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17/03/1988 | MONACO | N°25428

Monaco | Tribunal de première instance, 17 mars 1988, Copropriété immobilière S. T. c/ Hoirs B.


Abstract

Arbitrage

Clause compromissoire - Incompétence soulevée après le lien d'instance - Renonciation antérieure par la partie qui s'en prévaut - Incompétence du tribunal (non)

Résumé

Le défendeur ne saurait utilement soulever l'incompétence du tribunal sur le fondement d'une clause compromissoire dès lors qu'il a répondu au fond sur l'assignation et a laissé se lier le débat de sorte qu'il apparaît, par là-même, avoir implicitement renoncé à se prévaloir de ladite cause.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Attendu que dans le dernier ét

at de ses prétentions, la copropriété de l'immeuble dénommé S. T. - ci-après la copropriété - demande au tribu...

Abstract

Arbitrage

Clause compromissoire - Incompétence soulevée après le lien d'instance - Renonciation antérieure par la partie qui s'en prévaut - Incompétence du tribunal (non)

Résumé

Le défendeur ne saurait utilement soulever l'incompétence du tribunal sur le fondement d'une clause compromissoire dès lors qu'il a répondu au fond sur l'assignation et a laissé se lier le débat de sorte qu'il apparaît, par là-même, avoir implicitement renoncé à se prévaloir de ladite cause.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Attendu que dans le dernier état de ses prétentions, la copropriété de l'immeuble dénommé S. T. - ci-après la copropriété - demande au tribunal de condamner les hoirs B. « conjointement et solidairement » :

1° à démolir le plancher métallique édifié au-dessus de la rampe d'accès conduisant au premier niveau des garages et à remettre à leurs frais les lieux dans leur état antérieur sous astreinte définitive ;

2° à évacuer toutes les parties communes qu'ils occupent indûment, leur expulsion desdits lieux étant requise également sous astreinte définitive ;

3° à lui payer une indemnité compensatrice du préjudice subi, à évaluer par expertise, correspondant aux loyers indûment perçus sur les parties communes ou emplacements créés et aux charges, impayées depuis 1968, relatives à ces emplacements, outre 20 000 F à titre de dommages-intérêts supplémentaires ;

4° à supporter les entiers dépens ;

Qu'à titre subsidiaire, la copropriété sollicite la désignation d'un expert ayant notamment pour mission de décrire les parties communes et celles privatives appartenant aux hoirs B., de préciser les tantièmes de charges afférentes aux garages tant publics que privés, d'indiquer les parties communes occupées indûment par les hoirs B. et transformés par eux en garages supplémentaires, de constater la présence et l'utilisation du plancher métallique construit au-dessus d'un couloir de circulation, de déterminer le montant des loyers perçus depuis 1968 et celui des charges impayées depuis cette même année, en ce que ces loyers et charges sont relatifs aux parties communes indûment occupées et au plancher métallique transformé en garage ;

Qu'au soutien de ses demandes, la copropriété expose que les hoirs B., propriétaires de 231 emplacements de garage sur les 283 que compte l'immeuble le S. T., occupent sans droit ni titre certaines parties communes des sous-sols de l'immeuble ; qu'elle avance à titre d'exemple que 4 emplacements (n° 44 à 47) ont été détournés de leur destination de garage et ont été transformés en entrepôt commercial loué à un restaurant mitoyen en violation flagrante du cahier des charges (la cloison édifiée pour ce faire ayant été depuis démolie par application d'une ordonnance de référé au 18 juillet 1983) ; qu'elle indique encore qu'un couloir d'accès commun faisant face au cloisonnement de cet entrepôt et des couloirs de circulation ont été partiellement utilisés à des fins privatives puisque des emplacements de garages y ont été aménagés pour être ensuite loués, sans pour autant que les charges corrélatives en soient acquittées ;

Qu'elle mentionne, par ailleurs, l'existence d'un plancher métallique servant d'emplacement de garage pour deux véhicules supplémentaires dont la construction a été effectuée irrégulièrement au-dessus d'une rampe de circulation, outre la présence d'un coffre-fort appartenant à la famille B. dans la loge commune située à l'entrée du parking ;

Que la copropriété soutient que ces agissements violent les règles du cahier des charges de l'immeuble et n'ont jamais fait l'objet d'autorisations quelconques de sa part, celles délivrées par le promoteur (P.) de l'immeuble étant sans portée dans la mesure où il ne pouvait se substituer à l'assemblée des copropriétaires ;

Attendu qu'après avoir fait porter leur discussion, dans quatre jeux de conclusions, sur des questions procédurales tenant au défaut d'autorisation du syndic pour intenter la présente action ou à l'absence de communication de pièces - moyens manifestement dénués de sérieux, comme il sera dit ci-après - les hoirs B. ont pris des conclusions au fond par lesquelles ils s'expliquent sur les agissements qui leur sont imputés ;

Qu'ils prétendent ainsi que leur auteur a été spécialement autorisé le 14 décembre 1965 par P. à faire clore les emplacements n° 44 à 47 et le couloir d'accès leur faisant face, tout en remarquant que la cloison a été enlevée depuis juillet 1983 et les parties communes libérées ;

Qu'ils soutiennent qu'il en a été de même pour le plancher situé au-dessus de la rampe des garages (P. ayant donné son autorisation par acte du 4 avril 1968), en précisant qu'il s'agissait de la contrepartie d'une servitude qui a été imposée à leur auteur ;

Qu'en ce qui concerne l'occupation de la loge de gardien, ils prétendent qu'elle est justifiée par les nécessités du service devant être assuré aux clients

Que, se portant demandeurs reconventionnels, les hoirs B. sollicitent en définitive du tribunal l'allocation de 30 000 F à titre de dommages-intérêts devant réparer le préjudice qui leur est causé par les « inexplicables revendications » de la copropriété dont l'ensemble des demandes devrait, selon eux, être rejeté ;

Qu'à l'audience des plaidoiries, leur conseil, Maître Lorenzi, remplaçant Maître Boisson, décédé, a toutefois soulevé en dernier lieu l'incompétence du tribunal sur le fondement de la clause compromissoire édictée par l'article 59 du cahier des charges de l'immeuble ;

Sur quoi,

Attendu que si cette incompétence peut en l'espèce être opposée en tout état de cause et doit même conduire le tribunal à la déclarer d'office, puisqu'il s'agit bien en l'espèce d'une incompétence du tribunal en raison de la matière - au sens de l'article 263 du Code civil - au profit d'arbitres, il demeure que pour en être ainsi, les parties doivent ne pas avoir renoncé à se prévaloir de la clause compromissoire ;

Qu'en l'espèce, il apparaît qu'en acceptant de répondre au fond sur l'assignation du 17 novembre 1983 sans avoir à aucun moment mis en question la compétence du tribunal, les hoirs B. ont laissé se lier les débats et apparaissent par là même avoir implicitement renoncé à soulever l'incompétence de cette juridiction sur le fondement de la clause d'arbitrage, de sorte que le tribunal ne saurait désormais soulever d'office son incompétence mais doit au contraire apprécier le litige que les parties, comme il leur était loisible de le faire, ont entendu lui soumettre ;

Attendu que l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble le S. T., régulièrement réunie le 16 juin 1982, a constaté qu'aucun accord n'avait pu être pris amiablement avec les hoirs B. et a, en conséquence, autorisé le syndic G. à ester en justice, qu'il est donc vain de soutenir que celui-ci n'est pas dûment mandaté ;

Attendu qu'il est tout aussi inopérant de soutenir que les pièces réclamées par conclusions du 17 avril 1985 n'ont pas été produites, la copropriété conservant le choix des pièces qu'elle entend verser aux débats, étant observé au surplus que les documents produits sont ceux dont chacun des copropriétaires dispose ès qualités ;

Attendu qu'il résulte en particulier des procès-verbaux des assemblées de copropriétaires tenues les 19 avril et 16 juin 1982 que des parkings ont été transformés en entrepôt servant d'annexe à un restaurant (F.), que des parties communes de l'immeuble ont été utilisées à des fins personnelles par les hoirs B., que des emplacements de parking ont été par eux construits au-dessus d'une aire de circulation commune, puis donnés en location ;

Attendu que si certains seulement de ces agissements apparaissent avoir été autorisés par P., représentant la société civile particulière dénommée S.C.I. S. T., lors d'actes de vente consentis par cette société à B. les 14 décembre 1965 et 4 avril 1968, il ne peut être soutenu que ces autorisations aient eu pour effet de rendre régulières ces occupations ou utilisations des lieux dont s'agit par les hoirs B. ou leur auteur ;

Qu'il n'est pas contesté en effet que l'immeuble se trouvait alors soumis aux dispositions du règlement de copropriété établi le 24 juin 1963, ultérieurement modifié, et qu'en conséquence la S.C.I. S. T. n'avait pas qualité pour autoriser des modifications de destination de parties communes à l'ensemble des copropriétaires, voire leur transformation en parties privatives ; que ces autorisations qui semblaient impliquer au surplus une révision dudit règlement de copropriété, ne pouvaient en tout état de cause être délivrées que par l'assemblée des copropriétaires ;

Attendu en conséquence qu'il apparaît que les hoirs B. ne justifient d'aucun titre régulier de nature à légitimer leurs agissements passés ou présents dans certaines parties des sous-sols de l'immeuble, qu'ils occupent ou utilisent sans droit au mépris de ceux des copropriétaires ;

Qu'avant d'ordonner leur expulsion ou la démolition des ouvrages irréguliers, il y a lieu de recourir à une expertise dans les termes du dispositif ci-après à l'effet de renseigner le tribunal sur divers points de faits dont la connaissance est nécessaire à la solution définitive du présent litige ;

Attendu qu'en raison de leur succombance, les défendeurs doivent d'ores et déjà être condamnés aux dépens de l'instance, et leur demande reconventionnelle rejetée ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Rejette l'exception d'incompétence soulevée ;

Accueille la demande comme régulière en la forme ;

Dit et juge, en particulier, que les défendeurs sont sans droit ni titre à occuper les parties communes litigieuses à des fins personnelles ;

Avant de statuer sur les chefs de demande tendant à obtenir la démolition de l'ouvrage précité et la remise des lieux dans leur état antérieur, l'expulsion des parties communes indûment occupées et le paiement de dommages-intérêts ;

Ordonne une mesure d'expertise aux frais avancés de la copropriété ;

Désigne à cet effet, en qualité d'expert, Jacques Wolzok demeurant ., lequel aura pour mission, serment préalablement prêté :

* de déterminer par tous moyens quelles étaient les parties communes et celles privatives dans les sous-sols de l'immeuble S. T., lors de l'établissement du règlement de copropriété, en appréciant l'incidence des modifications qui ont pu y être apportées par la suite ;

* de déterminer les parties communes qui ont été ou sont encore indûment occupées par les hoirs B. ou leur auteur ; de décrire le mode d'occupation et l'utilisation desdits lieux, après en avoir précisé la situation ;

* de chiffrer le bénéfice ayant pu être retiré de ces occupations et utilisations irrégulières et d'évaluer, par rapport à la répartition des tantièmes de l'immeuble, les charges qui auraient pu être appliquées à ces occupations ;

Dit que l'expert conciliera les parties si faire se peut, sinon dressera et déposera rapport de ses opérations dans un délai de trois mois à compter de sa saisine ;

Désigne Madame Monique François, premier juge, pour suivre les opérations d'expertise ;

Dit qu'en cas d'empêchement de l'expert ou du juge commis, il sera pourvu à leur remplacement par simple ordonnance ;

Déboute les défendeurs de leur demande reconventionnelle ;

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, subst. ; MMe Sanita et Lorenzi, av. déf. ; Bosio, av. (Barreau de Nice).

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25428
Date de la décision : 17/03/1988

Analyses

Arbitrage interne ; Contrat - Général


Parties
Demandeurs : Copropriété immobilière S. T.
Défendeurs : Hoirs B.

Références :

article 263 du Code civil


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1988-03-17;25428 ?

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