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21/02/2002 | MONACO | N°26938

Monaco | Tribunal de première instance, 21 février 2002, P., G., T., R., É., M., F. c/ K. veuve R., en présence de M.


Abstract

Sociétés commerciales

Association en participation - Notions générales - Preuve de son existence - Dissolution - Association à durée illimitée : par la volonté d'un seul associé - Association à terme : par jugement pour de justes motifs, en présence de tous les associés - Droit International - Pacte International - Application

Résumé

Il ressort des articles 54 et suivants du Code de commerce que l'association commerciale en participation doit être relative à une ou plusieurs opérations de commerce et que ses participants doivent convenir en

tre eux de son objet, de ses formes, de ses proportions d'intérêt et de ses conditions. ...

Abstract

Sociétés commerciales

Association en participation - Notions générales - Preuve de son existence - Dissolution - Association à durée illimitée : par la volonté d'un seul associé - Association à terme : par jugement pour de justes motifs, en présence de tous les associés - Droit International - Pacte International - Application

Résumé

Il ressort des articles 54 et suivants du Code de commerce que l'association commerciale en participation doit être relative à une ou plusieurs opérations de commerce et que ses participants doivent convenir entre eux de son objet, de ses formes, de ses proportions d'intérêt et de ses conditions. Cette association n'est pas soumise aux formalités prescrites pour les autres sociétés et la preuve de son existence peut résulter des livres de commerce, de la correspondance et, si le tribunal estime pouvoir l'admettre, de tout témoignage.

L'association en participation reste cependant soumise aux conditions générales prévues de façon impérative aux articles 1670 et 1671 du Code civil. Une société ne peut exister que lorsque deux ou plusieurs personnes ont convenu, dans leur intérêt collectif, de mettre en commun des apports représentés par des biens, des sommes d'argent ou une contribution en industrie, en vue d'un objet licite et dans le but de partager le bénéfice qui pourra en résulter. Selon les articles 1691 et 1693 du même code, également d'ordre public, tout associé doit participer aux pertes éventuelles dans la proportion prévue au contrat ou, à défaut, en proportion de sa mise de fonds dans la société.

L'article 1162 du Code civil met à la charge de celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver.

L'acte de vente du fonds de commerce litigieux et les inscriptions prises au Répertoire du Commerce et de l'Industrie présentent H. J. R. comme seule propriétaire et exploitante du fonds de commerce litigieux. Le Code de commerce permet aux personnes qui se prétendent membres d'une association en participation d'apporter la preuve contraire à de tels actes. Il appartient donc aux demandeurs d'apporter la preuve qu'ils ont bien conclu avec H. J. R. un contrat d'association comprenant tous les éléments exigés par la loi.

Il ressort des pièces produites par M. P. que ce dernier s'est intéressé au restaurant dès l'époque de son achat.

Il résulte des faits énoncés qu'une association en participation a bien été constituée en vue de l'acquisition et de l'exploitation du restaurant L. T. Il est établi en effet que les parties ont entendu mettre en commun les sommes d'argent des uns et l'industrie des autres en s'inspirant de l'organisation prévue par la loi en matière de société en commandite simple.

Différents participants assimilés à des associés commanditaires, et non à de simples prêteurs de deniers, ont apporté des fonds. M. P. tire ses droits, d'une part, de l'apport de 70 000 $ dont la réalité a été admise par ces participants, d'autre part et pour l'essentiel, de la qualité qu'il prenait dans la société, assimilable à celle d'associé indéfiniment responsable envers les tiers, et des risques attachés à cette qualité, traduits notamment par son engagement de caution.

H. J. R. lui a reconnu cette qualité en lui versant la part de dividendes qui y était attachée. Ni le fait que M. P. ne résidait pas encore à Monaco à l'époque de l'achat et de l'ouverture du restaurant, ni celui que sa mère ait assuré en apparence sa gestion ne peuvent avoir pour effet de le priver de ses droits ; Ces droits ne sauraient être remis en cause par la mésentente survenue ultérieurement entre eux.

Le contrat régit également la participation de chacun aux bénéfices et aux pertes.

La part sur les bénéfices est déterminée selon les pourcentages ci-dessus relatés.

La participation aux pertes résulte de la nature même des stipulations convenues, les « limited partners » devant contribuer aux pertes dans la limite de leurs apports tandis que M. P. se trouvait tenu sans limitation des dettes nées de l'exploitation.

Il y a lieu en conséquence de faire droit à la demande tendant à faire juger qu'il existait bien entre les parties une association en participation. Les droits respectifs de ces parties doivent être fixés conformément aux quotes-parts ci-dessus mentionnées.

Une association en participation n'a ni personnalité morale ni patrimoine propre. Elle n'est en réalité que la manifestation des conventions existant entre ses différents participants. Sa dissolution équivaut donc, non à sa fin en tant que personne distincte, mais à la résiliation ou à la caducité pour l'avenir de ces conventions.

Les principes applicables à la fin des sociétés sont toutefois applicables à la rupture des conventions d'association en participation.

Les articles 1703 et 1709 du Code civil distinguent selon que la société a une durée illimitée ou est à terme.

Dans une société à durée illimitée, la dissolution peut résulter de la simple volonté exprimée par un ou plusieurs associés de n'être plus en société. Elle s'opère conformément aux articles 1707 et 1708 du même code par une renonciation notifiée à tous les associés, à condition que cette renonciation soit faite de bonne foi et non à contretemps.

Au contraire dans la société à terme, la dissolution avant le terme fixé doit être demandée en justice et ne peut être prononcée que s'il existe des justes motifs au sens de l'article 1709.

M. P. et les parties intervenantes invoquent expressément l'article 1709.

Ils n'allèguent cependant pas l'existence d'un terme stipulé dans leurs conventions. Les pièces produites ne permettent pas de trouver trace de leur volonté de limiter la durée de leur association.

En outre, ces parties n'ont pas fait intervenir à l'instance, en même temps qu'H. J. R., la totalité des autres associés qualifiés plus haut « autres minoritaires », représentant 9,89 % des parts, dont elles ont pourtant admis l'existence encore actuelle dans leurs conclusions sans prétendre qu'elles auraient depuis cédé leurs droits.

Les accords de participation auxquels ces autres associés sont parties ne peuvent pourtant pas être remis en cause sans qu'ils aient été appelés à s'exprimer, soit à l'occasion d'une assemblée générale convoquée à cette fin, soit devant le tribunal saisi dans le cadre d'une instance judiciaire. Cette nécessité résulte tant des principes généraux de la procédure civile et du droit des obligations que des articles 14 et 16 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, fait à New York le 16 décembre 1966 et rendu exécutoire à Monaco par l'ordonnance n° 13.330 du 12 février 1998, qui reconnaissent à toute personne le droit à être jugée équitablement en cas de contestations sur ses droits et obligations de caractère civil et le droit à la reconnaissance de sa personnalité juridique.

Il y a lieu en conséquence de surseoir à statuer sur les chefs de demandes relatifs à la dissolution et à la liquidation de l'association en participation et, avant dire droit, d'inviter les parties :

- à s'expliquer sur l'existence ou non d'un terme convenu pour la société et à en tirer les conséquences quant au mode de dissolution de l'association en participation ;

- à s'expliquer sur les droits actuels des autres participants non présents à l'instance ;

- si la demande de dissolution doit demeurer fondée sur l'article 1709 du Code civil, à faire intervenir ces participants aux débats.

Motifs

Le Tribunal,

Considérant les faits suivants :

Suivant actes authentiques reçus les 21 janvier et 9 juillet 1986, dûment enregistrés le 14 juillet suivant, H. J. K. veuve R. a acquis des consorts F. un fonds de commerce de « bar restaurant » exploité sous l'enseigne « V. », moyennant le prix de 2 500 000 francs ;

Sur ce prix, les actes contiennent quittance des sommes de 266 000 et 534 000 francs, payées les 21 janvier et 9 juillet 1986 ; le solde a été financé au moyen d'un prêt bancaire de 1 700 000 francs consenti par la Banque La Henin et la Banque Centrale Monégasque de Crédit à H. J. R. et garanti par le cautionnement solidaire de son fils M. P. ;

H. J. R. s'est fait immatriculer le 11 juillet 1986 auprès du Répertoire du commerce et de l'industrie comme propriétaire exploitant de ce fonds ; le restaurant a rapidement changé de nom et est désormais exploité sous la nouvelle enseigne « Restaurant L. T. » ;

Un litige est apparu entre H. J. R. et son fils M. P. qui a prétendu être le véritable propriétaire du fonds ;

Retenant que M. P. avait effectué des apports en numéraires ayant pu avoir pour objet l'acquisition ou l'exploitation du fonds, le Juge des référés a ordonné le 23 juillet 1996 une mesure d'expertise et a chargé R. M., expert-comptable, de rapporter tous éléments de fait permettant de déterminer ou d'apprécier la nature ou l'importance de ces apports, le rôle de M. P. dans l'acquisition et l'exploitation du fonds et les éventuels droits de créance qui pourraient en résulter pour lui dans la perspective d'un compte éventuel à faire entre les parties ;

Ce magistrat a refusé tant par cette décision que par une seconde ordonnance du 21 juillet 1997 de désigner un administrateur provisoire pour l'exploitation du fonds litigieux et de prendre une mesure de séquestre ;

R. M. a déposé le 12 avril 2000 un rapport au terme duquel il exposait que « malgré les nombreux éléments tendant à prouver l'existence d'une propriété partagée du fonds de commerce, nos travaux ne nous ont pas permis de conclure à la réalité des apports que Monsieur M. P. aurait pu réaliser dans le cadre de l'acquisition ou de l'exploitation du fonds de commerce » ;

Entre-temps, par l'exploit susvisé du 1er juillet 1998, M. P. avait fait assigner sa mère, en présence de l'expert M., pour demander au Tribunal :

* d'ordonner la liquidation du fonds de commerce et de désigner le cas échéant un expert chargé de régler les comptes entre les parties et d'accomplir tous les actes nécessaires à la liquidation ;

* de lui attribuer la pleine propriété du fonds, après avoir désintéressé H. J. R. du montant de ses apports ainsi que de ce qui pourrait lui revenir sur l'actif subsistant ;

* de condamner H. J. R. à lui payer la somme de 50 000 francs à titre de dommages-intérêts ;

Il invoquait un acte d'octobre 1992 relatif à son droit de propriété ; à titre subsidiaire, il demandait au tribunal de reconnaître l'existence d'une association en participation entre les parties ;

Il soutenait ses prétentions dans des conclusions du 31 décembre 1998 ;

Dans de nouvelles écritures déposées le 19 janvier 2000, il reprenait ses demandes « sauf à requalifier la société de fait ou créée de fait en société de participation » et faisait part de son intention d'appeler en cause, en qualité d'actionnaires de cette dernière société, D. R., K. T., V. G. et R. É. ;

Il reformulait et modifiait ses prétentions le 21 février 2001 dans des conclusions qualifiées de « récapitulatives » :

* dire et juger que l'acquisition du fonds s'est réalisée dans le cadre d'une société en participation regroupant comme associés les personnes déjà citées « ainsi que d'autres associés » ;

* conformément aux articles 1709 et 1710 du Code civil, prononcer la dissolution de cette société et désigner un administrateur-liquidateur chargé de procéder aux opérations de liquidation-parage et de procéder au partage du boni de liquidation après cession des actifs mobiliers, au besoin sous forme de licitation ;

* condamner H. J. R. à supporter les frais de l'administration et de liquidation judiciaire de la société ;

* condamner H. J. R. à lui payer la somme de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts ; il sollicite pour le tout le bénéfice de l'exécution provisoire « compte tenu de l'ancienneté du litige » ;

V. G., K. T., D. R., R. É., R. M. et A. F., se présentant comme unis d'intérêts, intervenaient volontairement le 21 février 2001 pour s'associer aux prétentions de M. P., faire leurs les écritures judiciaires de ce dernier et solliciter en outre la condamnation d'H. J. R. à payer à chacun d'eux la somme de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts ;

Ces intervenants volontaires et M. P. concluaient ensemble le 12 juillet 2001 dans le même sens et sollicitaient « le bénéfice de leurs dernières écritures judiciaires tant récapitulatives que d'intervention volontaire » ;

H. J. R. s'opposait aux demandes formées contre elle qu'elle considérait comme irrecevables ou mal fondées à défaut de preuve d'un quelconque droit sur le fonds de commerce litigieux ;

Dans ses conclusions des 14 octobre 1998 et 14 avril 1999, elle proposait subsidiairement de surseoir à statuer jusqu'au dépôt par R. M. de son rapport d'expertise ; puis elle adoptait la position inverse dans ses écritures déposées le 6 mars 2000 ;

Elle déposait de nouvelles conclusions le 25 octobre 2000 pour solliciter la condamnation de M. P. à lui payer :

* une indemnité de 100 000 francs en réparation de son préjudice moral et matériel ;

* la somme de 30 000 francs « au titre des frais de justice irrépétibles » ;

À la suite de l'intervention volontaire des autres demandeurs, elle concluait le 30 mai 2001 qu'il devait être fait obligation aux intervenants de produire l'ensemble des documents permettant de justifier leurs conclusions « notamment juridiques, comptables et surtout bancaires » ; elle demandait alors le sursis à statuer dans l'attente de cette production ;

Enfin, le 25 septembre 2001, elle demandait au tribunal de déclarer irrecevables les prétentions adverses et à titre subsidiaire, de les rejeter et maintenait sa demande de dommages-intérêts ;

Le débat entre les parties peut être ainsi présenté :

1) Sur la propriété du fonds de commerce :

* M. P. estime dans le premier état de ses conclusions qu'il est copropriétaire du fonds de commerce à hauteur de 60,71 % et que ce fonds doit lui être attribué en raison de sa qualité de copropriétaire majoritaire ; il fonde cette prétention sur la « Reconnaissance de propriété » souscrite le 11 décembre 1987 par H. J. R., selon laquelle le fonds appartenait bien à son fils, et sur le contrat d'octobre 1992 dans lequel elle admettait qu'il détenait 60,71 % des droits de propriété du restaurant ; il précise que ce pourcentage s'appliquait également à la distribution des dividendes sur les bénéfices et qu'il a assuré le remboursement du prêt consenti par la banque La Henin en prélevant sur ses propres dividendes ; il invoque encore des écrits de sa mère relatifs à ses parts et son testament par lequel elle lui attribue par priorité le fonds dans le cadre d'un éventuel partage successoral ;

* H. J. R. répond que le document du 11 décembre 1987 est sans portée alors qu'il énonce de façon erronée que son fils aurait payé l'intégralité du prix d'acquisition, en réalité financé en partie par la banque, et des frais d'aménagement ; elle ajoute qu'elle a révoqué cette reconnaissance le 11 juillet 1997, comme elle en avait le droit ; quant au document d'octobre 1992, elle explique qu'il ne s'agit que d'un projet d'association ; elle voit dans son testament, dont elle rappelle le caractère révocable, un simple avantage successoral et non la preuve d'un droit préexistant ; elle conteste tout remboursement du prêt par son fils alors qu'il était à l'époque totalement désargenté et qu'il ne faisait que transférer à son insu les produits de l'exploitation du fonds sur son compte personnel, dans le but de faire croire, par une manœuvre grossière, qu'il utilisait ses propres deniers ; s'appuyant sur le rapport de l'expert M., elle conteste de façon générale toute participation de son fils dans le paiement du prix du fonds ;

2) Sur la preuve :

* M. P. rappelle que les articles 56 et 57 du Code de commerce permettant d'établir par tous moyens, notamment la correspondance ou la preuve testimoniale, l'existence d'une société en participation qui n'est soumise à aucune formalité de publicité ; il insiste sur le refus de sa mère de s'expliquer sur l'origine des fonds ayant servi à l'acquisition ;

* H. J. R. répond qu'il doit rapporter la preuve de ses apports et ne peut pas prétendre inverser la charge de la preuve ;

* M. P. rétorque que le contrat d'octobre 1992 a « renversé la présomption simple » du droit de propriété de sa mère ;

3) Sur l'association en participation :

a) sur l'affectio societatis :

* M. P. et les intervenants volontaires invoquent plusieurs faits et actes juridiques pour en affirmer l'existence :

* prêt par eux à H. J. R. de fonds destinés à l'acquisition à hauteur de 800 000 francs ;

* reconnaissance souscrite le 11 décembre 1987 par H. J. R. devant Maître Aureglia, notaire : la rétractation de cette déclaration faite dix ans plus tard serait sans portée alors qu'un acte authentique fait foi jusqu'à inscription de faux ;

* contrat signé en octobre 1992 par bon nombre des associés, dont H. J. R., en vue de la vente du fonds et faisant apparaître leurs parts respectives ;

* courrier de Donald Manasse, avocat, faisant allusion aux apports faits au restaurant ;

* engagement du 8 mai 1995 entre certains associés en vue de la vente de leurs participations respectives ;

* travail dans le cadre non d'un contrat de travail mais « d'un amical accord basé sur la confiance » fourni dans le restaurant par M. P., K. T. et D. R. entre 1987 et leur éviction, alors qu'H. J. R. n'avait jamais exploité de restaurant et n'avait été déclarée comme gérant officiel que parce qu'elle était la seule en 1986 à remplir les critères nécessaires à l'inscription au Répertoire du Commerce et de l'Industrie ;

* H. J. R. relève une contradiction dans les propos de M. P. qui ne peut à la fois se prétendre personnellement propriétaire du fonds et invoquer l'existence d'une société ; elle prétend que son fils, directeur du restaurant entre le 1er mars 1993 et le 25 mai 1996, cherche à s'accaparer le fonds pour la « punir » après son licenciement rendu nécessaire par son incapacité à gérer l'affaire :

* elle affirme que les documents qu'on lui oppose sont dénaturés alors qu'ils n'ont été établis que dans la perspective de la création d'une société anonyme qui n'a finalement pu être constituée ;

* elle constate que le document d'octobre 1992 est en contradiction avec un contrat de restructuration d'une société en commandite simple qui fait apparaître une autre répartition et établit qu'un prétendu apport de 177 500 dollars n'a jamais été réuni ;

* elle fait observer que M. P. n'a pas interjeté appel de l'ordonnance par laquelle le Juge des référés avait estimé non patente sa qualité d'associé ;

* elle relève que les intervenants volontaires ont attendu près de cinq ans pour faire valoir leurs prétendus droits ;

* commentant l'appréciation de l'expert selon laquelle des bailleurs de fonds ont été remboursés de leurs avances et rémunérés sous forme de participation ou autrement, elle qualifie les intéressés de partenaires occasionnels ou « d'anciens créanciers », leur dénie toute qualité d'associé et estime qu'ils ne peuvent pas conforter les prétentions de M. P. ;

b) sur les apports :

* M. P. et les intervenants volontaires voient la preuve de tels apports :

* dans l'acte de cession du fonds de commerce lui-même selon lequel le crédit bancaire destiné à financer l'acquisition n'a été consenti que dans l'attente de la vente d'un bien aux États-Unis d'Amérique, appartenant en réalité à M. P. ;

* dans le fait constaté par l'expert qu'H. J. R. a bénéficié de fonds provenant de l'étranger ou de tiers ;

* H. J. R. relève encore les contradictions de son adversaire sur la nature de son apport puisque, prétendant détenir une participation de 60,71 %, il n'a invoqué devant l'expert des « parts d'investisseur » que pour 10,12 %, le reste relevant selon lui d'un apport en industrie en réalité inexistant alors qu'il était salarié du restaurant à mi-temps et n'était même pas titulaire d'une carte de séjour ;

c) sur le partage de dividendes. :

* M. P. et les intervenants volontaires font valoir :

* le versement périodique entre 1988 et 1995 à K. T., M. P., R. É., V. G. et D. R. de diverses sommes à titre de répartition des bénéfices, calculées selon les pertes et profits du restaurant ;

* le fait que les sommes versées chaque mois à M. P. étaient en réalité reversées intégralement à H. J. R. en vue de rembourser l'emprunt contracté par elle auprès de la banque La Henin, ces sommes devant être considérées comme un « versement de dividendes anticipé » alors que P. s'était porté caution de sa mère ;

* H. J. R. répond que M. P. se livre à un « subterfuge grossier » alors que, loin d'avoir remboursé lui-même l'emprunt, il se faisait adresser par le compte du restaurant « le montant de l'échéance devant être payé à la banque, avant que ce montant soit retransféré sur le compte de sa mère », son propre compte ne constituant qu'un transit inutile ; il ne pourrait donc pas prétendre justifier de prétendus dividendes par ce remboursement ; elle soutient par ailleurs que le versement de sommes aux autres demandeurs n'est pas probant alors que ces versements se sont interrompus, selon M. P. lui-même, dès 1992 sans qu'aucune réclamation n'ait ensuite été présentée par les prétendus associés ;

d) sur la dissolution de la société

* les demandeurs font valoir qu'elle est rendue nécessaire par la mésentente sérieuse et prolongée dans le temps entre les associés qui, par leurs accusations réciproques et la multiplication de procédures judiciaires, paralysent le bon fonctionnement de la société ; ils précisent que cette solution est la seule envisageable alors que le juge n'a pas le pouvoir d'obliger un associé à céder ses parts à un autre qui s'offrirait à les lui racheter ; ils exposent qu'H. J. R. veut accaparer pour elle seule un bien commun et « entraîne ainsi les actionnaires dans un tourbillon de ressentiment, qui est à l'origine de la pulvérisation de l'affectio societatis », ce qui prive les associés de toute information sur les comptes et toute réunion en assemblée générale ;

* H. J. R. dénonce dans les prétentions de ses adversaires une confusion entre société commerciale et société en participation alors que faute de personnalité morale, une société en participation, à la supposer établie, ne peut donner lieu à la liquidation d'un quelconque patrimoine social, mais seulement à une opération de règlement de comptes entre les prétendus associés qui seraient respectivement créanciers et débiteurs les uns des autres ;

4) Sur les dommages-intérêts :

* M. P. et les intervenants volontaires reprochent à leur adversaire d'avoir manqué à son obligation d'exécuter de bonne foi les conventions existant entre eux et de se comporter de façon égoïste et manœuvrière ; ils expliquent que leur préjudice découle des soucis et des dépenses multiples que cette faute leur a imposés pour faire valoir leur bon droit ;

* H. J. R. considère que la procédure engagée contre elle de façon acharnée est particulièrement vexatoire et a été à l'origine d'un préjudice matériel constitué par le trouble apporté à la gestion de ses affaires, d'un préjudice moral aggravé par son âge (74 ans) et de frais de procédure totalement inutiles ;

Sur quoi :

I. - Sur les demandes initiales présentées par M. P. :

Attendu que ces demandes n'ont pas été évoquées par M. P. dans ses conclusions « récapitulatives » du 21 février 2001, concomitantes à l'intervention volontaire de V. G., K. T., D. R., R. E., R. M. et A. F. ;

Que ces intervenants n'ont repris dans leurs écrits judiciaires que les prétentions de M. P. tendant à faire reconnaître l'existence d'une société en participation ; qu'ils n'ont manifestement pas entendu soutenir les prétentions initiales de ce dernier, contraires à leurs intérêts puisqu'il prétendait alors à la propriété exclusive du fonds de commerce litigieux ;

Attendu que M. P. et les intervenants volontaires ont ensuite fait cause commune ; qu'ils ont confié la défense de leurs intérêts à un seul et même avocat qui a déposé pour eux le 12 juillet 2001 des conclusions par lesquelles ils ne se référaient qu'à leurs dernières écritures judiciaires ; qu'à cette occasion, M. P. n'a manifestement pas voulu maintenir des prétentions allant contre les intérêts des personnes qui agissaient désormais avec lui en justice ;

Attendu qu'il en résulte que M. P. a implicitement mais nécessairement renoncé aux demandes qu'il avait formulées dans l'exploit introductif d'instance ;

Que le Tribunal n'est donc plus saisi que des demandes exprimées par M. P. et les intervenants volontaires dans les conclusions « récapitulatives » du 21 février 2001 et leurs écritures ultérieures, ainsi que des demandes reconventionnelles formées par leur adversaire ;

II. - Sur la compétence internationale du tribunal et sur le droit applicable

A. - Sur la compétence :

Attendu qu'il ressort des prétentions des parties, la plupart de nationalité américaine, qu'elles auraient créé une société en vue de l'exploitation du restaurant dénommé L. T. ;

Attendu que les articles 2 et 3 du Code de procédure civile donnent compétence aux juridictions monégasques pour connaître :

* des actions intentées contre un défendeur domicilié dans la Principauté de Monaco ;

* des actions fondées sur des obligations qui sont nées ou doivent être exécutées à Monaco ;

* des actions en matière de société, jusqu'à la liquidation définitive, si la société a son principal établissement à Monaco ;

Attendu qu'il est constant qu'H. J. R. est domiciliée à Monaco ;

Que le contrat de société invoqué devait être exécuté au moins en partie à Monaco, lieu de situation du restaurant et de réalisation des profits qu'il devait procurer ;

Que, même si certains documents laissent entendre que la société aurait eu une sorte de siège au Texas, le restaurant est susceptible de constituer son principal établissement ;

Que le Tribunal de Première Instance de Monaco est donc bien compétent pour statuer sur les demandes ;

B. - Sur la loi applicable :

Attendu que les parties invoquent expressément l'application du droit monégasque ; que bien que les documents qu'elles produisent aient été établis pour une bonne part aux États-Unis d'Amérique et paraissent se référer à des institutions juridiques de ce pays, elles ne demandent pas l'application du droit américain ; qu'à défaut de convention internationale contraire, le juge est tenu de statuer dans les limites fixées par les parties ;

Que le Tribunal devra en conséquence trancher le litige conformément aux règles du droit monégasque ;

Que ces règles sont constituées :

* par l'article 25 du Code de commerce selon lequel le contrat de société se règle par le droit civil, par les lois particulières au commerce et par les conventions des parties ;

* par les articles 1670 à 1711 du Code civil relatifs au contrat de société ;

* par les articles 956 à 1216 du même code relatifs aux contrats et aux obligations conventionnelles en général ;

* par les règles spéciales aux associations commerciales en participation, contenues aux articles 54 à 57 du Code de commerce ;

III. - Sur l'existence d'une société en participation :

Attendu qu'il ressort des articles 54 et suivants du Code de commerce que l'association commerciale en participation doit être relative à une ou plusieurs opérations de commerce et que ses participants doivent convenir entre eux de son objet, de ses formes, de ses proportions d'intérêt et de ses conditions ; que cette association n'est pas soumise aux formalités prescrites pour les autres sociétés et que la preuve de son existence peut résulter des livres de commerce, de la correspondance et, si le tribunal estime pouvoir l'admettre, de tout témoignage ;

Attendu que l'association en participation reste cependant soumise aux conditions générales prévues de façon impérative aux articles 1670 et 1671 du Code civil ; qu'une société ne peut exister que lorsque deux ou plusieurs personnes ont convenu, dans leur intérêt collectif, de mettre en commun des apports représentés par des biens, des sommes d'argent ou une contribution en industrie, en vue d'un objet licite et dans le but de partager le bénéfice qui pourra en résulter ; que selon les articles 1691 et 1693 du même code, également d'ordre public, tout associé doit participer aux pertes éventuelles dans la proportion prévue au contrat ou, à défaut, en proportion de sa mise de fonds dans la société ;

Attendu que l'article 1162 du Code civil met à la charge de celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver ;

Attendu que l'acte de vente du fonds de commerce litigieux et les inscriptions prises au Répertoire du Commerce et de l'Industrie présentent H. J. R. comme seule propriétaire et exploitante du fonds de commerce litigieux ; que le Code de commerce permet aux personnes qui se prétendent membres d'une association en participation d'apporter la preuve contraire à de tels actes ; qu'il appartient donc aux demandeurs d'apporter la preuve qu'ils ont bien conclu avec H. J. R. un contrat d'association comprenant tous les éléments exigés par la loi ;

Attendu qu'il ressort des pièces produites par M. P. que ce dernier s'est intéressé au restaurant dès l'époque de son achat ;

Qu'il a correspondu entre mars et juillet 1986 avec R. H., président de l'entreprise Loews Hotels, pour obtenir de lui des fonds ; que cependant R. H. n'apparaît pas sur les autres documents invoqués comme ayant contribué au financement du restaurant ;

Que M. P. a déposé le 9 juin 1986 auprès de la banque Interfirst Bank Park Cities à Dallas (Texas) un ensemble de sept chèques représentant un total de 55 000 dollars américains, décrits par lui comme « purchase cashier check for L. T. R. SCS » (pièce n° 48) ; que ces chèques avaient été tirés par F. (10 000 $), G. (2 500 $), R. (10 000 $), R. (2 500 $), P. (5 000 $), G. (5 000 $) et P. (20 000 $) ; que ce dernier paraît être non M. P. mais R. P., évoqué dans d'autres documents ;

Que M. P. s'est porté caution solidaire de sa mère envers les banques ayant contribué à financer l'achat du fonds de commerce ;

Attendu que d'autres personnes ont ultérieurement fourni des fonds ;

Qu'H. J. R. a établi le 11 janvier 1990 un reçu par lequel elle reconnaissait avoir perçu de R. E. une somme de 71 325 francs (12 500 $) représentant « 1,625 % de la propriété du Bar et Gril L. T. » (pièce n° 52) ;

Attendu que l'exploitation du restaurant a donné lieu à divers paiements au profit de tiers ; que selon des relevés dont H. J. R. ne conteste pas la réalité, des paiements qualifiés de « distribution » sont intervenus notamment en juin 1989, février 1990, septembre 1990, janvier 1991, janvier 1992 et en 1993 en faveur de diverses personnes dont les droits étaient calculés en fonction d'un pourcentage préétabli ; que la liste de ces personnes et leurs pourcentages respectifs a évolué, l'analyse étant encore compliquée par le fait que des sommes sont parfois reçues par certains pour le compte d'autres ; que des cessions de droits paraissent être intervenues entre 1989 et 1990 entre différents bénéficiaires (pièces n° 38 à 45) ; qu'en dernier lieu la répartition est ainsi effectuée en 1993, le vocable « K. » semblant viser H. J. R. (pièces n° 12 et 32) :

* D. R. : 4,62 %

* K. (M. R.) : 7,28 %

* V. G. : 6,60 %

* K. P. (MP/K.) : 4,30 %

* E. : 6,60 %

* B. M. : 0,72 %

* A. : 0,72 %

* J. F. : 1,65 %

* A. F. : 1,65 %

* I. (C.) : 1,44 %

* T. G. : 0,41 %

* M. R. : 0,83 %

* C. R. : 0,41 %

* L. W. M. : 0,41 %

* S. S. : 1,65 %

* M. P. : 60,71 %

Que ces versements paraissent avoir cessé en 1994 puisque dans une lettre du 24 janvier 1996, V. G., se qualifiant de « bailleur de fonds », se plaint de n'avoir reçu aucun dividende depuis 18 mois (pièce n° 10) ;

Attendu que les pourcentages en cause sont également mentionnés dans un document en langue anglaise intitulé « Contrat (agreement) » signé à une date non précisée paraissant située en 1992 par H. J. R., M. P., K. T. et D. R. ; que souhaitant clarifier le droit de propriété du restaurant en vue de sa vente, ils y expliquent que ce droit serait ainsi réparti :

* M. P. : 60,71 %

* D. R. : 4,62 %

* K. T. : 4,30 %

* R. : 7,28 %

* R. E. : 6,60 %

* autres minoritaires : 9,89 %

Que ce contrat devra être enregistré avec le présent jugement conformément à l'Ordonnance du 29 avril 1828 ;

Attendu que ces « autres minoritaires » sont manifestement ceux énumérés dans le décompte de répartition de 1993 comme représentant ensemble 9,89 % des parts : B. M., A., J. F., A. F., I. (C.), T. G., M. R., C. R., L. W. M. et S. S. ;

Attendu que ce document doit à l'évidence être rapproché d'un autre intitulé « contrat de restructuration d'une société en commandite simple (agreement to restructure a limited partnership) » dans lequel sont énumérés divers bailleurs de fonds ; que ce contrat n'a été signé que par certains des intéressés entre août 1988 et octobre 1989 ; que ce fait permet d'établir qu'il a été rédigé en 1988 ;

Qu'il y est expliqué que 19 personnes, dont H. J. R., ont versé au total une somme de 177 500 $ en vue de constituer une société texane en commandite simple qui devait être propriétaire du restaurant ; que cinq personnes ont ensuite « acheté » des « participations » :

* D. R., chef du restaurant, pour 17 000 $ ;

* G. K. pour 10 000 $ ;

* R. M. pour 5 000 $ ;

* M. P. pour 5 000 $  « au profit d'une autre personne » non dénommée ;

* K. T., également employée dans le restaurant, pour 15 000 $ ;

Que M. P. est présenté comme « associé en nom collectif (general partner) » alors que les autres participants sont qualifiés de « commanditaires (limited partners) » ; qu'il serait détenteur à ce titre de 60,7 % de la société ; qu'il est indiqué, sans aucune précision, qu'il aurait apporté « plus de 70 000 $ à ce projet » ; qu'il aurait en outre prêté à la société la somme de 52 000 $ provenant des participations vendues par lui ;

Attendu que le paragraphe 4 du contrat régit ainsi le partage des bénéfices :

* 60,7 % à P. et 39,3 % aux autres jusqu'à ce que ces derniers aient reçu 229 500 $ ;

* une fois cette somme atteinte, 80 % à P. jusqu'à remboursement du prêt de 52 000 $ et partage des 20 % restants à raison de 60,7 % à P. et de 39,3 % aux autres ;

* une fois ce prêt remboursé, 60,7 % à P. et le reste aux « limited partners » ;

Qu'il était en outre prévu de prélever sur les résultats une somme mensuelle de 28 500 francs pour permettre le remboursement par P. du prêt consenti par la Banque La Henin et la Banque Centrale Monégasque de Crédit ;

Attendu que ces modalités reflètent bien la volonté des parties ; que le fait qu'H. J. R. n'ait pas signé le contrat de 1988 est sans incidence, dès lors qu'elle a porté sa signature sur celui de 1992 qui s'y réfère implicitement ;

Attendu que ces stipulations ne sont pas restées à l'état de simple projet puisqu'H. J. R. les a volontairement exécutées alors qu'elle participait à la gestion du restaurant ;

Que des sommes ont été distribuées de façon habituelle entre 1989 et 1993 aux différents participants en fonction des droits qui leur avaient été reconnus ;

Que le remboursement des sommes prêtées par la banque La Hénin et la banque Centrale Monégasque de Crédit a été réorganisé de façon à faire apparaître M. P. ; qu'à partir de décembre 1988 et jusqu'à l'apurement du crédit, la somme de 28 460,69 francs (réévaluée ensuite à 28 458,32 F puis 28 459,21 F) a été virée du compte enregistrant les opérations commerciales du restaurant (compte n° 2400 252066 W ouvert au nom de J. R. à la Société Marseillaise de Crédit) sur le compte n° 08100048332 ouvert par M. P. à la banque La Hénin dont l'unique objet était ensuite de créditer chaque mois de 28 451,20 francs le compte n° 00100686344 ouvert à la même banque sous l'intitulé « J. R. – L. T. », spécialement affecté au remboursement de l'emprunt ;

Attendu qu'il résulte des faits énoncés qu'une association en participation a bien été constituée en vue de l'acquisition et de l'exploitation du restaurant L. T. ; qu'il est établi en effet que les parties ont entendu mettre en commun les sommes d'argent des uns et l'industrie des autres en s'inspirant de l'organisation prévue par la loi en matière de société en commandite simple ;

Attendu que différents participants assimilés à des associés commanditaires, et non à de simples prêteurs de deniers, ont apporté des fonds ; que M. P. tire ses droits, d'une part, de l'apport de 70 000 $ dont la réalité a été admise par ces participants, d'autre part et pour l'essentiel, de la qualité qu'il prenait dans la société, assimilable à celle d'associé indéfiniment responsable envers les tiers, et des risques attachés à cette qualité, traduits notamment par son engagement de caution ;

Attendu qu'H. J. R. lui a reconnu cette qualité en lui versant la part de dividendes qui y était attachée ; que ni le fait que M. P. ne résidait pas encore à Monaco à l'époque de l'achat et de l'ouverture du restaurant, ni celui que sa mère ait assuré en apparence sa gestion ne peuvent avoir pour effet de le priver de ses droits ; que ces droits ne sauraient être remis en cause par la mésentente survenue ultérieurement entre eux ;

Qu'il est donc ici sans intérêt de rechercher si les modalités de remboursement du prêt bancaire peuvent s'analyser comme un apport, ce qui ne paraît d'ailleurs pas être le cas ; que le fait que M. P. ait, entre 1993 et 1996, cumulé ses dividendes et des salaires est également sans incidence sur l'existence de la société et ne peut donner lieu, le cas échéant, qu'à répétition éventuelle ou compte entre les parties ;

Attendu que le contrat régit également la participation de chacun aux bénéfices et aux pertes ;

Que la part sur les bénéfices est déterminée selon les pourcentages ci-dessus relatés ;

Que la participation aux pertes résulte de la nature même des stipulations convenues, les « limited partners » devant contribuer aux pertes dans la limite de leurs apports tandis que M. P. se trouvait tenu sans limitation des dettes nées de l'exploitation ;

Attendu qu'il y a lieu en conséquence de faire droit à la demande tendant à faire juger qu'il existait bien entre les parties une association en participation ; que les droits respectifs de ces parties doivent être fixés conformément aux quotes-parts ci-dessus mentionnées ;

IV. - Sur la dissolution de l'association en participation :

Attendu qu'une association en participation n'a ni personnalité morale ni patrimoine propre ; qu'elle n'est en réalité que la manifestation des conventions existant entre ses différents participants ; que sa dissolution équivaut donc, non à sa fin en tant que personne distincte, mais à la résiliation ou à la caducité pour l'avenir de ces conventions ;

Que les principes applicables à la fin des sociétés sont toutefois applicables à la rupture des conventions d'association en participation ;

Attendu que les articles 1703 et 1709 du Code civil distinguent selon que la société a une durée illimitée ou est à terme ;

Que dans une société à durée illimitée, la dissolution peut résulter de la simple volonté exprimée par un ou plusieurs associés de n'être plus en société ; qu'elle s'opère conformément aux articles 1707 et 1708 du même code par une renonciation notifiée à tous les associés à condition que cette renonciation soit faite de bonne foi et non à contretemps ;

Qu'au contraire, dans la société à terme, la dissolution avant le terme fixé doit être demandée en justice et ne peut être prononcée que s'il existe des justes motifs au sens de l'article 1709 ;

Attendu que M. P. et les parties intervenantes invoquent expressément l'article 1709 ;

Qu'ils n'allèguent cependant pas l'existence d'un terme stipulé dans leurs conventions ; que les pièces produites ne permettent pas de trouver trace de leur volonté de limiter la durée de leur association ;

Attendu en outre que ces parties n'ont pas fait intervenir à l'instance, en même temps qu'H. J. R., la totalité des autres associés qualifiés plus haut « autres minoritaires », représentant 9,89 % des parts, dont elles ont pourtant admis l'existence encore actuelle dans leurs conclusions sans prétendre qu'elle auraient depuis cédé leurs droits ;

Que les accords de participation auxquels ces autres associés sont parties ne peuvent pourtant pas être remis en cause sans qu'ils aient été appelés à s'exprimer, soit à l'occasion d'une assemblée générale convoquée à cette fin, soit devant le tribunal saisi dans le cadre d'une instance judiciaire ; que cette nécessité résulte tant des principes généraux de la procédure civile et du droit des obligations que des articles 14 et 16 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques, fait à New York le 16 décembre 1966 et rendu exécutoire à Monaco par l'ordonnance n° 13.330 du 12 février 1998, qui reconnaissent à toute personne le droit à être jugée équitablement en cas de contestations sur ses droits et obligations de caractère civil et le droit à la reconnaissance de sa personnalité juridique ;

Attendu qu'il y a lieu en conséquence de surseoir à statuer sur les chefs de demande relatifs à la dissolution et à la liquidation de l'association en participation et, avant dire droit, d'inviter les parties :

* à s'expliquer sur l'existence ou non d'un terme convenu pour la société et à en tirer les conséquences quant au mode de dissolution de l'association en participation ;

* à s'expliquer sur les droits actuels des autres participants non présents à l'instance ;

* si la demande de dissolution doit demeurer fondée sur l'article 1709 du Code civil, à faire intervenir ces participants aux débats ;

Attendu qu'il convient également de surseoir à statuer sur les demandes de dommages-intérêts et sur la charge des dépens de l'instance ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Constate que M. P. a renoncé aux demandes formulées par lui dans ses écritures antérieures à ses conclusions « récapitulatives » du 21 février 2001 ;

Dit qu'il existe entre H. J. K. Veuve R., M. P., V. G., K. T., D. R., R. É., R. M. et A. F., sous réserve des droits d'autres participants non appelés à l'instance, une association en participation ayant pour objet l'acquisition, la transformation et l'exploitation du fonds de commerce de restaurant, à l'enseigne « L. T. », acquis par H. J. R. des époux F. selon actes reçus les 21 janvier et 9 juillet 1986 par Maître Crovetto, notaire à Monaco ;

Dit que les droits de ces parties sur les actifs dépendant de cette association s'élèvent aux quotes-parts suivantes :

* M. P.......................................... 60,71 %

* H. J. R............................... 7,28 %

* V. G...................................................... 6,60 %

* R. E........................................................ 6,60 %

* D. R....................................................... 4,62 %

* K. T............................................................ 4,30 %

* A. F............................................................ 1,65 %

* R. M....................................................... 0,72 %

Avant dire droit sur les autres chefs de demande.

Invite les parties à s'expliquer sur l'existence ou non d'un terme fixé à l'association et sur les droits actuels des autres participants ;

Si ces demandes demeurent fondées sur l'article 1709 du Code civil, ordonne l'intervention forcée des autres participants à l'association à moins qu'ils n'interviennent volontairement ;

Renvoie la cause et les parties à l'audience du Mercredi 17 avril 2002 à 9 heures ;

Composition

M. Narmino, prés. ; Mlle Le Lay, prem. subst. proc. gén. ; Mes Pastor, Escaut, av. déf. ; Deur et Flamant, av. bar de Nice.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26938
Date de la décision : 21/02/2002

Analyses

Public - Général ; Organisation des pouvoirs publics - Général ; Constitution, dissolution et actes relatifs à la vie de la société


Parties
Demandeurs : P., G., T., R., É., M., F.
Défendeurs : K. veuve R., en présence de M.

Références :

articles 1670 à 1711 du Code civil
ordonnance n° 13.330 du 12 février 1998
articles 54 à 57 du Code de commerce
articles 1703 et 1709 du Code civil
Code de commerce
article 1162 du Code civil
articles 2 et 3 du Code de procédure civile
articles 1670 et 1671 du Code civil
article 1709 du Code civil
article 25 du Code de commerce
Ordonnance du 29 avril 1828
articles 1709 et 1710 du Code civil
articles 56 et 57 du Code de commerce
ordonnance du 21 juillet 1997


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;2002-02-21;26938 ?

Source

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