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21/04/1988 | MONACO | N°25440

Monaco | Tribunal de première instance, 21 avril 1988, S.A.M. Le Prêt c/ S., S.A.M. Loews Hôtel de Monaco.


Abstract

Saisie - arrêt

Titre - Jugement étranger non revêtu d'exequatur - Validité de la saisie-arrêt (non)

Résumé

Une décision judiciaire française, en l'espèce une ordonnance d'injonction de payer dont l'exequatur à Monaco n'apparaît pas avoir été obtenu, ni même sollicité en vertu des dispositions de la Convention de Paris du 21 septembre 1949 relative à l'aide mutuelle judiciaire franco-monégasque, encore qu'elle puisse être invoquée durant la phase initiale de la saisie-arrêt pratiquée, ne peut, faute de revêtir à Monaco le caractère e

xécutoire, servir en l'état de fondement ni à l'instance en validité de la saisie-arrêt prévue p...

Abstract

Saisie - arrêt

Titre - Jugement étranger non revêtu d'exequatur - Validité de la saisie-arrêt (non)

Résumé

Une décision judiciaire française, en l'espèce une ordonnance d'injonction de payer dont l'exequatur à Monaco n'apparaît pas avoir été obtenu, ni même sollicité en vertu des dispositions de la Convention de Paris du 21 septembre 1949 relative à l'aide mutuelle judiciaire franco-monégasque, encore qu'elle puisse être invoquée durant la phase initiale de la saisie-arrêt pratiquée, ne peut, faute de revêtir à Monaco le caractère exécutoire, servir en l'état de fondement ni à l'instance en validité de la saisie-arrêt prévue par l'article 491 du Code de procédure civile ni à la condamnation au paiement demandée.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Attendu qu'en vertu d'une ordonnance d'injonction de payer rendue le 19 décembre 1980 par le président du Tribunal de commerce de Menton et dont elle a invoqué le caractère exécutoire en France, depuis le 3 février 1981, en précisant par ailleurs que ladite ordonnance avait « fait l'objet » à Monaco de deux ordonnances de saisie-arrêt sur salaires, en date respectivement des 28 octobre 1981 et 22 octobre 1986, la Société Le Prêt a, par l'exploit susvisé, fait saisie-arrêt entre les mains de la Société Lœws Hôtel Monaco des sommes détenues par celle-ci pour le compte de J.-H. S., pour sûreté, garantie et avoir paiement des dettes dont ce dernier serait encore redevable à son égard en exécution de l'ordonnance d'injonction de payer précitée, soit : 11 708,16 F en principal, 26 878,44 F et 4 907,32 F d'intérêts, et, enfin, 90 F, 486,45 F, 100 F, 160 F et 706 F de frais, sauf à parfaire ultérieurement ;

Attendu que, par le même exploit, la Société Le Prêt a fait assigner la Société Lœws Hôtel Monaco aux fins de sa déclaration affirmative des sommes revenant à J.-H. S., et ce dernier en validité de la saisie-arrêt pratiquée, ainsi qu'en paiement du montant des causes de celle-ci ;

Attendu qu'à l'appui de ses demandes ainsi présentées la Société Le Prêt, par conclusions datées du 14 avril 1988, soutient qu'elle a régulièrement procédé à la saisie-arrêt dont s'agit au regard des dispositions de droit commun prévues par l'article 487 du Code de procédure civile au cas d'existence d'un titre, dès lors qu'après avoir envisagé de pratiquer entre les mains de la Société Lœws Hôtel Monaco, et à l'encontre de J.-H. S., une saisie-arrêt sur salaires fondée sur la loi n. 471 du 25 mars 1963, et avoir à cet effet cité ce dernier en conciliation pour le 2 mars 1988, elle s'était vu rétorquer par la Société Lœws Hôtel Monaco qu'à compter de la fin mars 1988 celle-ci n'emploierait plus S. et ne verserait plus à ce dernier de salaires pouvant faire l'objet des retenues périodiques permises par la loi précitée ;

Qu'elle estime de la sorte que le recours au droit commun des saisies-arrêts serait justifié en l'espèce par l'existence d'une dette de J.-H. S. envers la Société Lœws Hôtel Monaco justiciable d'une saisie-arrêt sur la base de l'article 487 du Code de procédure civile ;

Attendu que la Société Lœws Hôtel Monaco, après avoir fait, sous la date du 16 mars 1988, une déclaration des sommes qu'elle doit à J.-H. S. (soit au total 12 100 F correspondant pour 6 100 F au salaire du mois de mars 1988 et pour 6 000 F à des indemnités compensatrices de congés payés pour la période du mois d'août 1987 au mois de mars 1988) a conclu le 13 avril 1988 à ce qu'il soit constaté qu'elle ne détenait que des salaires et indemnités de congés payés ne pouvant faire l'objet de saisie qu'en application de la loi n. 741 du 25 mars 1963 et non en vertu des dispositions des articles 487 et suivants du Code de procédure civile, et à ce que soit en conséquence ordonnée la mainlevée de la saisie-arrêt de droit commun pratiquée suivant l'exploit susvisé, ce, à l'effet que son ancien employé S. puisse toucher les sommes susvisées qu'elle détient pour son compte, alors surtout que ce dernier lui a déclaré, par lettre en date du 11 avril 1988, qu'il se réservait le droit d'exercer toute action ultérieure contre elle pour la réparation du dommage qu'il aurait subi du fait d'une saisie indue de ses salaires ;

Qu'à ce propos la Société Lœws Hôtel Monaco demande en outre qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle formule des réserves afin d'être, au besoin, relevée et garantie par la Société Le Prêt quant à toute demande de réparation que pourrait formuler S. à son encontre ;

Attendu que ce dernier, se réservant de conclure ultérieurement quant au montant des sommes qui lui sont réclamées, demande d'ores et déjà la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée comme il vient d'être dit par la Société Le Prêt, qu'il estime injustifiée et source de préjudice pour lui du fait de réclamations dont il dit avoir fait l'objet de la part de son bailleur relatives au paiement du loyer échu du mois de mars 1988, qu'il n'aurait pas pu acquitter par suite de la saisie-arrêt dont s'agit ;

Sur quoi,

Attendu que le titre invoqué en l'espèce sur la base de l'article 487 du Code de procédure civile comme justifiant ladite saisie-arrêt consiste en une décision judiciaire française dont l'exequatur à Monaco n'apparaît pas avoir été obtenu, ni même sollicité, en vertu des dispositions de la Convention de Paris du 21 septembre 1949 relative à l'aide mutuelle judiciaire entre la France et la Principauté de Monaco ;

Attendu que, si la demanderesse pouvait, durant la phase initiale de la saisie-arrêt pratiquée, se prévaloir d'une telle décision, sous réserve de l'application en l'espèce de l'article 4, alinéa 1er, de la loi n. 741 du 25 mars 1963 interdisant la saisie-arrêt de droit commun pour les créances de traitements et rémunérations visées par l'article 503-1° du Code de procédure civile, il demeure que cette même décision, faute de revêtir actuellement à Monaco le caractère exécutoire requis pour l'application de l'article 487 dudit code, au terme de l'instance en validité prévue par l'article 491 subséquent, ne peut servir en l'état de fondement ni à la validation sollicitée de saisie-arrêt, ni à la condamnation envisagée par la demanderesse de J.-H. S. au paiement des sommes déduites du titre invoqué, dont il n'est pas au demeurant demandé au tribunal d'examiner immédiatement le bien-fondé, en prononçant à Monaco la condamnation que ce titre comporte, indépendamment de toute instance d'exéquatur ;

Qu'il s'ensuit que la Société Le Prêt doit être déboutée quant au fond de l'ensemble de ses demandes formulées en vertu du titre constitué par l'ordonnance française d'injonction de payer susvisée ;

Attendu qu'il ne saurait être, par ailleurs, procédé à titre conservatoire au maintien des effets de la saisie-arrêt pratiquée suivant l'exploit susvisé pour permettre au besoin à la Société Le Prêt de formuler ensuite, utilement, une demande principale de condamnation de J.-H. S. au montant des causes de l'ordonnance française précitée, dès lors que, relative à des salaires, ladite saisie-arrêt ne pouvait avoir lieu, au regard de l'article 1er de la loi n. 741 du 25 mars 1963, que conformément aux dispositions de celle-ci, non applicables en l'état à la présente instance ;

Qu'il échet dès lors de faire droit aux demandes de mainlevée de saisie-arrêt présentées par J.-H. S. et par la Société Lœws Hôtel Monaco, auxquels il convient en outre de donner acte de leurs réserves ci-dessus spécifiées ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Déboute la société anonyme monégasque dénommée Le Prêt de l'ensemble de ses demandes formulées en vertu du titre constitué par l'ordonnance d'injonction de payer rendue par le président du Tribunal de commerce de Menton le 19 décembre 1980 ;

Donne mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée suivant l'exploit susvisé en vertu de ladite ordonnance ;

Ordonne que la société anonyme monégasque dénommée Lœws Hôtel Monaco versera entre les mains de J.-H. S. la somme de 12 100 F qu'elle détient pour le compte de celui-ci, moyennant quoi elle en sera valablement libérée ;

Lui donne acte de ce qu'elle se réserve d'être relevée et garantie par la Société Le Prêt des condamnations consécutives à toute action qui pourrait être éventuellement formée à son encontre par J.-H. S. ;

Donne acte par ailleurs à ce dernier de ce qu'il réserve ses droits quant au fond ;

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, subst. ; MMe Sanita et Léandri, av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25440
Date de la décision : 21/04/1988

Analyses

International - Général ; Exequatur ; Traités bilatéraux avec la France


Parties
Demandeurs : S.A.M. Le Prêt
Défendeurs : S., S.A.M. Loews Hôtel de Monaco.

Références :

loi n. 741 du 25 mars 1963
Code de procédure civile
article 491 du Code de procédure civile
loi n. 471 du 25 mars 1963
article 1er de la loi n. 741 du 25 mars 1963
article 503-1° du Code de procédure civile
article 487 du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1988-04-21;25440 ?

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