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23/01/1992 | MONACO | N°26117

Monaco | Tribunal de première instance, 23 janvier 1992, K. c/ SAM Cifer.


Abstract

Baux d'habitation

Obligations du bailleur - Trouble de jouissance du preneur, infiltrations d'eau provenant d'un tiers - Faute du bailleur : concession de réparer le dommage - Dommages-intérêts dus au locataire

Résumé

Le bailleur, en cette qualité, est tenu en application des dispositions de l'article 1559, 2° et 3° du Code civil, rappelées dans les stipulations du contrat de bail, d'entretenir la chose louée en état de servir à l'usage auquel elle est destinée et d'en faire jouir paisiblement son locataire.

Le locataire d'un appartement

, ayant subi des dégradations dues à des infiltrations d'eau provenant de l'appartement du...

Abstract

Baux d'habitation

Obligations du bailleur - Trouble de jouissance du preneur, infiltrations d'eau provenant d'un tiers - Faute du bailleur : concession de réparer le dommage - Dommages-intérêts dus au locataire

Résumé

Le bailleur, en cette qualité, est tenu en application des dispositions de l'article 1559, 2° et 3° du Code civil, rappelées dans les stipulations du contrat de bail, d'entretenir la chose louée en état de servir à l'usage auquel elle est destinée et d'en faire jouir paisiblement son locataire.

Le locataire d'un appartement, ayant subi des dégradations dues à des infiltrations d'eau provenant de l'appartement du dessus se trouve fondé, dès lors qu'il s'agit de détériorations survenues en dehors de l'usure normale, par ailleurs exclusivement imputables au fait d'un tiers, à obtenir réparation du trouble de jouissance qu'il a éprouvé, par suite de la carence fautive du bailleur, dans l'exécution de son obligation de faire les réparations nécessaires autres que locatives, conformément aux prescriptions de l'article 1560 alinéa 2 du Code civil.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu que suivant l'exploit susvisé, C. K., de nationalité néerlandaise, ayant élu domicile chez le sieur P., a fait assigner la société anonyme monégasque dénommée « Cifer » en restitution de la somme de 36 000 F versée à titre de caution, sollicitant en outre la condamnation de ladite société à lui payer une somme comprise entre 108 000 F et 144 000 F, à titre de dommages-intérêts, pour troubles de jouissance, lesdites sommes devant porter intérêts à compter du 1er octobre 1990 ;

Qu'il expose à l'appui de sa demande, avoir loué suivant bail en date du 4 novembre 1987, à la SAM Cifer, un appartement, qu'à l'expiration dudit bail survenu le 1er octobre 1990, il a rendu ledit appartement en parfait état, aux termes d'un constat dressé le même jour par maître Notari, huissier, au contradictoire de sa bailleresse, en sorte que celle-ci demeure tenue de lui restituer la somme de 36 000 F qu'il avait déposée entre ses mains, lors de la signature du bail, à titre de garantie de son exécution ;

Qu'il fait, par ailleurs, valoir qu'il a subi un trouble de jouissance, pendant le temps où il occupait les locaux, du fait des dégradations causées aux plafonds et murs du salon et de la loggia par des fuites d'eau qui se sont produites courant mars 1988, lesquels n'ont jamais été remis en état par la SAM Cifer, ainsi que cela lui incombait, en sa qualité de bailleresse tenue de lui assurer la jouissance paisible des lieux loués ;

Que compte tenu de la valeur locative de l'appartement donné à bail et de la durée de cette privation partielle de jouissance qui s'est poursuivie pendant 30 mois, l'indemnisation de son préjudice doit être évaluée à une somme comprise entre 108 000 F et 144 000 F ;

Attendu qu'in limine litis, la SAM Cifer tout en soulevant l'exception de caution prévue par l'article 259 du Code de procédure civile, à laquelle elle a déclaré renoncer à l'audience, a invoqué la nullité de l'exploit d'assignation tirée de l'élection de domicile faite à Monaco par le demandeur en application des articles 136 et suivants du Code de procédure civile ;

Qu'elle a par ailleurs conclu, quant au fond, au rejet des demandes formées par C. K., tout en sollicitant par voie reconventionnelle le paiement de la somme de 100 000 F à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Qu'elle expose à cet effet, d'une part, avoir rempli son obligation quant à la restitution de la caution versée par C. K. dès lors qu'elle lui a remboursé la somme de 10 160,36 F, après déduction des sommes que celui-ci restait lui devoir lesquelles s'établissaient comme suit :

* 3 940,95 F au titre des charges locatives afférentes à la période du 1er octobre 1989 au 30 septembre 1990 ;

* 328,41 F au titre d'un relevé de consommation d'eau de la société monégasque des eaux ;

* 3 662,36 F (plomberie) + 14 357,72 F (volets roulants) + 3 700,20 F (électricité) au titre des travaux de remise en état de l'appartement ;

Qu'elle prétend, d'autre part, que le demandeur ne saurait se prévaloir d'un quelconque trouble de jouissance, en l'absence de toute pièce justificative à cet égard, d'autant que son locataire n'en a fait état qu'après son départ des lieux, et qu'en tout état de cause, les dégradations subies par l'appartement se sont révélées insignifiantes, ainsi qu'en attestent les rapports de l'expert Ontivero, mandaté par la compagnie d'assurances UAP évaluant le coût des travaux de réfection à 1 257 F pour le premier sinistre survenu le 16 mars 1988 et à 3 830 F pour le second sinistre survenu le 17 septembre 1990 ;

SUR CE,

En la forme,

Attendu qu'il convient de constater que l'exploit d'assignation signifié à la requête de C. K., partie demanderesse, contient élection d'un domicile à Monaco ; qu'il s'en évince qu'ayant respecté l'obligation légale instituée par l'article 138 du Code de procédure civile, pour le cas où K. n'aurait pas de domicile à Monaco, ledit exploit apparaît régulier en la forme en sorte que la défenderesse doit être déboutée de son exception tirée de la nullité dudit exploit ;

Au fond :

Quant à l'indemnisation du trouble de jouissance,

Attendu qu'en sa qualité de bailleresse, la SAM Cifer était tenue, en application des dispositions de l'article 1559, 2e et 3e du Code civil, rappelées au paragraphe 25e du contrat de bail, d'entretenir la chose louée en état de servir à l'usage auquel elle était destinée et d'en faire jouir paisiblement son locataire ;

Qu'il résulte, à cet égard, des pièces produites, que l'appartement, objet de la location du 4 novembre 1987, a subi des dégradations au niveau des murs et des plafonds de la salle de séjour et de la loggia, dues à des infiltrations d'eau provenant de l'appartement situé au-dessus ;

Qu'il est par ailleurs constant que, contrairement à ses obligations, la SAM Cifer n'a jamais fait procéder aux travaux de remise en état des murs et plafonds de ces deux pièces, malgré les demandes réitérées de C. K. ;

Attendu, dès lors qu'il s'agissait de détériorations survenues en dehors de l'usure normale, par ailleurs exclusivement imputables au fait d'un tiers, que C. K. s'avère fondé à obtenir réparation du trouble de jouissance qu'il a subi, par suite de la carence fautive de la SAM Cifer, dans l'exécution de son obligation de faire les réparations nécessaires autres que locatives, conformément aux prescriptions de l'article 1560, alinéa 2 du Code civil ;

Que, compte tenu du caractère limité dans le temps des dégradations causées à l'appartement loué, lesquelles n'affectaient au surplus qu'une faible partie des locaux, le tribunal a les éléments suffisants d'appréciation pour fixer l'indemnisation devant être allouée, de ce chef, au demandeur à la somme de 30 000 F, laquelle portera intérêts à compter de ce jour, s'agissant d'une créance indemnitaire liquidée par le présent jugement ;

Quant à la restitution de « la caution » :

Attendu qu'il résulte des termes du bail, que la somme de 36 000 F versée par C. K. à la bailleresse, lors de son entrée dans les lieux, devait lui être restituée à son départ, après remise des clés ; que, toutefois, l'exécution de cet engagement par la SAM Cifer était subordonnée à la constatation que les locaux fussent rendus par le preneur, dans l'état dans lequel ils se trouvaient au moment où ce dernier les avaient reçus, c'est-à-dire en parfait état, ainsi qu'en dispose le paragraphe 15e du contrat de bail ;

Qu'à cet égard, il est constant, pour être établi par le procès-verbal de constat dressé par Maître Claire Notari, huissier, le 1er octobre 1990, jour du départ de C. K., au contradictoire de la SAM Le Brasilia, laquelle n'y a fait mentionner aucune réserve quelconque, que l'appartement était rendu en parfait état de réparations locatives, à l'exception des traces d'infiltration d'eau provenant de l'appartement du dessus ;

Qu'il en résulte que la SAM Cifer ne saurait prétendre déduire du montant du dépôt de garantie versé par son locataire, le coût des divers travaux de remise en état de l'appartement dont s'agit ;

Attendu cependant que la SAM Cifer apparaît fondée à obtenir de C. K., qui n'apporte pas la preuve, dont la charge lui incombe, de sa libération de sa dette, le solde des charges de copropriété afférentes à l'appartement loué à ce dernier, pour la période du 1er octobre 1989 au 30 septembre 1990, s'élevant à la somme de 3 608,70 F outre celle de 328,41 F représentant une facture de consommation d'eau ;

Qu'après compensation, la SAM Cifer demeure redevable, envers C. K., au titre du remboursement du dépôt de garantie, de la somme de : 36 000 F - 3 937,11 = 32 062,89 F, laquelle portera intérêts à compter du 4 février 1991, date de l'assignation valant seule mise en demeure, en raison de la nature contractuelle de la créance ;

Attendu qu'enfin la défenderesse ayant succombé dans l'essentiel de ses prétentions, la demande de C. K. n'apparaît pas avoir revêtu un caractère fautif, en sorte que la SAM Cifer doit être déboutée de sa demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts, de ce chef, et être, en outre, condamnée aux entiers dépens ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Condamne la société anonyme monégasque dénommée Cifer à payer à C. K. les sommes suivantes :

Trente deux mille soixante-deux francs quatre-vingt-neuf centimes (32 062,89 F), au titre de la restitution du dépôt de garantie, avec intérêts au taux légal à compter du 4 février 1991 ;

Trente mille F (30 000 F) à titre de dommages-intérêts, pour troubles de jouissance, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

Déboute la SAM Cifer de sa demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts ;

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, prem. subst. proc. gén. ; Me Escaut, av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26117
Date de la décision : 23/01/1992

Analyses

Baux ; Immeuble à usage d'habitation


Parties
Demandeurs : K.
Défendeurs : SAM Cifer.

Références :

article 1559, 2° et 3° du Code civil
article 138 du Code de procédure civile
article 259 du Code de procédure civile
Code de procédure civile
Code civil
article 1560 alinéa 2 du Code civil


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1992-01-23;26117 ?

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