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23/01/1992 | MONACO | N°26118

Monaco | Tribunal de première instance, 23 janvier 1992, B. C. c/ M.


Abstract

Baux d'habitation

Droit de reprise - Local à reprendre devant correspondre aux besoins normaux du propriétaire - Nécessité de justifications - Local occupé par la propriétaire ne répondant plus à ses besoins - Circonstance indifférente

Résumé

Si la demanderesse apparaît remplir la plupart des conditions légales afférentes à la procédure de notification du congé aux fins d'exercer un droit de reprise pour occupation personnelle, elle n'établit pas cependant, ni même n'offre de prouver que l'occupation du logement à reprendre soit de natur

e à répondre à ses besoins normaux, se bornant à indiquer à cet égard que les locaux actuel...

Abstract

Baux d'habitation

Droit de reprise - Local à reprendre devant correspondre aux besoins normaux du propriétaire - Nécessité de justifications - Local occupé par la propriétaire ne répondant plus à ses besoins - Circonstance indifférente

Résumé

Si la demanderesse apparaît remplir la plupart des conditions légales afférentes à la procédure de notification du congé aux fins d'exercer un droit de reprise pour occupation personnelle, elle n'établit pas cependant, ni même n'offre de prouver que l'occupation du logement à reprendre soit de nature à répondre à ses besoins normaux, se bornant à indiquer à cet égard que les locaux actuellement occupés par elle-même et ses deux filles âgées de 22 et 25 ans ne correspondent plus à ses besoins normaux, et ce, compte tenu notamment du prix de location pratiqué.

Cette simple affirmation - inhérente à l'appartement délaissé et non au local objet de la reprise - ne répond pas au voeu du législateur qui a entendu instituer par les dispositions de l'article 28 alinéa 3 une formalité substantielle prescrite à peine de nullité ; en effet le non-respect des prescriptions légales qui s'imposent au propriétaire voulant exercer le droit de reprise empêche les défendeurs de connaître la situation de fait dans laquelle se trouve ses adversaires et les prive de faire valoir utilement leurs moyens de défense en discutant les conditions de la reprise.

Il est en l'espèce constant que la demanderesse qui n'invoque dans le congé notifié à son locataire que le caractère inadapté de l'appartement dont elle est elle-même locataire, n'a de la sorte nullement justifié que l'appartement qu'elle entend reprendre répond pour elle-même à des besoins normaux au jour de la notification dudit congé, aucune précision n'étant à cet égard apportée sur le nombre d'occupants bénéficiaires ni sur des locaux objets de la reprise. Cette mesure et cette irrégularité entraînent la nullité de la procédure.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu que, suivant exploit en date du 18 juillet 1990, B. B. C. a fait assigner C. et S. M., qui occupent un appartement dont elle est propriétaire à Monaco, soumis aux dispositions de l'ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959, afin que soit validé le congé qu'elle leur a notifié le 24 avril 1990 dans le cadre de l'exercice du droit de reprise pour occupation personnelle et que soit ordonnée l'expulsion des époux M., avec le concours de la force publique et séquestration des meubles et effets pour sûreté des réparations locatives ; qu'elle demande en outre la condamnation des époux M. à lui payer une indemnité d'occupation de 50 F par jour à compter du 1er mai 1991 et jusqu'à leur départ, outre une astreinte provisoire de 50 F par jour à compter du 1er mai 1991 pendant un délai de deux mois ; qu'elle sollicite enfin l'exécution provisoire du présent jugement ;

Attendu que C. et S. M. exposent pour leur part que la demande formulée par B. B. C. présente un caractère prématuré, dès lors qu'étant formalisée par un exploit introductif d'instance du 18 juillet 1990, elle se fonde sur une échéance du terme située postérieurement, soit au 1er mai 1991, et ce, alors que les obligations des parties continuaient à produire effet ; qu'ils font également valoir que le congé n'a pas été signifié à leur personne et qu'il est de ce fait entaché de nullité, alors enfin que la dame B. C., ne justifie pas selon eux de la nécessité d'occuper le local qu'ils occupent et donc de la réalité de ses besoins normaux, et qu'elle ne peut en tout état de cause exercer un droit de reprise à leur encontre, dès lors qu'ils sont des étrangers résidant à Monaco depuis plus de dix ans ainsi que le dispose l'article 30 de la loi n° 669, faisant échec au droit de reprise ;

Que les défendeurs s'estiment dès lors fondés en leur argumentation et entendent voir débouter B. B. C. des fins de sa demande ;

Attendu que B. B. C. répliquant à de tels moyens de défense rappelle que l'action en validité de congé peut être engagée avant l'expiration du délai de préavis, seule l'expulsion ne pouvant être ordonnée avant cette date ; qu'elle fait également valoir que la délivrance à personne du congé n'est pas prévue à peine de nullité, tandis qu'elle justifierait de ce que les locaux actuellement occupés par elle-même et ses enfants ne correspondraient plus à ses besoins normaux, compte tenu notamment du prix de location ; que la demanderesse invoque enfin le régime de protection institué par l'article 30 de l'ordonnance-loi n° 669 invoqué par les époux M., dont le principe se trouve cependant atténué lorsque la bénéficiaire de la reprise, bien que de nationalité étrangère, est, néanmoins résidente monégasque depuis le 4 janvier 1972 ; que B. B. C. entend en conséquence voir rejeter les exceptions de nullité et d'irrecevabilité soulevées par les époux M. et réitère les termes de son exploit introductif d'instance ;

SUR CE,

Attendu qu'aux termes de l'article 28 de l'ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959 sont prévues diverses conditions que doivent remplir à peine de nullité de la procédure le propriétaire et le bénéficiaire de la reprise ;

Attendu qu'en l'espèce B. B. C. justifie tenir ses droits d'un acte ayant acquis date certaine depuis au moins six ans au jour de la notification puisqu'elle est devenue propriétaire de l'appartement suivant acte dressé le 2 septembre 1980 en l'étude de maître Paul Louis Aureglia ;

Qu'elle justifie également avoir notifié le congé dont elle demande la validation douze mois à l'avance en signifiant aux époux M. son intention de reprise suivant acte d'huissier du 24 avril 1990 pour le premier mai 1991 ; qu'il importe peu à cet égard que la demande de validation ait été quant à elle formalisée de manière anticipée, soit avant l'expiration du délai de douze mois inhérent à la seule notification, aucune nullité n'étant à cet égard prévue par le législateur qui entend seulement interdire qu'une expulsion soit prononcée avant l'expiration de l'année de préavis donnée aux locataires ;

Attendu cependant que si la demanderesse apparaît ainsi remplir la plupart des conditions légalement exigées, ayant trait à la procédure de notification du congé, elle n'établit cependant pas, ni même n'offre de prouver que l'occupation du logement à reprendre soit de nature à répondre à ses besoins normaux ; qu'elle se borne à cet égard à indiquer que les locaux actuellement occupés par elle-même et ses deux filles âgées de 22 et 25 ans ne correspondent plus à ses besoins normaux, et ce, compte tenu notamment du prix de location pratiqué par la SAM Rocabella propriétaire ;

Attendu toutefois que cette simple affirmation - inhérente à l'appartement délaissé et non au local objet de la reprise - ne répond pas au vœu du législateur qui a entendu instituer par les dispositions de l'article 28 alinéa 3 une formalité substantielle prescrite à peine de nullité ; qu'en effet, le non-respect des prescriptions légales qui s'imposent au propriétaire voulant exercer le droit de reprise empêche les défendeurs de connaître la situation de fait dans laquelle se trouvent ses adversaires et les prive de faire valoir utilement leurs moyens de défense en discutant les conditions de la reprise ;

Attendu qu'il est en l'espèce constant que la demanderesse qui n'invoque dans le congé du 24 avril 1990 que le caractère inadapté de l'appartement dont elle était jusqu'alors locataire n'a de la sorte nullement justifié que l'occupation de l'appartement sis à Monaco répondait pour elle à des besoins normaux au jour de la notification dudit congé, aucune précision n'étant à cet égard apportée sur le nombre d'occupants bénéficiaires ni sur les locaux objets de la reprise ;

Que cette omission et l'irrégularité qui en découle doivent conclure à constater la nullité de la procédure, et au rejet en l'état la demande de reprise formulée par B. B. C. ;

Et attendu que les dépens suivent la succombance ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

statuant contradictoirement,

Constate la nullité de la procédure diligentée par B. B. C., propriétaire, aux fins de reprise d'un appartement loué à C. et S. M. ;

Rejette en l'état la demande de ladite propriétaire ;

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, prem. subst. proc. gén. ; Mes Sanita, Escaut et Blot, av. déf. ; Licari, av.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26118
Date de la décision : 23/01/1992

Analyses

Baux ; Immeuble à usage d'habitation


Parties
Demandeurs : B. C.
Défendeurs : M.

Références :

ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959
article 28 de l'ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1992-01-23;26118 ?

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