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12/02/1988 | MONACO | N°25415

Monaco | Tribunal de première instance, 12 février 1988, B., B., B., C., L., J., M., N., M. et P. R., R. c/ S.C.I. Antimen Monaco, S.C.I. Deplast, S.C.I. Murinascia Monaco, Société nouvelle du nouveau port de Fontvieille.


Abstract

Compensation

Absence de réciprocité de dettes - Refus de compensation judiciaire

Résumé

Des sociétés promotrices immobilières ayant eu recours aux prestations de services d'un groupe d'architectes, dont la créance d'honoraires est établie, ne sauraient pour couvrir leur défaillance, invoquer une compensation judiciaire qui résulterait de ce que ce groupe aurait déjà perçu de l'État des honoraires pour les mêmes services, alors que ces sociétés sont étrangères aux relations contractuelles susceptibles d'avoir lié l'État auxdits architec

tes.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Attendu que par jugement définitif du 5 juin 1986 auquel il y a l...

Abstract

Compensation

Absence de réciprocité de dettes - Refus de compensation judiciaire

Résumé

Des sociétés promotrices immobilières ayant eu recours aux prestations de services d'un groupe d'architectes, dont la créance d'honoraires est établie, ne sauraient pour couvrir leur défaillance, invoquer une compensation judiciaire qui résulterait de ce que ce groupe aurait déjà perçu de l'État des honoraires pour les mêmes services, alors que ces sociétés sont étrangères aux relations contractuelles susceptibles d'avoir lié l'État auxdits architectes.

Motifs

LE TRIBUNAL,

Attendu que par jugement définitif du 5 juin 1986 auquel il y a lieu de se reporter pour l'exposé des circonstances de la cause et les décisions qu'il renferme, le tribunal, après avoir constaté la défaillance contractuelle des Sociétés civiles Murinascia Monaco, Deplas Monaco et Antimen Monaco et dit que cette défaillance doit entraîner les paiements dus aux architectes formant le C.A.F. à titre de mission commencée et d'indemnité forfaitaire, a ordonné une mesure d'expertise, avant de statuer plus avant, (principalement sur le montant des sommes revenant de ces chefs aux architectes et sur le mérite de l'inscription provisoire d'hypothèque prise le 25 octobre 1984) à l'effet de déterminer le montant des honoraires pouvant être dus aux architectes par application du contrat du 10 mars 1980 et de faire le compte entre les parties ;

Attendu que l'expert désigné, André Akerib, a déposé rapport de ses opérations le 9 avril 1987 aux termes duquel il a arrêté les comptes entre les parties comme suit :

* solde dû sur les 1re et 2e tranches de travaux.........................................H.T. 572 475,16 F

* solde dû sur la 3e tranche...............H.T. 3 524 478,00 F

* indemnité forfaitaire contractuelle H.T. 3 052 275,00 F

* -----------------------

Total.............................................. 7 149 228,16 F

T.V.A.............................................. 1 339 756,44 F

* -----------------------

soit T.T.C......................................... 8 478 984,60 F

qu'il a en outre fourni au tribunal trois hypothèses de décompte des intérêts ayant pu courir sur cette somme de 8 478 984,60 F, arrêtés en mars 1987, qui s'établissent ainsi, toutes taxes comprises :

* intérêts calculés à 9,50 % l'an

à compter du 5 décembre 1983........................ 2 617 886,50 F

* intérêts calculés à 9,50 % l'an

à compter de juin 1984.............................. 2 148 009,43 F

* intérêts calculés à 9,50 % l'an

à compter du 17 janvier 1985........................ 1 745 257,66 F

Attendu que les parties ont alors pris des conclusions par lesquelles elles ont précisé leurs positions respectives :

• Les architectes demandeurs réitèrent les termes de leur exploit d'assignation sauf à modifier le montant des sommes qu'ils réclament, pour tenir compte du rapport Akerib dont ils poursuivent l'homologation ;

Ils sollicitent donc le paiement de la somme en principal de 8 478 984,60 F ; en ce qui concerne les intérêts, ils soutiennent que l'hypothèse à retenir est celle prenant le 5 décembre 1983 - soit la date de vente des terrains par M. et donc de résiliation du contrat - comme point de départ de leur calcul ; ils demandent en conséquence le paiement de la somme de 2 617 886,50 F à ce titre, outre les intérêts au même taux du 1er mars 1987 jusqu'à parfait paiement ; les architectes réclament encore la somme de 1 000 000 F à titre de dommages-intérêts devant sanctionner la résistance abusive de « M. », dont ils demandent enfin la condamnation « ès qualités » aux entiers dépens ;

Par ailleurs, les architectes réfutent l'argumentation des sociétés défenderesses, selon lesquelles ils auraient perçu de l'État des honoraires pour des travaux qu'ils ont déjà effectués pour ces sociétés et que celles-ci devraient néanmoins honorer, en faisant valoir que le C.A.F. et l'État n'ont pas passé de contrat pour la construction des superstructures et que les études effectuées pour son compte diffèrent totalement de celles menées pour M., bien que les terrains concernés soient les mêmes ;

• Les sociétés défenderesses, après avoir rappelé dans le détail, mais sans les critiquer, les opérations auxquelles l'Expert Akerib s'est livré - la seule objection formulée concernant le point de départ du calcul des intérêts, qui, « en tout état de cause » ne pourrait être antérieur à juin 1984 compte tenu de la date d'exigibilité des honoraires -, considèrent que les architectes ne peuvent prétendre à l'intégralité des honoraires et pénalités retenus par l'expert ; ces sociétés soutiennent en effet que si, juridiquement, la clause contractuelle relative aux honoraires et pénalités dus aux architectes en cas de résiliation de la convention du 10 mars 1980 doit s'appliquer, en fait les architectes percevront de l'État de Monaco, pour les travaux d'infrastructure de la 3e tranche, 7 086 738 F d'honoraires au total (dont 4 777 622 F ont déjà été payés à la date du 6 mars 1987) ; elles estiment que ces règlements effectués par l'État doivent être déduits des sommes réclamées par les architectes dans la présente instance puisque, contrairement à ce qu'ils prétendent, les travaux d'infrastructure réalisés pour le compte de l'État reposent sur des études menées pour le compte des sociétés défenderesses, à l'exception de modifications de détail, ce fait pouvant être vérifié le cas échéant par expertise ; en décider autrement serait selon elles « particulièrement inéquitable » ; elles demandent donc au tribunal, après avoir constaté que l'État a versé la somme de 7 086 738 F à titre d'honoraires relatifs aux travaux d'infrastructure, de déduire ce montant de celui dont les architectes demandent le paiement ; à titre subsidiaire, dans le cas où les architectes prétendraient avoir établi des études nouvelles au profit de l'État sans pouvoir utiliser leurs précédentes études, en tout ou en partie, elles sollicitent une mesure d'expertise à l'effet de vérifier ce point et de préciser, dans le cas où la totalité des études n'aurait pu servir, le montant des études complémentaires faites pour le compte de l'État ;

Sur quoi,

Attendu que le principe de la créance due par les sociétés défenderesses aux architectes formant le C.A.F. a été consacré par le jugement définitif précité du 5 juin 1986 ;

Que le montant de celle-ci s'établit, aux termes du rapport Akerib - qui constitue un travail sérieux et complet devant dès lors être homologué et que les parties se sont en outre abstenues de critiquer - à la somme en principal de 8 478 984,60 F, outre les intérêts ;

Attendu que la compensation de cette somme avec celle correspondant aux honoraires que l'État a pu verser aux architectes, à laquelle tend en définitive la demande reconventionnelle des sociétés défenderesses, ne saurait être admise ;

Qu'une telle demande ne repose en effet sur aucun fondement juridique ; qu'il n'est pas concevable de faire échec à une demande en paiement justifiée par la défaillance contractuelle des sociétés civiles défenderesses en se prévalant de relations contractuelles distinctes liant l'État aux architectes, auxquelles ces sociétés sont parfaitement étrangères ; que des considérations d'équité ne sauraient être utilement invoquées, en l'espèce, devant le tribunal, puisqu'il appartient à celui-ci de statuer en droit ;

Attendu qu'il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de reconnaître, aux fins de compensation, la créance que les défenderesses allèguent à l'égard des architectes pour se soustraire à la juste demande en paiement dont elles font l'objet ; que leurs prétentions, tant principale que subsidiaire, doivent donc être rejetées ;

Attendu que la demande en paiement de l'intégralité de la somme due n'ayant été formée auprès des défenderesses par les architectes que par leur exploit d'assignation du 17 janvier 1985 valant mise en demeure, les intérêts au taux légal retenus par l'expert dans sa troisième hypothèse doivent être alloués pour le montant arrêté à 1 745 257,66 F, auquel doivent s'ajouter les intérêts ayant couru depuis mars 1987, date du décompte, jusqu'au mois du présent jugement, s'élevant à 738 378,23 F (11/12 x 9,5 % x 8 478 984,60 sF), soit au total la somme de 2 483 635,80 F à titre d'intérêts ; qu'ajoutée au montant retenu en principal, cette somme porte à celle globale de 10 962 620,40 F la dette dont les défenderesses unies d'intérêts doivent solidairement répondre envers les architectes, outre les intérêts qui courront à compter du présent jugement ;

Attendu que les demandeurs, qui ne s'expliquent pas sur le préjudice, distinct de celui déjà réparé par l'allocation des intérêts, qu'ils prétendent avoir subi du fait de la résistance fautive de leurs débitrices et qu'ils évaluent d'autorité à 1 000 000 F, ne sauraient être suivis de ce chef ;

Attendu que l'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire du 25 octobre 1984 apparaît avoir été régulièrement prise sur les terrains sis à Fontvieille, cadastrés section A, dont les S.C.I. Antimen et Murinascia sont propriétaires ; qu'il y a donc lieu de la déclarer valable et de renvoyer les demandeurs à l'accomplissement des formalités prévues par la loi pour ce qui concerne l'inscription définitive ;

Attendu que les dépens suivent la succombance ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement,

Homologue le rapport d'expertise déposé au greffe général le 9 avril 1987 par André Akerib, antérieurement désigné par le jugement précité du 5 juin 1986 ;

Condamne solidairement les sociétés dénommées S.C.I. Antimen Monaco, S.C.I. Deplas, S.C.I. Murinascia Monaco et Société du nouveau port de Fontvieille à payer aux architectes S. B., R. B., Y. B., M. C., J. L., C. J., J. M., H. N., M. R., P. R., L. R., unis d'intérêts au sein du « Comité d'architectes de Fontvieille » la somme de 10 962 620,40 F avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre des causes sus-énoncées ;

Déclare régulière et valide pour ce montant l'inscription provisoire d'hypothèque judiciaire prise le 25 octobre 1984 au bureau des hypothèques de Monaco sous le numéro 133 du volume 164 ;

Renvoie les demandeurs à l'accomplissement des formalités légales pour la prise de l'inscription définitive ;

Dit n'y avoir lieu de faire droit au surplus de leurs demandes ;

Déboute les sociétés défenderesses de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

Composition

MM. Landwerlin, prés. ; Serdet, subst. ; MMe Blot et Boéri, av. déf. ; Champsaur, av. (Barreau de Nice).

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25415
Date de la décision : 12/02/1988

Analyses

Architectes ; Sociétés - Général


Parties
Demandeurs : B., B., B., C., L., J., M., N., M. et P. R., R.
Défendeurs : S.C.I. Antimen Monaco, S.C.I. Deplast, S.C.I. Murinascia Monaco, Société nouvelle du nouveau port de Fontvieille.

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1988-02-12;25415 ?

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