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23/03/1995 | MONACO | N°26360

Monaco | Tribunal de première instance, 23 mars 1995, G. c/ G. et Compagnie d'Assurance Général Accident


Abstract

Accident du travail

Notion d'accident - Accident de trajet - Notion de résidence secondaire - Interruption motivée par nécessité de la vie courante

Résumé

Il résulte de l'article 2 alinéa 2 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 que l'accident, survenu à un salarié qui se rend de son lieu de travail à sa résidence et inversement, est considéré comme un accident de travail ; que, toutefois, la présomption d'après laquelle l'accident de trajet présente un lien avec le travail se trouve écartée s'il est établi que la victime a été détournÃ

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Abstract

Accident du travail

Notion d'accident - Accident de trajet - Notion de résidence secondaire - Interruption motivée par nécessité de la vie courante

Résumé

Il résulte de l'article 2 alinéa 2 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 que l'accident, survenu à un salarié qui se rend de son lieu de travail à sa résidence et inversement, est considéré comme un accident de travail ; que, toutefois, la présomption d'après laquelle l'accident de trajet présente un lien avec le travail se trouve écartée s'il est établi que la victime a été détournée de son parcours normal ou qu'elle l'a interrompu pour un motif étranger à son emploi, la charge de la preuve contraire incombant à la victime qui revendique le bénéfice de la législation sur les accidents du travail.

Il est de principe que sont couvertes par les dispositions légales les extrémités du trajet, constituées, pour l'essentiel, du lieu de travail et de la résidence du salarié.

Entre dans la notion de résidence, outre la résidence principale, la résidence secondaire dès lors que celle-ci présente un caractère de stabilité, qu'elle implique - comme c'est le cas en l'espèce - une installation assez complète, même si elle est périodique (durant la saison estivale).

Quant à l'itinéraire protégé, il est patent que le parcours ne doit pas être interrompu ou détourné pour un motif dicté par l'intérêt personnel et étranger aux nécessités essentielles de la vie courante ou indépendant de l'emploi.

Tel n'est point le cas lorsque l'accident est survenu non pas au cours de l'interruption du trajet pour effectuer un achat de médicaments - ce qui est conforme aux nécessités essentielles de la vie courante - mais après la fin de cette interruption, alors que la victime avait repris vers sa résidence secondaire un trajet momentanément détourné durant environ 45 minutes.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu que G. C. a déclaré avoir été victime d'un accident du travail le 1er juillet 1993 au service d'A. G., dont l'assureur-loi est la compagnie Général Accident, alors qu'elle se trouvait, après avoir terminé son travail, sur son cyclomoteur pour rejoindre sa résidence secondaire ;

Attendu que l'assureur-loi ayant refusé de reconnaître le caractère d'accident de trajet relevant de l'application de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 à l'épisode survenu à C. G. le 1er juillet 1993, l'affaire était alors renvoyée devant le Tribunal de première instance selon Ordonnance de non-conciliation du 25 mars 1994 ;

Attendu que, selon exploit du 17 mai 1994, C. G. a fait assigner A. G. et la compagnie Général Accident aux fins qu'il soit dit et jugé que son accident survenu le 1er juillet 1993 entre son lieu de travail et sa résidence secondaire constitue bien un accident de trajet, et que l'assureur-loi doit prendre en charge les conséquences pécuniaires de cet accident du travail ;

Qu'en réponse, l'employeur et l'assureur-loi concluent au débouté de C. G. de ses demandes aux motifs que la localisation de l'accident n'est pas située sur le trajet normal qu'aurait dû suivre la victime pour se rendre de son lieu de travail à son domicile, et que le temps écoulé entre la fin de son activité professionnelle et le moment de l'accident est trop important pour pouvoir être justifié par l'arrêt dans une pharmacie ainsi qu'il est prétendu ;

Sur ce,

Attendu qu'il résulte de l'article 2, alinéa 2 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 que l'accident survenu à un salarié qui se rend de son lieu de travail à sa résidence et inversement est considéré comme un accident du travail ; que toutefois la présomption d'après laquelle l'accident de trajet présente un lien avec le travail se trouve écartée s'il est établi que la victime a été détournée de son parcours normal ou qu'elle l'a interrompu pour un motif étranger à son emploi, la charge de la preuve contraire incombant à la victime qui revendique le bénéfice de la législation sur les accidents du travail ;

Attendu dans le domaine des faits, qu'il résulte du dossier pénal ayant donné lieu au jugement correctionnel du 21 décembre 1993, opposant C. G. au responsable de son accident du 1er juillet 1993, et notamment des déclarations de la victime consignées au plumitif d'audience - à laquelle étaient présents l'employeur et l'assureur-loi - que celle-ci, après avoir quitté son lieu de travail aux environs de 19 heures 15, a été renversée par un véhicule peu avant 20 heures 15 (heures des constatations effectuées par la Sûreté publique), alors qu'elle se trouvait sur la voie aval de la place des Moulins, au guidon de son cyclomoteur pour rejoindre sa résidence secondaire ;

Qu'entre la fin de son travail et le moment de l'accident, C. G. a déclaré s'être rendue à la pharmacie dénommée « C. » et avoir conversé un moment avec une amie ;

Attendu que la compagnie Général Accident et A. G. contestent la qualité d'accident du travail à l'épisode du 1er juillet 1993, aux motifs, d'une part, que la victime ne se trouvait pas sur le trajet de son domicile habituel, d'autre part que le détour effectué pour se rendre à la pharmacie ne permettrait pas à C. G. de bénéficier de la protection de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 ;

Attendu en premier lieu qu'il est de principe que sont couvertes par les dispositions légales les extrémités du trajet, constituées, pour l'essentiel, du lieu de travail et de la résidence du salarié ;

Attendu qu'entre dans la notion de résidence, outre la résidence principale, la résidence secondaire dès lors que celle-ci présente un caractère de stabilité ; que cette résidence implique une installation assez complète même si elle est périodique ; que tel est le cas de l'espèce, au regard notamment des impositions foncières dont les avis ont été versés aux débats, et payées annuellement par l'époux de la demanderesse, pour une villa située à Roquebrune-Cap-Martin, dont l'occupation habituelle et non contestée du couple G. durant la saison estivale lui confère le caractère de stabilité ainsi exigé ;

Attendu, en second lieu, quant à l'itinéraire protégé, qu'il est patent que le parcours ne doit pas être interrompu ou détourné pour un motif dicté par l'intérêt personnel et étranger aux nécessités essentielles de la vie courante ou indépendant de l'emploi ;

Attendu que l'accident dont a été victime C. G. est survenu après une interruption pour l'achat de médicaments auprès de la pharmacie C. (dont la facture est versée à la procédure), et alors que la demanderesse se trouvait à nouveau sur l'itinéraire normal ;

Attendu que ce même accident est ainsi survenu non pas au cours de l'interruption relevée de trajet, laquelle au demeurant s'est avérée en l'espèce conforme aux nécessités essentielles de la vie courante, mais après la fin de cette interruption, à un moment où C. G. avait repris, vers son domicile (alors sa résidence secondaire) un trajet momentanément détourné durant environ 45 minutes ;

Qu'à cet égard, le temps écoulé entre la fermeture de la bijouterie effectuée par l'accidentée, son déplacement à pied jusqu'à la pharmacie située à environ 10 minutes de son lieu de travail, son retour pour venir chercher son cyclomoteur et le moment de l'accident n'apparaît pas excessif eu égard à ces éléments de fait ;

Attendu en définitive que l'ensemble de ces circonstances permet au Tribunal de faire application de la présomption édictée par l'article 2 de la loi précitée en sorte que l'épisode survenu le 1er juillet 1993 constitue bien un accident de trajet relevant de la loi sur les accidents du travail, ses conséquences pécuniaires devant être dès lors prises en charge par l'assureur-loi, la compagnie Général Accident ;

Et attendu que les dépens suivent la succombance ; qu'imputables à l'adversaire d'un assisté judiciaire, leur recouvrement sera régi par l'article 50 du Code de procédure civile ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Dit que l'épisode accidentel dont a été victime C. G. le 1er juillet 1993 constitue un accident de trajet relevant de la loi n° 636 du 11 janvier 1958 sur les accidents du travail, dont les conséquences pécuniaires doivent être prises en charge par la compagnie Général Accident, substituée à A. G. ;

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, prem. subst. Proc. gén. ; Mme Brugnetti et Lorenzi, av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26360
Date de la décision : 23/03/1995

Analyses

Social - Général ; Sécurité au travail


Parties
Demandeurs : G.
Défendeurs : G. et Compagnie d'Assurance Général Accident

Références :

loi n° 636 du 11 janvier 1958
article 2 alinéa 2 de la loi n° 636 du 11 janvier 1958
article 50 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1995-03-23;26360 ?

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