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31/01/1991 | MONACO | N°26034

Monaco | Tribunal de première instance, 31 janvier 1991, R. c/ E.


Abstract

Conflit de juridiction

Action en divorce - Défendeur étranger, ayant son domicile à l'étranger lors de la demande. Incompétence de la juridiction monégasque

Divorce

Domicile conjugal antérieur à la demande : circonstance indifférente

Résumé

Le défendeur de nationalité étrangère est fondé à décliner la compétence du tribunal saisi d'une demande en divorce, en application des articles 4 et 262 du code de procédure civile, dès lors qu'il justifie avoir conservé un domicile dans son pays au moment de l'introduction de cette d

emande ; il ne saurait être opposé à ce déclinatoire le fait que les époux aient antérieurement à la dema...

Abstract

Conflit de juridiction

Action en divorce - Défendeur étranger, ayant son domicile à l'étranger lors de la demande. Incompétence de la juridiction monégasque

Divorce

Domicile conjugal antérieur à la demande : circonstance indifférente

Résumé

Le défendeur de nationalité étrangère est fondé à décliner la compétence du tribunal saisi d'une demande en divorce, en application des articles 4 et 262 du code de procédure civile, dès lors qu'il justifie avoir conservé un domicile dans son pays au moment de l'introduction de cette demande ; il ne saurait être opposé à ce déclinatoire le fait que les époux aient antérieurement à la demande en divorce, cohabité durablement à Monaco.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu que, par l'exploit susvisé, R., née le 5 Mai 1935 à Biala Podalska (Pologne), a régulièrement fait assigner en divorce E., né le 25 décembre 1937 à Zuara (Libye), qu'elle avait épousé le 12 mai 1963 à Tripoli (Libye), et dont elle a eu une enfant Muna, née le 27 décembre 1965 à Tripoli ;

Attendu que, dès ses premières conclusions et sous la réserve implicite de l'ensemble de ses droits quant au fond, le mari a décliné la compétence du Tribunal pour connaître de l'action de son épouse, sur le double fondement de son statut et de son domicile ;

Qu'il se prétend en effet bénéficiaire d'une immunité de juridiction à raison de sa qualité de conseiller au secrétariat d'état des relations extérieures de la République Dominicaine pour les affaires concernant la convention de Lomé, et d'envoyé spécial temporaire de ce secrétariat d'Etat ayant été chargé de diverses entrevues avec des investisseurs, successivement nord américains et européens, ce qui lui procurerait, soutient-il, un statut diplomatique ;

Que, par ailleurs, il précise qu'ayant, comme son épouse, la nationalité de la république dominicaine, ou il a d'ailleurs lui-même sollicité le divorce avant l'introduction de la présente instance - au jugement de laquelle il demande dès lors, subsidiairement, qu'il soit sursis pour cause de litispendance - il est domicilié sur le territoire de cette république, son adresse étant depuis le 1er avril 1990 : [adresse] ;

Attendu qu'en défense à l'exception d'incompétence ainsi soulevée, et en demandant qu'il soit statué sur les mesures provisoires, la demanderesse conteste le statut diplomatique invoqué par le mari et soutient d'autre part pour l'essentiel, tout en rappelant que la litispendance n'est pas admise à Monaco en matière internationale, qu'alors que le principal établissement du défendeur serait encore situé à Monaco, où les époux avaient fixé leur domicile conjugal dès 1973, l'actuel domicile à Saint-Domingue d'E. ne saurait permettre à ce dernier d'invoquer les dispositions de l'article 4 du Code de Procédure civile puisque la nationalité dominicaine dont il se prévaut n'a été par lui acquise qu'en 1983, soit postérieurement à l'installation de son domicile conjugal à Monaco en sorte qu'il ne pourrait soutenir avoir, lors de cette installation, « conservé un domicile de droit et de fait » à Saint-Domingue comme l'exigerait pour son application, et relativement à cette époque l'article 4 précité ;

Sur quoi,

Attendu qu'il résulte d'une attestation délivrée le 30 mars 1990 par le sous-secrétaire d'Etat dominicain des relations extérieures chargé des affaires administratives que E. ne possède pas le statut de fonctionnaire diplomatique dominicain faute d'accréditation à ce titre par un quelconque état étranger et, par ailleurs, qu'en tant que conseiller du secrétariat d'Etat des relations extérieures pour les affaires concernant la convention de Lomé (IV), il ne dispose à titre honorifique de privilèges, que pour les seuls actes officiels réalisés dans le cadre des fonctions lui étant spécifiquement confiées ;

Qu'il s'ensuit que les fonctions permanentes ou temporaires dont il est habituellement chargé au Secrétariat d'Etat des relations extérieures de la république dominicaine ne sont pas de nature à conférer à E. le statut diplomatique dont celui-ci entend se prévaloir dans la Principauté ;

Attendu, par ailleurs, qu'il est constant qu'après avoir, en 1983 acquis tous deux la nationalité dominicaine, les époux E. ont été parties à une instance en divorce introduite par le mari le 18 Juillet 1988 par-devant la 3e chambre civile et commerciale de district national de la république dominicaine, dont une décision faisant droit à la demande du mari, pour cause d'injures graves, fut rendue le 4 octobre 1988 ; que l'épouse a, le 8 décembre 1988, formé appel de cette sentence par-devant la Cour d'appel de Saint-Domingue avant de saisir elle-même la juridiction monégasque de la présente demande de divorce ;

Qu'ainsi saisie la juridiction dominicaine du second degré, par arrêt du 8 novembre 1990 a révoqué le jugement de divorce dont appel est rejeté à la demande du mari ;

Attendu, en outre, qu'il résulte des termes non contestés d'un extrait, versé en copie aux débats, de la carte d'identité dominicaine du mari, que celui-ci est actuellement domicilié à Saint-Domingue, à l'adresse susvisée dont il s'est prévalu, après avoir disposé avec son épouse, dès 1983, et toujours à Saint-Domingue, d'une adresse commune, [adresse], ainsi que cela ressort des photocopies régulièrement communiquées, et non contestées en leurs mentions, de deux autres cartes d'identité délivrées au nom de chacun des époux ;

Attendu qu'il se déduit de cet ensemble de circonstances qu'indépendamment des biens mobiliers ou immobiliers dont le mari peut être détenteur à Monaco, comme d'ailleurs en d'autres pays, pour les besoins des séjours temporaires qu'il serait appelé à y effectuer, cette partie a justifié pour sa part d'une fonction publique et d'une habitation à Saint-Domingue en sorte que, même si les époux ont pu cohabiter durablement par le passé à Monaco, se trouve ainsi caractérisé un domicile de droit et de fait d'E. sur le territoire de la république dominicaine lors de l'introduction de la demande en divorce de l'épouse ;

Que, par voie de conséquence, et sans qu'il y ait dès lors lieu de se prononcer sur l'exception de litispendance par ailleurs invoquée, à titre subsidiaire, il doit être fait droit au déclinatoire de compétence formulé par le mari, sur le fondement des articles 4 et 262 du Code de procédure civile, observation étant faite que le déroulement ci-dessus rapporté de l'instance en divorce introduite par ce défendeur à Saint-Domingue caractérise au vœu de l'article 4 précité la possibilité réelle de saisine de juge étranger requise par ce texte, dont l'application ne saurait être, au demeurant, écartée au seul motif, invoqué par l'épouse, que la nationalité et le domicile étrangers à prendre en considération devraient être en tous les cas antérieurs à l'installation des époux à Monaco, puisque le terme « conservé » contenu dans ce même texte, doit seulement être interprété dans le sens d'une existence et d'une permanence, lors de l'introduction de la demande en divorce, du domicile étranger allégué ;

Que, par voie de conséquence, et dès lors que le Tribunal ne peut ainsi connaître de l'instance en divorce introduite par l'épouse, il ne saurait être statué plus avant sur les demandes de celle-ci destinées à valoir à titre provisoire pour la durée de l'instance, lesquelles s'avèrent désormais irrecevables à défaut d'une telle instance ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement ;

Se déclare incompétent pour statuer sur l'action en divorce introduite par R. à l'encontre de E. ;

Déclare R. irrecevable en sa demande de mesures provisoires ;

Composition

MM. Landwerlin prés. ; Serdet prem. subst. proc. Gén. Mes Leandri et Blot av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26034
Date de la décision : 31/01/1991

Analyses

Droit de la famille - Dissolution de la communauté et séparation de corps ; Procédure civile


Parties
Demandeurs : R.
Défendeurs : E.

Références :

articles 4 et 262 du code de procédure civile
article 4 du Code de Procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1991-01-31;26034 ?

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