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20/02/1992 | MONACO | N°26127

Monaco | Tribunal de première instance, 20 février 1992, SAM Sélectal c/ SARL AMS et M.


Abstract

Compétence civile et commerciale

Clause attributive de compétence - Exception d'incompétence - Juridiction étrangère compétente - Défendeur fictif : article 2, alinéa 2, du Code de procédure civile inapplicable

Résumé

La clause attribuant compétence au Tribunal de commerce de Marseille en cas de contestation entre les parties, insérée dans des documents contractuels les liant, invoquée par l'un des deux co-défendeurs domicilié à l'étranger, ne saurait être tenue en échec par le jeu des dispositions de l'article 2 alinéa 2 du Code de pr

océdure civile dès lors qu'il s'avère que la demande formée contre l'autre co-défendeur domic...

Abstract

Compétence civile et commerciale

Clause attributive de compétence - Exception d'incompétence - Juridiction étrangère compétente - Défendeur fictif : article 2, alinéa 2, du Code de procédure civile inapplicable

Résumé

La clause attribuant compétence au Tribunal de commerce de Marseille en cas de contestation entre les parties, insérée dans des documents contractuels les liant, invoquée par l'un des deux co-défendeurs domicilié à l'étranger, ne saurait être tenue en échec par le jeu des dispositions de l'article 2 alinéa 2 du Code de procédure civile dès lors qu'il s'avère que la demande formée contre l'autre co-défendeur domicilié à Monaco, lequel n'a aucun intérêt au litige, n'a pas un fondement sérieux et présente un caractère fictif.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu que, par l'exploit susvisé, la société anonyme monégasque dénommée « Sélectal » qui expose avoir fait appel aux services de la société à responsabilité limitée de droit français dénommée AMS Selection, et de R. M., exerçant le commerce en Principauté, pour le recrutement et la formation du personnel d'un certain nombre de secteurs qu'elle se proposait de créer, en vue d'assurer la vente de ses produits sur le territoire français, a fait assigner la société AMS Selection ainsi que R. M., d'une part en responsabilité de leurs manquements à leurs obligations contractuelles à son égard, d'autre part en paiement des sommes suivantes :

* 124 580 F à titre de restitution des honoraires versés à celles-ci ;

* 350 000 F à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice commercial qui lui a été causé ;

* 100 000 F en remboursement des frais irrépétibles qu'elle a dû exposer ;

Attendu que la société AMS Selection a conclu, au principal, à l'incompétence du Tribunal de Monaco, au motif que ses ordres de mission, ses factures et son papier à lettre commercial comportent une clause attributive de compétence au profit du Tribunal de commerce de Marseille et que la société Sélectal a, par ses relations avec elle, nécessairement accepté une telle clause ;

Qu'au fond, et à titre subsidiaire, elle a sollicité le rejet des demandes formées par la société Selectal et, reconventionnellement, sa condamnation au paiement de la somme de 39 600 F à titre de solde d'honoraires, outre celles de 80 000 F à titre de dommages-intérêts et de 50 000 F, au titre des frais irrépétibles, en faisant valoir qu'elle n'a commis aucune faute dans l'exécution de sa mission, laquelle ne comportait qu'une simple obligation de moyens ;

Attendu que la société Selectal, réitérant sa demande initiale, a rétorqué, quant à l'incompétence soulevée, qu'elle avait la faculté, en sa qualité de demanderesse, dès lors qu'elle se trouvait en présence de plusieurs parties défenderesses, de saisir à son choix la juridiction du lieu où demeurait l'une d'elles, en l'espèce, le Tribunal de Monaco, dès lors que R. M. demeurait en Principauté ; qu'en tout état de cause, la clause attributive de compétence dont il est fait état, ne saurait la priver de l'option que lui offrait l'article 2 alinéa 2 du Code de procédure civile ;

Attendu que R. M., après avoir fait observer qu'elle n'était intervenue dans les relations entre les sociétés « Selectal » et « AMS Selection », qu'en qualité de prestataire de services de cette dernière société, qui l'avait chargée d'effectuer sa facturation, a également soulevé l'incompétence du Tribunal, au motif que les contrats avaient été exécutés en France par une société française, tout en se réservant de conclure sur le fond, au cas où le tribunal croirait devoir retenir sa compétence ;

Attendu qu'à la clôture des débats, les parties ont convenu de limiter la saisine du tribunal à la discussion de l'exception d'incompétence ;

SUR CE,

Attendu que le tribunal ne statuera par le présent jugement que sur l'exception d'incompétence soulevée par les défenderesses ; qu'il lui appartient de ce chef, d'examiner le fond, à seule fin de vérifier les conditions de la compétence ;

Attendu à cet égard, qu'il résulte des pièces versées aux débats qu'un marché de prestations de services est intervenu entre les sociétés Selectal et AMS Selection, aux termes duquel la société AMS Selection s'engageait à assurer pour le compte de la société Selectal, le recrutement et la formation en France d'un personnel devant ultérieurement être mis à la disposition de cette dernière société, dans différents secteurs géographiques du territoire français, où la société Selectal désirait s'implanter pour y étendre son activité commerciale ;

Que, pour l'exécution de ce marché, la société Selectal a notamment délivré à la société AMS Selection, qui les a acceptés, trois ordres de mission, en date des 5 décembre 1987 et 27 avril 1988, l'invitant à recruter et à assurer la formation de « 4 moniteurs nationaux de vente » et de « 10 voyageurs représentants de commerce » ; qu'il est constant que ces documents contractuels comportaient, à leur verso, sous la rubrique « conditions générales », une clause ainsi conçue ; « toutes contestations seront, de convention expresse entre les parties, de la compétence exclusive du Tribunal de commerce de Marseille » ;

Qu'il n'est pas davantage contesté par la société demanderesse qu'elle a eu connaissance des conditions générales de ces ordres de mission, dès lors qu'elle s'y est expressément référée dans les diverses correspondances échangées avec la société AMS Selection, au cours de leurs relations contractuelles, sans jamais avoir émis une quelconque protestation concernant la clause d'attribution de compétence litigieuse, laquelle était dépourvue de toute ambiguïté ;

Qu'ainsi l'existence de cette clause imposait à la société Selectal de soumettre le litige l'opposant à la société AMS Selection, né de l'inexécution fautive par celle-ci de ses obligations contractuelles à son égard, au Tribunal de commerce de Marseille ;

Attendu cependant, qu'ainsi que cela résulte des pièces produites, la clause attributive de juridiction susvisée ne pouvait produire effet à l'égard de R. M., qui n'était pas partie aux conventions formées entre les sociétés Selectal et AMS Selection, dans lesquelles ladite clause était insérée et à laquelle elle n'a donc pu adhérer ;

Qu'il convient ici d'observer que, non seulement R. M. n'a jamais accepté aucun ordre de mission de la société Selectal, dont l'unique destinataire était la société AMS Selectal, mais que son rôle s'est borné à la seule facturation des prestations effectuées par cette dernière société ;

Attendu que si la société Selectal a cru devoir attraire devant le tribunal, tant la société AMS Selection que R. M., en se prévalant des dispositions de l'article 2, alinéa 2, du Code de procédure civile qui permet au tribunal de retenir sa compétence, en cas de pluralité des défendeurs, lorsque l'un d'eux seulement se trouve comme en l'espèce domicilié à Monaco, il demeure que la clause attributive de juridiction susvisée ferait échec à cette compétence, dès lors que la partie domiciliée à Monaco ne serait pas personnellement et directement intéressée à l'objet du litige dont le tribunal se trouve saisi, en sorte que l'autre partie défenderesse à ce litige serait fondée à solliciter l'application d'une telle clause pour se soumettre à la juridiction de ses juges naturels, sous peine d'aboutir, sans cela, à une intervention indue de l'ordre des juridictions, fictivement fondée sur un lien juridique d'instance artificiellement créé ;

Attendu à cet égard que R. M., dont le domicile monégasque a été invoqué par la demanderesse comme conférant compétence au tribunal pour connaître des demandes résultant de l'exploit d'assignation susvisé, se trouve, aux termes dudit exploit appelée à répondre, avec la société AMS Selection, de fautes qu'elle aurait elle-même commises dans l'exécution des ordres de mission donnés à cette dernière par la société Selectal ;

Attendu, toutefois, que, dès lors que les fautes invoquées sont d'ordre contractuel, et que R. M. qui n'a jamais été partie à ces conventions liant la société Selectal à la société AMS Selection, y est restée totalement étrangère, ainsi que l'établissent les pièces de la procédure, il s'avère que la demande formée à son encontre n'apparaît pas sérieuse, du fait que cette partie n'est nullement intéressée au litige, sa présence aux débats devant la faire considérer comme un défendeur fictif ;

Attendu qu'il s'ensuit que les dispositions de l'article 2, alinéa 2 du Code de procédure civile, seules invoquées en la cause, ne sauraient recevoir application ; qu'il convient en conséquence pour le tribunal de se déclarer incompétent pour statuer sur les demandes formées par la société Selectal à l'encontre des défenderesses, en application de la clause attributive de juridiction invoquée par la société AMS Selection qui apparaît valable au regard de la loi monégasque s'agissant, en l'espèce, d'un litige international relatif à une convention dont l'objet porte sur l'exécution en territoire français par une société française de prestations de service commandées par une société monégasque, alors par ailleurs que cette clause ne fait pas échec à une compétence territoriale exclusive de la juridiction monégasque ;

Attendu enfin que les dépens suivront la succombance de la société demanderesse ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

statuant contradictoirement,

Se déclare incompétent ;

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, prem. subst. proc. gén. ; MMes Blot et Lorenzi, av. déf. ; Garotti, av. barr. de N ice.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26127
Date de la décision : 20/02/1992

Analyses

Justice (organisation institutionnelle) ; Procédure civile


Parties
Demandeurs : SAM Sélectal
Défendeurs : SARL AMS et M.

Références :

article 2, alinéa 2, du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1992-02-20;26127 ?

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