuit ;

- la nature même de l'emploi occupé par M.-A. E. impliquait en tout état de cause une certaine flexibilité, tant en ce qui concerne les horaires que les lieux de travail, comme en attestent les articles 6-3 et 6-4 du titre IV du règlement interne de la SAM Partner's Service ;

- en l'absence de mention dans le contrat de travail et à défaut de tout élément, il n'est pas démontré par M.-A. E. que le fait de disposer, outre du dimanche, de sa soirée du samedi, ait constitué lors de son embauche, un élément déterminant.

Le changement des conditions de travail de M.-A. E. décidé par l'employeur à la suite de la perte du contrat Soremartec, pouvait donc être mis en œuvre par celui-ci sans l'accord de la salariée, sous réserve seulement que les délais de prévenance prévus par le règlement intérieur aient été respectés, ce qui n'est pas contesté en l'espèce.

En refusant de reprendre le travail, alors que le changement de ses conditions de travail avait été décidé par la SAM Partner's dans l'exercice de son pouvoir souverain de direction, M.-A. E. a commis une faute que son employeur était en droit de sanctionner par un licenciement ; le congédiement de cette salariée a donc été mis en œuvre pour un motif valable.

Motifs

Le Tribunal du travail,

Embauchée le 16 janvier 1997 par la SAM Partner's Service en qualité d'agent de propreté, M.-A. E. a été licenciée par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 23 juillet 1998, pour faute grave, sans préavis ni indemnités de rupture ;

Soutenant d'une part que la faute qui lui était reprochée ne pouvait, au regard des circonstances dans lesquelles les faits s'étaient déroulés, être qualifiée de faute grave, et d'autre part et en toute hypothèse que la mesure de licenciement dont elle avait fait l'objet revêtait un caractère manifestement abusif, M.-A. E., ensuite d'un procès-verbal de non-conciliation en date du 8 mars 1999, a attrait son ancien employeur devant le Bureau de jugement du Tribunal du travail, afin d'obtenir l'allocation à son profit des sommes suivantes :

* 5 843,88 F net, au titre du préavis,

* 9 039,89 F brut, à titre d'indemnité pour « licenciement abusif ».

* 3 350,00 F, à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice ;

À la date fixée par les convocations, les parties ont comparu par leurs conseils respectifs puis, après six renvois contradictoires intervenus à la demande des avocats, l'affaire a été plaidée à l'audience du 11 mai 2000 et mise en délibéré pour être le jugement rendu ce jour 15 juin 2000 ;

M.-A. E. fait valoir à l'appui de ses prétentions que le changement d'équipe et surtout d'horaires qui lui a été notifié le 14 juillet par son employeur constituait, compte tenu de ses obligations familiales dont ce dernier était parfaitement informé, une modification d'un élément essentiel de son contrat de travail qu'elle était donc en droit de refuser ;

Qu'en conséquence sa décision de ne pas accepter le nouvel horaire qui lui a été proposé ne peut être considérée comme un abandon de poste et encore moins comme un acte d'insubordination ;

Qu'en outre il résulte des investigations effectuées par l'inspection du travail que la SAM Partner's aurait pu, sans subir de préjudice en matière d'organisation du travail, la maintenir à son poste antérieur ;

Soutenant à titre principal que la SAM Partner's ne justifie en définitive d'aucun motif valable l'autorisant à mettre unilatéralement fin à son contrat de travail, à titre subsidiaire qu'au regard des circonstances ci-dessus décrites l'acte d'insubordination qu'elle a pu commettre ne revêt pas le caractère de gravité qui lui est prêté, et en tout état de cause que le licenciement dont elle a été l'objet présente un caractère abusif, elle demande au Tribunal du travail de faire droit à l'intégralité des demandes contenues dans sa requête introductive d'instance, dont le détail a été fourni ci-dessus ;

La SAM Partner's Service prétend pour sa part que le changement d'horaires imposé à M.-A. E., qui a été décidé par l'employeur dans l'exercice de son pouvoir souverain de direction pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, ne constitue pas une modification substantielle du contrat de travail de celle-ci ;

Qu'en toute hypothèse, si cette modification devait être qualifiée de substantielle par la présente juridiction, la rupture du contrat de travail, consécutive au refus opposé par le salarié, ne serait pas nécessairement abusive ni source de dommages et intérêts pour celui-ci ;

Estimant en définitive qu'en ne se présentant pas sur son lieu de travail le 20 juillet 1998 ni les jours suivants et en refusant ainsi de se soumettre aux instructions de son employeur, M.-A. E. s'est rendue coupable d'une faute grave, justifiant son licenciement immédiat sans préavis ni indemnité de rupture, la SAM Partner's conclut à l'entier débouté des demandes formées à son encontre ;

Sur quoi :

Il est constant en l'espèce que par un courrier en date du 15 juillet 1998 la SAM Partner's Service a notifié à M.-A. E. le changement de son lieu et de son horaire de travail ;

Contrairement à ce que soutient la demanderesse, il ne s'agit pas là de modifications d'éléments essentiels de son contrat de travail, mais de simples changements de ses conditions de travail, décidés par l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction dans la mesure où :

• le nouveau lieu de travail (thermes marins de Monte Carlo) se situe également en Principauté, et donc dans le même secteur géographique que le précédent (quartier de Fontvieille),

• la durée globale du travail demeure quasiment inchangée,

• le nouvel horaire décidé par l'employeur n'a pas sensiblement modifié la répartition entre travail de jour et travail de nuit (18h - 24h du lundi au mercredi - 17h - 23h le jeudi et le vendredi - 9h - 13h le samedi jusqu'au 14 juillet 1998 et postérieurement à cette date du lundi au samedi de 18h à 24h),

• la nature même de l'emploi occupé par M.-A. E. impliquait en tout état de cause une certaine flexibilité, tant en ce qui concerne les horaires que les lieux de travail, comme en attestent les articles 6-3 et 6-4 du titre IV du règlement intérieur de la SAM Partner's Service,

• en l'absence de mention dans le contrat et à défaut de tout autre élément, il n'est pas démontré par M.-A. E. que le fait de disposer, outre du dimanche, de sa soirée du samedi, ait constitué lors de son embauche, un élément déterminant ;

Le changement des conditions de travail de M.-A. E. décidé par l'employeur à la suite de la perte du contrat Soremartec, pouvait donc être mis en œuvre par celui-ci sans l'accord de la salariée, sous réserve seulement que les délais de prévenance prévus par le règlement intérieur aient été respectés, ce qui n'est pas contesté en l'espèce ;

Alors qu'elle avait pourtant bien reçu notification (cf. signature apposée le 16 juillet 1998 sur l'accusé de réception) de sa nouvelle affectation et de ses nouveaux horaires, il est également constant que M.-A. E. ne s'est pas présentée au rendez-vous qui lui avait été fixé le lundi 20 juillet 1998 à 17h afin de rencontrer son nouveau chef d'équipe ;

Elle ne s'est pas davantage rendue les jours suivants sur son nouveau lieu de travail (les thermes marins de Monte Carlo) ;

En refusant ainsi de reprendre le travail, alors que le changement de ses conditions de travail avait été décidé par la SAM Partner's dans l'exercice de son pouvoir souverain de direction, M.-A. E. a commis une faute, que son employeur était en droit de sanctionner par un licenciement ;

Le congédiement de cette salariée a donc été mis en œuvre pour un motif valable ;

Dès lors toutefois d'une part que la SAM Partner's ne justifie pas que cette absence lui ait causé ou ait pu lui causer un préjudice particulier et d'autre part qu'au regard des circonstances particulières de l'espèce l'abandon par M.-A. E. de son poste de travail, intervenu par méconnaissance du droit et sous le coup de la colère ou l'émotion, ne peut être qualifié d'acte d'insubordination caractérisée, les fautes ainsi commises par cette dernière ne rendaient pas impossible son maintien dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis et ne peuvent dès lors recevoir la qualification de fautes graves ;

Il sera dans ces conditions alloué à M.-A. E., compte tenu de son ancienneté de services et du montant de son salaire, la somme brute de 5 987,68 F, à titre d'indemnité de préavis ;

Ce licenciement ne pouvant, au regard des conditions dans lesquelles il a été mis en œuvre, être qualifié d'abusif, M.-A. E. sera en revanche déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal du travail,

Statuant publiquement, contradictoirement en premier ressort après en avoir délibéré,

* Dit que le licenciement de M.-A. E. ne repose pas sur une faute grave mais sur un motif valable ;

* Dit en outre qu'il ne revêt aucun caractère abusif ;

* Condamne en conséquence la Société Anonyme Monégasque Partner's Service à payer à M.-A. E. la somme brute de :

• 5 987,68 francs (cinq mille neuf cent quatre vingt sept francs et soixante huit centimes) à titre d'indemnité de préavis,

* Déboute M.-A. E. du surplus de ses prétentions.

Composition

Mme Coulet-Castoldi Juge de paix. Prés. ; Mme Martet ; MM. Mas, Giannotti, Hamet membres employeurs et salarié ; Mes Lorenzi, Sbarrato av. déf. ; D. Lorenzi av. stag.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 258050
Date de la décision : 15/06/2000

Analyses

Contrats de travail ; Conditions de travail


Parties
Demandeurs : E.
Défendeurs : Partner's Service

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.du.travail;arret;2000-06-15;258050 ?

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