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27/05/1993 | MONACO | N°26240

Monaco | Tribunal de première instance, 27 mai 1993, C. c/ SAM Sotheby's


Abstract

Vente

Vente publique - Erreur sur la qualité substantielle de la chose vendue - Copie d'un objet vendu comme original - Nullité du contrat et des conditions générales de vente - Limitation de la responsabilité du vendeur (non)

Vice du consentement

Erreur sur la qualité substantielle de la chose vendue - Nullité du contrat de vente

Résumé

L'adjudicataire qui, lors d'une vente aux enchères publiques, a acquis une arquebuse, présentée dans le catalogue de vente comme ayant pu appartenir au Roi Louis XIII alors que celle-ci s'est avér

ée être une copie du XIXe siècle de l'arquebuse originale figurant dans l'inventaire général des...

Abstract

Vente

Vente publique - Erreur sur la qualité substantielle de la chose vendue - Copie d'un objet vendu comme original - Nullité du contrat et des conditions générales de vente - Limitation de la responsabilité du vendeur (non)

Vice du consentement

Erreur sur la qualité substantielle de la chose vendue - Nullité du contrat de vente

Résumé

L'adjudicataire qui, lors d'une vente aux enchères publiques, a acquis une arquebuse, présentée dans le catalogue de vente comme ayant pu appartenir au Roi Louis XIII alors que celle-ci s'est avérée être une copie du XIXe siècle de l'arquebuse originale figurant dans l'inventaire général des meubles de la couronne dressé le 31 décembre 1729, se trouve fondé à agir, non point en résolution du contrat de vente mais en nullité de celui-ci ainsi que des conditions générales de vente, compte tenu de l'erreur sur la qualité substantielle de la chose vendue non contestée, ayant déterminé l'achat de celle-ci.

Le vendeur ne saurait se prévaloir de dispositions des conditions générales relatives à cette vente limitant la responsabilité à la restitution du prix payé hors frais et droits d'enregistrement, ces dispositions étant inapplicables en l'espèce.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu que, suivant l'exploit susvisé, P.-L. C., qui expose s'être porté adjudicataire lors de la vente organisée par la société anonyme monégasque dénommée Sotheby's le 7 décembre 1987 d'une arquebuse décrite comme ayant appartenu au Roi Louis XIII, pour la somme de 500 000 F, outre commission de 11 %, soit au total 555 000 F, laquelle arquebuse s'est avérée être une copie du XIXe de l'arquebuse originale, ainsi qu'il a été amené à le découvrir près de cinq années plus tard, a assigné la société Sotheby's en remboursement de cette somme de 555 000 F, outre intérêts au taux légal durant une période de cinq années, soit 263 625 F et 25 000 F à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

Attendu qu'il expose que si la société défenderesse n'a pas contesté l'inauthenticité de l'arme vendue comme ne correspondant pas à la description qui en a été faite dans le catalogue de la vente litigieuse, elle a proposé le remboursement d'une seule somme de 530 000 F en arguant des dispositions de l'article 10 D des conditions générales de vente limitant sa responsabilité au prix payé pour l'objet, déduction faite des droits d'enregistrement ;

Qu'en effet, la société Sotheby's réplique par conclusions du 16 décembre 1992 que s'il est exact qu'elle proposa à C. la résolution de la vente litigieuse aux conditions d'application de l'article 10 des conditions générales de vente et mit à sa disposition une somme de 530 000 F à compter du 9 juin 1992, elle ne saurait être tenue à rembourser une somme supérieure, dès lors que l'article 10 D des conditions générales susvisées, portées à la connaissance de tous les adjudicataires, dispose que : « la responsabilité de l'huissier et de Sotheby's vis-à-vis de l'adjudicataire sera limitée au prix total payé par ce dernier pour le lot en question moins les droits d'enregistrement, quels que soient les pertes et dommages subis ou les dépenses faites par l'adjudicataire » ;

Que, dès lors, elle considère entièrement satisfactoire l'offre telle que ci-dessus rappelée et sollicite le rejet des prétentions de P.-L. C. ;

Sur quoi,

Attendu qu'il est constant dans le domaine des faits que P.-L. C. s'est porté acquéreur le 7 décembre 1987 d'une arquebuse ancienne décrite par la société Sotheby's comme ayant pu appartenir au Roi Louis XIII, pour la somme de 500 000 F et qu'il a, en outre, acquitté une commission de 55 000 F sur cette vente ;

Attendu qu'il n'est également pas contesté par la société défenderesse que l'arme litigieuse s'est avérée être une copie du XIXe siècle de l'arquebuse originale figurant dans l'inventaire général des meubles de la couronne dressé le 31 décembre 1729, alors que le catalogue de la vente Sotheby's du 7 décembre 1987 la présentait comme étant cet objet original ;

Que, dès lors, compte tenu de cette erreur sur la qualité substantielle de la chose vendue, reconnue par la venderesse, celle-ci a proposé la restitution du prix payé, hors frais et droits d'enregistrement ; que cependant, la limitation de responsabilité de celle-ci prévue par l'article 10 D des conditions générales de vente et alléguée par la défenderesse est inapplicable en l'espèce ;

Qu'en effet, cette erreur sur la qualité substantielle de la chose vendue portant sur un élément ayant déterminé l'achat de celle-ci par C. en 1987 - à savoir sa provenance du mobilier de la couronne et son époque de fabrication - entraîne non point la résolution de la vente litigieuse, ainsi que l'a sollicitée la société Sotheby's, mais sa nullité ainsi que celle de toutes les conditions relatives à cette vente ;

Que, dès lors, la société Sotheby's doit être tenue de rembourser l'intégralité des sommes avancées par P.-L. C. lors de la vente litigieuse s'élevant à 555 000 F ; qu'en outre, le dommage tant moral que matériel subi par le demandeur, qui a cru faire l'acquisition d'une arme à valeur historique et a été privé durant cinq années de la jouissance de la somme de 555 000 F, est indéniable et justifie sa demande en dommages et intérêts, le tribunal ayant les éléments, compte tenu des circonstances de la cause, pour en fixer le quantum à 250 000 F ;

Attendu que la société Sotheby's qui succombe doit être condamnée aux dépens ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal

Statuant contradictoirement,

Prononce la nullité de la vente intervenue entre les parties le 7 décembre 1987 ;

Condamne la société anonyme monégasque Sotheby's à payer à P.-L. C. la somme de 555 000 F, montant des causes susénoncées, et celle de 250 000 F à titre de dommages et intérêts ;

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet prem. subst. proc. gén. ; Mes Brugnetti et Escaut, av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26240
Date de la décision : 27/05/1993

Analyses

Vente


Parties
Demandeurs : C.
Défendeurs : SAM Sotheby's

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1993-05-27;26240 ?

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