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17/02/2000 | MONACO | N°26779

Monaco | Tribunal de première instance, 17 février 2000, Administration des Domaines c/ Sté G. et Cie, G., P.


Abstract

Contrat de louage

Application au domaine privé de l'État : inexistence d'un contrat administratif

Cessation des paiements - Faillites

Créance privilégiée du bailleur - Limitation au garnissement de l'immeuble - Caractère chirographaire du surplus de la créance

Résumé

L'Administration des Domaines et S. G. ont conclu le 13 février 1997 une convention d'occupation aux termes de laquelle cette administration lui accordait pour une durée de trois ans, à compter du 1er décembre 1996, la jouissance de divers locaux relevant du domaine p

rivé de l'État, situés à Monaco, destinés à abriter l'exercice ou l'exploitation d'un commerce d...

Abstract

Contrat de louage

Application au domaine privé de l'État : inexistence d'un contrat administratif

Cessation des paiements - Faillites

Créance privilégiée du bailleur - Limitation au garnissement de l'immeuble - Caractère chirographaire du surplus de la créance

Résumé

L'Administration des Domaines et S. G. ont conclu le 13 février 1997 une convention d'occupation aux termes de laquelle cette administration lui accordait pour une durée de trois ans, à compter du 1er décembre 1996, la jouissance de divers locaux relevant du domaine privé de l'État, situés à Monaco, destinés à abriter l'exercice ou l'exploitation d'un commerce de brancardier ambulancier, moyennant le versement d'une redevance annuelle de 10 324 F toutes taxes comprises, révisable le 1er janvier de chaque année en fonction d'un indice officiel des prix, outre le paiement de charges locatives.

Dans sa production au passif de la faillite de la société en commandite simple G. et Cie, l'Administration des Domaines a visé une créance de 5 638,93 F représentant des redevances et charges.

Sur la nature de la créance :

Selon l'article 34 de la loi n° 490 du 24 novembre 1948 sur les loyers commerciaux, cette loi n'est pas applicable aux locations portant sur des établissements appartenant à l'État, sous la condition que le refus de renouvellement corresponde à un intérêt public ; qu'il était donc parfaitement loisible aux parties de stipuler au profit de l'administration une faculté de reprise des lieux loués dans les circonstances énumérées à l'article 1er (cession, cessation ou transfert d'activité), ou une faculté de résiliation en cas de modification de l'activité ou de mise en gérance au profit d'une personne étrangère (art. 4) ; de telles clauses n'ont pas le caractère de clauses exorbitantes du droit commun des contrats emportant l'octroi au profit de l'une des parties des prérogatives de puissance publique.

La convention n'avait pas non plus pour effet d'organiser la participation du cocontractant à l'exécution du service public.

Elle n'a donc pas le caractère d'un contrat administratif.

Les parties ont, en réalité, essentiellement entendu se référer au droit du contrat de louage, tel qu'il est régi par les articles 1548 et suivants du Code civil, en recourant aux notions de loyer (articles 3 et 5-2), de charges locatives (articles 3 et 5-5), de bail (article 5-2), de bailleur (article 5-1).

Sur l'étendue du privilège du bailleur :

Elles ont expressément stipulé à l'article 5-2 l'obligation pour S. G. de tenir les lieux garnis, de meubles, objets mobiliers, matériel et marchandise en quantité et de valeur suffisante, et appartenant personnellement au bénéficiaire « afin de garantir à tout moment le paiement du loyer et l'exécution du bail ». L'Administration a ainsi nécessairement invoqué le privilège reconnu au bailleur par l'article 1939 du Code civil.

L'Administration est donc bien fondée, en raison de la qualité de sa créance, à se prévaloir de ce privilège dans la mesure où le montant de celle-ci n'excède pas les limites spécialement prévues par l'article 479 du Code de Commerce.

Cependant le privilège du bailleur doit être restreint aux seuls objets prévus à l'article 1939 du Code civil et ne peut s'appliquer à la généralité de l'actif dépendant de la liquidation ; la créance de l'Administration n'étant ici privilégiée que sur « le prix de tout ce qui garnit la maison louée ».

Selon les affirmations non contestées du syndic, l'intégralité du mobilier entreposé dans les locaux loués a donné lieu à cession pour un prix total de 500 F, étant précisé que les véhicules appartenant à la Société G. et Cie n'étaient pas susceptibles de garnir ces locaux, qui, selon la description qui en était donnée à la convention, ne comportaient pas de garage pour automobiles.

La créance admise excède donc l'assiette du privilège ; elle doit en conséquence n'être admise à titre privilégié qu'à concurrence de 500 F, n'ayant pour le surplus qu'un caractère chirographaire.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu que l'Administration des Domaines a régulièrement produit au passif de la société en commandite simple G. & Cie, de S. G. et de D. P. pour une créance de 5 638,93 francs à titre privilégié et n'a été admise pour cette somme qu'à titre chirographaire ;

Que, sur sa réclamation, le Juge Commissaire a, par ordonnance du 12 janvier 2000, admis cette créance à titre privilégié ;

Que l'examen de sa créance ainsi provisionnellement admise a été, sur ce, renvoyé devant le Tribunal par application de l'article 472 du Code de commerce ;

Attendu qu'à l'audience du Tribunal tenue le 4 février 2000, l'Administration des Domaines, comparaissant par l'intermédiaire d'Alice Crovetto, a maintenu à titre définitif sa production ;

Que, par conclusions du même jour, le syndic s'en est remis à justice, mais a fait valoir que la créance, découlant de l'exécution d'un contrat intitulé « convention d'occupation précaire », ne permettait pas à l'Administration des Domaines d'invoquer le bénéfice d'un bail ni le privilège conféré au bailleur ;

Attendu que l'Administration des Domaines et S. G. ont conclu le 13 février 1997 une convention d'occupation aux termes de laquelle l'Administration lui accordait pour une durée de trois années, à compter du 1er décembre 1996, la jouissance de divers locaux relevant du Domaine Privé de l'État, situés à Monaco, destinés à abriter l'exercice ou l'exploitation d'un commerce de brancardier-ambulancier, moyennant le versement d'une redevance annuelle de 10 324 francs toutes taxes comprises, révisable le 1er janvier de chaque année en fonction d'un indice officiel des prix, outre le paiement de charges locatives ;

Attendu que l'Administration vise dans sa production une créance née de l'exécution de cette convention, constituée par les redevances des deuxième et troisième trimestres 1998, les acomptes sur charges afférents aux mêmes périodes et la régularisation des charges de l'exercice 1998 ; que ni le principe ni le quantum de cette créance n'ont été contestés, de sorte qu'il y a lieu de l'admettre pour le montant déclaré de 5 638,93 francs ;

Attendu, quant à la nature de cette créance, qu'il appartient au tribunal de rechercher l'exacte nature de la convention eu égard au but poursuivi dans l'intention des parties ;

Attendu que, selon l'article 34 de la loi n° 490 du 24 novembre 1948 sur les loyers commerciaux, cette loi n'est pas applicable aux locations portant sur des établissements appartenant à l'État, sous la condition que le refus de renouvellement corresponde à un intérêt public ; qu'il était donc parfaitement loisible aux parties de stipuler au profit de l'Administration une faculté de reprise des lieux loués dans les circonstances énumérées à l'article 1er (cession, cessation ou transfert d'activité), ou une faculté de résiliation en cas de modification de l'activité ou de mise en gérance au profit d'une personne étrangère (article 4) ; que ces clauses n'ont pas le caractère de clauses exorbitantes du droit commun des contrats emportant l'octroi au profit de l'une des parties de prérogatives de puissance publique ;

Que la convention n'avait pas non plus pour effet d'organiser la participation du cocontractant à l'exécution du service public ;

Qu'elle n'a donc pas le caractère d'un contrat administratif ;

Attendu que les parties ont essentiellement entendu se référer au droit du contrat de louage, tel qu'il est régi par les articles 1548 et suivants du Code civil, en recourant aux notions de loyer (articles 3 et 5-2), charges locatives (articles 3 et 5-5), de bail (article 5-2), de bailleur (article 5-1) ;

Que l'Administration ne s'est réservée aucune faculté discrétionnaire de révocation de la convention ;

Que les parties ont expressément stipulé à l'article 5-2 l'obligation pour S. G. de tenir les lieux garnis de meubles, objets mobiliers, matériel et marchandise en quantité et de valeur suffisante, et appartenant personnellement au bénéficiaire « afin de garantir à tout moment du paiement du loyer et de l'exécution du bail » ; que l'Administration a ainsi nécessairement invoqué le privilège reconnu au bailleur par l'article 1939 du Code civil.

Attendu que l'Administration est donc bien fondée, en raison de la qualité de sa créance, à se prévaloir de ce privilège ; que le montant de cette créance n'excède pas les limites spécialement prévues à l'article 479 du Code de commerce ;

Attendu cependant que le privilège du bailleur doit être restreint aux seuls objets prévus à l'article 1939 du Code civil et ne peut s'appliquer à la généralité de l'actif dépendant de la liquidation ; que la créance de l'Administration n'est ici privilégiée que sur « le prix de tout ce qui garnit la maison louée » ;

Attendu que, selon les affirmations non contestées du syndic, l'intégralité du mobilier entreposé dans les locaux loués a donné lieu à cession pour un prix total de 500 francs ; que les véhicules appartenant à la société G. & Cie n'étaient pas susceptibles de garnir ces locaux, qui, selon la description qui en était donnée à la convention, ne comportaient pas de garage pour automobiles ;

Attendu que la créance admise excède donc l'assiette du privilège ; qu'elle doit en conséquence n'être admise à titre privilégié qu'à concurrence de 500 francs, n'ayant pour le surplus qu'un caractère chirographaire ;

Attendu que les dépens du présent jugement doivent être employés en frais privilégiés de procédure collective ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal,

Prononce l'admission définitive de l'Administration des Domaines au passif de la société G. & Cie, de S. G. et de D. P. :

* pour la somme de 500 francs à titre privilégié ;

* pour la somme de 5 138,93 francs à titre chirographaire ;

Ordonne l'enrôlement des dépens en frais privilégiés de procédure collective ;

Composition

M. Narmino, prés. ; Mlle Le Lay, prem. subst. proc. gén. ; Mme Crovetto, pour l'Administration des Domaines ; M. Boisson, Syndic.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26779
Date de la décision : 17/02/2000

Analyses

Contrat - Général ; Contrat de louage ; Baux


Parties
Demandeurs : Administration des Domaines
Défendeurs : Sté G. et Cie, G., P.

Références :

article 472 du Code de commerce
ordonnance du 12 janvier 2000
Code civil
article 1939 du Code civil
article 479 du Code de Commerce
article 34 de la loi n° 490 du 24 novembre 1948


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;2000-02-17;26779 ?

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