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11/04/1991 | MONACO | N°26069

Monaco | Tribunal de première instance, 11 avril 1991, M. V. ès-qualité c/ SAM Crédit Foncier de Monaco.


Abstract

Faillite

Cessation de paiements

Compétence

Incompétence provisoire d'hypothèque judiciaire sur un bien du débiteur - Inscription prise en France - Action en inopposabilité de cette sûreté - Compétence de la juridiction monégasque - Assimilation de la sûreté prise en France à celle prévue à l'article 762 ter du Code de procédure civile - Inopposabilité à la masse de cette sûreté : application de l'article 456-6° du Code de commerce

Résumé

S'agissant d'une inscription provisoire d'hypothèque judiciaire prise, en vertu d'un

e ordonnance d'un juge français sur un immeuble situé en France, appartenant à un débiteur déclaré en état...

Abstract

Faillite

Cessation de paiements

Compétence

Incompétence provisoire d'hypothèque judiciaire sur un bien du débiteur - Inscription prise en France - Action en inopposabilité de cette sûreté - Compétence de la juridiction monégasque - Assimilation de la sûreté prise en France à celle prévue à l'article 762 ter du Code de procédure civile - Inopposabilité à la masse de cette sûreté : application de l'article 456-6° du Code de commerce

Résumé

S'agissant d'une inscription provisoire d'hypothèque judiciaire prise, en vertu d'une ordonnance d'un juge français sur un immeuble situé en France, appartenant à un débiteur déclaré en état de cessation de paiements par la juridiction monégasque (laquelle a prononcé la liquidation de biens), celle-ci, saisie d'une action intentée par le syndic de la liquidation de biens, tendant à voir déclarer inopposable à la masse ladite sûreté, se trouve compétente pour en connaître en application de l'article 3-5° du Code de procédure civile.

Il ressort par ailleurs des dispositions de l'article 3 de l'ordonnance-loi n° 692 du 9 janvier 1953 rendant exécutoire la convention relative à la faillite et à la liquidation judiciaire signée à Paris le 13 septembre 1950, entre la Principauté de Monaco et la République française, que les effets de la faillite, déclarée dans l'un des deux pays, s'étendent au territoire de l'autre pays, les syndics étant alors autorisés à requérir des autorités de chacun des deux pays toute mesure provisoire ou conservatoire.

Il s'ensuit que le syndic a intérêt à agir, à l'effet de conserver les droits de la masse qu'il représente et d'éviter une rupture de l'égalité entre les créanciers et qu'ainsi son action se trouve recevable.

Dès lors que l'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire a été prise postérieurement à la date de cessation de paiements, il y a lieu de dire que les conditions prescrites par l'article 456-6° du Code de commerce sont bien réunies, étant observé que la sûreté prise en France à titre conservatoire, en application de l'article 54 du Code de procédure civile français, s'avère similaire dans sa nature et ses effets à celle prévue à l'article 762 ter du Code de procédure civile monégasque, auquel font référence les dispositions précitées du Code de commerce.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu que, suivant exploit du 3 avril 1990, L. V., syndic de la cessation des paiements de W. M., ayant exercé le commerce à Monaco, a assigné la SAM Crédit Foncier de Monaco, aux fins de s'entendre déclarer inopposable à la masse des créanciers de la liquidation des biens du sieur W. M. l'inscription d'hypothèque conservatoire prise en vertu d'une Ordonnance rendue par le Président du Tribunal de grande instance de Grasse le 1er juin 1988 au profit de la société anonyme monégasque Crédit Foncier de Monaco sur un bien immobilier identifié comme étant la propriété du débiteur, cadastrée Section F, n° 2 678 lot n° 28, et dire en conséquence que la société anonyme monégasque Crédit Foncier de Monaco ne pourra se prévaloir de ladite hypothèque pour sûreté de sa créance ;

Attendu que le Crédit Foncier de Monaco entend qu'il lui soit donné acte de ce qu'il ne conteste pas l'inopposabilité à la masse de l'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire conservatoire prise sur un bien immobilier de W. M. situé en France à l'époque où la date de cessation des paiements n'avait pas encore été reportée au 1er mai 1988 par jugement du 25 janvier 1990 ;

Que ladite banque entend par ailleurs voir le syndic déclarer irrecevable et mal fondé à obtenir un jugement déclaratif de droit à ses propres frais et sollicite qu'il soit débouté des fins de son exploit du 3 avril 1990 ;

SUR CE,

Attendu qu'il convient de rappeler que, suivant jugement rendu le 13 juillet 1989 par le Tribunal de Première Instance de Monaco, était constaté l'état de cessation des paiements de W. M., commerçant, L. V., expert-comptable étant en outre désigné en qualité de syndic et l'état de cessation des paiements fixé au 1er juillet 1989 ; que, par jugement ultérieur du 25 janvier 1990, le Tribunal de Première Instance prononçait la liquidation des biens de W. M. en reportant au 1er mai 1988 la date de la cessation des paiements ;

Attendu qu'il résulte par ailleurs des renseignements délivrés par la Direction Générale des Impôts, service Conservation des Hypothèques de Grasse, qu'une inscription judiciaire conservatoire était prise le 1er juin 1988 à concurrence d'une somme évaluée provisoirement à 800 000 F sur la propriété cadastrée section F n° 2678, propriété de W. M. ;

Attendu que le Tribunal de Monaco est présentement saisi d'une action dirigée par le syndic de la liquidation des biens de W. M. tendant à voir déclarer inopposable à la masse des créanciers ladite sûreté ; qu'il convient en premier lieu d'observer que les Tribunaux monégasques apparaissent bien compétents pour connaître d'une action née de l'application des articles 408 à 609 du Code de commerce si la procédure est ouverte dans la Principauté, et ce, en application de l'article 3 (5°) du Code de procédure civile ;

Qu'il ressort par ailleurs des dispositions de l'article 3 de l'Ordonnance-Loi n° 692 rendant exécutoire la convention relative à la faillite et à la liquidation judiciaire signée à Paris le 13 septembre 1950 entre la Principauté de Monaco et la République française que les effets de la faillite déclarée dans l'un des deux pays s'étendront au territoire de l'autre pays, les syndics étant alors autorisés à requérir des autorités de chacun des deux pays toute mesure provisoire ou conservatoire ;

Qu'il doit dès lors être admis que le syndic de W. M., demandeur à la présente action en inopposabilité a intérêt à agir à l'effet de conserver les droits de la masse qu'il représente et d'éviter une rupture de l'égalité entre les créanciers, et qu'il y a lieu de déclarer recevable sa demande ;

Attendu au fond qu'il résulte des dispositions de l'article 456 (6°) du Code de commerce applicable en l'espèce que « toute inscription prise en application des articles 762 bis et 762 ter du Code de procédure civile est inopposable à la masse si elle intervient après la cessation des paiements du débiteur » ;

Qu'en l'occurrence, la date de la cessation des paiements ayant été définitivement fixée au 1er mai 1988, et l'inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire ayant été autorisée le 1er juin 1988, il y a lieu de dire que les conditions prescrites par l'article 456 (6°) du Code de commerce sont bien réunies, étant observé que la sûreté prise en France à titre conservatoire en application de l'article 54 du Code de procédure civile français s'avère similaire dans sa nature et ses effets à celle prévue par l'article 762 ter du Code de procédure civile monégasque, auquel font référence les dispositions précitées du Code de commerce ;

Qu'il s'ensuit - la banque défenderesse n'en ayant pas en outre contesté le principe - qu'il y a lieu de constater l'inopposabilité à la masse des créanciers de la liquidation des biens de W. M. de l'inscription d'hypothèque conservatoire prise en vertu d'une Ordonnance rendue par le Président du Tribunal de première instance de Grasse le 1er juin 1988 au profit de la SAM Crédit Foncier de Monaco sur un bien immobilier identifié comme étant la propriété de W. M., cadastrée section F n° 2678 lot n° 28 ;

Attendu enfin que la Banque Crédit Foncier de Monaco doit être condamnée aux dépens dès lors que l'inscription provisoire d'hypothèque a rendu nécessaire la présente décision ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Déclare recevable la demande, et, y faisant droit, constate l'inopposabilité à la masse des créanciers de la liquidation de biens de W. M., de l'inscription d'hypothèque judiciaire conservatoire prise en vertu d'une Ordonnance rendue le 1er juin 1988 par le Président du Tribunal de grande instance de Grasse au profit de la SAM Crédit Foncier de Monaco, sur un bien immobilier identifié comme étant la propriété de W. M., cadastrée section F, numéro 2678, lot n° 28 ;

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, prem. subst. proc. gén. ; Mes Sbarrato, Marquet Sanita, av. déf.

Note

Cette décision est à rapprocher du jugement du Tribunal de première instance du 12 octobre 1989 rendu sur le fondement de l'article 456-5° du Code de commerce.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26069
Date de la décision : 11/04/1991

Analyses

Hypothèque ; Traités bilatéraux avec la France


Parties
Demandeurs : M. V. ès-qualité
Défendeurs : SAM Crédit Foncier de Monaco.

Références :

article 456-6° du Code de commerce
article 762 ter du Code de procédure civile
articles 762 bis et 762 ter du Code de procédure civile
articles 408 à 609 du Code de commerce
article 456-5° du Code de commerce
article 456 (6°) du Code de commerce
Code de commerce
article 3-5° du Code de procédure civile
article 3 (5°) du Code de procédure civile
article 3 de l'ordonnance-loi n° 692 du 9 janvier 1953


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1991-04-11;26069 ?

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