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14/03/2024 | MONACO | N°30408

Monaco | Tribunal de première instance, 14 mars 2024, m. A. et m. A. c/ g. A. épouse B. et autres


Abstract

Succession – Droit international privé – Règles de conflits de juridictions et de lois – Application de la loi dans le temps

Succession – Évaluation de l'actif et du passif successoraux – Rapports – Demande de communication de pièces – Action en réduction

Résumé

Au regard de la date de décès d'a. C., sont applicables les règles de compétence internationale et de conflit de lois antérieures à l'entrée en vigueur de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 relative au Code de droit international privé. Il sera donc fait application de l'a

rticle 3 du Code de procédure civile, avant son abrogation, qui dispose que « les juridictions monéga...

Abstract

Succession – Droit international privé – Règles de conflits de juridictions et de lois – Application de la loi dans le temps

Succession – Évaluation de l'actif et du passif successoraux – Rapports – Demande de communication de pièces – Action en réduction

Résumé

Au regard de la date de décès d'a. C., sont applicables les règles de compétence internationale et de conflit de lois antérieures à l'entrée en vigueur de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 relative au Code de droit international privé. Il sera donc fait application de l'article 3 du Code de procédure civile, avant son abrogation, qui dispose que « les juridictions monégasques connaissent : 1° De toutes actions ayant pour objet des immeubles situés dans la Principauté ;(…) 3° Des actions relatives à une succession ouverte dans la Principauté, jusqu'au partage définitif, s'il s'agit de demandes entre cohéritiers ; et pendant un délai de deux années à compter du décès, s'il s'agit de demandes formées par des tiers contre un héritier ou un exécuteur testamentaire ». Il ressort de l'application combinée de ces dispositions avec celles de l'article 83 du Code civil disposant que le lieu où la succession s'ouvre est celui du domicile du défunt, que la présente juridiction est compétente pour connaître du règlement d'une succession ouverte à Monaco s'agissant de tous les biens meubles et des immeubles situés dans la Principauté. Or, il résulte tant des pièces versées aux débats que des déclarations des parties, qui s'accordent sur ce point, que la succession est exclusivement composée de biens meubles, les immeubles en litige étant ou ayant été détenus par diverses sociétés dont les parts sociales étaient la propriété de la de cujus. S'agissant de la loi applicable, au regard des règles de conflit du for antérieures à la loi n° 1.448 du 28 juin 2017, la loi de la nationalité du défunt doit régir sa succession mobilière. Toutefois, en l'espèce, s'agissant de la loi anglaise, un renvoi est opéré au profit de la loi du domicile, donc ici, de la loi monégasque qu'il convient donc d'appliquer au présent litige.

L'article 712 du Code civil dispose que « Tout héritier, même bénéficiaire, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément par préciput et hors part ou avec dispense de rapport. Les legs faits à un héritier sont réputés faits par préciput et hors part, à moins que le testateur n'ait exprimé la volonté contraire ». Enfin, en application de l'article 787 du même code, les dispositions, soit entre vifs, soit à cause de mort, qui excèderont la quotité disponible, seront réductibles à cette quotité lors de l'ouverture de la succession dans les conditions prévues à l'article 789 qui dispose que « La réduction se détermine en formant une masse de tous les biens existant au décès du donateur ou du testateur. On y réunit fictivement, après en avoir déduit les dettes, ceux dont il a été disposé par donation entre vifs d'après leur état au jour de la donation et leur valeur à la date de l'ouverture de la succession ». En l'espèce, parallèlement aux rapports que le Tribunal a ordonnés dans son jugement du 25 septembre 2018 à l'encontre de l. et g. A., ces derniers formulent plusieurs demandes de rapport à l'encontre de leurs frères qui, de leur côté, présentent des demandes complémentaires qu'il convient d'examiner successivement. Léonardo et g. A. justifient par la production du relevé du compte bancaire détenue par a. C. auprès de la banque BSI à Lugano, du virement en faveur de m. A. de la somme de 200.000 GBP (254.080 euros), le 21 février 2013. Dans la mesure où ce dernier ne démontre ni même ne soutient l'existence d'une contrepartie à ce versement qui écarterait toute intention libérale, il convient de considérer qu'il constitue un don rapportable par application des dispositions de l'article 712 précité.

La demande de communication de pièces formée par les défendeurs s'inscrit également dans le cadre de l'action en réduction de donations puisqu'elle vise à obtenir de la part de m. et m. A., la communication de l'intégralité des relevés des comptes bancaires de la de cujus à compter de l'année 2012 afin de pouvoir identifier d'éventuels dons manuels pour ensuite en demander le rapport à la succession. Il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande formulée à l'encontre de m. et m. A. dans la mesure où elle est formulée contre deux co-héritiers par deux autres co-héritiers qui avaient eux-mêmes la possibilité, depuis l'ouverture de la succession, de se rapprocher des banques concernées, munis d'un acte de notoriété, pour solliciter, en leur qualité d'héritiers et donc de co-indivisaires, lesdits relevés de comptes, ce qu'ils se sont abstenus de faire. Il sera par ailleurs relevé qu'il n'est aucunement démontré que les demandeurs disposaient d'une procuration sur les comptes de leur mère et le fait que l'un de comptes litigieux était joint entre m. A. et sa mère ne constitue pas un obstacle à la communication par la banque des relevés à un des héritiers. Dans la mesure où il n'est pas justifié par l. et g. A. de leurs vaines démarches pour accéder à ces documents, les articles 274 et suivants du Code de procédure civile relatifs à la communication, la production et l'obtention des pièces, ne sont pas applicables.

L'article 713 du même code ajoute que « Les dons faits par préciput ou avec dispense de rapport ne peuvent être retenus ni les legs réclamés par l'héritier venant à partage que jusqu'à concurrence de la quotité disponible ; l'excédent est sujet à réduction ». L'article 780 du Code civil dispose que « Lorsque le disposant laisse à son décès des enfants, les libéralités ne peuvent excéder la moitié de ses biens s'il n'y a qu'un enfant, le tiers s'il y en a deux, le quart s'il y en a trois ou un plus grand nombre ». En l'espèce, a. A. laissant pour lui succéder quatre enfants, la quotité disponible est égale à un quart de la masse à partager. Les dons effectués par a. C. ne pouvaient donc excéder le quart de la masse successorale et sont donc sujets à réduction pour le surplus. Il sera à cet égard rappelé à m. et m. A. que leur mère pouvait librement disposer de la quotité disponible au profit de ses deux cadets et qu'ils ne peuvent donc pertinemment soutenir que la masse successorale doit être partagée à part égale entre les quatre enfants.

TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

N° 2023/000153 (ordonnance du 27 octobre 2022)

JUGEMENT DU 14 MARS 2024

En la cause de :

* 1- m. A., né le jma à M. (Royaume-Uni), de nationalité britannique, retraité, demeurant x1 x1 à Catanzaro (88060 – Italie),

* 2- m. A., né le jma à M. (Royaume-Uni), de nationalité britannique, retraité, demeurant x2, Bloc A, 4ème étage N. B 1 à Monaco,

DEMANDEURS, ayant tous deux élu domicile en l'étude de Maître Richard MULLOT, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

d'une part ;

Contre :

* 1- g. A. épouse B., née le jma à Margate (Royaume-Uni), de nationalité britannique, retraitée, demeurant x3, à Cliftonville, Kent (CT9 2JE – Royaume-Uni),

* 2- l. A., né le jma à M. (Royaume-Uni), de nationalité britannique, Président de sociétés, demeurant x4 (CT1 2HX – Royaume-Uni),

DÉFENDEURS, ayant tous deux élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par Maître Donald MANASSE, avocat au Barreau de Nice ;

d'autre part ;

En présence de :

* 1- Maître Nathalie AUREGLIA-CARUSO, en sa qualité de Notaire en charge de la succession de feue a. C. veuve A., demeurant en cette qualité 4 boulevard des Moulins à Monaco,

NON COMPARANTE, NI REPRÉSENTÉE ;

* 2- Monsieur le PROCUREUR GÉNÉRAL, près la Cour d'Appel, séant en son Parquet, Palais de Justice, 5 rue Colonel Bellando de Castro à Monaco ;

COMPARAISSANT EN PERSONNE ;

Visa

LE TRIBUNAL,

Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 27 juillet 2022, enregistré (n° 2023/000038) ;

Vu l'ordonnance rendue par le Juge en charge de la succession d'a. C. veuve A. en date du 27 octobre 2022, enregistré (n° 2023/000153) et renvoyant les parties devant le Tribunal de première instance le 24 novembre 2022 pour qu'il soit procédé au partage judiciaire de ladite succession ;

Vu la jonction prononcée sur le siège à l'audience du 5 janvier 2023 des instances susvisées lesquelles se poursuivent désormais sous le numéro 2023/000153 ;

Vu le jugement avant-dire droit de ce Tribunal en date du 15 juin 2023 ayant notamment soulevé d'office son incompétence territoriale s'agissant du partage et de la liquidation de la succession relative aux biens immobiliers situés à l'étranger, ordonné la réouverture des débats et ainsi invité les parties à conclure sur la question de la compétence territoriale du Tribunal et sur la loi applicable au litige et invité les parties ainsi que le Ministère Public à conclure au fond sur la question de la compétence territoriale du Tribunal et de la loi applicable, sursis à statuer sur le surplus des demandes et renvoyé pour ce faire à l'audience de mise en état dématérialisée du mardi 3 octobre 2023 pour les conclusions de m. et m. A. ;

Vu les conclusions récapitulatives de Maître MULLOT, avocat-défenseur, au nom de m. A. et m. A., en date du 26 juin 2023 ;

Vu les conclusions récapitulatives de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de g. A. épouse B. et de l. A., en date du 19 octobre 2023 ;

Vu les conclusions du Ministère public en date du 8 novembre 2023 ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 5 janvier 2024 ;

À l'audience publique du 11 janvier 2024, les conseils des parties ont été entendus en leurs plaidoiries et le jugement a été mis en délibéré pour être prononcé le 14 mars 2024, par mise à disposition au Greffe ;

Motifs

FAITS ET PROCÉDURE :

a. C. veuve A., née le jma à Glasgow (Ecosse), est décédée le jma en Angleterre, à l'âge de xx ans, où elle se trouvait en convalescence après un accident vasculaire cérébral.

Elle laissait pour lui succéder 4 enfants, nés de son union avec g. A., lui-même décédé plus de 25 ans auparavant en Allemagne, le jma :

* m. A. né le jma,

* m. A. né le jma,

* l. A. né le 0jma,

* g. A. née le jma.

Au moment de son décès, feue a. C. veuve A. était titulaire d'une carte de résidente monégasque, en sorte que sa succession y était ouverte en l'Etude de Maître Nathalie AUREGLIA-CARUSO, Notaire.

À la suite d'une assignation du 29 juillet 2016 de m. et m. A. devant le Tribunal de première instance de Monaco de g. B. née A. et de l. A., par jugement du 25 septembre 2018, le Tribunal a :

* ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de feue a. A. décédée le jma ;

* désigné pour y procéder Maître Nathalie AUREGLIA-CARUSO, notaire ;

* débouté m. et m. A. de leurs demandes relatives à un recel successoral ;

* dit qu'il y a lieu à rapport pour les biens suivants :

* • de la part de l. A. :

* – pour les 70 % des parts sociales de la société D. E. F. G. qui ont été transférés,

* – pour les 100 % des parts de la société W. F. G.,

* • de la part de g. A. :

* – pour les 30 % des parts sociales de la société D. E. F. G. qui ont été transférés,

* – pour les 100 % des parts de la société H. I. SA,

* – pour la valeur de l'anneau d'amarrage sis au port de San Remo,

* – pour le montant des effets personnels de type fourrures et bijoux en sa possession,

* donné acte à m. A. de son accord pour rapporter à la succession la somme de 900.000 livres sterling ou sa contre-valeur en euros, perçue par lui en avancement d'hoirie en octobre 2012 ;

* rejeté le surplus des demandes des parties ;

* ordonné la compensation totale des dépens.

Le 8 juin 2022, Maître AUREGLIA-CARUSO a dressé un procès-verbal de difficultés aux termes duquel elle indiquait que compte tenu des divergences des parties, elle se trouvait dans l'impossibilité de procéder, en l'état, aux opérations de liquidation, compte et partage judiciairement ordonnées.

Par ordonnance du 27 octobre 2022, le Juge en charge du suivi des opérations de liquidation de la succession d'a. C. veuve A., après avoir entendu les parties en leurs observations, a renvoyé m. A., m. A., l. A. et g. B. née A. devant le Tribunal de première instance à l'audience de mise en état du 24 novembre 2022.

Suivant jugement en date du 15 juin 2023, le Tribunal a :

* déclaré recevable l'action engagée par l. A. et g. B. née A. par assignation en date du 27 juillet 2022 ;

* constaté que le décès d'a. C. veuve A. est intervenu le jma ;

* dit que la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 est inapplicable à la succession de feue a. C. veuve A. ;

* soulevé d'office son incompétence territoriale s'agissant du partage et de la liquidation de la succession relative aux biens immobiliers situés à l'étranger ;

* ordonné la réouverture des débats ;

* invité les parties à conclure sur la question de la compétence territoriale du Tribunal et sur la loi applicable au litige ;

* invité les parties ainsi que le Ministère Public à conclure au fond sur la base de la compétence territoriale du Tribunal et de la loi applicable ;

* sursis à statuer sur le surplus des demandes.

Dans leurs dernières conclusions en date du 26 juin 2023, m. et m. A. demandent au Tribunal de :

• Sur le droit applicable,

* dire et juger que la règle de conflit de lois monégasque donne compétence à la loi nationale du défunt concernant sa succession mobilière,

* dire et juger que la loi anglaise, s'agissant de la nationalité de Feue a. C., renvoie elle-même à la loi de l'Etat dans lequel le défunt avait son domicile,

* constater qu'au moment de son décès, Feue a. C., résidente monégasque, avait son domicile en Principauté de MONACO, avec toutes conséquences de droit,

* dire et juger que la loi monégasque est applicable à la succession mobilière de Feue a. C.,

• À titre principal, sur le partage judiciaire,

* dire et juger que Feue a. C. est décédée ab intestat et a laissé pour lui succéder 4 enfants, habiles à recueillir ¼ de la succession chacun,

* dire et juger que la masse successorale est évaluée à une somme totale de 13.741.980 GBP minimum,

* dire et juger qu'en l'état d'une succession ouverte ab intestat, chacun des 4 héritiers est en droit de recevoir une somme de 3.435.495 GBP,

* dire et juger que l. A. a reçu, au titre de la succession de Feue a. C., la somme totale de 6.050.000 GBP minimum,

* dire et juger que g. B. a reçu, au titre de la succession de Feue a. C., la somme totale de 4.401.640 GBP minimum,

* constater que contrairement aux souhaits exprimés par Feue a. C., les parts de la société du LIECHTENSTEIN dénommée J. K., propriétaire de la maison "L." située à M. (ANGLETERRE), n'ont pas été transférées à m. A. et m. A.,

* dire et juger que lesdites parts sociales seront transférées par l'Administrateur de la société ou toute autre personne habilité, sur simple présentation du Jugement à intervenir, valant titre exécutoire, au profit de m. A. et m. A. à hauteur de 50% chacun, avec toutes conséquences de droit,

* fixer la valeur de ces parts sociales à la somme de 1.750.000 GBP, à laquelle s'ajoute celle de 45.340 GBP au titre des meubles meublants situés dans l'immeuble détenu par ladite société, soir la somme totale de 1.795.340 GBP,

* dire et juger que cette somme s'imputera, à hauteur de 50% chacun, soit 897.670 GBP, aux droits de m. A. et m. A. dans la succession de leur mère Feue a. C. ;

• En conséquence,

* condamner solidairement l. A. et g. B. à régler à m. A., à titre de soulte, la somme de 2.467.825 GBP, ou sa contrevaleur eu euros, avec toutes conséquences de droit,

* condamner solidairement l. A. et g. B. à régler à m. A., à titre de soulte, la somme de 1.567.825 GBP, ou sa contrevaleur eu euros, avec toutes conséquences de droit,

* à défaut d'attribuer les parts de la société J. K. à m. A. et m. A., à hauteur de 897.670 GBP chacun, Condamner solidairement l. A. et g. B. à régler à m. A., à titre de soulte, la somme de 3.365.495 GBP, ou sa contrevaleur eu euros, et à m. A., à titre de soulte, la somme de 2.465.495 GBP, ou sa contrevaleur eu euros, avec toutes conséquences de droit,

* dire et juger que les soldes des comptes bancaires disponibles (MEMOIRE), à MONACO ou à l'étranger, au nom de Feue a. C. seront attribués à m. A. et m. A. à hauteur de 50% chacun et que ces montants viendront en déduction des soultes qui leur sont dues par l. A. et g. B. ;

• À titre subsidiaire,

* désigner tel Administrateur provisoire qu'il plaira, aux frais avancés de la succession, avec les pouvoirs les plus étendus possibles pour éviter toute nouvelle situation de blocage et vaincre la résistance des cohéritiers, avec en particulier pour mission de :

* se faire communiquer par g. B. copie de l'acte par lequel Feue a. C. lui aurait fait "donation" des parts de la société H. I. SA ainsi que l'ensemble des documents en lien avec cette "donation" et le transfert des parts sociales qui a suivi,

* se faire communiquer par l. A. et g. B. tous les documents qu'il jugera utile pour permettre l'évaluation des parts sociales des sociétés D. E. F. G., W. F. G., H. I. S. A et J. K., notamment les documents comptables, bilans, relevés bancaires, baux etc...

* procéder ou faire procéder par tout professionnel de son choix qu'il se chargera de mandater aux frais avancés de la succession, y compris à l'étranger, à l'évaluation des biens immobiliers qui étaient ou sont encore détenus par les sociétés D. E. F. G., W. F. G., H. I. S. A et J. K.,

* procéder ou faire procéder par tout professionnel de son choix qu'il se chargera de mandater aux frais avancés de la succession, à un état descriptif et estimatif des immeubles, meubles, bijoux, fourrures et valeurs de toute nature composant la masse successorale,

* se faire communiquer par l. A. et g. B. tous éléments de nature à évaluer les biens (bijoux et fourrures) que le Jugement du Tribunal de Première Instance du 25 septembre 2018 leur a demandé de rapporter à la succession,

* de façon plus générale, se faire remettre tous documents utiles et recevoir les commentaires des parties, sans qu'il soit en revanche nécessaire de procéder à la réunion des parties eu égard au caractère totalement infructueux et excessivement polémique de l'unique réunion s'étant tenue chez le Notaire le 15 mai 2019,

* se faire remettre par les parties ou les établissements bancaires concernés, à MONACO ou à l'étranger, l'ensemble des relevés des comptes bancaires dont Feue a. C. était titulaire ou co-titulaire,

* se faire assister de tout sapiteur de son choix pour tout ou partie de sa mission, aux frais de la succession, y compris à l'étranger, chaque fois qu'il le jugera nécessaire ou utile mais sans que cela puisse retarder le dépôt de son rapport dans le délai imparti,

* reconstituer et évaluer les biens qui composent la masse successorale, en ce compris ceux qu'il a été demandé à l. A. et g. B. de rapporter à la succession par Jugement du Tribunal de Première Instance du 25 septembre 2018,

* déterminer des lots de nature à remplir m. et m. A. de leurs droits et chiffrer les soultes qui leur resteront dues après attribution de ce(s) lot(s),

* le cas échéant, faire procéder à la vente, par tout professionnel de son choix, des actifs immobiliers ou mobiliers qui composent la masse successorale,

* remettre au Notaire en charge du règlement de cette succession, Maître Nathalie AUREGLIACARUSO, le produit de ces ventes pour être répartis entre héritiers, selon les droits de chacun,

* faire régler les dettes de la succession, au moyen des fonds détenus par Maître Nathalie AUREGLIA-CARUSO, Notaire,

* de manière générale, apporter toutes précisions techniques et prendre toutes mesures utiles à la solution du litige,

* dire et juger que les frais afférents à la mission de l'Administrateur provisoire seront supportés par l'indivision successorale,

* dire et juger que l'Administrateur provisoire ainsi désigné disposera d'un délai de 3 mois pour accomplir sa mission et déposer son rapport,

* commettre un Juge pour surveiller les opérations dudit administrateur provisoire et trancher toute éventuelle difficulté qui s'élèverait au cours de celle-ci,

* condamner solidairement l. A. et g. B. à régler à m. A., à titre de provision ad Litem à valoir sur ses droits successoraux, la somme de 1.000.000 Euros (UN MILLION d'EUROS), avec toutes conséquences de droit,

* condamner solidairement l. A. et g. B. à régler à m. A., à titre de provision ad Litem à valoir sur ses droits successoraux, la somme de 500.000 euros (CINQ CENT MILLE EUROS), avec toutes conséquences de droit ;

• En tout état de cause,

* condamner solidairement l. A. et g. B. au paiement d'une somme de 200.000 euros (DEUX CENT MILLE EUROS) au profit de m. A. et m. A., à titre de légitimes dommages-intérêts, toutes causes de préjudices confondues (préjudice matériel, moral, financier, privation de jouissance, etc. ...)

* condamner solidairement l. A. et g. B. au paiement d'une somme de 100.000 euros (CENT MILLE EUROS) au profit de m. A. et m. A., au titre des frais irrépétibles non compris dans les dépens,

* dire et juger que toutes ces sommes porteront intérêt aux taux légal à compter de la date de l'assignation et que les intérêts seront capitalisés par application de l'article 1009 du Code civil,

* débouter l. A. et g. B. de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions contraires,

* ordonner, par application de l'article 202 du Code de procédure civile, l'exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant appel ou opposition.

* condamner tous contestants en tous les frais et dépens, lesquels comprendront tous frais et accessoires, frais d'huissiers, d'expertises et traductions éventuelles, dont distraction au profit de Monsieur le Bâtonnier Richard MULLOT, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Aux termes de leurs dernières écritures, l. et g. A. demandent au Tribunal de :

* sur la compétence territoriale, juger que le Tribunal de Première Instance est compétent pour connaître de l'ensemble de la succession litigieuse ;

* sur la loi applicable, juger que la loi monégasque est applicable à l'ensemble de la succession de feue a. C. ;

* avant-dire droit, tous droits et moyens de g. A. et de l. A. demeurant réservés :

* désigner tel expert judiciaire qu'il plaira au Tribunal avec pour mission de :

* reconstituer et évaluer la masse successorale, et déterminer et évaluer les rapports à succession devant être réalisés ;

* se rendre dans tout lieu utile à l'exécution de sa mission ;

* se faire communiquer tous documents et pièces utiles à l'accomplissement de sa mission, tels que notamment, mais non exclusivement, tous titres de propriété, acte de cessions de parts sociales ou d'actions, ainsi que l'ensemble des relevés de comptes bancaires et d'investissements dont feue a. C. était titulaire, que ce soit à Monaco ou à l'étranger, en ce compris les comptes joints que m. A. et/ou m. A. détenai(en)t avec cette dernière et/ou sur lesquels il(s) avaient la signature pour la période depuis janvier 2012 jusqu'à fin 2016 ;

* solliciter auprès de tout tiers, la communication de tous documents et pièces utiles à l'accomplissement de sa mission, en ce compris auprès de tout établissement financier et bancaire, que ce soit à Monaco ou à l'étranger, ou auprès de toute étude notariale que ce soit à Monaco ou à l'étranger ;

* entendre contradictoirement les parties ;

* évaluer les biens immobiliers dépendants de la succession litigieuse, sis à l'étranger, à savoir :

* • la maison familiale (« L. ») sise à M. en Angleterre et détenue par la société J. K. (Liechtenstein),

* • le bien immobilier à usage commercial sis à Canterbury en Angleterre, détenue par la société W. F. G.,

* • le bien immobilier dénommé « Invicta House » sis à Canterbury en Angleterre détenu par la société D. E. F. G. ;

* dresser un inventaire de l'ensemble des biens meubles se trouvant dans la maison familiale « L. », avec une estimation de leur valeur ;

* déterminer la valeur locative de la maison familiale « L. » ;

* estimer la valeur des bijoux reçus par g. A. et de ceux reçus par m. et m. A. ;

* examiner l'ensemble des relevés de comptes bancaires et d'investissement dont feue a. C. était titulaire, que ce soit à Monaco ou à l'étranger, en ce compris les comptes joints que m. A. et/ou m. A. détenai(en)t avec cette dernière et/ou sur lesquels il(s) avaient la signature pour la période depuis janvier 2012 jusqu'à fin 2016 ;

* décrire et vérifier l'ensemble des opérations et mouvements de fonds figurant sur ces relevés de comptes que ce soit au débit ou au crédit des comptes concernés, ainsi que leurs montants, leurs affectations et leurs provenances

* prendre connaissance des différents actes d'acquisition immobilière et de vente immobilière conclus par m. A., directement ou par l'intermédiaire de la SCI N. à compter de mars 2007, réalisés en France et portant sur des biens immobiliers sis à Saint-Laurent d'Eze en France ;

* faire toutes recherches et vérifications nécessaires, et demander la communication de tous documents utiles, pour déterminer l'origine des fonds ayant permis à m. A. de financer lesdites opérations immobilières, ainsi que les travaux de construction réalisés sur les terrains ainsi acquis ;

* déterminer la valeur de l'appartement dépendant du Park Palace sis à Monaco qui était détenu par feue a. A. par l'intermédiaire de la société O., par rapport au prix du marché à la date à laquelle il a été vendu par société, soit le 19 décembre 2012 ;

* déterminer la valeur locative de l'appartement dépendant du Park Palace sis à Monaco qui était détenu par feue a. A. par l'intermédiaire de la société O., par rapport au prix du marché ;

* déterminer les conditions d'acquisition par m. A. des deux biens immobiliers à usage commercial et d'habitation sis à M. (Angleterre), et des deux autres biens immobiliers sis à Ramsgate (Angleterre) (l'un à usage commercial et d'habitation et l'autre uniquement à usage commercial), ainsi que des deux autres propriétés qu'il a acquises également à M. en Angleterre, en 1972 ;

* s'adjoindre tout sachant, que ce soit à Monaco ou en Angleterre, dont notamment tout expert-comptable ou expert immobilier dont l'agence anglaise M. W., pour réaliser tout ou partie de sa mission ;

* dire que les frais de l'expertise seront avancés par prélèvement sur les fonds de la succession ;

* enjoindre à m. et m. A. de communiquer, sous une astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir, tous les relevés de comptes bancaires dont a. A. était titulaire, dont les comptes joints que m. A. et/ou m. A., détenaient avec feue a. C. et/ou sur lesquels avaient la signature, pour la période depuis le début de l'année 2012 jusqu'à la fin de l'année 2016 ;

* juger mal fondées les contestations opposées par m. et m. A. aux demandes avant-dire droit de g. A. épouse B. et de l. A. et, par conséquent, les en débouter ;

* sur le fond, donner acte à g. A. épouse B. et l. A. qu'ils se réservent tous droits et moyens au fond et, par conséquent, rouvrir les débats après le jugement à intervenir afin qu'ils puissent conclure sur le fond ;

* très subsidiairement sur le fond, juger m. et m. A. mal fondés en l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions et par conséquent, les en débouter ;

* à titre reconventionnel :

* juger que la valeur de la totalité des actifs immobiliers dépendants de la succession ne saurait être supérieure à la somme de 8.541.000 euros, dont les sommes de :

* 2.400.000 GBP pour DEFG,

* 1.385.000 GBP WFG,

* 1.256.000 GBP pour H.,

* 3.500.000 GBP pour J. ;

* juger que concernant le montant des rapports à faire par Monsieur l. WFG, un total de 1.650.000 GBP devra être déduit ;

* juger que concernant le montant des rapports à faire par g. A. épouse B., pour les bijoux, leur valeur ne saurait être supérieure à la somme de 50.000 GBP ;

* juger que l'anneau d'amarrage demeure parmi les actifs de la succession ;

* juger que la valeur des liquidités se trouvant sur les différents comptes bancaires ouverts au nom de la défunte ou conjointement, doit encore être déterminée ;

* juger que m. et m. A. devront faire les rapports suivants et que le règlement et la liquidation de la succession seront en fonction des éléments suivants :

* les deux biens immobiliers sis à M. (1 The Parade (Chiappini) et 14 Victoria Parade (le Glacier A.) dont les valeurs se situent entre 700.000 et 800.000 GBP pour le premier et de 1.600.000 GBP pour le second, devront être rapportés par m. A.,

* la somme de 5.160.000 euros au titre des profits tirés sur les opérations immobilières réalisées par m. A. en France à partir de l'avance de 900.000 GBP dont il a bénéficié,

* la somme de 864.000 euros au titre de l'occupation par m. A. de l'appartement de la défunte situé à Monaco dans l'immeuble Park Palace, pendant huit ans, moyennant une valeur locative mensuelle de 9.000 euros,

* la somme de 900.000 GBP au titre de l'avancement d'hoirie dont m. A. a bénéficié,

* la somme de 200.000 GBP qui aurait été versée par la défunte à m. A. au moment de la vente de l'appartement du Park Palace, en guise de « remerciements »,

* la somme de 252.000 GBP au titre de la jouissance exclusive que m. et m. A. se sont attribués sur le ben immobilier L. et du manque à gagner y correspondant,

* la somme de 210.000 GBP au titre des donations faites aux enfants et petits-enfants de m. A.,

* la somme de 100.000 GBP au titre des donations faites aux enfants de m. A.,

* les bijoux et montres conservés par m. et m. A.,

* l'apport en travail de g. A. pour le travail réalisé dans le restaurant familial, depuis ses 16 ans jusqu'à ses 42 ans, moyennant un salaire inférieur à celui pratiqué sur le marché,

* l'apport en travail de l. A. pour le travail réalisé dans le restaurant familial, depuis ses 16 ans jusqu'à ses 37 ans, moyennant un salaire inférieur à celui pratiqué sur le marché,

* la somme de 90.000 GBP que s'était appropriée â tort la défunte, sur le compte bancaire de g. A. à Lugano,

* la somme de 70.000 GBP que s'était appropriée à tort la défunte, sur le compte bancaire de l. A. à Lugano,

* la valeur (calculée au prix du marché réel) de la part revenant à g. A. au titre des droits qu'elle détenait dans le commerce de W. F. et de « L. » que la défunte l'a obligée à céder, moyennant le versement de la somme de 100.000 GBP et ce, du fait de la décision de g. A. d'épouser une personne ne répondant pas aux critères de la défunte ;

* en tout état de cause :

* juger que toute condamnation à paiement ou tout paiement à faire par m. et m. A. sera majorée des intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir et, en vertu de l'article 1099 du Code civil, les intérêts échus produiront eux-mêmes intérêts jusqu'à parfait paiement;

* condamner solidairement m. A. et m. A. à verser à g. A. et l. A., en application de l'article 238-l du Code de procédure civile, la somme de 80.000 euros ;

* condamner solidairement m. A. et m. A. aux entiers dépens distraits au profit de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, sous sa due affirmation.

Suivant conclusions en date du 8 novembre 2023, Monsieur le Procureur Général demande au Tribunal de :

* se déclarer compétent pour avoir à connaître de la succession de feue a. C. veuve A. relatives aux biens immobiliers se trouvant à Monaco et aux biens mobiliers d'une manière générale ;

* dire que le droit applicable à cette succession est le droit monégasque.

À l'audience du 11 janvier 2024, les conseils des parties ont plaidé et l'affaire a été mise en délibéré au 14 mars 2024.

SUR CE,

* Sur la compétence et la loi applicable

Au regard de la date de décès d'a. C. intervenu le jma, sont applicables les règles de compétence internationale et de conflit de lois antérieures à l'entrée en vigueur de la loi n° 1.448 du 28 juin 2017 relative au Code de droit international privé. Il sera donc fait application de l'article 3 du Code de procédure civile, avant son abrogation, qui dispose que « les juridictions monégasques connaissent : 1° De toutes actions ayant pour objet des immeubles situés dans la Principauté ;(…) 3° Des actions relatives à une succession ouverte dans la Principauté, jusqu'au partage définitif, s'il s'agit de demandes entre cohéritiers ; et pendant un délai de deux années à compter du décès, s'il s'agit de demandes formées par des tiers contre un héritier ou un exécuteur testamentaire ».

Il ressort de l'application combinée de ces dispositions avec celles de l'article 83 du Code civil disposant que le lieu où la succession s'ouvre est celui du domicile du défunt, que la présente juridiction est compétente pour connaître du règlement d'une succession ouverte à Monaco s'agissant de tous les biens meubles et des immeubles situés dans la Principauté.

Or, il résulte tant des pièces versées aux débats que des déclarations des parties, qui s'accordent sur ce point, que la succession est exclusivement composée de biens meubles, les immeubles en litige étant ou ayant été détenus par diverses sociétés dont les parts sociales étaient la propriété de la de cujus.

S'agissant de la loi applicable, au regard des règles de conflit du for antérieures à la loi n° 1.448 du 28 juin 2017, la loi de la nationalité du défunt doit régir sa succession mobilière. Toutefois, en l'espèce, s'agissant de la loi anglaise, un renvoi est opéré au profit de la loi du domicile, donc ici, de la loi monégasque qu'il convient donc d'appliquer au présent litige.

* Sur la demande d'expertise présentée « avant-dire droit »

La demande de désignation d'un expert judiciaire, bien que présentée avant-dire droit, dès lors qu'elle vise à évaluer la valeur de parts sociales dont le Tribunal a ordonné le rapport et à déterminer la composition de la succession, doit être examinée dans le cadre de la détermination de la masse successorale et de la valeur des biens mobiliers rapportables.

Par ailleurs, si l. et g. A. sollicitent, à titre subsidiaire, la réouverture des débats, il sera observé qu'ils ont largement conclu au fond sur les deux points précités. Au surplus, la demande d'expertise judiciaire n'ayant pour finalité que d'éclairer le Tribunal sans remettre en cause le fond du litige, elle ne saurait, en cas de rejet, justifier une réouverture des débats.

* Sur l'évaluation de l'actif et du passif successoraux

Il est acquis aux débats que dépendent de la succession outre des liquidités, les parts sociales de la société J. K. et un anneau d'amarrage au port de San Remo. Les parties s'opposent essentiellement sur l'évaluation de la demeure familiale, propriété de la société précisée.

* Sur l'évaluation des parts sociales de la société J. K.

m. et m. A. produisent une attestation de valeur de l'ancienne demeure familiale (L.) située à M. appartenant à cette société enregistrée au LIESCHTENTEIN. t. X., agent immobilier, l'a évaluée le 21 avril 2016 à une somme comprise entre 1,7 à 1,8 millions de livres sterling. Cette attestation, particulièrement sibylline, ne comporte aucune précision quant à la surface habitable, l'état d'entretien, l'existence et la surface d'un jardin ou de dépendances. Le professionnel n'indique pas non plus sur quelle base il a retenu cette estimation notamment en produisant des exemples de transactions similaires dans la même zone géographique. S'agissant du mobilier présent à l'intérieur, les demandeurs ont fait établir un inventaire qui chiffre l'ensemble à une somme comprise entre 36.370 GBP et 54.310 GBP.

l. et g. A. répliquent que ce bien immobilier est largement sous-évalué en rappelant les termes d'un échange de courriers entre leurs conseils respectifs en novembre 2021, m. et m. A. soutenant à cette époque que la maison ne pourrait être cédée dans le cadre d'une résolution amiable du litige à un prix inférieur à 3.500.000 GBP (pièce DEF n°25).

Malgré cet écart de prix et le fait que le bien est toujours en possession de la société J. K. il n'apparaît pas opportun de faire droit à la demande d'expertise judiciaire compte tenu de l'ancienneté du litige mais également des rapports conflictuels existant entre les parties susceptibles d'interférer durablement dans le déroulement des opérations d'expertise qui devraient se dérouler sur le territoire britannique étant observé que le système judiciaire britannique ne détient pas de liste d'experts agréés par la justice, ce qui impliquerait la désignation d'un professionnel de l'immobilier dont la compétence, l'intégrité ou l'impartialité serait susceptible d'être remise en cause par l'une et/ou l'autre des parties en fonction de l'évaluation produite.

Dès lors, le Tribunal considère que le prix de la propriété doit être fixé à la somme de 2.500.000 GBP constituant une position intermédiaire entre l'évaluation produite par les demandeurs et le prix qu'ils en exigeaient le 11 novembre 2021. En revanche, s'agissant du mobilier, les défendeurs n'apportant aucun élément permettant de remettre en question l'inventaire chiffré produit aux débats, il sera retenu à hauteur de 40.000 GBP.

Les parts sociales de la société J. K. seront donc évaluées à la somme totale de 2.540.000 GBP (3.235.960 euros).

* Sur l'anneau d'amarrage

L'anneau d'amarrage qui n'aurait finalement été attribué à aucun des héritiers doit pareillement être intégré à l'actif de la succession. En cas d'attribution à l'un d'entre eux dans le cadre des opérations de partage, il sera évalué à la somme non contestée de 60.000 euros HT fixée par g. Y. salariée du Port de SAN REMO, en réponse à la demande d'évaluation de m. A..

* Sur les comptes bancaires

a. A. détenait plusieurs comptes bancaires à Monaco, Lugano et San Remo.

Il ressort des pièces versées par les parties que doivent être intégrées à l'actif successoral les sommes suivantes :

* • 146.154,06 euros (compte n°00000273111 ouvert auprès de la Z. AA. à Monaco),

* • 1.723,57 euros (compte joint avec m. A. n°454792 ouvert auprès de la Z. AA. à Monaco à retenir pour moitié),

* • 69.892,84 GBP soit 89.043,47 euros compte tenu du taux de change au jour de l'ouverture de la succession (compte n° 00000262820 ouvert auprès de la Z. AA. à Monaco),

* • 40,82 euros (compte n° 00030227972 ouvert auprès de la Z. AA. à Monaco),

* • 249.809,54 CHF soit 274.041,06 euros compte tenu du taux de change au jour de l'ouverture de la succession (compte n°122146392002 ouvert auprès de lEGF à Lugano),

* • 74,16 CHF soit 81,35 euros (compte n°122146392003 ouvert auprès de lEGF à Lugano),

* • 56.606,01 euros (compte 131078 ouvert auprès de la AB. AC. à San Remo).

Le solde des comptes bancaires s'élève donc à la somme totale de 566.828,55 euros.

* L'évaluation du passif de la succession

l. et g. A. font état de diverses créances à l'égard de la succession. Toutefois, ils ne versent à l'appui de leurs allégations, aucune pièce justificative. Ainsi, s'agissant de leur créance salariale, aucun contrat de travail ou bulletin de salaire n'est versé alors qu'ayant conclu sur ce point, ils avaient la possibilité d'assortir leur demande de pièces. Il en est de même des sommes qui auraient été indument prélevées par a. C. sur leurs comptes bancaires, qui ne sont pas même démontrées par les relevés de leurs comptes bancaires étant au surplus observé qu'ils ne donnent aucune explication quant aux circonstances desdits prélèvements. Les sommes correspondantes ne peuvent, dans ces conditions, être prises en compte au titre du passif successoral.

Ensuite, g. A. expose avoir dû renoncer à la valeur des droits qu'elle détenait sur le commerce exploité par ses parents et la maison familiale au motif qu'elle aurait épousé un homme ne convenant pas à ses parents alors qu'elle indique elle-même avoir reçu la somme de 100.000 GBP en compensation. En tout état de cause, il n'est pas démontré que cette opération aurait généré en sa faveur, une créance sur la succession.

l. et g. A. demandent enfin la prise en compte de l'avantage successoral que leurs frères m. et m. se seraient octroyés en se réservant l'accès à la maison familiale (L.) après avoir changé les serrures. Ces derniers répliquent avoir agi après avoir constaté que les défendeurs s'étaient à plusieurs reprises introduits dans les lieux pour s'approprier divers mobiliers et valeurs. Dans la mesure où il n'est pas établi que m. ou m. A. se seraient effectivement installés dans la maison ou en auraient tiré un avantage quelconque, il n'y a pas lieu de prévoir une indemnité d'occupation au titre du passif successoral.

En conclusion, force est de constater qu'il n'est démontré l'existence d'aucune créance susceptible de venir s'imputer sur l'actif successoral.

* Sur les demandes relatives aux rapports

L'article 729 du Code civil dispose que « Sauf stipulation contraire dans l'acte de donation, le rapport est dû de la valeur du bien donné à la date de l'ouverture de la succession d'après son état au jour de la donation, le donataire bénéficiant des améliorations et répondant des dégradations imputables à son fait ».

En l'espèce, doit d'abord être prise en compte la valeur des parts sociales et effets dont le rapport a d'ores-et-déjà été ordonné par le Tribunal. Les parties s'opposant sur ce point, il convient de les examiner successivement étant précisé que l. et g. A. sollicitent, à titre principal, la désignation d'un expert judiciaire. Seront ensuite évoquées les demandes de rapport complémentaires.

* Sur l'évaluation des parts sociales de la société W. F. G.

Cette société, enregistrée à GUERNESEY, dont les parts ont été cédées à l. A., détenait au jour de l'ouverture de la succession une propriété commerciale et résidentielle située à CANTERBURY, 10-11 W. F.. m. et m. A. produisent, pour en établir la valeur, une première attestation non circonstanciée établie par Vince Nulcare, responsable évaluation chez AC. qui fixe le prix de vente, le 26 avril 2016, à une somme comprise entre 2.700.000 et 3.000.000 GBP. Une autre évaluation, établie par James X., agent immobilier, qui n'est pas davantage détaillée confirme une évaluation à 3.000.000 GBP à la date du 6 octobre 2017. Il est enfin communiqué un rapport d'évaluation établi par l'agence AD., géomètre agréé qui, de façon très circonstanciée et en tenant compte de la valeur locative des locaux professionnels, estime la propriété à la somme totale de 2.450.000 GBP en octobre 2017, en précisant que l'intérieur des bâtiments n'a toutefois pas pu être inspecté.

l. A., sous réserve de sa demande de désignation d'un expert, ne conteste pas l'évaluation faite par l'agence AD. dans la mesure où il se contente de rappeler que le montant de 750.000 GBP dont il s'est acquitté pour acquérir les parts sociales doit être déduit du montant à rapporter à la succession.

Dans la mesure où ce bien immobilier aurait été, au moins pour partie, cédé à des tiers depuis l'ouverture de la succession et que la société W. F. G. a fait l'objet d'une liquidation amiable, ce qui n'est pas contesté, l'organisation d'une mesure d'expertise n'apparaît pas opportune.

Il convient au vu des éléments versés à la procédure, de retenir la valeur de 2.450.000 GBP (3.112.480 euros), relativement consensuelle, pour fixer le montant à rapporter par l. A. à ce titre, étant observé qu'il ne saurait imputer sur ce montant un prix d'acquisition qu'il ne démontre pas avoir effectivement versé.

* Sur l'évaluation des parts sociales de la société D. E. F. G.

Les parts de cette société, enregistrée à JERSEY, ont été cédées par a. A. à ses deux cadets, à hauteur de 70 % au profit de l. et 30 % au profit de g.. Elle était, au jour de l'ouverture de la succession, propriétaire d'un ensemble immobilier à usage mixte (commercial et résidentiel) situé 19-23 D. E. F. à CANTERBURY (Maison Invicta) de plus de 2600 m² qui aurait été vendu en 2020 avant que la société ne soit liquidée en 2021.

Les demandeurs qui considèrent que les parts de cette société doivent être rapportées à hauteur de 4 220 000 GBP, se fondent en premier lieu sur la valeur de la propriété, estimée le 26 avril 2016 entre 4 000 000 et 4 500 000 GBP par la société AC. qui toutefois, ne donne aucun détail ni élément qui permettrait d'objectiver son évaluation.

m. et m. A. produisent ensuite plusieurs offres d'achat à hauteur de :

* • 4.000.000 GBP, le 15 février 2017, de la part du groupe AE.,

* • 4.250.000 GBP, le 13 février 2017, de la part de la société AF. LTD,

* • 4.412.000 GBP, le 2 juin 2017, de la part du groupe AG. AH.

Il est également produit un courrier adressé à a. C. datant du 16 novembre 2010, époque à laquelle une vente avait été envisagée au prix de 4.250.000 GBP. Dans un autre courrier, adressé à feu g. A. le 13 mars 1990, le prix de vente de l'ensemble immobilier avait déjà été estimé à 3.930.328 GBP.

m. et m. A. joignent par ailleurs un rapport d'évaluation circonstancié, établi par le cabinet AD. qui indique un prix minimum de 3.360.000 GBP pouvant atteindre 5.400.000 GBP si les locaux étaient vacants et réaménagés en résidence étudiante.

Parallèlement, et alors que le 21 mai 2021, le conseil de l. et g. A. informait le notaire en charge du règlement de la succession que la société D. E. F. G. avait été liquidée le 15 avril 2021 et qu'elle ne détenait plus de bien immobilier depuis 2020, les défendeurs ne produisent pas l'acte de vente du bien immobilier mais seulement une évaluation établie le 24 novembre 2016 par la société BTF, agent immobilier, à hauteur de 2.400.000 GBP qui à l'inverse du rapport AD. ne répertorie pas les ventes conclues dans le secteur à titre de comparaison.

Malgré l'importante discordance entre cette évaluation et les éléments produits en demande, il n'apparaît pas opportun de désigner un expert judiciaire, pour les mêmes raisons que précédemment évoquées, pour évaluer les parts sociales de cette société qui de surcroît a été liquidée et dont le bien a été vendu en un ou plusieurs lots.

Le Tribunal considère que l'ensemble des éléments produits permet de fixer la valeur à rapporter à la succession au titre des parts de cette société à la somme de 3.900.000 GBP (4.968.600 euros).

* Sur l'évaluation des parts sociales de la société H. I.

Les parts de cette société, enregistrée au PANAMA, ont été cédées à g. A. par sa mère. Elle détenait à cette date, un appartement à SAN REMO qui a été vendu le 20 décembre 2021, à deux napolitains au prix de 1.475.000 euros. m. et m. A. font à juste titre valoir que ce prix est nettement inférieur à celui qui avait été retenu par le géomètre-expert que g. A. avait elle-même mandaté le 13 janvier 2017 et dont elle avait transmis le rapport au notaire en charge du règlement de la succession, le 18 octobre 2021. La valeur de l'appartement avait alors été fixée à 1.696.000 euros par le professionnel dont la désignation faisait consensus devant le notaire.

Les demandeurs produisent pour leur part, une estimation établie le 17 juillet 2016 réalisée par l'agence immobilière AZ., qui chiffre l'appartement à 2.639.000 euros en précisant que sa surface est de 311 m² outre une terrasse de 394 m², deux box et un ascenseur privé. Ils considèrent que le prix auquel le bien a été vendu, très inférieur à celui de 2.000.000 euros, fixé lors de la mise en vente, ne correspond pas au prix au m² d'appartements pourtant d'une qualité et d'un standing inférieurs. Ils ne produisent cependant pour en justifier que des annonces d'offres de vente qui ne reflètent pas nécessairement le prix de cession effectif.

Il font en revanche et à juste titre valoir que la surface retenue par le géomètre-expert est erronée au regard de l'acte de vente notarié qui précise que le bien est composé de deux appartements réunis qui représentent des surfaces de 151 m² et 163 m² soit au total 314 m² outre deux terrasses de 127 et 138 m². Sur la base de ces surfaces et du prix au m² retenu par l'expert-géomètre (5.500 euros pour le couvert et 1.850 euros pour les terrasses) dont la qualité garantit l'impartialité, l'ensemble peut être évalué à la somme globale de 2.000.000 d'euros, correspondant au prix de mise en vente, étant observé que la succession n'a pas à supporter les conséquences d'une vente à vil prix dont g. A. est seule responsable.

En revanche aucune évaluation du mobilier n'étant versée, la somme de 30.000 GBP réclamée ne peut être prise en compte.

* Sur les bijoux et les fourrures

Dans son jugement du 25 septembre 2018, le Tribunal a considéré que ces bijoux, dont m. et m. justifiaient de l'existence avant le décès de leur mère, devaient être rapportés à la succession par g. A..

Pour justifier de la valeur des bijoux, les demandeurs produisent en premier lieu une évaluation établie en 1995 portant sur un solitaire estimé à 82.000 GBP outre 4 broches pour un montant total de 24.500 GBP dont g. A. ne conteste pas qu'elle correspond effectivement aux bijoux de sa mère. Les autres pièces communiquées sont des factures très anciennes établies au nom de feu g. A. et ne peuvent être prises en compte dès lors qu'il n'est pas établi que les bijoux correspondant ont été offerts à son épouse. Sont enfin produites des photos de broches qui correspondent en réalité à celles qui sont détaillées dans l'estimation faite en 1995.

Pour sa part, g. A. se contente de chiffrer arbitrairement à 50.000 GBP la collection de bijoux alors qu'étant en sa possession, il lui était aisé de la faire estimer. Dans ces conditions, et compte tenu du fait que les métaux précieux et pierres précieuses ne perdent que très rarement de la valeur dans le temps, le montant à rapporter au titre de ces bijoux sera fixée à 106.500 GBP (135.681 euros).

S'agissant des fourrures, aucune des parties ne produit d'élément permettant d'en chiffrer la valeur. m. et m. A. considèrent qu'une somme de 200.000 GBP doit être retenue par le Tribunal. Dans la mesure où g. A. qui critique cette estimation ne communique aucune pièce, ni même ne propose que ces fourrures soient restituées ou intégrées à la mission d'expertise judiciaire qu'elle préconise par ailleurs, la valeur de 200.000 GBP (254.800 euros) sera retenue.

* Sur les demandes complémentaires de rapport à la succession

L'article 712 du Code civil dispose que « Tout héritier, même bénéficiaire, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément par préciput et hors part ou avec dispense de rapport. Les legs faits à un héritier sont réputés faits par préciput et hors part, à moins que le testateur n'ait exprimé la volonté contraire ».

Enfin, en application de l'article 787 du même code, les dispositions, soit entre vifs, soit à cause de mort, qui excèderont la quotité disponible, seront réductibles à cette quotité lors de l'ouverture de la succession dans les conditions prévues à l'article 789 qui dispose que « La réduction se détermine en formant une masse de tous les biens existant au décès du donateur ou du testateur. On y réunit fictivement, après en avoir déduit les dettes, ceux dont il a été disposé par donation entre vifs d'après leur état au jour de la donation et leur valeur à la date de l'ouverture de la succession ».

En l'espèce, parallèlement aux rapports que le Tribunal a ordonnés dans son jugement du 25 septembre 2018 à l'encontre de l. et g. A., ces derniers formulent plusieurs demandes de rapport à l'encontre de leurs frères qui, de leur côté, présentent des demandes complémentaires qu'il convient d'examiner successivement.

Dans le courrier que l. et g. A. ont adressé au notaire le 20 janvier 2017, ils invoquent « dans l'hypothèse où les ventes ne pourraient pas être considérées comme ayant été réalisées à des conditions normales du marché » diverses opérations reprises dans leurs conclusions et qui n'ont pas vocation à être rapportées à la succession pour les raisons suivantes :

* • le prêt d'un million GBP consenti sans intérêt à m. A. par ses parents correspond en réalité au rapport ordonné par le jugement du 25 septembre 2018, à hauteur de 900.000 GBP après déduction de la somme de 100.000 GBP que chacun des quatre enfants a perçu à titre de legs et ne peut donc faire l'objet d'une demande supplémentaire de rapport,

* • le rapport de la somme de 864.000 euros correspondant au montant des loyers dont m. A. ne se serait pas acquitté alors que pendant 8 ans il aurait occupé l'appartement dont sa mère était propriétaire à Monaco est exclusivement fondé sur le fait que l'intéressé, bien qu'étant propriétaire d'un bien à Saint Laurent d'Eze, avait obtenu une carte de résident monégasque en se déclarant domicilié dans l'appartement maternel, ce qui ne suffit pas établir qu'il s'y était effectivement installé étant rappelé que la charge de la preuve de l'existence de cette créance successorale repose sur l. et g. A. qui ne produisent à l'appui de leur allégation, aucune autre pièce probante,

* • l'acquisition en 1975 par m. A. de deux biens immobiliers sis à M. qui appartenaient à ses parents alors qu'il n'est apporté aucun élément permettant d'établir qu'il s'agissait de donations déguisées et donc rapportables. Il en est de même du fonds de commerce et de l'appartement sis à RAMSGATE acquis par m. A.,

* • le dépôt de fonds en garantie de l'hypothèque sur la maison dont m. A. est propriétaire à FOLKERSTONE depuis 1983 n'est pas davantage étayé de pièces permettant de considérer qu'il constituait un don de la part de la défunte,

* • l'acquisition par m. A. de la propriété de Saint Laurent d'Eze qui aurait été acquise notamment au moyen de la somme de 900.000 GBP a d'ores et déjà été jugée rapportable. Aucune explication ni pièce n'est jointe permettant de justifier que le coût total de l'opération (5.160.000 euros) devrait être rapporté à la succession,

* • les donations faites au profit des enfants et petits-enfants de m. et m. A. pour une somme totale de 310.000 GBP, ces sommes ne pouvant être prises en compte dans la mesure où l'article 717 du Code civil dispose que les dons faits à l'enfant de celui qui se trouve successible à l'époque de l'ouverture de la succession sont toujours réputés faits avec dispense de rapport,

* • la conservation de bijoux et de montres par m. et m. A. qui auraient dépendu de la succession de leur père alors que le présent litige concerne exclusivement la succession d'a. C. et non celle de son défunt époux décédé en 1990,

* • l'acquisition par m. A. de divers bien immobiliers prétendument financés au moyen de dons manuels pour lesquels il est demandé une expertise alors que cette mesure ne doit pas pallier la carence des parties et qu'au cas d'espèce, les défendeurs n'apportent aucun élément de preuve à l'appui de leurs allégations,

* • la vente de l'appartement sis à Monaco dont les conditions seraient susceptibles d'avoir profité à m. A. et pour laquelle une expertise judiciaire apparait pareillement infondée en l'absence de tout élément de preuve étant par ailleurs observé que le 10 juin 2009, cet appartement avait été évalué à 5.800.000 euros -et non pas comme il est soutenu à 7,5 millions- et que si dans son courrier du 1er septembre 2009, a. C. indiquait qu'un de ses amis était prêt à le lui acheter au prix de 7,5 millions d'euros, aucune vente n'est intervenue avant 2013 date à laquelle l'appartement a été cédé au prix de 4.800.000 euros.

Il s'ensuit qu'aucune de ces demandes de rapport formulées par Léonardo et g. A. ne peut être accueillie.

En revanche, ils justifient par la production du relevé du compte bancaire détenue par a. C. auprès de la banque BSI à Lugano, du virement en faveur de m. A. de la somme de 200.000 GBP (254.080 euros), le 21 février 2013. Dans la mesure où ce dernier ne démontre ni même ne soutient l'existence d'une contrepartie à ce versement qui écarterait toute intention libérale, il convient de considérer qu'il constitue un don rapportable par application des dispositions de l'article 712 précité.

m. et m. A. présentent pour leur part une demande de rapport complémentaire de deux véhicules qui auraient appartenu à la défunte, ainsi qu'une plaque d'immatriculation spéciale numérotée AM73. Ils n'apportent cependant, à l'appui de leurs allégations, aucune preuve, pas même celle de l'existence de ces biens. Leur demande de rapport sera en conséquence rejetée.

Enfin, la demande de communication de pièces formée par les défendeurs s'inscrit également dans le cadre de l'action en réduction de donations puisqu'elle vise à obtenir de la part de m. et m. A., la communication de l'intégralité des relevés des comptes bancaires de la de cujus à compter de l'année 2012 afin de pouvoir identifier d'éventuels dons manuels pour ensuite en demander le rapport à la succession.

Il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande formulée à l'encontre de m. et m. A. dans la mesure où elle est formulée contre deux co-héritiers par deux autres co-héritiers qui avaient eux-mêmes la possibilité, depuis l'ouverture de la succession, de se rapprocher des banques concernées, munis d'un acte de notoriété, pour solliciter, en leur qualité d'héritiers et donc de co-indivisaires, lesdits relevés de comptes, ce qu'ils se sont abstenus de faire. Il sera par ailleurs relevé qu'il n'est aucunement démontré que les demandeurs disposaient d'une procuration sur les comptes de leur mère et le fait que l'un de comptes litigieux était joint entre m. A. et sa mère ne constitue pas un obstacle à la communication par la banque des relevés à un des héritiers. Dans la mesure où il n'est pas justifié par l. et g. A. de leurs vaines démarches pour accéder à ces documents, les articles 274 et suivants du Code de procédure civile relatifs à la communication, la production et l'obtention des pièces, ne sont pas applicables.

* Sur l'action en réduction

L'article 713 du même code ajoute que « Les dons faits par préciput ou avec dispense de rapport ne peuvent être retenus ni les legs réclamés par l'héritier venant à partage que jusqu'à concurrence de la quotité disponible ; l'excédent est sujet à réduction ».

L'article 780 du Code civil dispose que « Lorsque le disposant laisse à son décès des enfants, les libéralités ne peuvent excéder la moitié de ses biens s'il n'y a qu'un enfant, le tiers s'il y en a deux, le quart s'il y en a trois ou un plus grand nombre ».

En l'espèce, a. A. laissant pour lui succéder quatre enfants, la quotité disponible est égale à un quart de la masse à partager.

Les dons effectués par a. C. ne pouvaient donc excéder le quart de la masse successorale et sont donc sujets à réduction pour le surplus. Il sera à cet égard rappelé à m. et m. A. que leur mère pouvait librement disposer de la quotité disponible au profit de ses deux cadets et qu'ils ne peuvent donc pertinemment soutenir que la masse successorale doit être partagée à part égale entre les quatre enfants.

Il résulte de ce qui précède, compte tenu des taux de change GBP/Euro et CHF/Euro à retenir au jour de l'ouverture de la succession respectivement de 1,274 et de 1,097 que l'actif de la succession se compose comme suit :

* • parts sociales de la société J. K. : 3.235.960 euros (2.540.000 GBP),

* • anneau d'amarrage : 60.000 euros,

* • solde des comptes bancaires : 566.828,55 euros,

* • parts sociales de la société W. F. G. : 3.112.480 euros (2.450.000 GBP),

* • parts sociales de la société D. E. F. G. : 4.968.600 euros (3.900.000 GBP),

* • parts sociales de la société H. I. : 2.000.000 euros,

* • virement en faveur de m. A. : 254.080 euros (200.000 GBP),

* • versement en faveur de m. A. : 900.000 euros,

* • bijoux : 135.681 euros (106.500 GBP),

* • fourrures : 254.800 euros (200.000 GBP),

* Total de l'actif successoral : 15.488.429,55 euros.

La quotité disponible est donc égale à 3.872.107,38 euros et la réserve individuelle des cohéritiers s'élève à la somme de 2.904.080,54 euros. L'indemnité de réduction éventuellement due par chacun des héritiers dépend de la part dont ils ont d'ores et déjà bénéficié et qui excéderait cette réserve héréditaire.

l. A. a perçu 3.112.480 euros (100 % des parts de la société W. F. G.) et 3.478.020 euros (70% des parts de la société D. E. F. G.). Il est donc redevable d'une indemnité de réduction égale à 3.686.419,46 euros.

g. A. a perçu 2.000.000 euros (100 % des parts sociales de la société H. I.) et 1.490.580 euros (30 % des parts de la société D. E. F. G.) outre les bijoux et les fourrures (135.681 et 254.800 euros) soit au total 3.881.061 euros. Elle est donc redevable d'une indemnité de réduction égale à 976.980,46 euros.

m. A. a perçu 1.154.080 euros de liquidités. La part complémentaire lui revenant équivaut donc à la somme de 1.750.000,54 euros.

m. A. enfin, doit recevoir la totalité de sa part correspondant à la réserve héréditaire, soit la somme de 2.904.080,54 euros.

Dans la mesure où l. et g. A. ne s'opposent pas à l'attribution à leurs frères m. et m. des parts de la société J. K., il y sera fait droit. Par suite, compte tenu de leur valeur (3.235.960 euros) le reliquat de la part de m. A. atteindra la somme de 132.020,54 euros tandis que celui de la part de m. sera de 1.286.100,54 euros à prendre en compte par le notaire dans le cadre de la poursuite des opérations de partage.

* Sur la demande de provision ad litem et de désignation d'un administrateur judiciaire

Ces demandes étant présentées à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la masse successorale ne serait pas fixée par le Tribunal, il n'y a pas lieu de les examiner.

* Sur la demande de dommages et intérêts présentée par m. et m. A.

m. et m. A. sollicitent la condamnation de l. et g. A. à leur payer une somme totale de 200.000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du fait de leur attitude dilatoire dans le cadre des opérations de règlement de la succession de leur mère alors qu'ils bénéficient depuis son décès de l'essentiel de ses biens.

Les défendeurs s'opposent à cette demande en faisant valoir qu'ils ne sont pas responsables du comportement attentiste du notaire et rappellent que m. et m. A. ont été déboutés de leur demande formée au titre de recels successoraux ce qui démontre que les accusations dont ils avaient fait l'objet au début de la procédure étaient infondées.

À l'analyse des nombreux échanges entre les parties et avec le notaire en charge du règlement de la succession, il n'est pas établi que l. et g. A. seraient davantage que leurs frères, responsables du blocage des opérations de liquidation et de partage. Aucune faute n'étant caractérisée, la demande de dommages et intérêts ne peut qu'être rejetée.

* Sur les demandes présentées au titre de l'article 238-1 du Code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la teneur de la présente décision et de la nature du litige, les demandes croisées formées sur le fondement de l'article 238-1 du Code de procédure civile seront rejetées, chacune succombant pour partie.

Par ailleurs, chaque partie supportera la charge de ses propres dépens.

* Sur l'exécution provisoire

Selon les dispositions de l'article 202 du Code de procédure civile, l'exécution provisoire peut être ordonnée pour tout ou partie de la condamnation, chaque fois que le juge l'estime nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, à condition qu'elle ne soit pas interdite par la loi.

L'exécution provisoire de la présente décision, compte tenu de l'ancienneté de l'affaire, sera ordonnée.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL,

Statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire, et en premier ressort,

Dit que la présente juridiction est compétente pour statuer sur la succession de feue a. C. ouverte en Principauté ;

Dit que la loi applicable est la loi monégasque ;

Rejette la demande d'expertise judiciaire ;

Évalue au jour de l'ouverture de la succession :

* à la somme de 3.235.960 euros (TROIS MILLIONS DEUX CENT TRENTE-CINQ MILLE NEUF CENT SOIXANTE EUROS) les parts sociales de la société J. K. ;

* à la somme de 4.968.600 euros (QUATRE MILLIONS NEUF CENT SOIXANTE-HUIT MILLE SIX CENT EUROS) les parts sociales de la société D. E. F. G. ;

* à la somme de 3.112.480 euros (TROIS MILLIONS CENT DOUZE MILLE QUATRE CENT QUATRE-VINGTS EUROS) les parts sociales de la société W. F. G. ;

* à la somme de 2.000.000 euros (DEUX MILLIONS D'EUROS), les parts sociales de la société H. I. ;

* aux sommes de 135.681 euros (CENT TRENTE-CINQ MILLE SIX CENT QUATRE-VINGT ET UN EUROS), les bijoux et 254.800 euros (DEUX CENT CINQUANTE-QUATRE MILLE HUIT CENTS EUROS), les fourrures dépendant de la succession ;

* à la somme de 60.000 euros (SOIXANTE MILLE EUROS), l'anneau d'amarrage au port de San Remo ;

Dit que les soldes des comptes bancaires doivent être intégrés à la succession à hauteur de la somme totale de 566.828,55 euros (CINQ CENT SOIXANTE-SIX MILLE HUIT CENT VINGT-HUIT EUROS ET CINQUANTE-CINQ CENTIMES) ;

Ordonne le rapport, par m. A. de la somme complémentaire de 254.080 euros (DEUX CENT CINQUANTE-QUATRE MILLE QUATRE-VINGTS EUROS) ;

Fixe à la somme de 15.488.429,55 euros (QUINZE MILLIONS QUATRE CENT QUATRE-VINGT-HUIT MILLE QUATRE CENT VINGT-NEUF EUROS ET CINQUANTE-CINQ CENTIMES) l'actif successoral ;

Fixe à la somme de 3.686.419,46 euros (TROIS MILLIONS SIX CENT QUATRE-VINGT-SIX MILLE QUATRE CENT DIX-NEUF EUROS ET QUARANTE-SIX CENTIMES) l'indemnité de réduction due par l. A. à la succession d'a. C. ;

Fixe à la somme de 976.980,46 euros (NEUF CENT SOIXANTE-SEIZE MILLE NEUF CENT QUATRE-VINGTS EUROS ET QUARANTE-SIX CENTIMES) l'indemnité de réduction due par g. A. à la succession d'a. C. ;

Attribue à m. et m. A., dans le cadre du partage successoral, les parts de la société J. K. ;

Invite Maître AUREGLIA-CARUSO, Notaire, à poursuivre les opérations de liquidation et partage de la succession d'a. C. ;

Rejette la demande de dommages et intérêts formée par m. et m. A. ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Ordonne l'exécution provisoire ;

Dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens, y compris ceux réservés par jugement avant-dire droit en date du 15 juin 2023 ;

Composition

Après débats en audience du Tribunal de Première Instance de la Principauté de Monaco, et qu'il en ait été délibéré et jugé par la formation de jugement,

Ainsi jugé et rendu au Palais de Justice, à Monaco, le 14 MARS 2024, par Madame Evelyne HUSSON, Vice-Président, Madame Alexia BRIANTI, Premier Juge, Madame Catherine OSTENGO, Juge, assistées de Monsieur Julien SPOSITO, Greffier, en présence du Ministère public.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 30408
Date de la décision : 14/03/2024

Analyses

Droit des successions - Successions et libéralités ; Contentieux et coopération judiciaire


Parties
Demandeurs : m. A. et m. A.
Défendeurs : g. A. épouse B. et autres

Références :

article 238-1 du Code de procédure civile
article 787
article 83 du Code civil
article 780 du Code civil
'article 789
article 1009 du Code civil
article 202 du Code de procédure civile
article 712
article 3 du Code de procédure civile
article 713
article 712 du Code civil
Code de droit international privé
article 717 du Code civil
article 729 du Code civil
article 1099 du Code civil
loi n° 1.448 du 28 juin 2017
Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;2024-03-14;30408 ?

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