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30/03/2000 | MONACO | N°26794

Monaco | Tribunal de première instance, 30 mars 2000, I. c/ C.


Abstract

Divorce - séparation de corps

Cause de l'article 198 du Code civil - Maladie grave et durable compromettant sécurité et santé du conjoint - Pension alimentaire destinée au conjoint malade (C. civ., art. 206-25)

Résumé

En vertu des dispositions de l'article 198 du Code civil, le divorce peut être prononcé lorsque l'un des époux est atteint d'une maladie dont la gravité et la durée sont de nature à compromettre dangereusement la sécurité ou la santé du conjoint.

Il s'induit de l'ensemble des éléments de la cause que la maladie de N. C

. par sa gravité et sa durée (elle bénéficie d'une pension d'invalidité depuis le 3 août 1979),...

Abstract

Divorce - séparation de corps

Cause de l'article 198 du Code civil - Maladie grave et durable compromettant sécurité et santé du conjoint - Pension alimentaire destinée au conjoint malade (C. civ., art. 206-25)

Résumé

En vertu des dispositions de l'article 198 du Code civil, le divorce peut être prononcé lorsque l'un des époux est atteint d'une maladie dont la gravité et la durée sont de nature à compromettre dangereusement la sécurité ou la santé du conjoint.

Il s'induit de l'ensemble des éléments de la cause que la maladie de N. C. par sa gravité et sa durée (elle bénéficie d'une pension d'invalidité depuis le 3 août 1979), par la fréquence d'hospitalisation de longs séjours ayant nécessairement généré de lourdes contraintes à son époux, est de nature, au sens de l'article 198 du Code civil, à compromettre dangereusement la santé de J. I. d'autant que celui-ci est de santé fragile.

En conséquence il apparaît que les conditions de l'article 198 du Code civil sont réunies en la cause et qu'il y a lieu de prononcer le divorce des deux époux avec toutes conséquences de droit.

En vertu des dispositions de l'article 206-25 du Code civil, lorsque le divorce est prononcé sur le fondement de l'article 198 du Code civil, le Tribunal décide s'il convient de mettre à la charge du conjoint une pension destinée à l'époux malade et détermine également de quelle manière il sera pourvu à l'entretien de celui-ci.

J. I. ayant offert de payer le loyer et les charges du studio (4 500 F) de son épouse et de lui verser une pension alimentaire mensuelle de 4 000 F alors qu'il dispose de 50 000 F de ressources par mois, tandis que son épouse perçoit une pension trimestrielle d'invalidité de 13 600 F il convient de mettre à la charge de J. I. une pension mensuelle de 8 500 F indexée incluant le loyer et les charges susvisés.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu que suivant l'exploit susvisé, en date du 6 avril 1999, I., né le 24 décembre 1946 à Monaco, de nationalité française, a régulièrement fait assigner en divorce C., née le 7 février 1950 à Monaco, également de nationalité française, qu'il a épousée le 3 septembre 1971 par-devant l'officier d'état civil de la Principauté de Monaco, et ce, sans avoir conclu un contrat de mariage, déclarant se soumettre au régime légal français ;

Qu'aucun enfant n'est issu de cette union ;

Attendu qu'au soutien de sa demande en divorce, I. invoque l'aggravation de l'état de santé de son épouse fréquemment hospitalisée et faisant de nombreux et longs séjours à la Clinique de la Costière pour un état dépressif ;

Qu'il énonce que la gravité de l'état de santé de son épouse et ses très longues absences l'ont profondément perturbé et l'ont lui-même contraint à un suivi médical constant pour dépression et même une récente hospitalisation au Centre Hospitalier Princesse Grace de Monaco ;

Que I. demande en conséquence au Tribunal de prononcer le divorce en application de l'article 198 du Code civil et de constater que la gravité et la durée de la maladie dont son épouse est atteinte, sont de nature à compromettre dangereusement la santé de son conjoint ;

Qu'il sollicite cependant le prononcé du divorce aux torts exclusifs de C. avec toutes conséquences de droit ;

Attendu que C. conclut au débouté de la demande formée à son encontre, en invoquant le fait que son époux ne rapporte pas la preuve que son état de santé ait pu avoir des conséquences importantes sur celui-ci, ce dernier étant lui-même soigné depuis 15 ans ;

Attendu que la défenderesse a, pour sa part, formé envers son époux une demande reconventionnelle en divorce en exposant que la présentation déformée des faits de la cause faite par son époux constitue une injure grave ;

Que C. demande en conséquence au Tribunal de prononcer le divorce aux torts exclusifs de I. avec toutes conséquences de droit ;

Qu'elle sollicite par ailleurs la somme mensuelle indexée de 8 500 francs à titre de pension alimentaire ;

Attendu qu'en réponse I. sollicite le rejet des demandes, fins et conclusions de C. et maintient ses prétentions ;

Qu'il confirme que la gravité de l'état de santé de son épouse et ses très longues absences pour des hospitalisations l'ont profondément perturbé, lui laissant à sa charge toutes les tâches ménagères ; qu'il ajoute à ce fondement un second fondement en invoquant l'adultère de son épouse ;

Qu'à ce propos, il allègue que son épouse a eu à son égard un comportement injurieux, par son infidélité, qui constitue un manquement grave de son épouse aux obligations conjugales ;

Qu'il produit à l'appui de son allégation une attestation établie par D. B., ami commun du couple ;

Que par ailleurs, I. produit notamment des attestations de sa mère et de sa sœur, ainsi qu'une attestation des Caisses Sociales de Monaco, selon laquelle son épouse bénéficie d'une pension d'invalidité depuis le 3 août 1979 ;

Que sur la demande reconventionnelle, I. répond qu'elle est infondée et ne repose sur aucune preuve d'une quelconque faute qu'il aurait commise ;

Attendu qu'en réplique, C. conclut au débouté des demandes, fins et conclusions de I. au motif qu'elles sont dénuées de tout fondement et maintient sa demande reconventionnelle ;

Qu'elle produit à l'appui de sa demande une attestation de son médecin traitant auprès de la Clinique de la Costière, aux termes de laquelle ce médecin énonce n'avoir jamais constaté aucun trouble du comportement de C. en infraction avec le règlement intérieur de la clinique, ainsi que deux attestations faisant état du comportement alcoolique de son époux ;

Qu'elle verse aux débats également un autre certificat médical attestant du fait qu'elle supporte très mal sur le plan psychologique la procédure engagée par son époux ;

Sur ce :

I. - Sur la demande principale en divorce,

Attendu qu'en vertu des dispositions de l'article 198 du Code civil, le divorce peut être prononcé lorsque l'un des époux est atteint d'une maladie dont la gravité et la durée sont de nature à compromettre dangereusement la sécurité ou la santé du conjoint ;

Attendu en l'espèce, qu'il résulte d'une attestation des Caisses Sociales de Monaco en date du 11 novembre 1998, versée aux débats, que C. bénéficie d'une pension d'invalidité servie par cet organisme social au titre « d'invalide incapable d'exercer quelque activité professionnelle que ce soit » depuis le 3 août 1979 et perçoit à ce titre trimestriellement la somme de 13 600 francs ;

Qu'il découle de cette attestation que C. a été déclarée invalide professionnellement par les Caisses Sociales de Monaco depuis plus de 20 ans, nécessairement pour des raisons de santé ;

Qu'il est également constant que C. est régulièrement hospitalisée pour de longs séjours à la Clinique de la Costière à Nice depuis de nombreuses années afin de suivre un traitement médical psychiatrique ;

Qu'au demeurant, C. ne le conteste pas et produit elle-même des attestations de son médecin traitant, le docteur M., qui certifie la suivre régulièrement pour un état dépressif récidivant nécessitant des hospitalisations à l'occasion de décompensations aiguës ;

Attendu, par ailleurs, qu'il ressort des pièces versées aux débats et notamment d'un certificat médical établi par le docteur P. le 10 novembre 1998, que I. est traité médicalement pour état dépressif avec angoisses depuis environ 15 ans ;

Qu'il résulte de cette pièce que I. a été contraint de suivre un traitement médical postérieurement à la maladie de son épouse ;

Attendu qu'il s'induit ainsi de l'ensemble de ces éléments que la maladie de C., par sa gravité et sa durée, par la fréquence d'hospitalisation de longs séjours ayant nécessairement généré de lourdes contraintes à son époux, est de nature, au sens de l'article 198 du Code civil, à compromettre dangereusement la santé de I., d'autant que celui-ci est de santé fragile ;

Attendu en conséquence qu'il apparaît que les conditions de l'article 198 du Code civil sont réunies en la cause ; qu'il y a donc lieu de prononcer le divorce des époux I./C. avec toutes conséquences de droit ;

Attendu, par ailleurs, que I... invoque le comportement adultère de son épouse en versant aux débats une attestation établie par D. B., ami commun du couple, selon laquelle ce dernier affirme que « lors d'un séjour à la Clinique de la Costière, pendant la période de mars à juin 1998, C. a eu des rapports sexuels avec D. un patient de la chambre 110 P au RDC » et que celui-ci en a été témoin par certaines scènes " ;

Attendu qu'il convient d'observer que les éléments décrits dans cette attestation sont imprécis ; qu'ils ne suffisent pas, dès lors, à établir l'infidélité de C. envers son époux ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que le grief d'adultère n'est pas établi, en sorte qu'il y a lieu de débouter I. de ce chef ;

II - Sur la demande reconventionnelle,

Attendu que C. fait grief à son époux de ne pas rapporter la preuve que son état de santé ait pu avoir des conséquences néfastes sur celui-ci et d'avoir procédé par affirmations inexactes ou déformées, de nature à constituer une injure grave ; qu'elle lui fait également grief de son intempérance chronique avec un penchant très prononcé pour l'alcool, qui a eu pour conséquence de la déséquilibrer psychologiquement ;

Attendu sur le premier grief, que dès lors qu'il a été fait droit à la demande principale de I. ce chef de demande doit être rejeté ;

Attendu qu'à l'appui du second grief allégué, C. verse aux débats une attestation émanant de Mme V. née R., gérante du magasin sis au boulevard d'Italie à Monaco qui certifie avoir vu I. deux fois consécutives ivre sur le trottoir en sortant d'un bar, ayant dû se faire ramener chez lui ;

Qu'elle produit une seconde attestation établie par Mme M. qui déclare que I. a un penchant pour l'alcool très prononcé, ayant nécessité plusieurs hospitalisations dans des cliniques spécialisées ;

Attendu qu'au regard de ces seuls éléments, les faits d'alcoolisme allégués à l'encontre de I. ne sont pas suffisamment établis ; que l'attestation Rossi ne précise pas la date des faits, tandis que l'attestation M. ne constitue pas le reflet de faits constatés ;

Attendu en conséquence qu'il n'est pas établi que l'alcoolisme allégué ait constitué une injure ou des excès au sens de l'article 197-2e du Code civil, en sorte que ce grief ne peut constituer en l'espèce une cause de divorce ;

Qu'il y a donc lieu de débouter C. des fins de sa demande reconventionnelle ;

III - Quant aux mesures accessoires,

Attendu qu'en vertu des dispositions de l'article 206-25 du Code civil, lorsque le divorce est prononcé sur le fondement de l'article 198 du Code civil, le Tribunal décide s'il convient de mettre à la charge du conjoint une pension destinée à l'époux malade et détermine également de quelle manière il sera pourvu à l'entretien de celui-ci ;

Attendu que lors de l'audience de conciliation devant le juge conciliateur du 24 mars 1999, I. a offert à titre provisoire de payer le loyer et les provisions sur charges du studio sis [adresse] s'élevant à une somme de 4 500 francs par mois et de payer une pension alimentaire à hauteur de 4 000 francs par mois à C. ;

Attendu que compte tenu des éléments qui précèdent, des ressources de I. qui s'élèvent mensuellement environ à 50 000 francs et des ressources de C. qui perçoit trimestriellement une pension d'invalidité de 13 600 francs, il apparaît légitime que I. continue à assumer pour partie les charges auxquelles son épouse malade doit faire face ;

Attendu, en conséquence, qu'il convient de mettre à la charge de I. une pension mensuelle de 8 500 francs, incluant la somme de 4 500 francs pour régler mensuellement le loyer et les provisions sur charges du studio sis [adresse] ; que cette somme devra être indexée ;

Attendu enfin sur les dépens, que C. ne peut être considérée comme ayant succombé au sens de l'article 231 du Code de procédure civile, compte tenu des circonstances de la cause ;

Qu'en conséquence les dépens devront rester à la charge du demandeur ; qu'imputables à l'adversaire d'une assistée judiciaire, ils seront recouvrés conformément à l'article 50 du Code de procédure civile ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant contradictoirement,

Prononce avec toutes conséquences de droit le divorce des époux I./C. en application de l'article 198 du Code civil ;

Fixe au 11 janvier 1999 les effets de la résidence séparée des époux ;

Condamne I. à payer à C., à son domicile, le premier de chaque mois et d'avance, une pension mensuelle de 8 500 francs ;

Dit que cette contribution sera révisée annuellement en fonction des variations de l'indice mensuel des prix à la consommation des ménages urbains (série France entière), publié par l'INSEE et pour la première fois le 1er janvier 2001, le cours de l'indice au mois du présent jugement étant pris pour base ;

Déboute I. du surplus de ses demandes ;

Déboute C. de sa demande reconventionnelle ;

Ordonne la liquidation des intérêts communs ayant pu exister entre les époux ;

Commet Maître Paul-Louis Aureglia, notaire, pour procéder à cette liquidation et Mlle A.-V. B.-G., juge au siège, pour suivre ces opérations et faire rapport en cas de difficultés ;

Dit qu'en cas d'empêchement du notaire ou du magistrat ainsi commis, il sera procédé à son remplacement par simple ordonnance ;

Composition

M. Narmino, prés. ; Auter, subst. proc. gén. ; Mes Sbarrato et P. Lorenzi, av. déf. ; D. Lorenzi, av. stag.

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Synthèse
Numéro d'arrêt : 26794
Date de la décision : 30/03/2000

Analyses

Civil - Général ; Droit de la famille - Dissolution de la communauté et séparation de corps


Parties
Demandeurs : I.
Défendeurs : C.

Références :

article 50 du Code de procédure civile
article 198 du Code civil
article 231 du Code de procédure civile
Code civil
C. civ., art. 206-25


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;2000-03-30;26794 ?

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