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06/04/1995 | MONACO | N°26370

Monaco | Tribunal de première instance, 6 avril 1995, Société Somerco c/ Société SGTM


Abstract

Compétence civile et commerciale

Compétence territoriale - Clause attributive de compétence à des juridictions françaises - Litige concernant l'exécution d'un contrat à Monaco - Incompétence de la juridiction monégasque - Convention faisant loi des parties - Renonciation unilatérale d'une partie (non)

Résumé

Le litige, relatif à l'exécution à Monaco du contrat de prestations de services liant deux parties, ne saurait relever de la juridiction monégasque, dès lors que celles-ci, comme il leur en était loisible, ont dérogé expressément à

l'application des articles 2 et 3 alinéa 2 du Code de procédure civile, en attribuant compét...

Abstract

Compétence civile et commerciale

Compétence territoriale - Clause attributive de compétence à des juridictions françaises - Litige concernant l'exécution d'un contrat à Monaco - Incompétence de la juridiction monégasque - Convention faisant loi des parties - Renonciation unilatérale d'une partie (non)

Résumé

Le litige, relatif à l'exécution à Monaco du contrat de prestations de services liant deux parties, ne saurait relever de la juridiction monégasque, dès lors que celles-ci, comme il leur en était loisible, ont dérogé expressément à l'application des articles 2 et 3 alinéa 2 du Code de procédure civile, en attribuant compétence aux juridictions de Nice, une telle clause ne faisant pas échec à une règle d'ordre public conférant la compétence territoriale exclusive aux juridictions monégasques.

Cette convention tenant lieu de loi, ainsi qu'en dispose l'article 989 du Code civil, la demanderesse est mal fondée à prétendre qu'elle conserverait la faculté de s'en dégager unilatéralement par sa seule volonté en attrayant la défenderesse devant le Tribunal de Monaco, la compétence de celui-ci supposant que les parties aient d'un commun accord renoncé à se prévaloir de la clause attributive de juridiction.

Motifs

Le Tribunal,

Considérant les faits suivants :

Selon acte sous seing privé en date à Nice du 19 juin 1989 - à enregistrer - l'ensemble des entreprises attributaires des travaux de tous les corps d'état relatifs à la construction de l'immeuble Prince de Galles, parmi lesquelles la société anonyme monégasque dénommée « Société Générale des Travaux Monégasques », en abrégé « SGTM », ont confié à la société à responsabilité limitée de droit français dénommée « Société Méridionale de coordination », en abrégé « Somerco », la mission d'exécuter, en vue de la coordination et du pilotage des travaux, l'élaboration du calendrier de réalisation des ouvrages par chacune des entreprises ainsi que la coordination de l'action entre les entreprises d'une part, et entre les entreprises, le maître de l'ouvrage et le maître d'œuvre, d'autre part ;

Cette convention précisait sous l'article III de ses conditions particulières que l'intervention de la société « SOMERCO » sur le chantier fixée au 9 mai 1990 s'achèverait à la réception de l'immeuble, le délai prévisionnel des travaux étant de 23 mois ;

Par ailleurs, aux termes de l'article IV de ces mêmes conditions relatif au calcul des honoraires de la société « Somerco », il était stipulé qu'au cas où le délai d'exécution des travaux excéderait 23 mois, ladite société percevrait de ses cocontractants, à partir du 26e mois, des honoraires mensuels calculés à l'aide de la formule suivante :

Honoraires mensuels INSEE x (I/lo) - HT

où lo est l'indice INSEE mensuel du coût de la construction pour le 2e trimestre 1990, I est l'indice INSEE du coût de la construction pour le trimestre du mois de facturation ;

Enfin sous la rubrique « contestations et litiges » constituant l'article 3-6 de ces conditions générales, cette même convention comportait une clause prévoyant que toutes contestations relatives à son interprétation et à son exécution quelles qu'en soient la forme, l'objet ou la date seraient soumise à la juridiction des Tribunaux de Nice ;

Selon exploit en date du 27 septembre 1994, la société « Somerco » a fait assigner la société « SGTM » en paiement de la somme principale de 183 571,88 francs, à titre de complément d'honoraires pour dépassement des délais d'exécution des travaux du chantier de l'immeuble Prince de Galles, outre celle de 2 500 francs à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

La société « SGTM » a conclu, « in limine litis » et avant toute défense au fond, à l'incompétence du Tribunal de Monaco au profit du Tribunal de commerce de Nice, au motif que la convention la liant à la société « Somerco » comportait une clause attributive de juridiction aux Tribunaux de Nice, à laquelle cette dernière société avait adhéré, en parfaite connaissance de cause, lors de sa signature ;

La société « Somerco », réitérant sa demande initiale, a conclu au rejet de l'exception d'incompétence soulevée ; elle fait valoir, d'une part, que le contrat litigieux avait été exécuté dans la Principauté de Monaco et que la société défenderesse était de nationalité monégasque ; d'autre part, que la clause attributive de juridiction dont s'agit avait été stipulée dans son intérêt exclusif ; elle en déduit que le Tribunal de Monaco serait seul territorialement compétent pour connaître du présent litige ;

Sur ce,

Attendu que, de l'accord des parties le Tribunal ne statuera par le présent jugement que sur l'exception d'incompétence soulevée par la défenderesse ;

Qu'il convient cependant, de ce chef, d'examiner le fond du litige, à seule fin de vérifier les conditions de la compétence du Tribunal ;

Attendu, à cet égard, qu'il résulte des pièces versées aux débats, et notamment de la convention définissant l'intervention de la société « Somerco », en vue de la coordination des entreprises travaillant sur le chantier de l'immeuble Prince de Galles, que celle-ci était en droit de percevoir des honoraires supplémentaires, en cas de dépassement du délai contractuel d'exécution des travaux par ces mêmes entreprises, dont la société « SGTM » faisait partie en sa qualité d'entreprise chargée du gros œuvre ;

Qu'ainsi l'action de la société « Somerco », tendant au paiement d'honoraires qu'elle prétend lui être dus par la société défenderesse, en application de l'article III des conditions particulières de la convention dont s'agit, a bien trait à une difficulté d'exécution de cette même convention ;

Attendu qu'en l'état de la clause attributive de compétence insérée dans cette convention et stipulant que toute contestation relative à l'exécution de celle-ci est de la compétence exclusive des Tribunaux de Nice, la société « Somerco » - qui avait accepté une telle clause en signant le contrat où elle figurait - se devait de soumettre le litige l'opposant à la société « SGTM », né de l'inexécution fautive par celle-ci de ses obligations contractuelles à son égard, à un tribunal étranger ;

Qu'il y a lieu de préciser ici, que ladite clause est dépourvue de toute ambiguïté, et désigne de manière suffisamment précise la juridiction devant être saisie du litige opposant les parties à ladite convention ;

Qu'en effet, dès lors que l'exécution des prestations objet de la convention liant les parties relevait de leur activité commerciale, la clause dont s'agit imposait à la société demanderesse d'actionner la société défenderesse devant le Tribunal de commerce de Nice, en application des dispositions de l'article 631 du Code de commerce français ;

Attendu qu'il en résulte que les articles 2 et 3 alinéa 2 du Code de procédure civile, invoqués par la demanderesse, ne sauraient recevoir application en la cause, les parties, comme il leur en était loisible, y ayant dérogé expressément, aux termes de la convention intervenue entre elles, laquelle leur tient lieu de loi, ainsi qu'en dispose l'article 989 du Code civil ;

Qu'ainsi liée par la stipulation attribuant compétence aux juridictions de Nice qu'elle avait fait inclure dans la convention définissant son intervention sur le chantier de l'immeuble Prince de Galles et que sa cocontractante, la société « SGTM » avait acceptée, la société « Somerco » est mal fondée à prétendre qu'elle conserverait la faculté de s'en dégager unilatéralement par sa seule volonté en attrayant la société défenderesse devant le Tribunal de Monaco, la compétence de cette juridiction supposant que les parties auraient d'un commun accord, renoncé à se prévaloir de la clause attributive de juridiction ;

Attendu qu'il y a lieu, en conséquence, pour le Tribunal, de se déclarer incompétent quant aux demandes formées par la société « Somerco » à l'encontre de la société « SGTM », ce, en application de la clause attributive de juridiction invoquée par cette dernière société ;

Qu'il convient d'observer, ici, que la clause dont s'agit apparaît valable au regard de la loi monégasque, dès lors qu'elle ne fait pas échec à une règle d'ordre public conférant la compétence territoriale exclusive aux juridictions de la Principauté ;

Attendu qu'enfin, les dépens suivront la succombance de la demanderesse ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Se déclare incompétent ;

Composition

MM. Landwerlin prés. ; Serdet prem. subst. proc. gén. ; - Mes Brugnetti, Pastor, Sbarrato av. déf. ; Giraudon-Nicolai av. bar. de Nice.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26370
Date de la décision : 06/04/1995

Analyses

Procédure civile ; Compétence


Parties
Demandeurs : Société Somerco
Défendeurs : Société SGTM

Références :

articles 2 et 3 alinéa 2 du Code de procédure civile
article 989 du Code civil


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1995-04-06;26370 ?

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