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21/04/1988 | MONACO | N°25439

Monaco | Tribunal de première instance, 21 avril 1988, C. c/ Caisse de compensation des services sociaux.


Abstract

Accident du travail

Infirmités multiples - Méthodes d'évaluation de l'I.P.P. - Fixation d'un seul taux : inadmissible

Résumé

En cas d'infirmités multiples, c'est-à-dire intéressant des membres, segments de membres ou organes différents, une méthode d'évaluation spécifique doit être suivie et ce, de manière variable, selon qu'il s'agit de lésions concernant des organes différents mais associés à la même fonction, ou bien, de lésions relatives à différents segments d'un même membre, ou encore, des organes différents et de fonction dist

incte.

Dans ce dernier cas qui correspond à celui de l'espèce, l'expert médical se doit d'éval...

Abstract

Accident du travail

Infirmités multiples - Méthodes d'évaluation de l'I.P.P. - Fixation d'un seul taux : inadmissible

Résumé

En cas d'infirmités multiples, c'est-à-dire intéressant des membres, segments de membres ou organes différents, une méthode d'évaluation spécifique doit être suivie et ce, de manière variable, selon qu'il s'agit de lésions concernant des organes différents mais associés à la même fonction, ou bien, de lésions relatives à différents segments d'un même membre, ou encore, des organes différents et de fonction distincte.

Dans ce dernier cas qui correspond à celui de l'espèce, l'expert médical se doit d'évaluer la première incapacité à son taux spécifique et calculer chacune des suivantes proportionnellement à la capacité restante.

Il appartient ainsi à cet expert après avoir fixé le taux d'I.P.P. de la première infirmité d'attribuer à chacune des infirmités subsistantes affectant des membres et organes différents un taux d'I.P.P. spécifique permettant au tribunal d'exercer un contrôle au regard de la méthode et des critères prévus par l'arrêté ministériel du 14 janvier 1947 fixant le taux d'incapacité des victimes d'accidents du travail, ce qui ne saurait être possible lorsqu'un seul taux a été retenu sans qu'il soit précisé si celui-ci est global ou afférant à telle ou telle infirmité.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Attendu qu'A. C., employé pour le compte de la Caisse de compensation des services sociaux (C.C.S.S.), dont l'assureur-loi est la Compagnie U.A.P.-Urbaine, a été victime le 27 février 1987 d'un accident du travail ayant entraîné, aux termes d'un rapport d'expertise établi le 23 juin 1987 par le docteur Chatelin, une I.T.T. du 27 février 1987 au 1er avril 1987 et une I.P.P. de 15 % avec consolidation au 15 avril 1987 ;

Que, l'assureur-loi ayant refusé de s'accorder sur la base de telles conclusions expertales, l'affaire était renvoyée devant le Tribunal de première instance selon ordonnance de non-conciliation en date du 24 novembre 1987 ;

Attendu que, suivant exploit du 14 décembre 1987, A. C. assignait la C.C.S.S. et la Compagnie U.A.P. devant le Tribunal de première instance aux fins de s'entendre homologuer le rapport du docteur Chatelin du 23 juin 1987, fixer à 15 % le taux d'I.P.P. dont il demeure atteint et voir en conséquence l'assureur-loi condamné à lui payer une rente annuelle et viagère calculée en fonction dudit taux d'incapacité ;

Attendu cependant que la C.C.S.S. et la Compagnie U.A.P. se sont, pour leur part, opposées à cette demande d'homologation au motif que l'expert Chatelin n'aurait pas obéi aux prescriptions du barème officiel établi par l'arrêté ministériel du 14 janvier 1947 aux termes duquel il y a lieu d'attribuer à chaque infirmité indépendante un taux d'I.P.P. distinct ; qu'elles s'estiment dès lors fondées à solliciter la désignation d'un nouvel expert médical avec la même mission que celle précédemment confiée au docteur Chatelin ;

Sur ce,

Attendu que pour retenir un taux d'I.P.P. de 15 % le docteur Chatelin a, dans son rapport du 23 juin 1987, relevé qu'A. C. avait présenté à l'occasion de l'accident du travail du 27 février 1987 un traumatisme cérébral, une contusion thoracique gauche avec fracture de deux côtes et traumatisme de l'épaule gauche ;

Attendu qu'il est néanmoins constant qu'après avoir dénié que ledit accident ait pu entraîner l'aggravation alléguée par la victime de troubles fonctionnels vertébraux dont elle souffrait déjà auparavant, l'expert a fixé un taux d'incapacité de 15 % pour les autres séquelles subsistantes (résultant tant du traumatisme cérébral, que de la contusion thoracique et du traumatisme de l'épaule gauche) ;

Attendu que, ce faisant, le docteur Chatelin a méconnu les prescriptions du barème indicatif annexé à l'arrêté ministériel du 14 janvier 1947 fixant le taux d'incapacité des victimes d'accidents du travail ; qu'en effet, en cas d'infirmités multiples, c'est-à-dire intéressant des membres, segments de membres ou organes différents, une méthode d'évaluation spécifique doit être suivie, et ce, de manière variable, selon qu'il s'agit de lésions intéressant des organes différents mais associés à la même fonction, ce qui n'est pas le cas de l'espèce, ou bien de lésions relatives à différents segments d'un même membre, ou encore des organes différents et de fonction distincte ; que dans ce dernier cas qui correspond à la présente hypothèse, il y a lieu d'évaluer la première incapacité à son taux spécifique tel que chiffré par l'expert médical et de calculer chacune des suivantes proportionnellement à la capacité restante ;

Attendu, cependant, que si l'expert Chatelin n'a, en tout état de cause, pas procédé de la sorte en l'espèce, il lui appartenait néanmoins d'attribuer à chacune des infirmités subsistantes, affectant des membres et organes différents, un taux d'I.P.P. spécifique permettant au tribunal d'exercer son contrôle au regard de la méthode et des critères prévus par l'arrêté du 14 janvier 1947 ;

Attendu qu'il apparaît, toutefois, que dans le rapport établi le 23 juin 1987 cet expert n'a nullement indiqué les raisons l'ayant conduit à attribuer à la victime un taux d'I.P.P. de 15 %, dont le tribunal ignore même s'il s'agit d'un taux global retenu en considération de toutes les séquelles observées ou de certaines d'entre elles seulement et lesquelles... ;

Qu'il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu d'homologuer ledit rapport du docteur Chatelin et qu'il convient, dès lors, de désigner un nouvel expert médical avec la mission habituelle, outre celle de spécifier notamment si l'accident du travail du 27 février 1987 a pu, de quelque manière que ce soit, entraîner l'aggravation d'un état pathologique préexistant, et en particulier des troubles vertébraux et lombaires dont souffrait déjà la victime avant ledit accident du travail du 27 février 1987 ;

Et attendu que les dépens doivent être réservés en fin de cause ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Tous droits et moyens des parties demeurant réservés ;

Dit n'y avoir lieu à homologation du rapport d'expertise du docteur Chatelin en date du 23 juin 1987 ;

Désigne en qualité d'expert le docteur Raphaël Pastorello - . -, lequel, serment préalablement prêté aux formes de droit, aura pour mission, après avoir pris connaissance du dossier médical d'A. C. :

1° d'examiner la victime ;

2° de décrire ses blessures et déterminer parmi les séquelles dont l'existence peut être constatée celles qui sont la conséquence directe de l'accident du travail du 27 février 1987 et celles qui doivent exclusivement être rattachées à un état préexistant qui n'aurait en rien été provoqué ou aggravé par ledit accident ;

3° de fixer la durée de l'I.T.T. en indiquant tant la date à laquelle est intervenue la consolidation des blessures que celle à laquelle la victime a effectivement repris son travail ;

4° de fixer le taux d'I.P.P. rattachable aux seules séquelles consécutives à l'accident du travail en attribuant à chacune des infirmités résultant de ces séquelles un taux d'I.P.P. spécifique, avant d'évaluer l'I.P.P. globale ;

5° de dire s'il convient de faire apprécier la capacité résiduelle de gain de la victime par la Commission spéciale prévue par l'article 23 bis de la loi n. 636 du 11 janvier 1958 ;

Dit que l'expert disposera d'un délai de trois mois à compter du début de ses opérations d'expertise pour déposer son rapport ; Dit qu'en cas de refus ou d'empêchement de l'expert, il sera pourvu à son remplacement par simple ordonnance ;

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, subst. ; MMe Karczag-Mencarelli et Clérissi, av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25439
Date de la décision : 21/04/1988

Analyses

Sécurité au travail ; Protection sociale


Parties
Demandeurs : C.
Défendeurs : Caisse de compensation des services sociaux.

Références :

article 23 bis de la loi n. 636 du 11 janvier 1958
arrêté ministériel du 14 janvier 1947


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1988-04-21;25439 ?

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