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23/11/1989 | MONACO | N°25558

Monaco | Tribunal de première instance, 23 novembre 1989, Communauté Immobilière de Fontvieille Village, W. et D. B. c/ Sociétés Antimen Monaco, Murinascia Monaco, Deplas Monaco, Satri, J. S., EGTM, Dragages et Travaux Publics et Tous autres.


Abstract

Copropriété

Action des copropriétaires dirigée contre les promoteurs-vendeurs et les constructeurs - Qualité pour agir de la copropriété dans l'intérêt de la sauvegarde des parties communes - Absence de pouvoir, en l'état de l'habitation donnée limitativement par l'assemblée générale, pour agir contre les constructeurs

Vente immobilière

Garanties du vendeur - Vices cachés affectant le gros œuvre - Responsabilité du vendeur promoteur

Résumé

Il ne saurait être opposé à un syndicat de copropriété un défaut de qualité po

ur agir, au prétexte que les désordres immobiliers ne concerneraient que les parties privatives, telles que le...

Abstract

Copropriété

Action des copropriétaires dirigée contre les promoteurs-vendeurs et les constructeurs - Qualité pour agir de la copropriété dans l'intérêt de la sauvegarde des parties communes - Absence de pouvoir, en l'état de l'habitation donnée limitativement par l'assemblée générale, pour agir contre les constructeurs

Vente immobilière

Garanties du vendeur - Vices cachés affectant le gros œuvre - Responsabilité du vendeur promoteur

Résumé

Il ne saurait être opposé à un syndicat de copropriété un défaut de qualité pour agir, au prétexte que les désordres immobiliers ne concerneraient que les parties privatives, telles que les emplacements de parkings et les caves, dès lors qu'en l'espèce l'action de ce syndicat a en vue, en application de l'article 6 de l'ordonnance-loi n° 662 du 28 mai 1959, la sauvegarde des droits attachés à la propriété et à la jouissance des parties communes de l'ensemble immobilier et la réparation des atteintes à l'intégrité matérielle des immeubles considérés dans leur totalité, par suite du défaut d'étanchéité du gros œuvre, comprenant les fondations et les murs périphériques, déclaré partie commune par l'article 5 du règlement de copropriété.

Le syndicat des copropriétaires habilité par l'assemblée générale à agir seulement à l'encontre des promoteurs-vendeurs, ne saurait valablement actionner d'autres personnes (constructeurs).

L'action de la copropriété contre les promoteurs-vendeurs s'analyse en une action en garantie des vices cachés des immeubles qu'ils ont vendus en lots aux copropriétaires, en application des articles 1483 et suivants du Code civil.

Les sociétés promotrices de construction, qui par leur activité ne peuvent ignorer le vice des immeubles vendus et sont de surcroît tenues à l'obligation déterminée de livrer une chose exempte de tout vice, se trouvent dans l'obligation, les conditions d'application des articles 1483, 1485 et 1487 du Code civil étant réunies en l'espèce, de garantir le vice caché affectant le gros œuvre des immeubles litigieux et de réparer l'intégralité du dommage.

Motifs

Le Tribunal,

Attendu qu'il résulte des éléments de la cause la relation suivante des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties :

Les Sociétés Civiles Immobilières Monégasques respectivement dénommées « Antimen Monaco », « Murinascia Monaco » et « Deplas Monaco » ont notamment fait édifier sur le terre-plein de Fontvieille, en Principauté, un ensemble de six immeubles dont les travaux de gros œuvre ont été confiés pour trois d'entre eux (Bâtiments A, B, E) au groupement d'Entreprises Spada, Dragages et Travaux Publics et EGTM, ceux des trois autres étant confiés (Bâtiments C, D, F) à l'Entreprise Satri, les autres participants à la construction étant le Bureau d'Etudes ETEC, le géomètre expert L. ainsi que onze architectes unis d'intérêts au sein du Comité d'Architectes de Fontvieille ;

Par Ordonnance de référé des 31 janvier et 14 février 1984, une expertise a été prescrite au contradictoire des parties ci-dessus énumérées, pour rechercher l'existence, les causes et les remèdes des désordres allégués par les maîtres de l'ouvrage consistant en inondations périodiques dans le troisième sous-sol des immeubles concernés ;

Aux termes de son rapport déposé le 21 octobre 1985 au Greffe Général, l'expert Chatelin a notamment conclu :

* que les désordres se produisent au niveau du troisième sous-sol d'une superficie de 5 500 m2 à usage de garages, de caves et de locaux techniques où l'on constate sur les parois des étiages de nappes d'eau qui se sont élevés de 5 à 10 centimètres au-dessus du sol,

* que le nivellement altimétrique de ce troisième sous-sol tel que défini par les documents du marché se situe à la cote + 0,420 alors que les niveaux réels font apparaître des cotes inférieures à la norme contractuelle allant de 0,277 à 0,329 du nord au sud des bâtiments A, B, C, D, E, F,

* que pour niveler le sol du troisième sous-sol, les entreprises ont utilisé un repère 5,418 situé sur le rocher à l'entrée du tunnel, côté Fontvieille, et porté une cote 1,420 en 4 points de la paroi de la galerie technique longeant les immeubles à l'ouest ; qu'après contrôle, ces mêmes niveaux s'établissaient de 1,247 à 1,339 révélant ainsi des écarts entre moins 0,173 et moins 0,081 pouvant être dus soit à des erreurs de nivellement faites par les entreprises, soit à un tassement différentiel de la galerie technique,

* que s'il y a eu un certain affaissement de celle-ci, il ne s'est pas répercuté de façon appréciable sur les radiers des bâtiments en l'absence de fracture des structures mais que, par contre, cet affaissement de la galerie technique a eu pour conséquence d'entraîner un déplacement du repère tracé sur sa paroi à + 1,42 du niveau fini du troisième sous-sol,

* qu'ainsi les entreprises Spada et Satri n'ont pas respecté les éléments contractuels de leur marché respectif du fait d'une part des insuffisances d'études de fondations et des surcharges inévitables apportées par les bâtiments au cours de leur construction alors que les terrains de remblais sont compressibles ainsi que d'autre part des négligences dans l'établissement des repères de nivellement et dans leur usage,

* que, par rapport au niveau des plus hautes eaux fixé à la cote + 0,300 les niveaux du sol sont - à leurs points les plus bas - inférieurs à celle de + 0,30 des hautes eaux c'est-à-dire :

• pour la première tranche (0,300 - 0,246 = 0,054) soit 5,4 centimètres ;

• pour la seconde tranche (0,300 - 0,273 = 0,027) soit 2,7 centimètres ;

* que la cote de sol fini de + 0,420 n'ayant pas été respectée, il pourrait ainsi se produire aux périodes de vives eaux, quelques jours par an, une infiltration d'eaux saumâtres d'une hauteur maximale de 5,4 centimètres,

* que, pour remédier à ces infiltrations, il faut :

• soit obtenir l'étanchéité totale du sol du sous-sol (11 000 mètres carrés environ),

• soit surélever ce sol pour le mettre à l'abri des venues d'eau,

• soit traiter le dallage et la base des structures avec des résines d'étanchéité ;

* que la première solution consiste à réaliser une chape étanche de trois à quatre centimètres d'épaisseur sur toute la surface du sous-sol et à relever cette chape sur une hauteur de + 0,550 à la base des structures portantes pour contenir les eaux saumâtres ;

Que l'exécution de ces travaux entraînera d'importantes sujétions, telle la nécessité de démolir la base des cloisons de distribution pour assurer la continuité de la chape, l'obligation de maintenir les joints de construction existants en les obturant par un produit souple homologué et de réaliser un batardeau étanche le long du mur mitoyen, côté galerie technique ;

Que le coût d'une telle opération peut être évalué à 5 412 000 F Hors Taxes, valeur juillet 1985 (non compris les honoraires du maître d'œuvre choisi pour concevoir et diriger les travaux),

* que la seconde solution consisterait à surélever le niveau du sous-sol par un dallage mixte composé d'une couche de galets de 20 centimètres formant drain et d'un dallage de béton armé, d'environ 5 centimètres d'épaisseur, un polyane résistant étant interposé entre ces deux éléments ;

Que l'exécution de ces travaux ne peut être envisagée que sous réserve de la dérogation à obtenir des services de l'urbanisme pour diminuer en certaines parties la hauteur libre réglementaire ;

Que le coût d'un tel ouvrage peut être évalué à 4 608 000 F Hors Taxes, valeur juillet 1985 (non compris les honoraires) ;

* que la troisième solution consisterait à assurer une étanchéité par application de résines d'étanchéité (Irete ou équivalent) mises en œuvre par des entreprises et fabricants spécialisés : SEPT, SGREG, SIR sur l'ensemble des sols du sous-sol ainsi que sur les structures des bâtiments sur une hauteur de 0,550 dont le coût peut être estimé à 3 570 000 F Hors Taxes, valeur juillet 1985 ;

Cet ouvrage est plus simple à mettre en œuvre que les précédents ;

* que les quatre entreprises concernées par les désordres devraient participer à concurrence de 25 % chacune au règlement du coût des travaux de réfection ci-dessus exposés, quelle que soit la solution retenue par le Tribunal,

* que le préjudice subi par le maître de l'ouvrage ne représente pas une sujétion insupportable, quelques centimètres d'eau, pendant quelques heures, quelques jours par an,

Se référant aux constatations et aux conclusions du rapport de l'expert Chatelin, la Communauté Immobilière de Fontvieille Village représentée par son syndic principal en exercice, dûment habilité par décision de l'Assemblée Générale du 29 mai 1985, a été autorisée par Ordonnance sur requête du 7 mars 1986 à inscrire une hypothèque conservatoire sur divers biens appartenant aux Sociétés Civiles Immobilières Murinascia Monaco et Antimen Monaco, en garantie de sa créance provisoirement évaluée à 6 000 000 F, que cette hypothèque a été inscrite le 17 mars 1986 à la conservation des hypothèques de Monaco, volume 166, numéro 160 ;

Suivant exploit en date du 25 mars 1986 (Instance n° 570 du Rôle de 1986), la Communauté Immobilière de Fontvieille Village représentée par son syndic principal en exercice a fait assigner d'une part les Sociétés Civiles Immobilières Murinascia Monaco, Antimen Monaco et Deplas Monaco, d'autre part la Société Anonyme Monégasque dénommée Satri, les Sociétés Anonymes de droit français dénommées Spada, EGTM, Dragages et Travaux Publics, le géomètre L. ainsi que les architectes B., B., C., L., J., M., N., R. M. et P., et R., unis d'intérêts au sein du Comité d'Architectes de Fontvieille, aux fins d'obtenir l'homologation du rapport de l'expert Chatelin et leur condamnation solidaire au paiement des sommes suivantes :

• 6 418 000 F montant du coût des travaux de réfection nécessaires pour réaliser l'étanchéité du 3e sous-sol sous réserve de leur actualisation au jour de leur exécution,

• 100 000 F par jour au titre de la privation de jouissance entraînée par la fermeture du 3e sous-sol pendant la durée des travaux,

• 1 000 000 F à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la dépréciation des parties communes des immeubles ;

Elle a par ailleurs sollicité la validation de l'inscription provisoire d'hypothèque pour voir produire son plein effet à celle-ci conformément aux dispositions de l'article 762 ter du Code de procédure civile ;

Suivant exploit en date du 13 août 1986 (Instance n° 57 du Rôle de 1986), la Communauté Immobilière de Fontvieille Village a de nouveau assigné aux mêmes fins la Société Satri ;

Elle fait valoir au soutien de sa demande que, parmi les trois solutions préconisées par l'expert dans son rapport pour remédier aux inondations du 3e sous-sol des immeubles, seule la première consistant en la construction d'une chape étanche doit être retenue par le Tribunal du seul fait qu'elle supprime de manière définitive les inconvénients constatés sans entraîner une diminution de la hauteur minimale de ce même sous-sol, laquelle nécessite par ailleurs l'obtention toujours aléatoire d'une dérogation administrative ;

Les Sociétés Civiles Antimen, Murinascia et Deplas ont conclu au débouté, tout en sollicitant la mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire prise à leur encontre, en faisant notamment valoir que le rapport de l'expert Chatelin a permis d'établir que les désordres qu'il a constatés ne leur sont nullement imputables mais proviennent de non respect par les entreprises Satri, Spada, EGTM, Dragages et Travaux Publics de la cote prescrite par le Bureau d'Etudes ETEC qui leur imposait de ne pas construire en-dessous de celle-ci afin de protéger les sous-sols des arrivées des plus hautes eaux ;

Les Sociétés Spada, EGTM, Dragages et Travaux Publics ainsi que le Comité d'Architectes de Fontvieille ont conclu tout d'abord à la nullité de l'exploit d'assignation dirigé à leur encontre en ce qu'il leur a été signifié à domicile élu ; ensuite à l'irrecevabilité de la demande du syndic, lequel serait dépourvu de qualité pour agir à leur égard en faisant valoir que les désordres invoqués ne concernant que des parties privatives, seuls les copropriétaires auraient pu agir en réparation de leur préjudice personnel ;

La Société Satri a conclu aux mêmes fins en ajoutant que la demanderesse ne saurait se prévaloir d'un rapport d'expertise prescrit dans une instance à laquelle elle n'était pas partie ;

Le géomètre L. a conclu au débouté, aucune faute à l'origine des désordres ne pouvant lui être reprochée ainsi que l'a souligné l'expert ; il a par ailleurs formé une demande reconventionnelle en paiement de la somme de 30 000 F de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

La Communauté Immobilière de Fontvieille Village, réitérant sa demande initiale et sollicitant la jonction des instances introduites par ses assignations des 25 mars et 13 août 1986, a fait valoir, quant à la régularité de la procédure, qu'elle est intervenue volontairement à l'expertise diligentée par Chatelin à laquelle elle avait intérêt, en l'état des désordres affectant des parties communes dont elle avait la charge d'assurer la conservation ;

Sur ce,

Quant à la jonction,

Attendu qu'en l'état de la connexité existant entre les instances enrôlées sous les numéros 570 et 57 de 1986, qui tendent aux mêmes fins, il convient, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, de les joindre pour y être statué par un seul et même jugement ;

Quant à la nullité de l'exploit d'assignation,

Attendu qu'il n'y a pas lieu d'examiner le moyen tiré de la nullité de cet acte, en ce qu'il a été signifié au domicile élu par les défendeurs, dès lors que ceux-ci, par l'organe de leur conseil, ont déclaré, à la barre du Tribunal de ce siège, renoncer à s'en prévaloir ;

Quant à la recevabilité de la demande du syndicat,

Attendu que c'est à tort que les différents locateurs d'ouvrages prétendent que la Communauté Immobilière de Fontvieille Village serait dépourvue de tout intérêt à se prévaloir du rapport de l'expert Chatelin diligenté dans une autre instance, à laquelle elle n'aurait pas été partie, dès lors que ce rapport, aux opérations duquel ils ont tous participé, leur est opposable et qu'il constitue pour la copropriété demanderesse, qui y est par ailleurs intervenue volontairement, le seul élément de preuve utile au soutien de son action, étant par ailleurs observé qu'il est toujours loisible au Tribunal, pour asseoir sa décision, de se référer aux résultats d'une expertise prescrite dans une instance antérieure, dès lors qu'elle a été, comme en l'espèce, régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion des parties ;

Attendu, par ailleurs, que ces mêmes défendeurs ne sauraient pas davantage exciper du défaut de qualité du syndicat pour agir en la cause, au prétexte que les désordres ne concerneraient que des parties privatives, telles que les emplacements de parkings et les caves, dès lors qu'en l'espèce l'action de ce même syndicat a en vue la sauvegarde des droits attachés à la propriété et à la jouissance des parties communes de l'ensemble immobilier pour obtenir la réparation des atteintes à l'intégrité matérielle des immeubles considérés dans leur totalité par suite du défaut d'étanchéité du gros œuvre du socle en infrastructure, comprenant les fondations et les murs périphériques, déclaré partie commune par l'article 5 du Règlement de Copropriété ;

Attendu d'autre part que la Copropriété de Fontvieille Village représentée par son syndic s'estime fondée à agir de ce chef, tant à l'encontre des sociétés civiles promotrices que des différents participants à l'acte de construction, qu'elle a fait assigner pour obtenir leur condamnation solidaire ;

Que cette copropriété a produit, à cet effet, un procès-verbal de l'Assemblée Générale des copropriétaires en date du 29 mai 1985, aux termes duquel ceux-ci ont autorisé le syndic à diligenter une procédure aux fins d'inscription d'hypothèque conservatoire sur les biens des sociétés civiles immobilières, promoteurs-vendeurs ; qu'il résulte de la lecture de ce document, que le syndic n'a été ainsi régulièrement habilité par l'Assemblée Générale susvisée conformément à l'article 6 du Règlement de Copropriété, qu'à ester en justice au nom du syndicat aux fins d'obtenir la validation de cette inscription d'hypothèque prise à l'encontre des Sociétés Civiles Antimen Monaco, Murinascia Monaco et Deplas Monaco et s'avère donc sans pouvoir pour agir dans la même instance au nom du syndicat des copropriétaires à l'encontre de tous les autres défendeurs dès lors que le pouvoir ainsi conféré au syndic par l'Assemblée Générale d'agir contre des personnes dénommées n'impliquait pas l'autorisation d'ester en justice à l'encontre de tous autres tiers de son choix, les copropriétaires n'ayant pas été mis en mesure, dans les formes prescrites par le règlement, de prendre leur décision en connaissance de cause ; qu'il échet en conséquence de déclarer irrecevable la demande introduite par le syndic de la copropriété en ce qu'elle est dirigée à l'encontre de tous les autres défendeurs ;

Quant au fond,

Sur le fondement de la demande

Attendu que si la Communauté Immobilière de Fontvieille Village n'a pas cru devoir préciser le fondement juridique de sa demande à l'égard des Sociétés Civiles Immobilières Antimen Monaco, Murinascia Monaco et Deplas Monaco, il s'évince des éléments de la cause, que celle-ci s'analyse en l'action en garantie des vices cachés des immeubles qu'elles ont vendu en lots aux copropriétaires, en application des dispositions des articles 1483 et suivants du Code civil ;

Qu'à cet égard, il convient de relever que le syndicat de la copropriété dispose indiscutablement du pouvoir d'exercer les actions attachées à la propriété indivise entre les copropriétaires des parties communes de l'immeuble, que ceux-ci ont acquis des venderesses en même temps que celle de leur lot privatif, dès lors qu'en application de l'article 6 de l'Ordonnance Loi n° 662 du 23 mai 1959 le syndicat a la conservation et la garde de ces parties communes (Cour de Révision 6 décembre 1974 - Recueil des Décisions Judiciaires - I) ;

Sur la garantie du vice

Attendu qu'il résulte des constatations de l'expert que les infiltrations d'eau qui se produisent au niveau des murs périphériques et des fondations des 3e sous-sols des immeubles, notamment en période de hautes eaux marines, les rendent sinon tout à fait impropres à leur destination de garages et de locaux techniques desservant les équipements communs, du moins impropres à leur usage, et ont constitué un vice caché dès lors que celui-ci ne pouvait être normalement décelé par un profane de par sa nature même et qu'il existait en germe à l'époque où la Communauté Immobilière de Fontvieille Village a été constituée pour prendre en charge l'administration des parties communes des immeubles concernés ;

Que, par ailleurs, s'agissant de sociétés de construction, qui par leur activité ne pouvaient ignorer le vice des immeubles vendus, et étaient de plus tenues de l'obligation déterminée de livrer une chose exempte de tout vice, il échet, au vu des considérations qui précèdent, les conditions d'application des articles 1483, 1485 et 1487 du Code civil étant réunies en l'espèce, de déclarer en conséquence que les Sociétés Civiles Immobilières Antimen, Murinascia et Deplas Monaco devront garantie du vice caché affectant le gros œuvre des immeubles dépendant de la Communauté Immobilière de Fontvieille Village ainsi que de tous dommages-intérêts envers cette dernière ;

Sur la réparation du vice

Attendu que, parmi les propositions de l'expert destinées à remédier aux infiltrations d'eaux marines, il apparaît que la première doit être écartée dès lors qu'elle entraînerait de trop importantes sujétions telles que la nécessité de démolir les cloisons de distribution pour assurer la continuité de la chape et ainsi des troubles manifestement excessifs, qu'il en est de même pour la seconde consistant à surélever le niveau du sol dès lors qu'elle suppose l'obtention préalable d'une dérogation, non acquise en l'état des services de l'urbanisme pour diminuer la hauteur libre réglementaire ;

Qu'il apparaît ainsi à l'analyse des solutions préconisées par l'expert dans son rapport, que la dernière, consistant à faire application de résines spéciales synthétiques sur l'ensemble du sol des sous-sols ainsi que sur les structures des bâtiments sur une hauteur de 0,55 mètres, de manière à les rendre étanches, doit être en l'espèce retenue, comme étant à la fois tout autant efficace que les précédentes et la plus simple à mettre en œuvre ;

Que le coût de ces travaux ayant été évalué par l'expert à la somme non contestée de 3 570 000 F Hors Taxes, soit celle de 4 234 000 F en tenant compte de l'incidence de la taxe sur la valeur ajoutée, il échet de condamner les Sociétés Civiles Antimen, Murinascia et Deplas solidairement à payer à la Communauté Immobilière de Fontvieille Village ladite somme, au titre des travaux de réfection des désordres affectant les parties communes, laquelle sera actualisée au jour du paiement en fonction des variations de l'indice BT01 du coût de la construction depuis juillet 1985 et portera intérêts au taux légal à compter de ce jour, s'agissant d'une créance de nature compensatoire et la liquidation du préjudice étant effectuée à la date du présent jugement ;

Sur la privation de jouissance des locaux du 3e sous-sol

Attendu qu'il est constant que la réalisation des travaux de réfection du sol et des murs périphériques du 3e sous-sol entraînera une privation de jouissance tant des lots privatifs constitués par les emplacements de parking et les caves que des parties communes et des éléments d'équipements communs ;

Que, cependant, s'agissant en l'espèce soit de troubles de jouissance subis par chacun des copropriétaires sur son lot privatif soit de troubles de jouissance à caractère personnel en relation avec le dommage causé aux parties communes, il convient, constatant que les copropriétaires se sont abstenus d'exercer leur action individuelle en réparation, de débouter la Communauté Immobilière de Fontvieille Village de sa demande en dommages-intérêts pour privation de jouissance ;

Sur la dépréciation des parties communes

Attendu, quant à la demande de dommages-intérêts formulée par la Communauté Immobilière de Fontvieille Village, qu'il y a lieu de relever qu'en l'espèce, le préjudice invoqué de ce chef présente un caractère purement éventuel et futur qui ne peut être apprécié actuellement par le Tribunal, d'autant que les travaux tendant à la remise en état des lieux qui seront entrepris à la requête de la copropriété demanderesse la rendent sans objet ; qu'il convient en conséquence de rejeter, en l'état, une telle demande ;

Quant à la validation de l'inscription d'hypothèque conservatoire

Attendu, qu'étant constaté que la procédure d'inscription provisoire d'hypothèque a été régulièrement suivie, il y a lieu de renvoyer la copropriété demanderesse à l'exécution des formalités prévues par l'article 762 ter du Code de procédure civile ;

Quant à la demande reconventionnelle du géomètre L.

Attendu qu'en l'état de l'irrecevabilité susvisée de la copropriété à agir notamment à l'encontre de ce dernier, il convient de l'indemniser du préjudice que lui a occasionné la nécessité d'ester en justice dans la présente instance en lui allouant la somme de 5 000 F à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Quant aux dépens

Attendu qu'enfin les dépens suivront la succombance et seront intégralement supportés par les sociétés civiles défenderesses ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Joint les instances portant les numéros 570 et 57 du Rôle de 1986 ;

Déclare la Communauté Immobilière de Fontvieille Village, 1re et 2e tranches, irrecevable en sa demande, en ce qu'elle est dirigée à l'encontre des Sociétés dénommées Satri, Spada, EGTM, Dragages et Travaux Publics, du géomètre P. L. ainsi que des architectes S. B., R. B., Y. B., M. C., J. L., C. J., J. M., H. N., M. R., P. R. et L. R. ;

Condamne la Communauté Immobilière de Fontvieille Village à payer à P. L. la somme de 5 000 F à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Déclare les Sociétés Civiles Immobilières dénommées « Antinem Monaco », « Murinascia Monaco » et « Deplas Monaco » tenues à garantie du vice caché affectant les parties communes du troisième sous-sol des immeubles de la Communauté Immobilière de Fontvieille Village, 1er et 2e tranches ;

Condamne en conséquence solidairement les Sociétés Civiles Immobilières « Antimen Monaco », « Murinascia Monaco » et « Deplas Monaco » à payer à la Communauté Immobilière de Fontvieille Village, 1re et 2e tranches, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, la somme de quatre millions deux cent trente quatre mille F (4 234 000 F) qui sera actualisée à la date du paiement en fonction de la variation de l'indice bâtiment BT01 intervenue depuis le mois de juillet 1985 ;

Déboute, en l'état, la Communauté Immobilière de Fontvieille Village, 1er et 2e tranches, de ses demandes tendant au paiement de dommages-intérêts pour dépréciation et privation de jouissance des parties communes ;

Constate que la procédure d'inscription d'hypothèque provisoire a été régulièrement suivie ;

Renvoie la Communauté Immobilière de Fontvieille Village à l'exécution des formalités prévues par l'article 762 ter du Code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Composition

MM. Landwerlin prés., Serdet prem. subst. proc. gén. MMe Karczag-Mencarelli, Boéri, Sbarrato, Btot, Léandri av. déf., Joselet av. au Barreau de Nice.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25558
Date de la décision : 23/11/1989

Analyses

Copropriété ; Vente d'immeuble


Parties
Demandeurs : Communauté Immobilière de Fontvieille Village, W. et D. B.
Défendeurs : Sociétés Antimen Monaco, Murinascia Monaco, Deplas Monaco, Satri, J. S., EGTM, Dragages et Travaux Publics et Tous autres.

Références :

articles 1483, 1485 et 1487 du Code civil
Code civil
article 762 ter du Code de procédure civile
Loi n° 662 du 23 mai 1959
article 6 de l'ordonnance-loi n° 662 du 28 mai 1959


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1989-11-23;25558 ?

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