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19/06/2008 | MONACO | N°8000

Monaco | Tribunal de première instance, 19 juin 2008, J. L. c/ M. V.


Abstract

Obligation alimentaire

Contribution du père à l'entretien et l'éducation de l'enfant, article 303, alinéa 2 du Code civil

- Contrat fixant cette contribution, conclu entre le père et la mère

- Contentieux quant à l'exécution de ce contrat

- Compétence du juge tutélaire, à l'exclusion du Tribunal de première instance

- Litige relatif à la contribution d'un parent fixée par contrat

- Compétence exclusive du juge tutélaire

Résumé

Conformément à l'article 303, alinéa 1 du Code civil, à la demande du père

, de la mère, de tout intéressé ou du ministère public, le juge tutélaire statue sur les conditions d'exercice de l'autorité...

Abstract

Obligation alimentaire

Contribution du père à l'entretien et l'éducation de l'enfant, article 303, alinéa 2 du Code civil

- Contrat fixant cette contribution, conclu entre le père et la mère

- Contentieux quant à l'exécution de ce contrat

- Compétence du juge tutélaire, à l'exclusion du Tribunal de première instance

- Litige relatif à la contribution d'un parent fixée par contrat

- Compétence exclusive du juge tutélaire

Résumé

Conformément à l'article 303, alinéa 1 du Code civil, à la demande du père, de la mère, de tout intéressé ou du ministère public, le juge tutélaire statue sur les conditions d'exercice de l'autorité parentale ou les difficultés qu'elles soulèvent ;

L'autorité parentale est définie par l'article 303, alinéa 1 du Code civil comme l'autorité exercée sur l'enfant par ses père et mère qui ont envers lui droit et devoir de garde, de surveillance et d'éducation, pour le protéger dans sa sécurité, sa santé, sa moralité et pour permettre son développement, dans le respect dû à sa personne ;

L'obligation faite aux parents de contribuer à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de leurs ressources respectives et des besoins de l'enfant, prévue par l'alinéa 2 de même article, est indissociable de l'autorité parentale dont elle conditionne le bon exercice ;

Le juge tutélaire est dès lors seul compétent pour connaître d'un litige relatif à la contribution d'un parent à l'entretien et à l'éducation d'un enfant ;

L'existence d'une convention fixant certaines modalités d'exercice de l'autorité parentale ne fait pas échec à la compétence du juge tutélaire, auquel il incombe expressément, conformément à l'alinéa 2 de l'article 303 du Code civil, de faciliter la recherche d'un exercice consensuel de l'autorité parentale ;

Il convient donc de se déclarer incompétent pour connaître du litige ;

Motifs

TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

R.

JUGEMENT DU 19 JUIN 2008

En la cause de :

Mme J. L., de nationalité néerlandaise, née le 10 septembre 1963 à LEERDAM (PAYS BAS) demeurant [...] AMSTERDAM (PAYS BAS)

DEMANDERESSE, ayant élu domicile en l'étude de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur,

d'une part ;

Contre :

M. M. V., demeurant et domicilié [...] à Monaco,

DÉFENDEUR, ayant élu domicile en l'étude de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur près la Cour d'appel de Monaco et plaidant par ledit avocat-défenseur,

d'autre part ;

LE TRIBUNAL,

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'exploit d'assignation du ministère de Maître Claire NOTARI, huissier, en date du 28 septembre 2007, enregistré (n° 2008/106) ;

Vu les conclusions de Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, au nom de Jacqueline X, en date des 12 mars 2008 et 3 juin 2008 ;

Vu les conclusions de Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, au nom de Marcus Y, en date des 28 février 2008 et 14 mai 2008 ;

Ouï Maître Joëlle PASTOR-BENSA, avocat-défenseur, pour Jacqueline X, en ses plaidoiries et conclusions ;

Ouï Maître Jean-Pierre LICARI, avocat-défenseur, pour Marcus Y, en ses plaidoiries et conclusions ;

Ouï le ministère public ;

Considérant les faits suivants :

Par acte d'huissier du 28 septembre 2007, J. L. a fait assigner M. V. devant le Tribunal afin qu'il soit condamné à lui payer la somme de 14 500 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2007 sur la somme de 4 500 euros et à compter de l'assignation pour le surplus, représentant un arriéré de pension alimentaire pour l'entretien d'un enfant commun, fixée d'un commun accord entre les parties par acte sous seing privé du 9 février 2006 ; J. L. sollicitait également la fixation à 2 000 euros par mois de la part contributive du père à l'entretien de cet enfant, conformément à l'accord conclu entre les parents, et le bénéfice de l'exécution provisoire ;

Par son assignation et ses conclusions des 12 mars et 4 juin 2008, J. L. expose qu'elle a vécu avec M. V. au numéro 26 du boulevard des M. et qu'ils ont eu un fils prénommé J. ; au début de l'année 2006, M. V. aurait entendu mettre un terme à la vie commune et un accord aurait été conclu entre les parties aux termes duquel J. L. devait libérer le domicile commun au 1er septembre 2006, et le père s'engageait à verser à la mère, pour l'entretien de l'enfant commun et jusqu'au vingt et unième anniversaire de celui-ci, une pension mensuelle de 1 000 euros portée à 2 000 euros à compter de la libération du logement ;

Conformément à l'accord, J. L. aurait fixé son domicile à Amsterdam en septembre 2006, mais depuis cette date M. V. aurait payé de manière irrégulière la pension convenue et une mise en demeure du 12 avril 2007 visant un arriéré de 4 500 euros serait demeurée sans effets ; depuis juin 2007 aucune somme n'aurait été payée ;

J. L. soutient que son action tend à faire constater la défaillance de M. V. dans l'exécution d'une obligation contractuelle et qu'elle ne relève donc pas de la compétence du juge tutélaire qui concerne uniquement la modification de la charge ou du montant de la pension alimentaire ; elle conteste l'exception de nullité de la convention soulevée par le défendeur, en soutenant qu'aucun texte n'interdit de conclure un contrat ayant pour objet de régler les modalités de versement des subsides dus pour l'entretien et l'éducation d'un enfant naturel, et qu'en l'espèce ce contrat n'a pas été signé dans l'urgence ni sous la contrainte mais a été préparé sous l'égide de deux médiateurs ; il aurait d'ailleurs reçu un commencement d'exécution de la part des deux parties ;

Elle affirme également que la proposition de M. V. de verser chaque mois une somme de 500 euros est insuffisante et qu'il ne justifie pas de sa situation financière réelle ;

Par conclusions des 28 février et 14 mai 2008, M. V. soulève l'incompétence du Tribunal en invoquant les dispositions de l'article 831 du Code de procédure civile qui attribue compétence au juge tutélaire pour modifier la garde d'un mineur dont les parents sont séparés ou divorcés, organiser le droit de visite, ou modifier la charge et le montant de la pension alimentaire relative à ce mineur ; la jurisprudence aurait admis que cette compétence n'était pas limitée aux enfants de couples mariés ; de plus l'article 303 du Code civil donnerait compétence au juge tutélaire pour statuer sur les conditions d'exercice de l'autorité parentale ou les difficultés qu'elles soulèvent, ce qui serait le cas de la contribution à l'entretien d'un enfant ;

Quant au fond du litige, M. V. soulève la nullité de la convention au motif que les parents ont disposé du droit de garde portant sur l'enfant lequel est hors commerce au sens de l'article 983 du Code civil ; de plus, conformément à l'article 6 de ce code, on ne pourrait déroger par des conventions particulières aux lois qui intéressent l'ordre public, ce qui serait le cas des lois relatives à l'état des personnes, l'autorité parentale et l'administration légale ; il ajoute que J. L. l'a menacé de ne pas quitter l'appartement s'il ne signait pas le contrat litigieux et a exercé sur lui une contrainte morale ; le fait qu'il ait payé certaines sommes de son propre chef n'emporterait aucune reconnaissance de la validité du contrat ;

De plus une contribution de 2 000 euros par mois serait excessive compte tenu de l'âge de l'enfant, alors que M. V. connaîtrait une situation professionnelle difficile ; à titre subsidiaire, il offre de payer une pension alimentaire de 500 euros par mois ;

L'affaire a été plaidée à l'audience du 5 juin 2008 puis mise en délibéré jusqu'à ce jour ;

Sur quoi :

Sur la compétence

Attendu que conformément à l'article 303, alinéa 1, du Code civil, à la demande du père, de la mère, de tout intéressé ou du ministère public, le juge tutélaire statue sur les conditions d'exercice de l'autorité parentale ou les difficultés qu'elles soulèvent ;

Attendu que l'autorité parentale est définie par l'article 300, alinéa 1 du Code civil comme l'autorité exercée sur l'enfant par ses père et mère qui ont envers lui droit et devoir de garde, de surveillance et d'éducation, pour le protéger dans sa sécurité, sa santé, sa moralité et pour permettre son développement, dans le respect dû à sa personne ;

Attendu que l'obligation faite aux parents de contribuer à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de leurs ressources respectives et des besoins de l'enfant, prévue par l'alinéa 2 du même article, est indissociable de l'autorité parentale dont elle conditionne le bon exercice ;

Attendu que le juge tutélaire est dès lors seul compétent pour connaître d'un litige relatif à la contribution d'un parent à l'entretien et à l'éducation d'un enfant ;

Attendu que l'existence d'une convention fixant certaines modalités d'exercice de l'autorité parentale ne fait pas échec à la compétence du juge tutélaire, auquel il incombe expressément, conformément à l'alinéa 2 de l'article 303 du Code civil, de faciliter la recherche d'un exercice consensuel de l'autorité parentale ;

Attendu qu'il convient donc de se déclarer incompétent pour connaître du litige ;

Sur les dépens

Attendu que, conformément à l'article 231, alinéa 1, du Code de procédure civile, tous jugements, autres que les jugements d'instruction, condamnent même d'office aux dépens la partie qui succombe ;

Attendu que J. L. sera donc condamnée aux dépens de la présente instance à laquelle elle succombe ;

Attendu que selon l'article 233 du même code, les avocats-défenseurs pourront demander la distraction des dépens à leur profit, en affirmant qu'ils ont fait la plus grande partie des avances ; qu'il convient de faire droit à la demande de distraction de Maître Jean-Pierre Licari, sur son affirmation de droit ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant contradictoirement,

Vu l'article 303 du Code civil,

Se déclare incompétent pour connaître du litige opposant J. L. à M. V., relatif aux conditions d'exercice de l'autorité parentale sur l'enfant J. et à l'exécution des accords passés entre eux à cet effet ;

Les renvoie à saisir le juge tutélaire ;

Condamne J. L. aux dépens, distraits au profit de Maître Jean-Pierre Licari, avocat-défenseur, sous sa due affirmation ;

Ordonne que lesdits dépens seront provisoirement liquidés sur état par le greffier en chef, au vu du tarif applicable.

Composition

Mme Grinda-Gambarini, prés. ; M. Dubes, prem. subst. proc. gén. ; Mes Pastor-Bensa et Licari, av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 8000
Date de la décision : 19/06/2008

Analyses

Droit de la famille - Autorité parentale et droits de l'enfant ; Contrat - Inexécution ; Justice (organisation institutionnelle) ; Droit de la famille - Dissolution de la communauté et séparation de corps


Parties
Demandeurs : J. L.
Défendeurs : M. V.

Références :

article 231, alinéa 1, du Code de procédure civile
article 300, alinéa 1 du Code civil
article 983 du Code civil
article 831 du Code de procédure civile
article 303, alinéa 2 du Code civil


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;2008-06-19;8000 ?

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