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17/01/2002 | MONACO | N°26923

Monaco | Tribunal de première instance, 17 janvier 2002, D. C. c/ SAM Compagnie Monégasque de Banque


Abstract

Procédure pénale

Commission rogatoire internationale - Convention italo-monégasque du 26 mars 1866, article 13 - Saisie de compte bancaire requise - Exécution sur délégation du juge d'instruction, conforme à la convention et au Code de procédure pénale monégasque

Résumé

Il est acquis aux débats que par arrêt en date du 30 novembre 2000, la Cour d'appel de Naples, présidée par R. Castellano, a, en vertu de la Convention conclue le 26 mars 1866 avec l'Italie relativement à l'extradition des malfaiteurs et promulguée par ordonnance souveraine

du 29 mai 1866, sur réquisitions du Procureur de la République de Santa Maria Capua Vete...

Abstract

Procédure pénale

Commission rogatoire internationale - Convention italo-monégasque du 26 mars 1866, article 13 - Saisie de compte bancaire requise - Exécution sur délégation du juge d'instruction, conforme à la convention et au Code de procédure pénale monégasque

Résumé

Il est acquis aux débats que par arrêt en date du 30 novembre 2000, la Cour d'appel de Naples, présidée par R. Castellano, a, en vertu de la Convention conclue le 26 mars 1866 avec l'Italie relativement à l'extradition des malfaiteurs et promulguée par ordonnance souveraine du 29 mai 1866, sur réquisitions du Procureur de la République de Santa Maria Capua Vetere, délivré commission rogatoire aux autorités judiciaires monégasques dans l'information pénale suivie en Italie contre G. D. C. et autres des chefs d'escroquerie et blanchiment d'argent.

Cette commission rogatoire tendait expressément à la saisie des sommes d'argent se trouvant sur les comptes de G. D. C. auprès de la Compagnie Monégasque de Banque.

Aux termes de l'article 13 de ladite Convention « Si l'un des deux gouvernements juge nécessaire, pour l'introduction d'une affaire criminelle en correctionnelle, la déposition de témoins domiciliés sur le territoire de l'autre État, ou tout autre acte d'instruction judiciaire, des lettres rogatoires, adressées par voie diplomatique, seront, à cet effet, expédiées en due forme que la Cour d'appel compétente du Royaume d'Italie, au tribunal supérieur de la Principauté de Monaco, et réciproquement, lesquels seront tenus d'y donner cours conformément aux lois en vigueur dans le pays où le témoin sera entendu, ou l'acte délivré ».

Ainsi, contrairement à ce qui est soutenu en demande, commission rogatoire peut être délivrée non seulement en vue d'obtenir une extradition (article 1 et suivants) mais également, comme c'est le cas en l'espèce, pour la réalisation d'un quelconque acte d'instruction en matière criminelle ou correctionnelle (article 13).

En outre, la procédure civile en Italie à l'encontre du demandeur est bien de nature correctionnelle - et non simplement fiscale ainsi que l'a prétendu G. D. C. - puisque ouverte des chefs d'escroquerie et blanchiment d'argent.

Par ailleurs, régulièrement au regard des dispositions de l'article 13 précité, la commission rogatoire en cause émane de la Cour d'appel italienne compétente et, par la voie diplomatique, a été transmise au « Tribunal supérieur de la Principauté », devenu en application de la loi n° 783 du 15 juillet 1965, le « Tribunal de première instance de la Principauté de Monaco ».

Enfin les saisies de comptes bancaires sollicitées par l'autorité judiciaire italienne ont été réalisées « conformément aux lois en vigueur » en Principauté puisque l'exécution à Monaco de la commission rogatoire a été confiée à un juge d'instruction désigné par ordonnance présidentielle du 22 janvier 2001 conformément aux dispositions de l'article 39 alinéa 3 du Code de procédure pénale, lequel juge d'instruction a, en vertu de l'article 205 du Code de procédure pénale, régulièrement délégué ses pouvoirs aux services de police judiciaire le 24 janvier 2001.

Il est patent que la référence aux « lois en vigueur » en Principauté doit s'entendre des lois pénales et non civiles, l'article 13 précité en cause s'inscrivant dans un contexte de procédure exclusivement pénale. Ainsi, la matière des saisies applicable en l'espèce était régie par les articles 100 et suivants du Code de procédure pénale et non par les articles 487 et suivants du Code de procédure civile.

Il en résulte que G. D. C. doit être débouté de ses demandes dans la mesure où, en la forme et au fond, la Convention bilatérale du 26 mars 1866 a été régulièrement appliquée et ainsi les comptes bancaires dont s'agit ont été valablement saisis, étant relevé que le demandeur ne prétend pas et ne justifie pas de l'obtention en Italie d'une décision mettant fin à la saisie des comptes ou devant entraîner qu'il y soit mis fin.

Motifs

Le Tribunal,

Considérant les faits suivants :

G. D. C., par l'acte susvisé du 3 juillet 2001, a fait assigner l'établissement financier dénommé Compagnie Monégasque de Banque et le Parquet de Monaco aux fins de :

Voir déclarer recevable et bien fondé la demande de mainlevée de saisie faite par le requérant ;

Dire et juger que la Convention du 26 mars 1866 est inapplicable en l'espèce ;

À titre subsidiaire,

Dire et juger que les conditions d'application de la Convention du 26 mars 1866 et notamment prévues dans son article 13, n'ont pas été respectées ;

À titre très subsidiaire,

Dire et juger que la saisie-arrêt des comptes du requérant ouverts auprès de la Compagnie Monégasque de Banque à Monaco ne respecte pas les dispositions des articles 487 et suivants du Code de procédure civile monégasque ;

En conséquence,

Donner mainlevée pure et simple de la mesure de saisie ainsi pratiquée ;

Dire que la Compagnie Monégasque de Banque pourra, au seul vu d'une copie de la décision à intervenir, procéder à la mainlevée des saisies et restituer au requérant la libre disposition de ses comptes ;

G. D. C. fait valoir à l'appui de ses demandes :

* qu'au sein de la Compagnie Monégasque de Banque, il détient plusieurs comptes bancaires ouverts sous son nom propre et sous l'intitulé E. ;

* que début février 2001, il a demandé à la banque de clôturer ses trois comptes existants et de procéder au virement de ses avoirs sur un autre compte ;

* que la banque devait cependant lui répondre que les comptes dont s'agit avaient fait l'objet d'une réquisition et d'une saisie de la part de la sûreté publique de Monaco agissant à la demande du Parquet de la Principauté ;

* que ce Parquet faisait savoir à son conseil le 7 mars 2001 que ce blocage de comptes était intervenu suite à une commission rogatoire délivrée le 28 novembre 2000 par le Procureur de la République près le Tribunal italien de Santa Maria Capua Vetere.

* qu'il devait ainsi apprendre que la commission rogatoire italienne dont s'agit était fondée sur la Convention du 26 mars 1866 signée entre l'Italie et la Principauté ;

* que cependant, ni la forme ni le fond de cette Convention n'ont été respectés ;

* qu'en effet, la commission rogatoire aurait dû émaner de la cour d'appel italienne compétente, outre que la Convention de 1866 en cause ne peut tendre qu'à une extradition et ne peut être appliquée en matière de délit fiscal ;

* qu'également, le blocage des comptes n'a pas été effectué conformément aux règles procédurales applicables et énumérées aux articles 487 et suivants du Code de procédure civile ;

Le représentant du Ministère public a conclu en réponse lors de l'audience du 25 octobre 2001 ;

Il rappelle que les saisies ont été ordonnées en l'état d'une procédure italienne pour délit de droit commun (blanchiment d'argent et escroquerie) et non pour délit fiscal ;

Il ajoute que la référence à l'article 13 de la Convention italo-monégasque du 26 mars 1866 est régulière et qu'à la réception de la demande italienne, un magistrat instructeur a été désigné le 23 janvier 2001 (en réalité le 22 janvier 2001) par le Président du Tribunal de Monaco ;

Il précise enfin qu'après exécution de son objet, il a été procédé le 24 avril 2001 à l'acheminement en retour de la commission rogatoire ;

Le Ministère public en déduit que seule l'autorité judiciaire italienne est compétente pour prononcer la mainlevée des saisies en cause ;

La Compagnie Monégasque de Banque a de son côté, par conclusions du 14 novembre 2001, demandé qu'il lui soit donné acte de son rapport à justice quant au bien fondé de la demande de G. D. C. ;

Sur quoi :

Attendu qu'il est acquis aux débats que par arrêt en date du 30 novembre 2000, la Cour d'appel de Naples, présidée par R. Castellano, a, en vertu de la Convention conclue le 26 mars 1866 avec l'Italie relativement à l'extradition des malfaiteurs et promulguée par ordonnance souveraine du 29 mai 1866, sur réquisitions du Procureur de la République de Santa Maria Capua Vetere, délivré commission rogatoire aux autorités judiciaires monégasques dans l'information pénale suivie en Italie contre G. D. C. et autres des chefs d'escroquerie et blanchiment d'argent ;

Que cette commission rogatoire tendait expressément à la saisie des sommes d'argent se trouvant sur les comptes de G. D. C. auprès de la Compagnie Monégasque de Banque ;

Attendu qu'aux termes de l'article 13 de ladite Convention :

Si l'un des deux gouvernements juge nécessaire, pour l'introduction d'une affaire criminelle en correctionnelle, la déposition de témoins domiciliés sur le territoire de l'autre État, ou tout autre acte d'instruction judiciaire, des lettres rogatoires, adressées par voie diplomatique, seront, à cet effet, expédiées en due forme par la Cour d'appel compétente du Royaume d'Italie, au tribunal supérieur de la Principauté de Monaco, et réciproquement, lesquels seront tenus d'y donner cours conformément aux lois en vigueur dans le pays où le témoin sera entendu, ou l'acte délivré ;

Attendu qu'ainsi, contrairement à ce qui est soutenu en demande, commission rogatoire peut être délivrée non seulement en vue d'obtenir une extradition (article 1 et suivants) mais également, comme c'est le cas en l'espèce, pour la réalisation d'un quelconque acte d'instruction en matière criminelle ou correctionnelle (article 13) ;

Attendu, qu'en outre, la procédure suivie en Italie à l'encontre du demandeur est bien de nature correctionnelle - et non simplement fiscale mais que prétendu par G. D. C. - puisque ouverte des chefs d'escroquerie et blanchiment d'argent ;

Attendu, par ailleurs, que régulièrement au regard des dispositions de l'article 13 précité, la commission rogatoire en cause émane de la Cour d'appel italienne compétente et, par la voie diplomatique, a été transmise au « Tribunal Supérieur de la Principauté », devenu, en application de la loi n° 783 du 15 juillet 1965, le « Tribunal de première instance de la Principauté de Monaco » ;

Attendu qu'enfin les saisies de comptes bancaires sollicitées par l'autorité judiciaire italienne ont été réalisées « conformément aux lois en vigueur » en Principauté puisque l'exécution à Monaco de la commission rogatoire a été confiée à un juge d'instruction désigné par ordonnance présidentielle du 22 janvier 2001 conformément aux dispositions de l'article 39 alinéa 3 du Code de procédure pénale, lequel juge d'instruction a, en vertu de l'article 205 du Code de procédure pénale, régulièrement délégué ses pouvoirs aux services de police judiciaire le 24 janvier 2001 ;

Attendu sur ce point qu'il est patent que la référence aux « lois en vigueur » en Principauté doit s'entendre des lois pénales et non civiles, l'article 13 précité en cause s'inscrivant dans un contexte de procédure exclusivement pénale ; qu'ainsi, la matière des saisies applicable en l'espèce était régie par les articles 100 et suivants du Code de procédure pénale et non par les articles 487 et suivants du Code de procédure civile ;

Attendu qu'il en résulte que G. D. C. doit être débouté de ses demandes dans la mesure où, en la forme et au fond, la Convention bilatérale du 26 mars 1866 a été régulièrement appliquée et qu'ainsi les comptes bancaires dont s'agit ont été valablement saisis, étant relevé que le demandeur ne prétend pas et ne justifie pas de l'obtention en Italie d'une décision mettant fin à la saisie des comptes ou devant entraîner qu'il y soit mis fin ;

Et attendu que G. D. C. devra supporter les dépens de l'instance dans la mesure où il a succombé ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Dit que la Convention bilatérale conclue avec l'Italie le 26 mars 1866 et promulguée par ordonnance souveraine du 29 mai 1866 a, en la forme et au fond, été régulièrement appliquée à l'occasion de la délivrance et de l'exécution de la commission rogatoire internationale concernant G. D. C. ;

Déboute en conséquence G. D. C. de sa demande tendant à la mainlevée des mesures de saisie de ses comptes bancaires ouverts dans les livres de la Compagnie Monégasque de Banque et rejette l'ensemble de ses prétentions.

Composition

M. Narmino ; prés. ; Mlle Le Lay, prem. subst. proc. gén. ; Mes Escaut et Sbarrato, av. def. ; Bertolotto et Morel, av. bar. de Nice.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26923
Date de la décision : 17/01/2002

Analyses

International - Général ; Traités bilatéraux hors France ; Procédure pénale - Général


Parties
Demandeurs : D. C.
Défendeurs : SAM Compagnie Monégasque de Banque

Références :

Code de procédure pénale
loi n° 783 du 15 juillet 1965
Code de procédure civile
ordonnance souveraine du 29 mai 1866
article 39 alinéa 3 du Code de procédure pénale
article 205 du Code de procédure pénale


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;2002-01-17;26923 ?

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