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11/03/1999 | MONACO | N°26660

Monaco | Tribunal de première instance, 11 mars 1999, F. c/ SAM Cosmetic Laboratories


Abstract

Exequatur

Décision française : convention franco-monégasque du 21 septembre 1949

- Atteinte à l'ordre public monégasque (art. 18-5°)

- Loi monégasque applicable et non point la loi française

Rejet de la demande

Résumé

Le litige entre un VRP (voyageur-représentant-placier) et la société monégasque qui l'emploie au sujet du contrat de travail les liant, partiellement exécuté en France, relève de la loi monégasque n° 762 du 26 mai 1964, modifiée le 5 juillet 1979 fixant le statut professionnel des voyageurs, représenta

nts ou placiers, laquelle revêt un caractère d'ordre public.

Il s'en suit que la décision française, ayant fa...

Abstract

Exequatur

Décision française : convention franco-monégasque du 21 septembre 1949

- Atteinte à l'ordre public monégasque (art. 18-5°)

- Loi monégasque applicable et non point la loi française

Rejet de la demande

Résumé

Le litige entre un VRP (voyageur-représentant-placier) et la société monégasque qui l'emploie au sujet du contrat de travail les liant, partiellement exécuté en France, relève de la loi monégasque n° 762 du 26 mai 1964, modifiée le 5 juillet 1979 fixant le statut professionnel des voyageurs, représentants ou placiers, laquelle revêt un caractère d'ordre public.

Il s'en suit que la décision française, ayant fait application en l'espèce de la loi française, passée en force de chose jugée, ne saurait recevoir l'exequatur à défaut d'être compatible avec l'ordre public monégasque au sens de l'article 18-5° de la convention franco-monégasque d'aide mutuelle judiciaire du 21 septembre 1949.

Elle porterait atteinte au principe de l'égalité devant la loi aussi bien vis-à-vis des employeurs de Monaco que des VRP qu'ils emploient ; une rupture de l'égalité serait en effet manifestement consacrée par l'admission en Principauté de la décision litigieuse, puisque la Société Cosmetic Laboratories aurait à subir des règles - notamment en matière de procédure de licenciement - dont d'autres entreprises monégasques pourraient s'affranchir tandis que M. F. bénéficierait d'une situation différente de celle à laquelle ses collègues de travail peuvent prétendre.

Motifs

Le Tribunal,

Considérant les faits suivants :

Employé en qualité de voyageur-représentant-placier par les sociétés anonymes monégasques dénommées Cosmetic Laboratories et Real Vernis à partir de 1970, M. F. a été licencié le 11 juillet 1991 ;

Au regard de son domicile en France, il a saisi le Conseil de Prud'hommes de Marmande (Lot-et-Garonne) et a obtenu de cette juridiction, selon le jugement contradictoire du 6 juillet 1992, la condamnation de la société Cosmetic Laboratories, dont le Conseil a dit qu'elle a procédé au licenciement de M. F. « en méconnaissance des dispositions prévues par le Code du travail », à lui payer, en sus des dépens, les sommes de :

* 47 774,31 francs à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 4 777,43 francs à titre de congés payés sur préavis,

* 165 000 francs au titre de l'indemnisation sur le fondement de l'article L. 122-14-4 du Code du travail,

* 461 221,22 francs au titre de l'indemnité de clientèle,

* 5 000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

la société Real Vernis ayant été mise hors de cause ;

Sur appel des sociétés Cosmetic Laboratories et Real Vernis, la Cour d'appel d'Agen, par arrêt du 29 juin 1993, a rejeté l'appel,

confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

et y ajoutant, condamné les sociétés anonymes monégasques Cosmetic Laboratories et Real Vernis à payer à M. F. la somme de 3 000 francs en application de l'article 700 précité, outre les dépens ;

Ces mêmes sociétés s'étant pourvues en cassation, la Chambre sociale de la Cour de cassation a rendu le 5 février 1997 un arrêt par lequel elle a rejeté le pourvoi, en condamnant les sociétés Cosmetic Laboratories et Real Vernis aux dépens ;

Par l'exploit susvisé du 9 octobre 1997, M. F., qui expose être créancier de la société Cosmetic Laboratories en vertu des décisions précitées, a fait assigner cette société en vue d'obtenir l'exequatur de l'arrêt de la Cour d'appel d'Agen du 29 juin 1993 et de l'arrêt de la Cour de cassation du 5 février 1997 sur le fondement des articles 473 et suivants du Code de procédure civile ;

Il poursuit en conséquence la condamnation de la défenderesse à lui payer les sommes ci-dessus mentionnées, outre des montants portés « pour mémoire », totalisant 686 772,96 francs, ainsi que 50 000 francs à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et injustifiée ;

Il a ultérieurement maintenu ces demandes sauf à solliciter le rejet des prétentions de son adversaire et à s'opposer à tout délai de paiement (conclusions des 22 avril et 14 octobre 1998) ;

La société Cosmetic Laboratories a conclu à titre principal à l'irrecevabilité de la demande ;

Subsidiairement, elle estime que l'exequatur ne peut être ordonné compte tenu des dispositions de l'article 473 alinéa 2 du Code de procédure civile, en l'état d'un conflit de loi touchant à la compétence des juridictions ; elle considère en outre que les décisions dont l'exequatur est requis sont contraires à l'ordre public monégasque en ce qu'elles sanctionnent un employeur « de droit monégasque » pour le non-respect de dispositions de droit français contraires à celles du droit monégasque en matière de licenciement ;

À titre plus subsidiaire, elle conclut au rejet de la demande en paiement de dommages-intérêts et sollicite des délais pour s'acquitter des sommes réclamées ;

Les thèses en présence peuvent être ainsi résumées, référence étant faite aux conclusions échangées pour plus ample relation des moyens et prétentions des parties :

M. F. affirme produire les pièces nécessaires et conteste devoir verser aux débats un certificat de non-recours à l'égard de l'arrêt de la Cour de cassation dont les décisions sont insusceptibles de recours ; il ajoute avoir fait revêtir les décisions dont l'exequatur est demandé d'une légalisation au demeurant non prévue par la convention franco-monégasque d'aide mutuelle judiciaire ;

Sur la compétence des juridictions françaises, il observe que la société Cosmetic Laboratories s'est abstenue de la décliner dans les trois instances où elle a comparu, que les juridictions françaises étaient bien compétentes dès lors que le contrat de travail s'exécutait au moins partiellement en territoire français et que, selon les termes de la Cour de cassation, les parties avaient entendu soumettre leurs relations à la loi française, en observant sur ce point que la société Cosmetic Laboratories admet, dans la présente instance, que les juridictions saisies en France ont fait une juste application de leur droit national ;

S'agissant de la contrariété alléguée à l'ordre public monégasque, M. F. considère que les principes français de droit social appliqués en la cause, qui ne comportent aucune différence fondamentale avec les règles monégasques, n'ont rien de contraire à l'ordre public de la Principauté ; il précise que les menues différences entre les deux législations ne permettent pas de soutenir que les ordres publics français et monégasque seraient antagonistes ; à cet égard, il prétend que les différences invoquées par son adversaire n'ont pas constitué l'objet du litige ayant opposé les parties et ne doivent être regardées que comme des modalités de la procédure de licenciement qui n'affectent pas le fond du droit ;

La société Cosmetic Laboratories, sur la base des pièces communiquées en cours d'instruction de la cause, laisse au Tribunal le soin d'apprécier si les articles 473 et suivants du Code de procédure civile ont bien été respectés ;

Par référence à l'article 473-2° du Code de procédure civile exigeant que la décision émane d'une juridiction compétente d'après la loi locale « sans qu'il y ait opposition avec la loi monégasque », la société Cosmetic Laboratories considère que cette condition n'est pas remplie puisqu'elle est une personne morale de droit monégasque, qu'elle y a son siège et son unique établissement, que le contrat de travail a été signé à Monaco, qu'il s'exécutait pour partie en Principauté et que la clause attributive de compétence contenue dans le contrat laissait le choix de la juridiction saisie à l'employeur ;

Elle en déduit que selon les règles monégasques, le Tribunal du travail de Monaco était compétent pour connaître du litige, en sorte qu'il existe une contradiction entre les règles de compétence française et monégasque, même si elle admet que le Code civil français permet à une partie de nationalité française d'attraire son adversaire devant une juridiction française ;

En ce qui concerne la question de l'ordre public, la société Cosmetic Laboratories affirme que les dispositions de droit du travail à Monaco et en France présentent des différences importantes ; elle critique la décision du Conseil de Prud'hommes de Marmande en ce qu'il a considéré que le droit français devait s'appliquer au litige du seul fait qu'il était compétent pour en connaître, alors que les parties ont entendu en réalité soumettre leurs relations à la loi monégasque ; il en résulte selon elle une contrariété évidente à l'ordre public de la Principauté, en observant notamment que l'employeur monégasque a été soumis à des règles inapplicables à Monaco (entretien préalable au licenciement, convocation à la Direction départementale de l'emploi) ;

La société Cosmetic Laboratories, qui constate que le juge français, tenu d'appliquer les dispositions d'ordre public du droit du travail français, a écarté en vertu de son ordre public l'application du droit monégasque, considère cette situation comme choquante dès lors que l'employeur monégasque n'était tenu de se conformer qu'aux règles locales ; elle en déduit que le juge monégasque, également tenu d'appliquer les règles monégasques d'ordre public en matière de relations de travail, doit faire prévaloir en la cause son ordre public national ;

Elle soutient en définitive qu'en retenant sa compétence alors que l'accord des parties et les règles de droit interne monégasques désignaient le Tribunal du travail, et en appliquant au litige le droit français qui n'avait pas vocation à le régir, les juridictions françaises ont violé les règles d'ordre public du droit du travail monégasque, en sorte que l'exequatur requis ne peut être accordé ;

En vertu de l'article 184-17° du Code de procédure civile, le Ministère public a pris des conclusions par lesquelles il relève « la situation d'espèce très particulière » ayant justifié, selon lui, la décision rendue ; il mentionne que l'ordre public revêt une connotation particulière en droit social : conçu comme un ordre public de protection du salarié et établi pour lui seul, il fixerait les règles minimales en deçà desquelles on ne peut déroger et encouragerait les dérogations favorables aux salariés en reconnaissant la primauté du contrat sur la loi ;

Ainsi, l'employeur ne pourrait revendiquer une protection résultant d'un ordre public non établi à son intention ;

En conséquence, le Ministère public conclut qu'il n'existe pas de cause objective s'opposant à l'exequatur requis ;

Les parties principales ont ultérieurement déposé des « notes » en réponse à ces conclusions, écrits dont la recevabilité n'a pas été contestée ; il convient de s'y reporter, sauf à relever :

* en ce qui concerne la société Cosmetic Laboratories, qu'elle estime que les débats sont liés sur le fondement de l'article 473 du Code de procédure civile, qu'elle critique la conception - réductrice selon elle - de l'ordre public résultant de la thèse du Ministère public, en observant que cette conception est un facteur d'insécurité juridique pour les employeurs monégasques dont les salariés pourraient relever de régimes différents, qu'elle rappelle les moyens auxquels les conclusions du Ministère public ne répondent pas ;

* en ce qui concerne M. F., qu'il considère que la note de son adversaire comporte des inexactitudes et contradictions, qu'il approuve la position du Ministère public en contestant le grief d'insécurité juridique allégué, le contrat de l'espèce étant soumis au droit français par ses modalités d'exécution ;

Sur quoi :

Attendu que la primauté sur les règles internes devant être reconnue à la convention franco-monégasque relative à l'aide mutuelle judiciaire du 21 septembre 1949 commande de faire application au présent litige de l'article 18 de cette convention, sans égard pour les articles 473 et suivants du Code de procédure civile sur lesquels les parties ont entendu à tort se fonder, la circonstance que la discussion judiciaire se soit instaurée sur ce fondement n'étant pas de nature à faire obstacle à l'application de la règle de droit pertinente ;

Attendu que la procédure d'exécution simplifiée, instaurée par cet article 18, des jugements exécutoires français à Monaco impose de vérifier si les conditions prescrites par le second alinéa dudit article sont réunies en la cause ;

Attendu qu'il est constant que les décisions, exécutoires en France, dont l'exequatur est requis, telles que versées aux débats, réunissent les conditions nécessaires à leur authenticité et sont passées en force de chose jugée, après que les parties aient été régulièrement citées, au sens des chiffres 1°, 3° et 4° de l'article 18 précité ;

Que seules demeurent litigieuses les conditions énoncées aux chiffres 2° et 5°, relatives à la compétence des juridictions appréciée selon la loi française et à l'absence de contrariété à l'ordre public ou aux principes de droit public de Monaco des dispositions dont l'exécution est poursuivie ;

Attendu, sur la compétence, que la décision du Conseil de Prud'hommes de Marmande - confirmée en toutes ses dispositions par l'arrêt définitif de la Cour d'appel d'Agen - retient que M. F. est domicilié et réside à ..., que sa profession de VRP induit un travail effectué en dehors de tout établissement et que c'est à juste titre qu'il a porté sa demande devant ce Conseil « compétent du fait du domicile de ce dernier » ;

Attendu que cette juridiction apparaît ainsi avoir implicitement mais nécessairement appliqué l'article R. 517-1 alinéa 2 du Code français du travail qui dispose :

« Si le travail est effectué en dehors de tout établissement..., la demande est portée devant le conseil de prud'hommes du domicile du salarié »,

tandis que le dernier alinéa de cet article édite que « toute clause qui directement ou indirectement déroge aux dispositions qui précèdent est réputée non écrite » ;

Attendu qu'il s'ensuit que d'après la loi française, les juridictions saisies en appel puis en cassation étaient bien compétentes pour connaître du litige soumis par F. au Conseil de Prud'hommes du ressort de son domicile ;

Qu'au demeurant, la société Cosmetic Laboratories, bien que sur le fondement distinct de l'article 14 du Code civil français instaurant un privilège de juridiction au profit d'un Français pour les obligations contractées envers lui par une personne étrangère en pays étranger, n'a pas sérieusement contesté et a même admis que les décisions rendues par la Cour d'appel d'Agen et la Cour de cassation émanent de juridictions compétentes ;

Attendu, s'agissant de la question de l'ordre public, qu'il est constant et non contesté que si la société Cosmetic Laboratories n'a pas décliné la compétence des juridictions françaises, elle a en revanche demandé l'application de la loi monégasque au litige ; que sur cette demande, le Conseil de Prud'hommes n'a pas autrement statué qu'en déduisant l'application de la loi française de sa compétence territoriale, qu'il venait de retenir en ces termes : « De ce fait (la compétence tirée du domicile de M. F.), c'est la loi française et non la loi monégasque qui sera appliquée » ; que la Cour d'appel a repris ces mêmes motifs et a confirmé le jugement du Conseil de Prud'hommes dans le dispositif de son arrêt ; que la Cour de cassation, répondant au second moyen selon lequel « le choix de la loi applicable et la désignation du tribunal compétent sont deux questions distinctes relevant de règles de solution de conflit différentes, de telle sorte que la loi applicable au fond du litige ne saurait se déduire de règles et de considérations propres à déterminer le tribunal compétent », a énoncé :

« ... la Cour d'appel ayant relevé que le travail s'exécutait sur le territoire français a fait ressortir que les parties avaient entendu soumettre leurs relations à la loi française » ;

Attendu, sur la loi applicable au litige ayant opposé les parties en France, que le tribunal constate que celles-ci sont régies par les dispositions de la loi n° 762 du 26 mai 1964 modifiée le 5 juillet 1979 fixant le statut professionnel des voyageurs, représentants ou placiers (VRP) ;

Attendu qu'il résulte en effet de ces dispositions que le législateur monégasque a manifestement entendu soumettre les VRP et leurs employeurs aux règles édictées par la loi monégasque même dans l'hypothèse - quasiment nécessaire, eu égard à l'exiguïté du territoire monégasque - où le travail s'exécute en dehors de la Principauté ;

Qu'ainsi, il est notamment prévu que les VRP sont liés à leurs employeurs par des engagements déterminant « la zone géographique dans laquelle ils doivent exercer leur activité » (article 1-4°-b) et que le délai-congé de VRP « employés hors de Monaco » est augmenté (article 2, 4e alinéa) ;

Attendu que le caractère d'ordre public de la loi n° 762 précitée n'apparaît pas contestable ; qu'il résulte d'abord de la matière (législation régissant les relations de travail, les conventions entre VRP et employeurs étant qualifiées par l'article 1er, nonobstant toutes stipulations contraires, de contrats de travail), mais encore des dispositions impératives de la loi, en particulier à l'article 5 (droit à commissions à titre de salaire « quelles que soient la cause et la date de la cessation des services de l'employé »), à l'article 6 dernier alinéa (droit, « en tout état de cause à une indemnité calculée selon des modalités particulières »), à l'article 7 (dispositions de la loi applicables de plein droit aux contrats et aux instances en cours, obligation de se conformer à la loi dans les deux mois de sa publication), à l'article 8 (compétence exclusive du Tribunal du travail), à l'article 9 (nullité de plein droit des conventions éludant les dispositions de la loi) et à l'article 11 (sanctions pénales) ;

Attendu qu'il résulte de ces circonstances que même à supposer que les parties aient entendu soumettre leurs rapports contractuels à d'autres règles que celles édictées par la loi monégasque incontestablement applicable en l'espèce - ce qui, au demeurant, n'est pas établi par les pièces du dossier, le seul fait tiré de l'exécution du travail en France étant insuffisant, au regard de la loi monégasque n° 762 qui envisage expressément cette circonstance, pour caractériser la volonté des parties de soumettre leurs relations à la loi française -, elles n'auraient pu convenir de telles règles sans heurter les prescriptions tout aussi impératives qu'exclusives de la loi n° 762 ; qu'il en résulte que seule la loi monégasque avait vocation à régir leurs relations ;

Attendu, dans ces conditions, qu'en ayant appliqué la loi française au litige opposant les parties, les décisions françaises - dont les dispositions ne sont pas détachables des motifs en vertu desquels cette application a été décidée - apparaissent contraires à l'ordre public de la Principauté, qui impose que le litige soit gouverné par la loi monégasque ;

Attendu qu'une autre contrariété à l'ordre public peut être relevée en la cause, tenant à l'insécurité juridique qui résulterait de l'application des lois différentes à un même employeur en fonction des circonstances ;

Qu'alors que l'un des objectifs d'une législation du travail consiste à fixer dans l'ordre interne des règles, en fonction desquelles une entreprise employant du personnel apprécie si elle entend s'y soumettre, la situation de l'espèce rend cette perspective inopérante ;

Qu'il ne peut être admis en effet qu'un employeur de Monaco régi par la loi n° 762 précitée, soit soumis à des règles différentes selon le domicile ou la nationalité de ses employés, dans la mesure où ces critères leur permettraient de saisir des juridictions étrangères pour leur faire appliquer d'autres règles que celles de la loi monégasque ;

Attendu, enfin, qu'apparaît également atteint le principe de droit public (au sens de l'article 18-5° de la convention) de l'égalité devant la loi, aussi bien vis-à-vis des employeurs de Monaco que des VRP qu'ils emploient ; qu'une rupture de l'égalité serait en effet manifestement consacrée par l'admission en Principauté des décisions litigieuses, puisque la société Cosmetic Laboratories aurait à subir des règles - notamment en matière de procédure de licenciement - dont d'autres entreprises monégasques pourraient s'affranchir tandis que M. F. bénéficierait d'une situation différente de celle à laquelle ses collègues de travail peuvent prétendre ;

Attendu qu'il s'ensuit que les dispositions des arrêts de la Cour d'appel et de la Cour de cassation, en ce qu'elles sont nécessairement soutenues par une motivation préalable ayant conduit à l'application de la loi française avec les conséquences ci-dessus analysées, ne peuvent recevoir l'exequatur à Monaco fautes d'être compatibles avec l'ordre public et les principes de droit public de la Principauté ;

Attendu, par suite, que la demande de dommages-intérêts formée par M. F. doit être rejetée ; que ce demandeur doit en définitive être débouté de l'ensemble de ses prétentions et tenu aux dépens de l'instance, par application de l'article 231 du Code de procédure civile ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Déclare la demande recevable ;

Déboute M. F. de l'ensemble de ses prétentions ;

Composition

M. Narmino, prés. ; Mlle Le Lay, prem. subst. proc. gén. ; Mes Karczag-Mencarelli et Pastor, av. déf. ; Michel, av.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26660
Date de la décision : 11/03/1999

Analyses

Exequatur ; Traités bilatéraux avec la France


Parties
Demandeurs : F.
Défendeurs : SAM Cosmetic Laboratories

Références :

article 184-17° du Code de procédure civile
article 473-2° du Code de procédure civile
article 473 alinéa 2 du Code de procédure civile
loi n° 762 du 26 mai 1964
article 231 du Code de procédure civile
Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1999-03-11;26660 ?

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