La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/04/1987 | MONACO | N°25326

Monaco | Tribunal de première instance, 30 avril 1987, K. c/ Crédit foncier de Monaco.


Abstract

Contrat de travail

Licenciement au cours du stage - Absence de caractère abusif

Résumé

Le licenciement d'un employé au cours du stage auquel il était contractuellement soumis avant de pouvoir être titularisé, intervenu dans le respect des dispositions légales et conventionnelles, doit être considéré comme légitime et dépourvu de caractère abusif, l'employeur étant libre d'apprécier si le stage a été satisfaisant.

Motifs

LE TRIBUNAL,

statuant comme juridiction d'appel,

Attendu que par jugement du 9 octobre 1986

auquel il y a lieu de se reporter, le Tribunal du travail, saisi par K. d'une demande tendant à obtenir du Crédit ...

Abstract

Contrat de travail

Licenciement au cours du stage - Absence de caractère abusif

Résumé

Le licenciement d'un employé au cours du stage auquel il était contractuellement soumis avant de pouvoir être titularisé, intervenu dans le respect des dispositions légales et conventionnelles, doit être considéré comme légitime et dépourvu de caractère abusif, l'employeur étant libre d'apprécier si le stage a été satisfaisant.

Motifs

LE TRIBUNAL,

statuant comme juridiction d'appel,

Attendu que par jugement du 9 octobre 1986 auquel il y a lieu de se reporter, le Tribunal du travail, saisi par K. d'une demande tendant à obtenir du Crédit foncier de Monaco le paiement d'arriérés de salaires pour la période du 1er septembre 1984 au 30 octobre 1985, d'indemnités de préavis (2e et 3e mois), d'un solde d'indemnités de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement abusif, a déclaré irrecevable le premier chef de demande en ce qu'il s'applique à la période du 1er septembre au 31 décembre 1984, l'a jugé mal fondé pour la période du 1er janvier au 29 octobre 1985, et a débouté le demandeur de l'ensemble de ses prétentions ;

Que sur les arriérés de salaires, le Tribunal du travail a relevé comme constant que K., pendant la période de l'année 1984, n'était nullement au service du Crédit foncier de Monaco mais était le préposé de la Banque Indosuez à Paris auprès de laquelle il lui appartient, le cas échéant, de faire valoir ses droits ; que pour la période de l'année 1985, le Tribunal du travail a constaté que K. a perçu un salaire mensuel supérieur à celui convenu ;

Que sur la demande en paiement de dommages-intérêts, le Tribunal du travail a estimé que le Crédit foncier de Monaco, en refusant de titulariser à la date convenue son employé qui se trouvait alors en cours de stage, a fait un exercice légitime de son pouvoir d'appréciation sur les mérites professionnels d'un candidat à la titularisation, ce refus ne pouvant être regardé comme abusif puisque conforme aux règles édictées par la convention collective applicable ;

Que sur le solde d'indemnités de licenciement, et par application de cette convention, le tribunal a considéré que K. ne pouvait prétendre qu'à un demi-mois de traitement et constaté qu'il a été rempli de ses droits de ce chef ;

Que sur les indemnités de préavis, le tribunal a relevé qu'un préavis de trois mois a été donné et exécuté du 29 juillet au 29 octobre 1985, sans égard pour la diminution de salaire entraînée par une absence de maladie durant cette période, dès lors que l'employeur a payé ces salaires conformément aux dispositions contractuelles et réglementaires ;

Attendu que par l'exploit susvisé, K. a interjeté appel de cette décision qui lui a été signifiée le 22 octobre 1986 ; qu'il en poursuit l'infirmation en demandant au Tribunal d'appel :

* de juger, par application du contrat du 30 août 1984, qu'il doit être considéré comme ayant travaillé au service du Crédit foncier de Monaco à compter du 10 septembre 1984, date de son début de stage dont il importe peu qu'il ait été effectué hors de l'entreprise,

* de juger, par application des articles 17 et 21 de la convention collective, que sa titularisation aurait dû intervenir à l'expiration de la période d'essai de trois mois, soit le 31 mars 1985 au plus tard, à la faveur de sa qualité d'ancien agent titularisé dans un précédent établissement bancaire,

* de juger que la rupture du contrat par le Crédit foncier de Monaco est intervenue après les périodes de stage et d'essai alors que le contrat de travail avait une durée indéterminée,

* de juger, enfin, que le licenciement n'est pas justifié par un motif valable et est intervenu dans des circonstances démontrant une légèreté blâmable de l'employeur ;

Qu'il demande en conséquence le paiement des sommes originairement réclamées ;

Attendu qu'au soutien de son appel, K. reproche aux premiers juges d'avoir erronément interprété les faits de la cause en considérant, sur le fondement de la rédaction ambiguë de la lettre d'engagement du 30 août 1984, qu'il se trouvait encore en période de stage ; qu'il affirme que cette interprétation est contraire à la loi et à la convention collective en ce qu'elle admet la validité du cumul de périodes de stages et d'essai s'étendant sur près d'une année, alors que les textes législatifs et la jurisprudence sanctionnent les successions abusives de périodes préparatoires et que la convention collective en limite la durée, en prévoyant en outre que la titularisation d'un agent doit intervenir au plus tard à l'expiration d'une durée de 12 mois ; qu'il précise que sa situation d'agent titulaire dans un établissement antérieur limite la période d'essai à 3 mois en ce qui le concerne, par l'effet de l'article 31 § 3 de la convention collective, en sorte qu'il aurait dû être titularisé le 31 mars 1985 au plus tard ; qu'il en déduit que, passé cette date, a pris effet un contrat à durée indéterminée ;

Qu'il fait valoir d'autre part que le tribunal a insuffisamment motivé sa décision selon laquelle le stage effectué auprès de la Banque Indosuez n'avait pas lieu d'être pris en considération pour le paiement des arriérés de salaires, alors que, selon lui, le véritable employeur pendant ce stage a été le Crédit foncier de Monaco qui a, en particulier, défini ses conditions de travail et fixé le montant de son salaire ;

Attendu qu'en réponse, le Crédit foncier de Monaco observe pour l'essentiel que la lettre d'engagement, par la clarté de ses termes, ne donne pas lieu à interprétation, indique s'être borné à appliquer tant le contrat que la convention collective qui autorise les stage et essai avant la décision éventuelle de titularisation, affirme sans être contredit sur ce point que K. ne remplit pas les conditions pour se prévaloir de l'article 21 § 3 de la convention collective, réfute l'argumentation consistant à prétendre que la période d'essai auprès du Crédit foncier a commencé avec le stage à la Banque Indosuez et rappelle, bien que ne s'y estimant pas tenu, les griefs ayant motivé le refus de titularisation en fin de stage ; que le Crédit foncier de Monaco conclut à la confirmation du jugement entrepris ;

Sur quoi,

Attendu que la banque intimée n'a pas contesté la régularité, en la forme, de l'appel interjeté par K. ; que cet appel doit être déclaré recevable ;

Attendu que les premiers juges ont exactement rapporté dans leur décision la relation des faits de la cause ; que les parties n'ont d'ailleurs pas critiqué cette relation sur la base de laquelle le tribunal entend dès lors statuer ;

Attendu qu'en donnant son accord exprès à la lettre d'engagement du 30 août 1984, K. a accepté, en vue d'être le cas échéant titularisé le 31 août 1985 au plus tard auprès du Crédit foncier de Monaco, d'effectuer un stage, ayant notamment pour objet de compléter sa formation, à la Banque Indosuez à Paris moyennant une indemnité mensuelle calculée sur la base d'un salaire annuel brut de 180 000 F et d'intégrer ensuite le Crédit foncier de Monaco, à l'essai pendant une période de 3 mois puis en stage pour une durée ne devant pas excéder le 31 août 1985 ;

Attendu que de ces chefs, les relations contractuelles entre les parties sont dépourvues de toute ambiguïté et ne donnent pas lieu à interprétation ; que dans ce cadre conventionnel, K. a effectué un stage rémunéré du 10 septembre au 31 décembre 1984 à la Banque Indosuez à Paris, a été embauché par le Crédit foncier de Monaco à compter du 1er janvier 1985, y a achevé sa période d'essai le 31 mars suivant et se trouvait en stage lorsque l'employeur a décidé le 16 juillet 1985, en le confirmant par lettre du 29 juillet suivant, de ne pas titulariser l'intéressé à la fin de sa période de stage prévue pour la date limite du 31 août 1985 ;

Attendu que ce licenciement n'est pas critiquable dès lors qu'il peut être décidé librement par l'employeur si celui-ci estime insatisfaisant, sur la base de sa seule appréciation, le stage auquel s'est soumis l'employé en connaissance de cause ; qu'il suffit qu'un tel licenciement respecte les dispositions légales ou conventionnelles en vigueur ;

Attendu qu'en l'espèce, le Crédit foncier de Monaco a pris soin de se conformer aux dispositions de l'article 31 de la convention collective - à laquelle les parties ont admis être soumises - en observant un délai de préavis de 3 mois (s'étant achevé le 29 octobre 1985) tel que reconnu par l'article 29 de ladite convention aux cadres après la période d'essai ;

Attendu, quant à la durée du stage, qu'en tout état de cause la période maximum de 12 mois de services effectifs prévue par l'article 21 de la convention collective avant la titularisation de l'agent, n'a pas été atteinte par K. dont l'argumentation devient à cet égard inopérante ; que les seules prohibitions envisagées par cette convention concernent le refus systématique de titularisation par suite d'embauchages et de licenciements répétés (art. 31 § 3), ce qui n'est pas le cas de l'espèce ; que par ailleurs K., qui ne prouve pas être entré au service du Crédit foncier de Monaco dans le délai maximum de 6 mois après avoir quitté un établissement où il était titularisé (art. 21 § 3) et ne conteste d'ailleurs pas avoir quitté le 30 novembre 1983, comme l'affirme l'intimé, la Banque de Syrie et du Liban, ne saurait invoquer le bénéfice de cette disposition conventionnelle ;

Attendu que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont considéré le licenciement comme légitime et dépourvu de caractère abusif, le Crédit foncier n'ayant fait qu'user régulièrement d'un droit lui étant reconnu et donc insusceptible d'ouvrir droit à des dommages-intérêts ;

Attendu que si le stage auprès de la Banque Indosuez à Paris apparaît avoir été organisé, dans ses modalités et conditions, par le Crédit foncier de Monaco, compte tenu des relations économiques sinon juridiques liant ces établissements, il demeure, au vu de la lettre - acceptée - du 7 septembre 1984 produite aux débats (pièce n° 4 Me Sbarrato), que c'est la Banque Indosuez qui a pris la décision d'employer K. comme stagiaire, lequel était soumis aux horaires et à la discipline de cette banque en sorte qu'un lien de subordination l'unissait pendant son stage à la Banque Indosuez qui assurait au surplus le paiement de son indemnité de stage ;

Qu'il s'ensuit que K., ainsi que l'ont justement relevé les premiers juges, n'avait effectué au service du Crédit foncier à la date de son licenciement qu'un seul semestre entier de service et ne pouvait donc prétendre, au titre de l'indemnité de licenciement, qu'à un demi-mois de traitement ;

Attendu, sur les arriérés de salaires, qu'en acceptant postérieurement à l'engagement du 30 août 1984 qui prévoyait une indemnité de stage calculée sur un montant brut annuel de 180 000 F, de percevoir une indemnité mensuelle de 13 500 F (cf. pièce n° 4 susvisée) telle que proposée le 7 septembre suivant par la Banque Indosuez, K. s'est interdit de revenir sur ce qui a été décidé en dernier lieu d'un commun accord entre les intéressés ; qu'il ne saurait dès lors se prévaloir du contrat antérieur pour exiger un complément d'indemnité auquel il apparaît en tout état de cause avoir renoncé ;

Que par ailleurs, les premiers juges, sur les salaires versés par le Crédit foncier de Monaco, ont exactement déduit des pièces produites que K. avait été rempli de ses droits pour la période du 1er janvier au 29 octobre 1985, ce qui d'ailleurs n'a pas été contesté ;

Attendu en conséquence que le jugement entrepris doit être confirmé en toutes ses dispositions ;

Attendu que les dépens suivent la succombance ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Et ceux non contraires des premiers juges,

Le Tribunal,

Statuant comme juridiction d'appel du Tribunal du travail,

Déclare l'appel recevable en la forme ;

Au fond, confirme le jugement du Tribunal du travail en date du 9 octobre 1986 dans toutes ses dispositions ;

Composition

MM. Landwerlin, vice-prés. ; Truchi, prem. subst. ; MMe Sbarrato et J.-Ch. Marquet, av. déf.

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25326
Date de la décision : 30/04/1987

Analyses

Contrats de travail ; Rupture du contrat de travail


Parties
Demandeurs : K.
Défendeurs : Crédit foncier de Monaco.

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1987-04-30;25326 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award