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31/10/2024 | MONACO | N°30728

Monaco | Tribunal de première instance, 31 octobre 2024, j.K c/ d.E


Abstract

Contrats et obligations - Action en résiliation de la convention - Versement d'une somme en contrepartie d'une cession de parts - Contestation de la convention de portage - Échec de la cession de parts - Droit au remboursement de la somme versée - Inscription au passif de la succession

Résumé

Il est établi que le demandeur a versé à son père la somme de 500 000 euros pour lui éviter la saisie de biens immobiliers par le fisc français. En contrepartie de ce versement, un acte de cession de parts a été établi. La demande de remboursement est fondée su

r la clause résolutoire de cet acte. Il n'est pas contestable que c'est l'action...

Abstract

Contrats et obligations - Action en résiliation de la convention - Versement d'une somme en contrepartie d'une cession de parts - Contestation de la convention de portage - Échec de la cession de parts - Droit au remboursement de la somme versée - Inscription au passif de la succession

Résumé

Il est établi que le demandeur a versé à son père la somme de 500 000 euros pour lui éviter la saisie de biens immobiliers par le fisc français. En contrepartie de ce versement, un acte de cession de parts a été établi. La demande de remboursement est fondée sur la clause résolutoire de cet acte. Il n'est pas contestable que c'est l'action en contestation du portage de parts sociales qui ouvre droit au cessionnaire de résilier le contrat. Toutefois, l'issue judiciaire de cette contestation va motiver la mise en œuvre de la clause résolutoire ou non. Il est donc logique que le demandeur ait attendu l'issue de la procédure en contestation de portage engagée par ses soeurs pour mettre en oeuvre la clause résolutoire. La succession du père est cours de liquidation et le demandeur est en droit d'obtenir le remboursement des 500 000 euros, compte tenu de l'échec de la cession de parts. Cette somme doit être inscrite au passif de celle-ci.

TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

N° 2022/000378 (assignation du 20 avril 2022)

JUGEMENT DU 31 OCTOBRE 2024

En la cause de :

* • j.K, né le jma à Pian Camuno (Italie), de nationalité italienne, administrateur de société, demeurant x2 à Monaco ;

DEMANDEUR au principal, DÉFENDEUR en appel en garantie, ayant élu domicile en l'étude de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Nicolas PHILIPPE, avocat au barreau de Paris ;

d'une part ;

Contre :

* • d.E, tant à titre personnel, qu'ès-qualités d'administrateur provisoire à la succession de feu m.K, désignée à cet effet en vertu d'une ordonnance de référé du 2 mai 2019, demeurant en cette qualité X7 à Monaco ;

DÉFENDERESSE au principal, DEMANDERESSE en intervention forcée, ayant élu domicile en l'étude de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

d'autre part ;

En présence de :

* 1- g (ou j) K divorcée R, née le jma à Pian Camuno (Italie), de nationalité italienne, demeurant x3 à Monaco ;

* 2- n K épouse S, née le jma à Pian Camuno (Italie), de nationalité italienne, demeurant x1 à Monaco ;

INTERVENANTES FORCÉES, ayant toutes deux élu domicile en l'étude de Maître Christophe BALLERIO, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Jean-Louis DAVID, avocat au barreau de Grasse ;

* 3- s K épouse V, née le jma à Menton (France), de nationalité française, demeurant x4 à Menton (06500 - France) ;

INTERVENANTE FORCÉE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

* 4- m K, né le jma à Monaco, de nationalité italienne, demeurant X5 - Suisse, majeur sous curatelle, représenté par son curateur désigné par décision de la Commission tutélaire de Bellinzona (14) en date du 3 février 2009, Maître Massimo BIONDA, avocat à Lugano (TI) Suisse, y demeurant X6 ;

INTERVENANT FORCÉ, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

Visa

LE TRIBUNAL,

Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Frédéric LEFEVRE, huissier, en date du 20 avril 2022, enregistré (n° 2022/000378) ;

Vu l'exploit d'assignation en intervention forcée du ministère de Maître Patricia GRIMAUD-PALMERO, huissier, en date du 30 juin 2022, enregistré (n° 2023/000044) ;

Vu la jonction prononcée sur le siège à l'audience du 6 octobre 2022 des instances susvisées lesquelles se poursuivent désormais sous le seul numéro 2022/000378 ;

Vu les conclusions récapitulatives de Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur, au nom de s K épouse V, en date du 6 avril 2023 ;

Vu les conclusions récapitulatives de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de Maître Massimo BIONDA, ès-qualités de curateur de m K, en date du 6 avril 2023 ;

Vu les conclusions récapitulatives de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, au nom de j.K, en date du 4 juillet 2023 ;

Vu les conclusions récapitulatives de Maître Christophe BALLERIO, avocat-défenseur, au nom de g (ou j) K divorcée R et de n K épouse S, en date du 5 décembre 2023 ;

Vu les conclusions récapitulatives de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, au nom de d.E, à titre personnel et ès-qualités d'administrateur provisoire à la succession de feu m.K, en date du 6 février 2024 ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 21 juin 2024 ;

À l'audience publique du 27 juin 2024, les conseils des parties demanderesse en principal et intervenantes forcées numéros 1 et 2 ont été entendus en leurs plaidoiries, les conseils des autres parties ont déposé leur dossier et le jugement a été mis en délibéré pour être prononcé le 31 octobre 2024, par mise à disposition au Greffe.

Motifs

FAITS ET PROCÉDURE :

Par convention du 27 avril 2017, j.K a acquis de m.K « la pleine propriété des droits qu'il tient de la convention de portage existant entre lui et Mesdames jj.K divorcée R et n K épouse S ».

Le prix de cession était fixé à 3,3 millions d'euros payables à raison de 500.000 euros à la signature et le solde sous 90 jours après l'enregistrement des cessions de parts sociales.

Par acte d'huissier en date du 20 avril 2022, j.K a assigné d.E devant le Tribunal de première instance de Monaco et demande au Tribunal de :

* • condamner d.E ès-qualités d'administrateur judiciaire de la succession de feu m.K au paiement d'une somme de 500.000 euros, outre les intérêts légaux à compter du 23 mars 2022 ;

* • condamner d.E tant à titre personnel qu'ès-qualités d'administrateur judiciaire de la succession de feu m.K à lui payer une somme de 7.200 euros au titre des frais de procédure de l'article 238-1 du Code de procédure civile ;

* • ordonner l'exécution provisoire du jugement à venir ;

* • condamner d.E ès-qualités d'administrateur judiciaire de la succession de feu m.K à tous les frais et dépens de l'instance distraits au profit de Maître Thomas GIACCARDI, avocat-défenseur, sur sa due affirmation.

Par acte d'huissier du 30 juin 2022, d.E ès-qualités d'administrateur judiciaire de la succession de feu m.K a assigné en intervention forcée devant le Tribunal de première instance g (ou j) K divorcée R, n.S née K, s.V née K et m K et demande au Tribunal de :

* • dire que g (ou j) K divorcée R, n.S née K, s.V née K et m K doivent intervenir à l'instance engagée à son encontre ;

* • dire que le jugement à intervenir sera opposable à g (ou j) K divorcée R, n.S née K, s.V née K et m K ;

* • ordonner la jonction de la présente procédure avec l'instance enrôlée sous le n° 2022/000378 ;

* • réserver les dépens.

La jonction des deux procédures a été prononcée sur le siège sous le n° 2022/000378.

Par conclusions du 6 avril 2023, Maître Massimo BIONDA, curateur de m K demande au Tribunal de :

* • lui donner acte de ce qu'il s'en rapporte à justice sur les demandes formulées ;

* • condamner tout contestant aux entiers dépens distraits au profit de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Par conclusions en date du 6 avril 2023, s.V demande au Tribunal de :

* lui donner acte de ce qu'elle s'associe pleinement aux arguments développés et aux demandes formulées par ses soeurs, n K épouse S et g (ou j) K divorcée R, aux termes de leurs conclusions en date du 10 janvier 2033 et les cas échéant de leurs écritures ultérieures ;

En tout état de cause,

* Condamner j.K à lui payer la somme de 5.000 euros au titre des frais non compris dans les dépens en application de l'article 238-1 du Code de procédure civile ;

* Condamner j.K aux entiers dépens distraits au profit de Maître Hervé CAMPANA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Par conclusions récapitulatives en date du 4 juillet 2023, j.K a maintenu ses demandes initiales à l'encontre de d.E, outre les frais de procédure à l'encontre de d.E, g (ou j) K divorcée R et n K épouse S.

Par conclusions en date du 5 décembre 2023, n.S née K et g (ou j) K divorcée R demandent au Tribunal d' :

* • enjoindre à j.K et à d.E de verser aux débats tout document utile permettant de déterminer si le versement de la somme de 500.000 euros par j.K à m.K le 27 avril 2017 correspond à un versement réel ou fictif ;

Subsidiairement,

* • débouter j.K de ses demandes ;

* • condamner j.K à leur payer la somme de 50.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

* • condamner j.K à leur payer la somme de 20.000 euros au titre de leurs frais de procédure ;

* • condamner j.K aux dépens de l'instance distraits au profit de Maître Christophe BALLERIO, avocat-défenseur sous sa due affirmation.

Par conclusions récapitulatives en date du 6 février 2024, d.E, demande au Tribunal de :

* • débouter n.S née K et g (ou j) K divorcée R de leur demande visant à lui enjoindre de produire tout document utile permettant de déterminer si le versement de 500.000 euros invoqué par j.K est réel ou fictif ;

* • dire et juger qu'elle s'en rapporte, ès-qualités, à justice sur le bien-fondé de la demande de j.K ;

* • dire et juger qu'elle n'a commis, ès-qualités, aucune faute ni manquement dans sa mission ni à titre personnel ;

* • condamner j.K à lui verser, ès-qualités, une somme de 15.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive en ce qu'il a sollicité sa condamnation à titre personnel ;

* • condamner j.K à lui verser, ès-qualités, une somme de 5.000 euros au titre des frais de procédure non compris dans les dépens ;

* • condamner j.K aux entiers dépens distraits au profit de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, sous son affirmation de droit.

Les débats ont été clos par ordonnance en date du 21 juin 2024.

À l'audience du 27 juin 2024, l'affaire a été mise en délibéré au 31 octobre 2024.

SUR CE,

* Sur la demande en paiement de j.K

Les époux K, aujourd'hui tous deux décédés, ont constitué de leur vivant plusieurs sociétés civiles particulières dont la SCI Z suivant acte reçu par Maître Henry REY le 7 mars 1983. Les 100 parts sociales de cette SCI étaient détenues par jj.K, l'épouse et sa fille n K.

À compter de mai 1996, suite à plusieurs cessions, le capital de la SCI Z était réparti de la façon suivante :

* • g (ou j)née K divorcée R : 12 parts sociales,

* • n K épouse S : 12 parts sociales,

* • s K épouse V : 12 parts sociales,

* • m.K : 38 parts sociales,

* • j.K : 13 parts sociales,

* • m K : 13 parts sociales.

Par acte du 27 avril 2017, m.K a cédé à son fils j.K les droits qu'il détenait au titre d'une convention de portage conclue entre g (ou j) K divorcée R et n K épouse S lors de la constitution de la SCI Z.

Préalablement à cette convention, m.K a fait sommation à g (ou j) K divorcée R et à n K de procéder aux formalités nécessaires à la restitution des 24 parts qu'elles détenaient dans la SCI.

g (ou j) K divorcée R et n K épouse S ont contesté l'existence d'une convention de portage.

j.K les a alors assignées en justice le 19 juin 2017 afin d'obtenir reconnaissance de cette convention de portage et le transfert des 24 parts sociales devant lui revenir.

Par jugement du 18 juin 2020, le Tribunal a débouté j.K de sa demande de voir constater qu'une convention de portage a été passée entre m.K, g (ou j) K divorcée R et n K épouse S.

La Cour d'appel, dans un arrêt du 8 juin 2021, a confirmé le jugement du Tribunal.

j.K produit le contrat de cessions signé entre lui et m.K le 27 avril 2017.

L'acte rappelle que g (ou j) K divorcée R et n K épouse S détiennent chacune 12 parts sociales de la SCI Z qu'elles ont été sommées de restituer par acte extrajudiciaire du 19 avril 2017 mais ne se sont pas exécutées.

L'acte du 27 avril 2017 consiste pour m.K à céder à j.K la pleine propriété des droits qu'il détient dans la convention de portage intervenue entre lui et g (ou j) K divorcée R et n K épouse S. Le prix de cession est fixé à 3,3 millions d'euros, dont 500.000 euros payable le jour même.

C'est cette somme dont j.K sollicite le remboursement.

Il produit en pièce 2 un ordre de virement qu'il a donné au Y le 27 avril 2017 de 500.000 euros par débit de son compte au profit de m.K, l'objet indiqué est « achat actions société SCI Z ».

La pièce 3 émanant de la banque Y indique le 27 avril 2017 un virement du compte de j.K en faveur de m.K pour « achat actions société SCI Z » de 500.000 euros.

Ce virement est confirmé par l'extrait du compte bancaire n° xxx de j.K qui affiche le 27 avril 2017 un débit de 500.000 euros.

De cela, il se déduit que le 27 avril 2017, j.K a viré une somme de 500.000 euros à son père pour le motif « achats actions SCI Z ». Cette somme correspond au montant prévu à l'acte de cession signé le même jour entre j.K et son père.

Les procédures judiciaires engagées par j.K pour faire exécuter la cession de parts sociales à son profit à l'encontre de g (ou j) K divorcée R et n K épouse S ont échoué, il sollicite donc le remboursement de l'acompte qu'il a versé qui n'a plus lieu d'être.

g (ou j) K divorcée R et n K épouse S sollicitent que soit vérifié le fait que le paiement est bien réel et non fictif au motif que des procédures antérieures ont conclu à des paiements fictifs dans d'autres opérations.

Elles sollicitent que j.K et d.E soient enjoints de produire tous documents utiles permettant de vérifier la réalité du versement.

Le Tribunal relève que j.K a fourni l'acte de cession signé entre lui et son père le 27 avril 2017 prévoyant le premier versement de 500.000 euros. Il produit l'ordre de virement qu'il a donné à sa banque le jour de l'acte, pour un montant de 500.000 euros au profit de m.K ainsi que son exécution effective attestée par le document de la banque Y.

S'ajoute à cela, l'extrait de compte bancaire de j.K qui affiche au débit la somme de 500.000 euros.

De ces pièces communiquées à la procédure, le Tribunal considère que j.K a démontré la réalité du virement qu'il a effectué le 27 avril 2017 à son père d'un montant de 500.000 euros. g (ou j) K divorcée R et n K épouse S argue de ce que cette somme aurait pu être restituée à j.K sous forme d'espèces, ce qui est totalement impossible à vérifier, puisque de son vivant, m.K a eu toute liberté de verser à son fils des sommes en espèces, versements dont la preuve ne peut être rapportée puisque des retraits en liquide, par définition, ne mentionnent pas de « bénéficiaires ».

Dans un courrier du 5 avril 2022 adressé à j.K, d.E lui indique qu'elle a sollicité la banque aux fins de pouvoir vérifier l'effectivité du virement sur le compte du défunt et ajoute n'avoir pas eu de réponse à ce jour. Aucune pièce n'a été communiquée par d.E à la procédure attestant du virement, ce qui importe peu dès lors que la banque de j.K atteste, elle, avoir fait le virement sur un compte au nom de « m.K ».

Il n'y a pas lieu d'enjoindre à j.K ni à d.E de communiquer tout document utile à la démonstration de la réalité du versement et g (ou j) K divorcée R et n K épouse S sont déboutées de cette demande avant dire-droit.

La réalité du versement de 500.000 euros à son père est confortée par des pièces produites par d.E consistant en des échanges de courriels avec j.K permettant de reconstituer l'origine du virement de fonds de 500.000 euros.

m.K était en 2017 visiblement en difficulté financière à la suite d'une procédure fiscale devant entraîner la vente de certains de ses biens aux enchères pour permettre le recouvrement d'une créance estimée à 383.718,70 euros. m.K a essayé de vendre un bien immobilier mais aucun acquéreur ne s'est présenté.

Dans un courriel du 27 avril 2017 (jour de l'acte de cession de parts), j.K écrit à l'expert financier de son père « je vous confirme avoir accéléré une transaction et pouvoir ainsi transférer dans l'urgence ce matin 500.000 euros sur le compte de mon père afin de le sauver in extremis de la mise en vente de ses biens aux enchères par le fisc français ».

Il est démontré qu'il y a eu ce versement de j.K à son père de 500.000 euros. Il n'est pas surprenant qu'en contrepartie de ce versement, m.K qui n'avait pas de liquidités, ait prévu un acte de cession de parts au profit de son fils Jean-Pierre avec versement d'un acompte de 500.000 euros correspondant à la somme versée le jour même par son fils. L'acte de cession de parts est donc la contrepartie du versement de 500.000 euros, outre le solde à payer à la cession effective.

j.K sollicite le remboursement de la somme de 500.000 euros qu'il a versée à son père. Le complément de prix de 2,8 millions d'euros n'a pas été versé puisque la cession de parts sociales n'a jamais été enregistrée.

La demande de remboursement de j.K est fondée sur l'application de la clause résolutoire figurant à l'article 4 de l'acte en ces termes « le présent contrat pourra être résolu immédiatement et de plein droit si bon semble au cessionnaire, sans qu'il soit besoin de faire ordonner cette résolution en justice, dans le cas où le portage des parts sociales de la société et/ou le présent contrat seraient contestés en justice par jj.K et n K épouse S. Le cessionnaire devra informer le cédant de sa volonté de résoudre le présent contrat par lettre recommandée avec accusé de réception ».

g (ou j) K divorcée R et n K épouse S considèrent que les conditions d'application de l'article 4 ne sont pas remplies en l'espèce. Elles expliquent que la possibilité de mettre en oeuvre la clause résolutoire prévue par l'article 4 n'existe que le temps de la procédure de contestation du portage des parts sociales. Or la Cour de révision a statué le 21 mars 2022 sur cette question du portage et a mis fin à la procédure. Au-delà de cette date, j.K n'est plus recevable à invoquer la clause résolutoire selon elles.

Le libellé de l'article 4 rappelé supra ne prévoit pas explicitement un temps d'action de la part du cessionnaire. Il n'est pas contestable que c'est l'action en contestation du portage de parts sociales qui ouvre droit au cessionnaire de résilier le contrat. Toutefois, l'issue judiciaire de cette contestation va motiver la mise en oeuvre de la clause résolutoire ou non. Il est donc logique que j.K ait attendu l'issue de la procédure en contestation de portage engagée par ses soeurs pour mettre en oeuvre la clause résolutoire.

Ceci est d'ailleurs confirmé par un courrier du 23 mars 2022 de j.K à d.E qui demande le remboursement de la somme de 500.000 euros car « il résulte de l'arrêt confirmatif de la Cour de révision du 21 mars 2022 que m.R et S ont obtenu les droits qui faisaient l'objet de cette cession ». C'est donc bien à l'issue de la procédure judiciaire que j.K met en oeuvre la clause résolutoire et non en cours de procédure car si l'issue lui avait été favorable, il n'avait pas lieu d'invoquer ladite clause.

S'agissant de l'argument des défenderesses consistant à soutenir que si la clause de résiliation peut être mise en oeuvre postérieurement à l'issue de l'action en justice, il s'agit d'une clause potestative en ce que l'exécution du contrat dépend de j.K. Cet argument n'a pas de sens dans la mesure où si j.K met en oeuvre la clause résolutoire, c'est parce qu'il y a eu une action en justice ayant abouti à rejeter l'existence d'une convention de portage. Cette action n'a pas été exercée par lui mais a mis à néant la possible exécution du contrat signé le 27 avril 2017 avec son père. C'est à partir de là qu'il est en droit de mettre en oeuvre la clause résolutoire, aucun caractère potestatif n'existe dans un tel schéma.

j.K est donc fondé à solliciter la résolution du contrat et le remboursement de l'acompte versé au cédant, m.K aujourd'hui décédé.

La difficulté de son action réside toutefois dans le fait qu'il ne peut solliciter de l'administrateur provisoire à la succession, d.E, le remboursement d'une dette du défunt.

d.E l'a d'ailleurs écrit dans un courriel adressé aux autres héritiers le 31 mars 2022 dans lequel elle explique la revendication financière de j.K, demande la conduite à tenir et précise « à toutes fins utiles, je vous informe que tout acte de disposition devra être préalablement soumis à l'autorisation du Tribunal. Je n'ai aucune capacité de prendre des dispositions pour procéder au règlement de cette demande ». j.K était également destinataire de ce message.

La succession de m.K est en cours de liquidation partage. j.K, qui a versé 500.000 euros à son père décédé, est en droit d'obtenir le remboursement compte tenu de l'échec de la cession de parts. Cela dépend toutefois de l'actif de celle-ci. C'est pourquoi, à ce jour, la créance de j.K de 500.000 euros sur la succession de feu m.K doit être inscrite au passif par le notaire en charge de celle-ci.

En tout état de cause, j.K est débouté de toutes ses demandes en paiement à l'encontre de d.E.

* Sur la demande de dommages et intérêts de d.E pour procédure abusive

Il est établi que la demande de j.K concerne une somme de 500.000 euros qu'il a versée à son père et dont il demande remboursement du fait de la résiliation du contrat de cessions de parts sociales.

Le droit d'agir ne dégénère en abus que si la mauvaise foi du demandeur est démontrée. En l'espèce, le Tribunal a admis la créance revendiquée par j.K, sous la seule réserve que ce n'est pas d.E qui lui doit le paiement en sa qualité d'administrateur provisoire mais la succession. Il n'y a pas de la part du demandeur une quelconque mauvaise foi mais une simple erreur quant à la procédure à suivre pour récupérer sa créance.

Le Tribunal déboute en conséquence d.E de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive à son encontre.

* Sur la demande de g (ou j) K divorcée R et n K épouse S de dommages et intérêts pour procédure abusive à l'encontre de j.K

En préalable, le Tribunal ne statuera pas sur la demande de s K épouse V de lui donner acte de ce qu'elle s'associe pleinement aux demandes formulées par ses soeurs, ceci ne constituant pas une demande au sens juridique.

Le Tribunal relève que j.K n'a aucunement attrait en justice jj.K et n K épouse S puisque l'action initiale est engagée à l'encontre de d.E qui a, elle-même appelée g (ou j) K divorcée R et n K épouse S en intervention forcée.

La demande de dommages et intérêts pour procédure abusive à l'encontre de j.K n'est donc aucunement fondée et g (ou j) K divorcée R et n K épouse S seront déboutées.

* Sur la demande au titre des frais de procédure

L'article 238-1 du Code de procédure civile prévoit que :

« Le juge condamnera la partie tenue aux dépens ou qui perdra son procès à payer :

* 1° à l'autre partie la somme qu'il déterminera au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

* 2° et le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'assistance judiciaire une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'assistance aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide ;

Dans tous les cas, le juge tiendra compte de l'équité, de la situation économique de la partie condamnée. Il pourra, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. Néanmoins, s'il alloue une somme au titre du 2° du présent article, celle-ci ne pourra être inférieure à la part contributive de l'Etat.

L'avocat bénéficiaire de l'assistance judiciaire ne pourra cumuler la somme prévue au titre du 2° du présent article avec la part contributive de l'Etat ».

j.K est condamné à payer à d.E, la somme de 3.500 euros en application de l'article précité.

g (ou j) K divorcée R et n K épouse S, succombant en leurs demandes à l'encontre de j.K, sont déboutées de leur demande d'indemnisation de leurs frais de procédure à l'encontre de ce dernier. s K épouse V est également déboutée de sa demande à ce titre.

j.K est condamné aux dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur sous sa due affirmation.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL

Statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

Déboute g (ou j) K divorcée R et n K épouse S de leur demande avant dire-droit de voir communiquer par j.K et d.E tout document utile à la démonstration de la réalité du versement de 500.000 euros ;

Constate la résiliation de la convention du 27 avril 2017 à l'initiative de j.K ;

Dit que la créance découlant de la résiliation de la convention de 500.000 euros de j.K sur la succession de feu m.K sera inscrite au passif de celle-ci ;

Déboute j.K de ses demandes à l'encontre de d.E tant ès-qualités d'administrateur judiciaire de la succession de feu m.K qu'à titre personnel ;

Déboute d.E, de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive de la part de j.K ;

Déboute g (ou j) K divorcée R et n K épouse S de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive à l'encontre de j.K ;

Condamne j.K à payer à d.E, la somme de 3.500 euros en application de l'article 238-1 du Code de procédure civile ;

Déboute g (ou j) K divorcée R, n K épouse S et s K épouse V, de leur demande d'indemnisation de leurs frais de procédure à l'encontre de j.K ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne j.K aux dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Alexis MARQUET, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ;

Ordonne que les dépens distraits seront provisoirement liquidés sur état par le greffier en chef, au vu du tarif applicable ;

Composition

Après débats en audience du Tribunal de Première Instance de la Principauté de Monaco, et qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement,

Ainsi jugé et rendu au Palais de Justice, à Monaco, le 31 OCTOBRE 2024, par Madame Evelyne HUSSON, Vice-Président, Madame Catherine OSTENGO, Juge, Monsieur Maxime MAILLET, Magistrat Référendaire, assistés de Madame Cécile BRANCHE, Greffier stagiaire, en présence du Ministère Public.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 30728
Date de la décision : 31/10/2024

Analyses

Société immobilière ; Constitution, dissolution et actes relatifs à la vie de la société


Parties
Demandeurs : j.K
Défendeurs : d.E

Références :

article 238-1 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2024
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;2024-10-31;30728 ?

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