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16/01/1992 | MONACO | N°26115

Monaco | Tribunal de première instance, 16 janvier 1992, H. c/ Banque de placements et de crédit.


Abstract

Exequatur

Jugement français n'ayant pas la force de chose jugée - Suivi d'une transaction : effet extinctif de la transaction - Conditions non remplies (Conv. franco-monégasque, art. 18-4°)

Résumé

Ne saurait être accueillie, la demande aux fins d'obtenir l'exequatur d'un jugement français qui n'a pu passer en force de chose jugée et devenir exécutoire conformément à l'article 501 du Code de procédure civile français, en l'état de la transaction intervenue avant l'expiration des délais d'appel, laquelle a entraîné des concessions réciproqu

es entre les parties : l'une acceptant les termes du jugement et renonçant à interjeter ap...

Abstract

Exequatur

Jugement français n'ayant pas la force de chose jugée - Suivi d'une transaction : effet extinctif de la transaction - Conditions non remplies (Conv. franco-monégasque, art. 18-4°)

Résumé

Ne saurait être accueillie, la demande aux fins d'obtenir l'exequatur d'un jugement français qui n'a pu passer en force de chose jugée et devenir exécutoire conformément à l'article 501 du Code de procédure civile français, en l'état de la transaction intervenue avant l'expiration des délais d'appel, laquelle a entraîné des concessions réciproques entre les parties : l'une acceptant les termes du jugement et renonçant à interjeter appel, l'autre se contentant d'une indemnité moindre que celle octroyée par la juridiction.

En effet, cette transaction a mis fin au litige opposant les parties et revêt entre elles, conformément aux dispositions de l'article 2052 du Code civil français, applicable à cette transaction, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort ; dès lors en l'état de l'effet extinctif de toute transaction, le juge de l'exequatur ne saurait conférer à la décision étrangère qui en fut l'objet, une autorité plus grande que celle dont elle bénéficie en application de la loi dont elle relève, étant rappelé que la condition édictée par l'article 18-4° de la Convention franco-monégasque du 21 septembre 1949, inhérente au caractère exécutoire du jugement étranger, n'apparaît pas remplie en l'espèce.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu que, par l'exploit susvisé, R. H. et F. F. ont fait assigner la Banque de placements et de crédit, dont le siège social est situé à Monaco, aux fins d'obtenir en Principauté de Monaco l'exequatur d'un jugement prononcé le 22 octobre 1985 par le Tribunal de grande instance de Paris, dont le dispositif est ainsi conçu :

« Le Tribunal, statuant publiquement, contradictoirement,

Déclare recevable la demande en déclaration de jugement commun présentée par les époux H. à l'encontre de Maître G., es-qualité de syndic à la liquidation de biens de la SA Constructions et réalisations traditionnelles ;

Condamne la banque de placements et de crédit à payer aux époux H. :

* 189 784 F avec intérêts de droit à compter de l'assignation ;

* 100 000 F à titre de dommages-intérêts avec intérêts de droit à compter de ce jour,

* 5 000 F au titre de l'article 500 du Nouveau Code de procédure civile ;

Déboute Maître G., es-qualité de syndic à la liquidation des biens de la société Constructions et réalisations traditionnelles de sa demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

Déclare la présente décision commune et opposable à la société Constructions et réalisations traditionnelles ;

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement ;

Condamne la Banque de placements et de crédit aux entiers frais et dépens, y compris les frais d'expertise ».

Attendu que la Banque de placements et de crédit invoque pour sa part les termes d'une transaction intervenue le 4 avril 1986 - par laquelle elle avait déclaré accepter le jugement précité, tout en s'engageant à payer une somme de 80 000 F à titre de dommages-intérêts - pour en déduire qu'il a été mis fin au litige qui avait fait l'objet du jugement du Tribunal de grande instance de Paris en date du 22 octobre 1985, lequel ne peut dès lors pas être exequaturé en Principauté de Monaco ; qu'à titre reconventionnel, la Banque de placements et de crédit sollicite la condamnation des codemandeurs à lui payer une somme de 50 000 F à titre de dommages-intérêts ;

Attendu que R. et F. H., reconnaissant l'existence de la transaction alléguée font pour leur part valoir que celle-ci visait l'acceptation du jugement du 22 octobre 1985 outre la réduction des dommages-intérêts à 80 000 F et ne portait nullement sur les intérêts au taux légal, l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile et les dépens ;

Que, toutes les autres modalités du jugement ayant dès lors été maintenues, les époux H. en déduisent le caractère fondé de leur demande d'exequatur et s'estiment fondés à solliciter également la condamnation de la Banque de placements et de crédit à leur payer les intérêts au taux légal fixés par le jugement du Tribunal de grande instance de Paris, outre une somme de 5 000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, et 20 000 F de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

Qu'ils entendent également voir constater que les intérêts non réglés sont également productifs d'intérêts à compter de la présente assignation et sollicitent l'exécution provisoire du jugement à intervenir ;

SUR CE,

Attendu que les faits de l'espèce commandent de déterminer si le jugement rendu le 22 octobre 1985 par le Tribunal de grande instance de Paris peut ou non, au regard des dispositions de l'article 18 de la Convention du 21 septembre 1949, relative à l'aide mutuelle judiciaire entre la France et la Principauté de Monaco, qui a été rendue exécutoire à Monaco par l'ordonnance souveraine n° 106 du 2 décembre 1949, recevoir à Monaco, l'exequatur dans les conditions qui y sont prévues, et ce, en l'état d'une transaction qui serait intervenue entre les parties postérieurement à sa signification ;

Attendu que les éléments de la cause permettent à cet égard de constater que le jugement rendu le 22 octobre par le Tribunal de grande instance de Paris, entre, d'une part, les époux H. et, d'autre part, Maître G., syndic, la Banque de placements et de crédit et la Société de constructions et réalisations traditionnelles a été signifié à la Banque de placements et de crédit le 6 février 1986 ;

Qu'il est en outre constant, en l'espèce, et admis par les deux parties, qu'avant que cette décision ne devienne définitive, une offre transactionnelle acceptée le 4 avril 1986 par les époux H. mettait fin au litige, dès lors qu'il était convenu d'une part que la Banque de placements et de crédit acceptait les termes du jugement, et, d'autre part, que les époux H. se contentaient de dommages-intérêts réduits à 80 000 F, au lieu de 100 000 F ;

Attendu que parmi les vérifications auxquelles doit procéder le juge de l'exequatur, il y a notamment lieu de contrôler si, d'après la loi du pays où a été rendue la décision, le jugement est passé en force de chose jugée ;

Attendu que tel n'apparaît pas être le cas du jugement rendu le 22 octobre 1985 par le Tribunal de grande instance de Paris qui n'a de toute évidence pu passer en force de chose jugée et devenir exécutoire conformément aux dispositions de l'article 501 du Code de procédure civile français, en l'état de la transaction intervenue avant l'expiration des délais d'appel ;

Attendu qu'il convient à cet égard de rappeler que l'accord des parties n'a pas consisté en un simple acquiescement au jugement, mais en une véritable transaction caractérisée par la présence de concessions réciproques, consistant pour la Banque de placements et de crédit à accepter les termes du jugement, en renonçant de la sorte à toute voie de recours, et pour les époux H. à se contenter d'une somme de 80 000 F de dommages-intérêts, au lieu de celle de 100 000 F octroyée par la juridiction parisienne ;

Attendu qu'il doit dès lors en être déduit que seule cette transaction a, en l'espèce, mis fin au litige opposant les parties et revêt, entre elles, conformément aux dispositions de l'article 2052 du Code civil français, applicable à cette transaction, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort ;

Que dès lors, en l'état de l'effet extinctif de toute transaction, le juge de l'exequatur ne saurait conférer à la décision étrangère qui en fut l'objet une autorité plus grande que celle dont elle bénéficie en application de la loi dont elle relève ;

Qu'étant en conséquence rappelé que la condition édictée à l'article 18 (4°) de la Convention du 21 septembre 1949 inhérente au caractère exécutoire du jugement étranger n'apparaît pas remplie en l'espèce, il y a lieu de débouter les époux H. des fins de leur demande tendant à voir exequaturer sur le territoire de la Principauté de Monaco le jugement rendu le 22 octobre 1985 par le Tribunal de grande instance de Paris ;

Attendu, s'agissant de la demande reconventionnelle en dommages-intérêts, que les époux H. ont pu se méprendre sur la portée de leurs droits et n'apparaissent pas avoir engagé la présente action de mauvaise foi, mais plutôt en l'état de difficultés d'exécution de la transaction précitée ; qu'il suit qu'il y a lieu de débouter la Banque de placements et de crédit des fins de sa demande de dommages-intérêts à leur encontre ;

Et attendu que les dépens suivent la succombance ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

statuant contradictoirement,

Déboute les époux H. des fins de leur demande d'exequatur ;

Déboute la Banque de placements et de crédit des fins de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts ;

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, prem. subst. proc. gén. ; Mes Sanita et Karczag-Mencarelli, av. déf. ; Piscla et Szepetowski, av. barr. de Nice.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26115
Date de la décision : 16/01/1992

Analyses

Arbitrage - Général ; Exequatur


Parties
Demandeurs : H.
Défendeurs : Banque de placements et de crédit.

Références :

ordonnance souveraine n° 106 du 2 décembre 1949
Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1992-01-16;26115 ?

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