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25/03/1993 | MONACO | N°26234

Monaco | Tribunal de première instance, 25 mars 1993, Communauté immobilière de « Fontvieille Village » c/ Société Industrielle de Fermeture et Construction Métallique, Cie d'assurances Le Nord Via Assurances


Abstract

Contrat de louage d'ouvrage

Contrat d'Entreprise : vices de construction affectant de menus ouvrages-notions - Action en garantie décennale des articles 1630 et 2090 du Code civil - Action résultant des vices cachés, exercée à bref délai - Défaut de conformité : inexécution de l'obligation de délivrance - Action fondée sur l'article 1002 du Code civil - Prescription trentenaire

Résumé

S'agissant d'un contrat de louage d'ouvrage, au sens de l'article 1617-3° du Code civil liant une copropriété à une entreprise chargée de fournir et d'instal

ler les portes basculantes donnant accès aux différents parkings d'un ensemble immobilier...

Abstract

Contrat de louage d'ouvrage

Contrat d'Entreprise : vices de construction affectant de menus ouvrages-notions - Action en garantie décennale des articles 1630 et 2090 du Code civil - Action résultant des vices cachés, exercée à bref délai - Défaut de conformité : inexécution de l'obligation de délivrance - Action fondée sur l'article 1002 du Code civil - Prescription trentenaire

Résumé

S'agissant d'un contrat de louage d'ouvrage, au sens de l'article 1617-3° du Code civil liant une copropriété à une entreprise chargée de fournir et d'installer les portes basculantes donnant accès aux différents parkings d'un ensemble immobilier, les défectuosités multiples constatées dans le fonctionnement, constitutives de vices cachés, invisibles pour un profane, tel le maître de l'ouvrage, lesquelles affectent des éléments d'équipement devant être qualifiés de menus ouvrages, les portes d'accès aux parkings n'étant pas, en effet intégrées de façon indissociable dans les corps des bâtiments qu'elles desservent, dès lors qu'elles peuvent être déposées et remplacées sans porter atteinte à leur ossature, comme c'est le cas, ne sauraient engager la responsabilité de l'entreprise sur le fondement de la garantie décennale des gros ouvrages tirée des articles 1630 et 2090 du Code civil.

Cependant cette responsabilité subsiste, quant aux menus ouvrages dont s'agit, après leur réception, pour les vices cachés dont ils étaient atteints, à la condition toutefois que l'action résultant desdits vices soit intentée dans un bref délai, après que le maître de l'ouvrage en ait eu la révélation ce qui n'est point le cas en l'espèce, la copropriété ayant intenté son action au fond plus de deux ans après, ce qui la rend irrecevable, la citation en référé n'ayant point de caractère interruptif.

Par contre, dès lors qu'il a été constaté par l'expert que les portes d'accès aux parkings n'étaient pas conformes aux documents contractuels et qu'elles ne correspondaient aucunement aux caractéristiques particulières de ce type de portes, telles que prévues aux plans et devis annexés au marché, ces défauts manifestes de conformité qui n'étaient pas apparents, pour un non spécialiste, sont de nature à constituer pour l'entreprise, l'inexécution de son obligation de délivrance, en sorte que la responsabilité contractuelle de celle-ci s'avère engagée sur le terrain du droit commun de l'article 1002 du Code civil ; aussi l'action en réparation exercée sur le fondement de ce texte apparaît actuellement recevable, une telle action n'étant en effet soumise qu'à la prescription de droit commun prévue par l'article 2087 du Code civil.

Motifs

Le Tribunal

Considérant les faits suivants :

La Communauté Immobilière de Fontvieille Village désirant procéder au remplacement des huit portes donnant accès aux parkings souterrains de l'ensemble immobilier dénommé Fontvieille Village, 1re et 2e tranches, selon marchés successifs en date du mois de juin 1986 et du 20 juillet 1987, faisant respectivement suite à deux devis descriptifs et estimatifs des 24 avril 1986 et 22 mai 1987, a confié à la société anonyme de droit français dénommée « Société industrielle de fermeture et de construction métallique », en abrégé « SIF », la fourniture et l'installation de huit portes basculantes automatiques, à commande électronique ;

Le marché de juin 1986 concernait la livraison et la pose de deux portes, type Silfluide, à contrepoids, moyennant le prix global de 69 500 F, toutes taxes comprises, tandis que le marché du 20 juillet 1987 était relatif à la livraison et à la pose de six portes, type Silversif, à vérin hydraulique, moyennant le prix de 240 580,10 F, toutes taxes comprises ;

Par ordonnances de référé des 18 juillet et 21 novembre 1989, une expertise a été prescrite pour rechercher l'existence, les causes et les remèdes du fonctionnement défectueux des portes installées par la société SIF allégué par la Communauté immobilière de Fontvieille Village ;

Aux termes desdites ordonnances, l'expert commis avait reçu, en outre, mission d'assurer le contrôle de bonne fin des travaux entrepris par la société SIF, conformément à sa lettre du 7 mars 1989, pour le cas où ceux-ci auraient reçu l'agrément des deux parties, ce qu'il lui appartiendrait de relever ;

Aux termes de son rapport déposé le 20 décembre 1990 au Greffe Général, l'expert Jean-Claude Margaria a notamment conclu :

* que les deux portes ayant fait l'objet du marché de juin 1986 apparaissent conformes à la commande qui en a été faite, en ce qu'elles comportent une compensation par contrepoids mécanique et une centrale hydraulique indépendante,

* que par ailleurs, ces deux portes ont fonctionné normalement depuis leur installation, tout en présentant cependant une insuffisance de protection du système sécuritaire (barrage photo-électrique à réflecteur) ainsi qu'une usure anormale de leur centrale hydraulique,

* qu'en revanche les six portes ayant fait l'objet du marché du 20 juillet 1987 ne sont pas conformes à celles qui devaient être livrées ; qu'en effet, il était prévu au devis faisant partie de ce marché, la fourniture de portes de type « Silversif », c'est-à-dire comportant une centrale hydraulique compacte et une triangulation utilisant un seul vérin, correspondant au brevet d'invention déposé par S. alors, que les portes qui ont été installées étaient à centrale hydraulique séparée et à triangulation utilisant plusieurs vérins,

* que par ailleurs, ces six portes présentaient toutes des anomalies de fonctionnement multiples ayant notamment consisté en :

* tablier de porte de travers,

* rupture de certaines pièces mécaniques,

* barrage de sécurité insuffisant,

* fonctionnement cyllique incohérent,

* que ce fonctionnement défectueux résulte de la présence du double vérin en prise sur chaque bras de levier situés à droite et à gauche du tablier de chacune de ces portes, lequel provoque un arc-boutement sur certaines pièces mécaniques dont il entraîne la détérioration,

* qu'en outre, le nombre de vérins utilisés dans le cycle de fonctionnement de ces portes est tel, qu'il s'ensuit une instabilité de la chaîne cinématique mettant en œuvre leur ouverture et leur fermeture,

* que les travaux nécessaires qui ont dû être réalisés en cours d'expertise, pour assurer le bon fonctionnement des huit portes installées par la société SIF ont consisté :

en ce qui concerne les portes objet du marché de juin 1986 :

1° - à remplacer les centrales hydrauliques de chaque porte,

2° - à remplacer chaque barrage photo-électrique à réflecteur par catadioptre existant par un barrage photo-électrique constitué de trois faisceaux à émetteurs/récepteurs actifs et répartis selon un plan incliné permettant la détection des véhicules passants de forme variée,

3° - à remplacer l'armoire automatique électronique nécessaire pour le bon fonctionnement des barrages photo-électriques de sécurité (temps de commutation de l'ordre de 0,2 s maximum),

en ce qui concerne les portes objet du marché du 20 juillet 1987 :

1° - à remplacer l'ensemble de ces six portes,

2° - à mettre en œuvre deux barrages photo-électriques complémentaires en plus du barrage existant positionné sur le montant vertical de l'ossature de fixation métallique de la porte, ces barrages photo-électriques se composant de cellule à émetteur/récepteur infra-rouge,

* que le coût total des travaux de réfection exécutés par la société SIF s'est élevé à la somme de 210 268 F dont la communauté immobilière de Fontvieille Village a fait l'avance, en les réglant à la société SIF ;

La Communauté Immobilière de Fontvieille Village, se référant aux conclusions du rapport de l'expert Margaria dont elle a sollicité l'homologation, a, suivant exploit en date du 28 mai 1991, fait assigner la Société Industrielle de Fermeture et de Construction Métallique et la Compagnie Le Nord Via Assurances en paiement de la somme de 210 268 F, montant des travaux de remise en état des portes installées par ladite société, outre celle de 100 000 F, à titre de dommages-intérêts, en réparation du préjudice qui lui a été causé ;

La Compagnie Le Nord Via Assurances n'ayant pas comparu, le Tribunal constatant son défaut, a, par jugement du 12 juillet 1991, ordonné sa réassignation à laquelle il a été procédé suivant exploit du 26 juillet 1991 ;

La société SIF et la Compagnie Le Nord Via Assurances ont conclu à l'irrecevabilité de la demande formée par la Communauté Immobilière de Fontvieille Village au motif qu'elle serait prescrite ;

Elles font valoir à ce sujet, tout d'abord que la garantie contractuelle stipulée, d'une durée d'un an dans le marché conclu en juin 1986, et d'une durée de deux ans dans le marché signé le 20 juillet 1987 était expirée à la date de l'assignation sur le fond du 28 mai 1991, étant observé que l'assignation en référé n'avait pas utilement interrompu ce délai ;

Elles soulignent, d'autre part, que les portes installées ne sont que des éléments d'équipement dissociables du gros œuvre, en sorte que l'action de la copropriété de Fontvieille Village ne peut être fondée sur la responsabilité décennale des constructeurs ;

Elles ont conclu, quant au fond, que la demande de la Communauté Immobilière de Fontvieille Village doit être rejetée, dès lors que l'expert a noté dans son rapport que les deux portes, objet du marché de juin 1986, fonctionnaient normalement, et a, par ailleurs, relevé quant aux six portes objet du marché du 20 juillet 1987, que celles-ci correspondaient aux normes en vigueur à l'époque où elles ont été installées ;

Elles ajoutent, que si les six portes livrées, ne sont pas celles qui étaient prévues dans ce dernier marché, aucun reproche ne saurait lui être fait à ce sujet, dès lors qu'elle se réservait expressément dans ses devis, d'apporter toutes modifications techniques à son installation ;

Elles font enfin observer, que l'expert, ainsi qu'il l'a souligné dans son rapport, a présenté une solution technique plus évoluée que les normes en la matière pour satisfaire pleinement l'aptitude à la fonction de ces portes automatiques, que de la sorte, les travaux de remplacement des six portes du second marché, et l'amélioration des deux portes du premier marché qui ont été préconisés par l'expert constituent un enrichissement pour la copropriété qui bénéficie désormais d'une installation d'une technique plus récente que celle d'origine et doit donc en supporter seule la charge ;

La Compagnie Le Nord Via Assurances ajoute, pour sa part, que pour le cas où le Tribunal devrait retenir une quelconque responsabilité de la société SIF, elle ne saurait être tenue de garantir son assurée que dans les limites de la police souscrite par celle-ci, et sous déduction de la franchise ;

La Communauté Immobilière de Fontvieille Village, réitérant ses demandes initiales, a conclu au rejet des prétentions des défenderesses en faisant successivement valoir, pour l'essentiel :

* quant à la prescription, que celle-ci ne saurait jouer, en l'espèce, du seul fait que les portes litigieuses ne sauraient, en aucun cas, être assimilées à des éléments d'équipement dissociables, s'agissant d'immeubles par destination, ainsi qu'en disposent les articles 419 et 420 du Code civil ;

* que par ailleurs, en tout état de cause, le moyen tiré de la prescription ne saurait être utilement invoqué par les défenderesses, dès lors que la société SIF a expressément renoncé à s'en prévaloir, ce qui résulte des termes de la lettre qu'elle a adressée le 7 mars 1989 au syndic de la copropriété de Fontvieille Village, où elle écrivait notamment : « ... Nous prenons donc l'engagement de procéder au remplacement des deux portes ci-dessus mentionnées, au plus tard dans les 15 jours à dater de la présente, et de remettre en état définitif de service les quatre autres portes » ;

* quant au fond, qu'il ressort du rapport circonstancié de l'expert Margaria que les six portes installées par la société SIF en exécution du marché du 20 juillet 1987 étaient atteintes de vices cachés entachant leur fonctionnement normal et les rendant inaptes à leur destination d'une part, et d'autre part ne correspondaient pas à celles qui étaient prévues à ce marché, auquel elles n'étaient donc pas conformes ;

* qu'ainsi pour ce double motif, la Communauté Immobilière est fondée à obtenir paiement de la société SIF du montant des travaux nécessités par ces désordres et non conformités, soit la somme de 210 268 F ;

La société SIF réitérant ses précédentes écritures judiciaires, a formé une demande reconventionnelle à l'encontre de la Communauté Immobilière de Fontvieille Village en paiement d'une somme de 63 678,71 F correspondant à un solde de factures de travaux ;

Sur ce,

Attendu que la Commmunauté Immobilière de Fontvieille Village s'est abstenue de préciser le fondement juridique de sa demande à l'encontre des défenderesses ; qu'il appartient en conséquence au Tribunal, eu égard aux éléments de la cause, de restituer aux faits qui lui sont soumis, leur exacte qualification juridique, de manière à déterminer tant la nature des conventions liant les parties que celle des responsabilités découlant de leur inexécution et susceptibles d'être encourues par la société industrielle de fermeture et de construction métallique ;

Attendu, tout d'abord, qu'il résulte des pièces produites, que les conventions successivement conclues par les parties relatives à la fourniture et à l'installation des portes donnant accès aux différents parkings de l'ensemble immobilier dénommé « Fontvieille Village », constituent des contrats de louage d'ouvrage, au sens de l'article 1617-3° du Code civil ;

Qu'en effet, la société SIF pour satisfaire aux commandes de la Communauté Immobilière de Fontvieille Village a fabriqué et livré, sous forme d'assemblage, des portes basculantes automatiques avec leurs armatures et leurs différents composants mécaniques, électriques et électroniques ayant des dimensions et des caractéristiques particulières ;

Qu'elle a, ce faisant, effectué un travail spécifique adapté aux instructions précises et déterminées à l'avance par le maître de l'ouvrage, pour répondre aux besoins particuliers exprimés par celui-ci pour chacun des accès aux parkings de l'ensemble immobilier concerné, ce qui rendait par ailleurs impossible de substituer au produit commandé un autre équivalent ;

Attendu par ailleurs, qu'il est constant, qu'en l'absence de procès-verbal de réception dressé entre les parties, la prise de possession des portes, après leur installation dans les bâtiments qui a été faite, sans réserves, courant novembre 1987, par la Communauté Immobilière de Fontvieille Village, dès lors qu'elle en a payé intégralement le prix, manifestant ainsi sa volonté non équivoque de les accepter, équivaut à leur réception tacite, à compter de la date susvisée ; que cette réception marque l'achèvement de la période contractuelle et le point de départ des délais de garantie propres à la matière ;

Attendu qu'il résulte, tout d'abord, des constatations de l'expert Margaria que les six portes basculantes faisant l'objet du marché du 20 juillet 1987, lequel apparaît seul litigieux, ont présenté des défectuosités multiples dans leur fonctionnement, s'étant notamment manifestées par « la rupture de certaines pièces mécaniques, un barrage de sécurité inefficient, un fonctionnement cyclique incohérent, la mise en travers des tabliers, des arrêts intempestifs, etc... » ;

Que ces défectuosités sont constitutives de vices cachés de construction, dès lors qu'elles n'étaient pas visibles pour un profane, tel le maître de l'ouvrage, et ne se sont révélées à lui, qu'à l'usage et postérieurement à l'installation des portes dont s'agit ;

Attendu, à cet égard, que de tels vices affectent des éléments d'équipement devant être qualifiés de menus ouvrages, les portes d'accès aux parkings n'étant pas, en effet, intégrées de façon indissociable dans les corps des bâtiments qu'elles desservent, dès lors qu'elles peuvent être déposées et remplacées sans porter atteinte à leur ossature, ce qui est le cas, en l'espèce ;

Qu'il s'ensuit que la responsabilité de la société SIF ne saurait être engagée sur le fondement de la garantie décennale des gros ouvrages tirée des articles 1630 et 2090 du Code civil ; que cependant cette responsabilité subsiste, quant aux menus ouvrages dont s'agit, après leur réception, pour les vices cachés dont ils étaient atteints, à la condition toutefois que l'action résultant desdits vices soit intentée dans un bref délai, après que le maître de l'ouvrage en a eu la révélation ;

Attendu, qu'à cet égard, la Communauté Immobilière de Fontvieille Village a eu une connaissance certaine de la réalité des défauts de fonctionnement des portes d'accès aux parkings de l'ensemble immobilier, dès le 30 janvier 1989, date du procès-verbal de constat dressé à sa requête par Me Escaut-Marquet dans lequel celle-ci a déclaré que la Communauté Immobilière de Fontvieille Village lui avait exposé avoir fait procéder au remplacement des portes basculantes de tous les accès aux parkings de l'ensemble immobilier par la société SIF et que la copropriété avait le plus grand intérêt à faire constater, notamment :

« que depuis cette installation, ces portes fonctionnent de façon défectueuse et que la société SIF n'a pas réussi à les régler ;

qu'en outre, un grand nombre d'anomalies sont apparues notamment des pertes d'huiles sur les vérins, les tableaux électriques non conformes aux normes, les cellules photo-électriques fonctionnent de façon défectueuse, les sécurités pneumatiques ne fonctionnent pas et les portes n'ont pas un aspect neuf » ;

Que, par ailleurs, elle a confirmé sa connaissance parfaite de ces vices, par son assignation en référé aux fins d'expertise, en date du 8 juin 1989, dans laquelle elle déclarait notamment que « dès les premiers jours de fonctionnement ces portes s'avéraient de très mauvaise qualité et inadaptées à un fonctionnement normal » ;

Qu'il s'ensuit, en l'absence du caractère interruptif de ce bref délai par la citation en référé susvisée, que l'action présentement exercée par la Communauté Immobilière de Fontvieille Village, en ce qu'elle pourrait être fondée sur la garantie des vices cachés, n'ayant elle-même été exercée devant le Tribunal, que par exploit d'assignation du 21 mai 1991, doit être déclarée irrecevable, de ce chef, la demande en paiement des travaux de remplacement des portes dont s'agit, s'avérant tardive, comme n'ayant pas été intentée dans le bref délai de la découverte des vices ;

Attendu, cependant, que l'expert a, d'autre part, relevé dans son rapport que les portes d'accès aux parkings n'étaient pas conformes aux documents contractuels, dès lors qu'elles ne correspondaient aucunement aux caractéristiques particulières des portes de type Silversif, telles que prévues aux plans et devis annexés au marché ;

Qu'en effet, les portes installées par la société SIF comportaient notamment une centrale hydraulique séparée, à compensation et triangulation utilisant deux vérins, « alors que ce type de porte à double vérin présentait des inconvénients en raison du fait que, d'une part, ces deux vérins provoquent à certains moments, un arc-boutement sur certaines pièces mécaniques provoquant leur détérioration et que, d'autre part, ils entraînent une instabilité de la chaîne cinématique mettant en œuvre l'ouverture et la fermeture de ces portes » ;

Attendu que ces défauts manifestes de conformité, qui n'étaient pas apparents, pour un non spécialiste, sont de nature à constituer pour la société SIF l'inexécution de son obligation de délivrance, en sorte que la responsabilité contractuelle de cette société s'avère engagée sur le terrain du droit commun de l'article 1002 du Code civil.

Attendu que, dès lors, l'action présentement exercée par la Communauté Immobilière de Fontvieille Village, en ce qu'elle peut être analysée comme exercée sur le fondement de ce texte, apparaît actuellement recevable, une telle action n'étant en effet soumise qu'à la prescription de droit commun prévue par l'article 2082 du Code civil ;

Attendu qu'il s'ensuit, quant au fond, que la société SIF qui ne saurait se soustraire à son obligation de livrer des portes conformes aux caractéristiques contractuellement prévues, ainsi d'ailleurs qu'elle s'y était expressément engagée dans sa lettre du 7 mars 1989 adressée au syndic de la copropriété, doit être en conséquence déclarée responsable des conséquences dommageables de son manquement à l'obligation de délivrance d'un produit conforme à son marché ;

Attendu qu'il y a dès lors lieu de condamner in solidum la société SIF et son assureur la Compagnie Le Nord Via Assurances au paiement de la somme de 210 268 F, correspondant au montant des factures justificatives acquittées par la Communauté Immobilière de Fontvieille Village et visées par l'expert judiciaire, conformément à sa mission ;

Que cette indemnisation qui correspond à la réparation du préjudice subi par le maître de l'ouvrage, étranger à sa réalisation, ne saurait, comme l'ont prétendu les défenderesses, être supportée, fut-ce en partie, par la demanderesse au prétexte d'un enrichissement sans cause, dès lors qu'elle n'aura pour effet que d'assurer la stricte conformité des prestations de la société SIF à ses obligations contractuelles envers la Communauté Immobilière de Fontvieille Village ;

Attendu, par ailleurs, que la persistance prolongée des désordres ayant affecté le fonctionnement des portes d'accès aux parkings, parties communes et la gêne qui en est résultée sont à l'origine d'un trouble de jouissance collectif dont l'indemnisation revenant au syndicat de la copropriété, chargé de la sauvegarde de l'ensemble immobilier, doit être fixée à la somme de 20 000 F, eu égard aux éléments d'appréciation dont le Tribunal dispose ;

Attendu, par ailleurs, que la société SIF ayant succombé dans l'ensemble de ses prétentions, doit être déboutée de sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 63 678,71 F, à titre de solde de travaux, dont elle ne produit en outre, aucune justification ;

Attendu que les condamnations présentement prononcées in solidum à l'encontre de la société SIF et de la Compagnie d'Assurances Le Nord Via Assurances seront limités à l'égard de cette dernière, au montant de l'indemnité due en vertu du contrat d'assurance, déduction faite de la franchise contractuelle ;

Attendu qu'enfin la société SIF et la Compagnie Le Nord Via Assurances doivent être condamnées solidairement aux dépens de la présente instance qui comprendront les frais de l'expertise, en application de l'article 235 alinéa 2 du Code de procédure civile ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Déclare la société anonyme de droit français dénommée « Société industrielle de fermeture et de construction métallique », en abrégé « SIF », responsable des défauts de conformité affectant les portes basculantes automatiques installées dans l'ensemble immobilier dénommé Fontvieille Village 1re et 2e tranches ;

Condamne in solidum la Société industrielle de fermeture et de construction métallique et la Compagnie Le Nord Via Assurances, cette dernière dans la limite du montant de l'indemnité due en vertu du contrat d'assurance, déduction faite de la franchise contractuelle, à payer à la Communauté Immobilière de Fontvieille Village la somme de Deux cent dix mille deux cent soixante huit francs (210 268 F), montant des causes sus-énoncées, outre celle de vingt mille francs (20 000 F), à titre de dommages-intérêts, pour troubles de jouissance ;

Déboute la société industrielle de fermeture et de construction métallique de sa demande reconventionnelle ;

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, prem. subst. proc. gén. ; Mes Karczag-Mencarelli et Sbarrato, av. déf. ; Gaultier, Assus-Juttner et Desprests, av. barr. de Nice.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26234
Date de la décision : 25/03/1993

Analyses

Contrat de louage


Parties
Demandeurs : Communauté immobilière de « Fontvieille Village »
Défendeurs : Société Industrielle de Fermeture et Construction Métallique, Cie d'assurances Le Nord Via Assurances

Références :

articles 419 et 420 du Code civil
articles 1630 et 2090 du Code civil
article 235 alinéa 2 du Code de procédure civile
article 2082 du Code civil
article 2087 du Code civil
article 1617-3° du Code civil
article 1002 du Code civil


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1993-03-25;26234 ?

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