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02/03/2000 | MONACO | N°6404

Monaco | Tribunal du travail, 2 mars 2000, a FI c/ SAM HO ME


Abstract

Contrat de Travail - Preuve de son existence incombant à celui qui se prétend salarié

Résumé

Un relevé d'identité bancaire et des mouvements sur un compte, auprès d'une société financière en Principauté de Monaco, qui y effectue des virements, ne suffisent pas à prouver un contrat de travail avec celle-ci.

Un intermédiaire qui avait exercé à Monaco pour le compte d'une société financière s'était vu demander par sa direction de transférer son activité à Genève où il bénéficiait d'un carnet d'adresse important. Il alléguait s'être

aperçu que son employeur utilisait son compte American Express pour réaliser un nombre considérable...

Abstract

Contrat de Travail - Preuve de son existence incombant à celui qui se prétend salarié

Résumé

Un relevé d'identité bancaire et des mouvements sur un compte, auprès d'une société financière en Principauté de Monaco, qui y effectue des virements, ne suffisent pas à prouver un contrat de travail avec celle-ci.

Un intermédiaire qui avait exercé à Monaco pour le compte d'une société financière s'était vu demander par sa direction de transférer son activité à Genève où il bénéficiait d'un carnet d'adresse important. Il alléguait s'être aperçu que son employeur utilisait son compte American Express pour réaliser un nombre considérable d'opérations et avoir vu son contrat immédiatement rompu lorsqu'il s'était alarmé de cette situation illégale auprès de celui-ci. Il avait saisi le Tribunal du travail, estimant son licenciement abusif, en paiement d'indemnités de préavis, congés payés sur préavis et dommages et intérêts.

La SAM HO ME soulevait l'incompétence rationae materiae du Tribunal du Travail, la relation de travail salarié avec le demandeur n'étant pas selon établie avec cette même société mais avec une société distincte à Genève.

Le Tribunal estime non rapportée la preuve d'un contrat de travail avec la Société Anonyme Monégasque HO ME dès lors que s'il apparait, au travers de diverses pièces (déclaration pour l'impôt cantonal et communal, bail du logement à Genève, cartes de visites, factures) que le demandeur a bien été lié à la SA de droit suisse HO ME et Cie, les mouvements sur son compte bancaire auprès de la SAM HO ME Monaco ne suffisent pas à caractériser l'existence d'une relation de travail avec la société monégasque.

Le tribunal du travail de la Principauté de Monaco n'est dès lors pas compétent pour connaître du litige.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu la requête introductive d'instance en date du 8 mars 1999 ;

Vu les convocations à comparaître par-devant le bureau de jugement du tribunal du travail, suivant lettres recommandées avec avis de réception, en date du 23 mars 1999 ;

Vu les conclusions déposées par Maître Didier ESCAUT, avocat-défenseur, au nom de Monsieur a FI, en date du 22 avril 1999 ;

Vu les conclusions déposées par Maître Joëlle PASTOR, avocat-défenseur, au nom de la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE HO ME, en date des 10 juin 1999 et 23 novembre 1999 ;

Ouï Maître Jean-Michel BARGIARELLI, avocat à la Cour de Paris, assisté de Maître Didier ESCAUT, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, au nom de Monsieur a FI, et Maître René SCHILEO, avocat au barreau de Nice, assisté de Maître Joëlle PASTOR, avocat-défenseur près la Cour d'Appel de Monaco, au nom de la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE HO ME, en leurs plaidoiries et conclusions ;

Vu les pièces du dossier ;

Aux termes d'un procès-verbal de non-conciliation en date du 22 mars 1999, Monsieur a FI a attrait la Société Anonyme Monégasque HO ME devant le Bureau de Jugement du Tribunal du Travail, afin d'obtenir sa condamnation au paiement des sommes suivantes :

– la contrepartie en francs français de la somme de 15.000 US Dollars, au titre du préavis,

– la contrepartie en francs français de la somme de 4.500 US Dollars, au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur le préavis,

– la contrepartie en francs français de la somme de 1.500.000 US Dollars, à titre de dommages et intérêts,

– 50.000 FF, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

À l'audience fixée par les convocations, les parties ont comparu par leurs conseils respectifs puis, après trois renvois contradictoires intervenus à la demande des avocats, l'affaire a été plaidée le 20 janvier 2000 et mise en délibéré pour être le jugement rendu ce jour 2 mars 2000 ;

Monsieur a FI expose, à l'appui de ses prétentions, qu'après avoir exercé pour le compte de la Société HO ME GENEVE des fonctions exactement semblables de mars 1995 à juin 1997, il lui a été demandé de transférer son activité de Genève, où il bénéficiait d'un carnet d'adresse volumineux voire même considérable, à MONACO ce qu'il a effectué sur les instructions de son employeur ;

Il précise par ailleurs qu'alors qu'il aurait dû servir seulement d'intermédiaire voire même de remisier, il s'est rapidement aperçu que son compte personnel AMERICAN EXPRESS était en réalité sciemment utilisé par son employeur pour réaliser un nombre important d'opérations, dont le montant cumulé atteint la somme de 2 millions de francs, prohibées expressément par la loi bancaire monégasque, et en tout cas non autorisées par les statuts de la Société HO ME, qui ne bénéficie en aucune façon d'un statut d'établissement financier au sens de la loi bancaire ; que lorsque craignant à terme des poursuites pénales il s'est alarmé de cette situation auprès de son employeur, celui-ci, pour toute réponse lui a notifié verbalement la fin de son contrat de travail, l'interruption de sa ligne téléphonique et la cessation pour l'avenir de la prise en charge du paiement du loyer de ses locaux parisiens ;

Soutenant qu'au vu de ces circonstances son licenciement présente un caractère manifestement abusif, il demande au Tribunal du Travail, après avoir insisté sur l'ampleur du préjudice qu'il subit au regard des poursuites douanières et pénales qui pourraient être exercées à son encontre, de faire droit à l'intégralité de ses prétentions, telles qu'elles ont été détaillées ci-dessus et d'assortir en outre le jugement à intervenir du bénéfice de l'exécution provisoire ;

La SAM HO ME conclut pour sa part à l'incompétence rationae materiae du Tribunal du Travail pour connaître du présent litige ;

Elle fait valoir, au soutien de ses prétentions, que Monsieur a FI n'apporte pas la preuve que la SAM HO ME ait été son employeur, au sens des dispositions de la loi 729 du 16 mars 1963 ; qu'en effet, en l'absence d'écrit, les pièces et documents qu'il verse aux débats de manière désordonnée n'établissent pas l'existence d'une relation de travail ayant existé entre lui et la Société Anonyme Monégasque HO ME, qu'il échet de ne pas confondre avec la SA de Droit Suisse HO ME et COMPAGNIE ou la Société de Droit Américain HO ME SECURITIES CORPORATION, ces trois entités juridiques étant totalement distinctes les unes des autres ; qu'au contraire ces documents, et notamment la pièce n° 18 constituée par une déclaration fiscale aux autorités Suisses, démontrent que l'employeur de Monsieur a FI est la Société HO ME et COMPAGNIE SA de GENEVE ;

SUR QUOI,

Aux termes de l'article 1er de la loi n° 446 du 16 mai 1946, le Tribunal du Travail a compétence pour régler les différends s'élevant à l'occasion du contrat de louage de services entre les employeurs et leurs représentants d'une part, les salariés et les apprentis qu'ils emploient de l'autre ;

L'article 1er de la loi n° 729 du 16 mars 1963 définit par ailleurs le contrat de travail comme la Convention par laquelle une personne s'engage temporairement à exécuter un contrat sous l'autorité et au profit d'une autre personne contre paiement d'un salaire déterminé ;

La charge de la preuve incombant à celui qui se prévaut de l'existence du contrat de travail, il convient en l'espèce de rechercher, en l'absence de contrat écrit, d'autorisation d'embauche et de permis de travail, si les pièces versées aux débats par Monsieur a FI établissent suffisamment que ce dernier ait effectué, sous les ordres et les directives de la SAM HO ME, et en contrepartie d'une rémunération, une prestation de travail pour le compte de ladite Société ;

S'il apparaît certes à l'examen de la déclaration pour l'impôt cantonal et communal 1996, du bail afférent au logement sis 19, Grand Rue à GENEVE, des cartes de visite libellées au nom de Monsieur a FI et enfin des factures de frais de transport aérien établies par la SA WTA TRAVEL AGENCY que Monsieur a FI a bien été lié par un contrat de travail à la SA de Droit Suisse HO ME et COMPAGNIE, il ne résulte pas des documents versés aux débats que Monsieur a FI ait ultérieurement exercé une activité similaire pour le compte de la SAM HO ME MONACO ;

La transmission par Monsieur a FI de son relevé d'identité bancaire à la SAM HO ME MONACO et les mouvements retracés sur le compte de ce dernier ne suffisent pas en effet à caractériser l'existence d'une relation de travail, alors d'une part qu'au regard de l'objet social de cette Société les virements, dont le montant diffère au surplus à chaque opération, ont pu être effectués à un tout autre titre que le paiement d'un salaire ; qu'il doit être observé d'autre part que les relevés de compte versés aux débats n'établissent nullement que le donneur d'ordre de ces virements ait été la Société Anonyme Monégasque HO ME ;

Monsieur a FI ne démontrant pas ainsi l'existence du contrat de travail le liant à la Société Anonyme Monégasque HO ME dont il se prévaut, le Tribunal du Travail de la Principauté de MONACO n'est pas compétent pour connaître du présent litige ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL DU TRAVAIL,

Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort après en avoir délibéré ;

Se déclare incompétent pour connaître du litige opposant Monsieur a FI à la SOCIÉTÉ ANONYME MONÉGASQUE HO ME ;

Renvoie ce dernier à mieux se pourvoir ;

Le condamne aux entiers dépens.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6404
Date de la décision : 02/03/2000

Analyses

Contrats de travail ; Contrat - Formation


Parties
Demandeurs : a FI
Défendeurs : SAM HO ME

Références :

Code de Procédure Civile
article 1er de la loi n° 446 du 16 mai 1946
article 1er de la loi n° 729 du 16 mars 1963


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.du.travail;arret;2000-03-02;6404 ?

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