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04/02/2010 | MONACO | N°2304

Monaco | Tribunal de première instance, 4 février 2010, Mme G LP épouse C. c/ M. D. C.


Abstract

Divorce

Requête fondée sur l'article 198 du Code civil - Suivie d'une assignation fondée sur l'article 197 du Code civil - Exception d'irrecevabilité soulevée par le défendeur - Recevabilité de l'action en divorce sur la base de l'article 197 du Code civil en l'absence d'acceptation par le défendeur de la rupture du mariage sans énonciation des faits à l'origine de celle-ci - Abus de droit du défendeur ayant soulevé l'exception d'irrecevabilité

Résumé

Le divorce peut être prononcé à la demande de l'un des époux soit pour l'une des causes

prévues par l'article 197 du Code civil, soit, conformément à l'article 198 du même code, ...

Abstract

Divorce

Requête fondée sur l'article 198 du Code civil - Suivie d'une assignation fondée sur l'article 197 du Code civil - Exception d'irrecevabilité soulevée par le défendeur - Recevabilité de l'action en divorce sur la base de l'article 197 du Code civil en l'absence d'acceptation par le défendeur de la rupture du mariage sans énonciation des faits à l'origine de celle-ci - Abus de droit du défendeur ayant soulevé l'exception d'irrecevabilité

Résumé

Le divorce peut être prononcé à la demande de l'un des époux soit pour l'une des causes prévues par l'article 197 du Code civil, soit, conformément à l'article 198 du même code, lorsque le demandeur et son conjoint acceptent le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l'origine de celle-ci ;

Dans les deux cas la procédure sur requête d'un des époux, définie par les articles 200-1 à 200-16 du Code civil, est applicable au divorce, et qu'il s'agit en l'espèce de la procédure suivie par G. L. P.

Conformément, à l'article 156-3° du Code de procédure civile, l'assignation doit contenir l'objet de la demande avec un exposé sommaire des moyens, en revanche aucune disposition légale n'impose au demandeur en divorce de choisir le fondement de sa demande au moment du dépôt de sa requête.

Conformément à l'article 200-9, alinéa 1 du Code civil, les époux peuvent à tout moment de la procédure demander à la juridiction saisie de constater leur accord pour voir prononcer le divorce sur le fondement de l'article 198, il résulte de l'alinéa 2 du même article que seule l'acceptation, la rétractation de la proposition faite par l'un des époux de voir prononcer le sans considération des faits à l'origine de celui-ci est donc toujours possible.

En conséquence la procédure suivie par G. L. P. est régulière au regard de l'objet actuel de sa demande, sans qu'il puisse lui être fait le reproche de ne pas avoir invoqué l'article 197 du Code civil et les fautes reprochées à D. C. dans sa requête initiale ; qu'il n'était pas interdit à la demanderesse de proposer, dès le dépôt de cette requête, un prononcé du divorce sans considération des faits à l'origine de celui-ci, et qu'en l'absence d'acceptation par le défendeur, par exemple lors de la tentative préalable de conciliation, elle est recevable à agir sur le fondement de l'article 197 du Code civil ;

L'exception a été soulevée alors qu'aucune disposition légale n'interdit de solliciter le divorce pour faute lorsque le conjoint refuse d'accepter la rupture du mariage sans énonciation des faits à l'origine de celle-ci, et sans qu'aucune violation d'une règle formelle n'ait été alléguée ; l'exception était fondée sur une règle dont seul objet est de permettre un apaisement des relations conflictuelles afin de faciliter le règlement du litige, dont l'interprétation a contrario était destine à produire l'effet inverse ;

L'abus commis par D. C., en détournant une disposition légale pour lui faire produire un effet contraire à son objet, a causé un préjudice à G. L. P. en la contraignant à défendre spécialement sur une exception et en retardant l'issue du litige ; ce préjudice sera réparé par une somme de 3 000 euros.

Motifs

TRIBUNAL

DE PREMIÈRE INSTANCE

R.

JUGEMENT DU 4 FÉVRIER 2010

En la cause de :

Mme G LP épouse C, née le 7 décembre 1984 à Hyères (Var), de nationalité française, demeurant et domiciliée « X », X à Monaco mais autorisée à résider séparément chez son frère M. S LP, X à Nice ;

Bénéficiaire de l'assistance judiciaire selon décision n° 119 BAJ 07 en date du 7 novembre 2007 ;

DEMANDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

d'une part ;

Contre :

M. D C, chirurgien plasticien, né le 19 janvier 1949 à Monaco, de nationalité française, demeurant et domicilié « X », X à Monaco ;

DÉFENDEUR, ayant élu domicile en l'étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco, et plaidant par ledit avocat-défenseur ;

d'autre part ;

LE TRIBUNAL,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'ordonnance présidentielle en date du 24 octobre 2007 rendue en application de l'article 200-2 du Code civil, ayant autorisé G LP à résider seule hors du domicile conjugal c/o S LP, X à Nice ;

Vu l'ordonnance en date du 7 novembre 2007 rendue en application de l'article 200-6 du Code civil ayant constaté le maintien de la demande en divorce, autorisé l'épouse demanderesse à assigner devant le tribunal de céans D C, ordonné une mesure d'enquête sociale confiée à Corinne QUERCI, assistante sociale à la Direction des Services Judiciaires et renvoyé les parties à date fixe devant le Tribunal de première instance aux fins de leurs conclusions sur les mesures provisoires ;

Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 5 décembre 2007, enregistré (n° 2008/000222) ;

Vu le jugement avant-dire-droit de ce Tribunal en date du 10 juillet 2008 ayant notamment renvoyé la cause et les parties à l'audience du 23 octobre 2008 ;

Vu les conclusions de Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur au nom de G LP épouse C, en date des 18 décembre 2008 et 20 novembre 2009 ;

Vu les conclusions de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur au nom de D C, en date du 23 avril 2009 ;

Ouï Maître Christine PASQUIER-CIULLA, avocat-défenseur, pour G LP épouse C, en ses plaidoiries et conclusions ;

Ouï Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur pour D C, en ses plaidoiries et conclusions ;

Ouï le ministère public ;

La cause ayant été débattue hors la présence du public ;

Considérant les faits suivants :

D. C. et G. L. P. se sont mariés le 27 septembre 2003 à Monaco ; un enfant, E., est né de cette union le 26 juin 2005 ;

Par acte d'huissier du 5 décembre 2007, G. L. P. a fait assigner D. C. devant le Tribunal afin de voir prononcer leur divorce aux torts exclusifs du défendeur, de faire fixer chez elle la résidence habituelle de l'enfant mineur, moyennant une contribution mensuelle du père à son entretien d'un montant de 1 500 euros ; elle sollicitait également une somme de 500 000 euros à titre de prestation compensatoire ainsi que celle de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Par conclusions du 23 avril 2009, D. C. soutient que la demande de G. L. P. tendant à faire prononcer le divorce sur le fondement de l'article 197 du Code civil n'est pas recevable dans la mesure où sa requête initiale visait l'article 198 du même code ; il sollicite la restitution de la provision allouée à son épouse suivant jugement du 10 juillet 2008 ayant statué sur les mesures provisoires pour la durée de la procédure, ainsi que la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Par conclusions du 20 novembre 2009, G. L. P. répond que la présentation d'une requête en divorce fondée sur l'article 198 du Code civil n'interdit pas au requérant d'assigner ensuite sur le fondement de l'article 197 du même code tant que le défendeur n'a pas accepté le principe d'un divorce sans considération des faits à l'origine de celui-ci ; l'exception soulevée par le défendeur constituerait une manœuvre dilatoire justifiant l'octroi d'une somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de cet abus de procédure ;

L'exception a été évoquée à l'audience de plaidoiries du 7 janvier 2010, puis l'affaire a été mise en délibéré jusqu'à ce jour ;

Sur quoi,

Sur la recevabilité de l'action en divorce

Attendu que le divorce peut être prononcé à la demande de l'un des époux soit pour l'une des causes prévues par l'article 197 du Code civil, soit, conformément à l'article 198 du même code, lorsque le demandeur et son conjoint acceptent le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l'origine de celle-ci ;

Attendu que dans les deux cas la procédure sur requête d'un des époux, définie par les articles 200-1 à 200-16 du Code civil, est applicable au divorce, et qu'il s'agit en l'espèce de la procédure suivie par G. L. P. ;

Attendu que si, conformément à l'article 156-3° du Code de procédure civile, l'assignation doit contenir l'objet de la demande avec un exposé sommaire des moyens, en revanche aucune disposition légale n'impose au demandeur en divorce de choisir le fondement de sa demande au moment du dépôt de sa requête ;

Attendu que conformément à l'article 200-9 alinéa 1 du Code civil, les époux peuvent à tout moment de la procédure demander à la juridiction saisie de constater leur accord pour voir prononcer le divorce sur le fondement de l'article 198 ; qu'il résulte de l'alinéa 2 du même article que seule l'acceptation des époux n'est pas susceptible de rétractation ; qu'à défaut d'une telle acceptation, la rétraction de la proposition faite par l'un des époux de voir prononcer le divorce sans considération des faits à l'origine de celui-ci est donc toujours possible ;

Attendu en conséquence que la procédure suivie par G. L. P. est régulière au regard de l'objet actuel de sa demande, sans qu'il puisse lui être fait le reproche de ne pas avoir invoqué l'article 197 du Code civil et les fautes reprochées à D. C. dans sa requête initiale ; qu'il n'était pas interdit à la demanderesse de proposer, dès le dépôt de cette requête, un prononcé du divorce sans considération des faits à l'origine de celui-ci, et qu'en l'absence d'acceptation par le défendeur, par exemple lors de la tentative préalable de conciliation, elle est recevable à agir sur le fondement de l'article 197 du Code civil ;

Sur l'abus de droit

Attendu que l'exception a été soulevée alors qu'aucune disposition légale n'interdit de solliciter le divorce pour faute lorsque le conjoint refuse d'accepter la rupture du mariage sans énonciation des faits à l'origine de celle-ci, et sans qu'aucune violation d'une règle formelle n'ait été alléguée ; que l'exception était fondée sur une règle dont le seul objet est de permettre un apaisement des relations conflictuelles afin de faciliter le règlement du litige, dont l'interprétation a contrario était destinée à produire l'effet inverse ;

Attendu que l'abus commis par D. C., en détournant une disposition légale pour lui faire produire un effet contraire à son objet, a causé un préjudice à G. L. P. en la contraignant à défendre spécialement sur une exception et en retardant l'issue du litige ; que ce préjudice sera réparé par une somme de 3 000 euros ;

Sur les dépens

Attendu que D. C. succombe sur l'incident ; qu'il convient néanmoins de réserver les dépens, conformément à la demande de G. L. P.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal, statuant contradictoirement avant-dire-droit,

Déboute D. C. de sa fin de non recevoir,

Condamne D. C. à payer G. L. P. la somme 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour abus de procédure,

Renvoie la cause et les parties à l'audience du JEUDI 25 MARS 2010 à 9 heures pour les conclusions au fond de D. C.,

Réserve les dépens.

Composition

Ainsi jugé et prononcé en audience publique du Tribunal de Première Instance de la Principauté de Monaco, le 4 FEVRIER 2010, par Madame Brigitte GRINDA-GAMBARINI, Président officier de l'ordre de Saint-Charles, Monsieur Emmanuel ROBIN, Juge, Madame Michèle HUMBERT, Juge, en présence de Monsieur Jean-Jacques IGNACIO, Substitut du Procureur Général, assistés de Monsieur Thierry DALMASSO, Greffier.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2304
Date de la décision : 04/02/2010

Analyses

Droit de la famille - Dissolution de la communauté et séparation de corps ; Procédure civile


Parties
Demandeurs : Mme G LP épouse C.
Défendeurs : M. D. C.

Références :

article 200-6 du Code civil
article 197 du Code civil
article 200-2 du Code civil
articles 200-1 à 200-16 du Code civil
article 156-3° du Code de procédure civile
article 200-9, alinéa 1 du Code civil
article 198 du Code civil


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;2010-02-04;2304 ?

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