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28/01/1999 | MONACO | N°26646

Monaco | Tribunal de première instance, 28 janvier 1999, V., ès qualités, de la SAM Cedaroma c/ Société Marseillaise de Crédit


Abstract

Cessation de paiements

Liquidation de biens

- Dessaisissement des biens du liquidé

- Compensation en principe impossible

- Exception : interdépendance des dettes réciproques

Résumé

Le dessaisissement qui s'induit du jugement déclaratif de liquidation de biens a pour effet de fixer à sa date la consistance du patrimoine du débiteur saisi au profit de la masse, en sorte qu'aucune compensation ne peut plus opérer dans les rapports de ce dernier avec un tiers, sous peine de créer une rupture de l'égalité des créanciers.

Un tel principe se trouve cependant tempéré par la possibilité désormais reconnue par la jurisprudence à tou...

Abstract

Cessation de paiements

Liquidation de biens

- Dessaisissement des biens du liquidé

- Compensation en principe impossible

- Exception : interdépendance des dettes réciproques

Résumé

Le dessaisissement qui s'induit du jugement déclaratif de liquidation de biens a pour effet de fixer à sa date la consistance du patrimoine du débiteur saisi au profit de la masse, en sorte qu'aucune compensation ne peut plus opérer dans les rapports de ce dernier avec un tiers, sous peine de créer une rupture de l'égalité des créanciers.

Un tel principe se trouve cependant tempéré par la possibilité désormais reconnue par la jurisprudence à tout créancier d'un débiteur failli de procéder à une compensation, en cas d'interdépendance entre leurs dettes réciproques.

En l'occurrence, le fait que la Société Cedaroma soit titulaire d'un compte courant ouvert sur les livres de la Société Marseillaise de Crédit - sur lequel a été porté le crédit consenti par cette banque et qui a été débité du montant des échéances de remboursement - caractérise la volonté des parties d'intégrer les diverses opérations intervenues entre elles en un seul compte et démontre l'existence d'un lien de causalité entre leurs obligations réciproques.

L'affectation générale de l'ensemble des opérations à un tel compte courant révèle en effet l'existence d'une relation économique unique et globale, au regard de laquelle la compensation pratiquée « de facto » par la Société Marseillaise de Crédit apparaît régulière.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu que L. V., agissant en qualité de syndic de la liquidation des biens de la société anonyme monégasque Cedaroma, qui expose que la Société Marseillaise de Crédit a conservé un reliquat créditeur de 162 626,51 francs sur le compte courant de la société Cedaroma pour compenser cette somme avec sa propre créance (constituée par le solde impayé sur un prêt d'équipement consenti à cette débitrice faillie) a, suivant l'exploit susvisé, fait assigner la Société Marseillaise de Crédit à l'effet de voir :

* dire n'y avoir lieu à compensation entre les sommes détenues par la masse et la créance alléguée par la Société Marseillaise de Crédit qui doit être réglée dans le cadre de la liquidation ;

En conséquence,

* condamner la Société Marseillaise de Crédit à payer au requérant ès qualités la somme de 162 626,51 francs avec intérêts de droit à compter du 29 octobre 1996 et ce au besoin à titre de dommages-intérêts complémentaires ;

* condamner la Société Marseillaise de Crédit à payer au requérant ès qualités la somme de 50 000 francs à titre de dommages-intérêts ;

* condamner la banque requise à tous les dépens ;

Attendu que la Société Marseillaise de Crédit s'oppose pour sa part formellement à une telle demande en faisant référence à l'évolution de la jurisprudence française et à la possibilité de compenser désormais des créances réciproques antérieures au jugement d'ouverture de la procédure collective ; qu'invoquant par ailleurs le fait que le compte courant de la société Cedaroma se trouvait crédité lors du déblocage du prêt, tandis que les échéances dudit prêt étaient par la suite débitées sur ce compte, la Société Marseillaise de Crédit défenderesse estime caractérisée la connexité entre les deux contrats, condition nécessaire à la compensation ; qu'elle précise que si les obligations réciproques des parties étaient en l'occurrence nées de deux conventions distinctes, elles s'intégraient cependant dans le cadre de leurs relations d'affaires ;

Attendu que le syndic L. V. observe en réponse que les deux contrats liant les parties ne présentent aucun lien d'interdépendance et ne s'insèrent nullement dans le cadre d'une opération économique globale et indivisible, de sorte que l'exception de compensation ne saurait selon lui être accueillie, et la banque défenderesse doit être condamnée à lui restituer le montant du solde créditeur du compte courant ouvert en ses livres au nom de la société Cedaroma ;

SUR CE :

Attendu qu'il résulte des faits constants de la cause que la société CEDAROMA a suivant acte du 23 septembre 1988 ouvert un compte courant dans les livres de la Société Marseillaise de crédit ;

Que suivant contrat du 11 octobre 1989, un prêt d'équipement de 300 000 francs était consenti par la Société Marseillaise de Crédit à la société Cedaroma, le remboursement devant être effectué par prélèvement d'office sur le compte de l'emprunteur ;

Attendu que suivant jugement du 13 septembre 1991, le Tribunal de première instance constatait la cessation des paiements de la société anonyme monégasque dénommée Cedaroma et prononçait la liquidation des biens de cette société, tout en désignant L. V. en qualité de syndic ; qu'alors que la Société Marseillaise de Crédit produisait au passif de ladite liquidation de biens pour le montant des échéances de prêt impayées, elle informait par ailleurs le syndic suivant lettre du 16 octobre 1996 de ce que le solde du compte courant susvisé s'avérait créditeur à concurrence d'une somme de 162 626,51 francs ;

Attendu qu'en dépit de la lettre de mise en demeure alors adressée le 29 octobre 1996 à cette banque par le syndic, le montant de cette somme n'était pas restitué à la société CEDAROMA, prise en la personne de L. V., la Société Marseillaise de Crédit entendant opérer une compensation entre sa propre créance dans la masse et celle de la société débitrice ;

Attendu que le dessaisissement qui s'induit du jugement déclaratif de liquidation de biens a pour effet de fixer à sa date la consistance du patrimoine du débiteur saisi au profit de la masse, en sorte qu'aucune compensation ne peut plus opérer dans les rapports de ce dernier avec un tiers, sous peine de créer une rupture de l'égalité des créanciers ;

Attendu qu'un tel principe se trouve cependant tempéré par la possibilité désormais reconnue par la jurisprudence à tout créancier d'un débiteur failli de procéder à une compensation, en cas d'interdépendance entre leurs dettes réciproques ;

Attendu qu'en l'occurrence, le fait que la société Cedaroma soit titulaire d'un compte courant ouvert sur les livres de la Société Marseillaise de Crédit - sur lequel a été porté le crédit consenti par la Société Marseillaise de Crédit et qui a été débité du montant des échéances de remboursement - caractérise la volonté des parties d'intégrer les diverses opérations intervenues entre elles en un seul compte et démontre l'existence d'un lien de causalité entre leurs obligations réciproques ;

Attendu que l'affectation générale de l'ensemble des opérations à un tel compte courant révèle en effet l'existence d'une relation économique unique et globale, au regard de laquelle la compensation pratiquée « de facto » par la Société Marseillaise de Crédit apparaît régulière ;

Attendu que le syndic L. V. doit en conséquence être débouté de l'ensemble de ses prétentions à l'encontre de la Société Marseillaise de Crédit et condamné aux dépens de l'instance ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

statuant contradictoirement,

Faisant droit à l'exception de compensation soulevée par la Société Marseillaise de Crédit,

Déboute L. V., syndic de la société anonyme monégasque Cedaroma, de l'ensemble de ses demandes de condamnation ;

Composition

M. Narmino, prés. ; Mlle Le Lay, prem. subst. proc. gén. ; Mes Licari et Brugnetti, av. déf. ; Valvo, av. bar. de Nice ; Rey, av.

Note

M. L. V. agissant en qualité de syndic de la liquidation des biens de la SAM Cedaroma a assigné la Société Marseillaise de Crédit aux fins de dire n'y avoir lieu à compensation entre les sommes détenues par la masse et la créance alléguée par cette banque laquelle créance doit être réglée dans le cadre de la liquidation en conséquence, de condamner la Société Marseillaise de Crédit à lui payer ès qualités la somme de 162 626,51 F avec intérêts de droit à compter du 29 octobre 1996 et ce au besoin à titre de dommages-intérêts complémentaires.

Il exposait dans son assignation que la Société Marseillaise de Crédit avait conservé un reliquat créditeur de 162 626,51 F sur le compte courant de la société Cedaroma (représentant le remboursement de certaines échéances) pour compenser cette somme avec sa propre créance (constituée par le solde impayé sur un prêt d'équipement consenti à cette débitrice en faillite).

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26646
Date de la décision : 28/01/1999

Analyses

Droit des biens - Biens et patrimoine ; Crédits


Parties
Demandeurs : V., ès qualités, de la SAM Cedaroma
Défendeurs : Société Marseillaise de Crédit

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1999-01-28;26646 ?

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