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30/04/1987 | MONACO | N°25324

Monaco | Tribunal de première instance, 30 avril 1987, Société nouvelle des Établissements Cobry c/ L.


Abstract

Contrat de travail

Licenciement sous prétexte de suppression d'emploi - Absence de justification de motif valable - Indemnité légale de licenciement - Dommages-intérêts pour rupture abusive

Résumé

Le licenciement d'une employée au motif d'une prétendue suppression de poste consécutive à une limitation de l'activité de l'entreprise, alors qu'il s'avère au contraire que cette employée a été remplacée dans l'emploi qu'elle occupait, fonde celle-ci à réclamer l'indemnité légale de licenciement et des dommages-intérêts pour rupture abusive

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Motifs

LE TRIBUNAL,

statuant comme juridiction d'appel,

Attendu que E. L. est entrée, le...

Abstract

Contrat de travail

Licenciement sous prétexte de suppression d'emploi - Absence de justification de motif valable - Indemnité légale de licenciement - Dommages-intérêts pour rupture abusive

Résumé

Le licenciement d'une employée au motif d'une prétendue suppression de poste consécutive à une limitation de l'activité de l'entreprise, alors qu'il s'avère au contraire que cette employée a été remplacée dans l'emploi qu'elle occupait, fonde celle-ci à réclamer l'indemnité légale de licenciement et des dommages-intérêts pour rupture abusive.

Motifs

LE TRIBUNAL,

statuant comme juridiction d'appel,

Attendu que E. L. est entrée, le 7 novembre 1983, au service de la société anonyme monégasque dénommée « Société nouvelle des Établissements Cobry », ce, en qualité de conditionneuse, aux termes d'un permis de travail ultérieurement délivré le 13 février 1984 ;

Qu'il a été mis fin à son contrat de travail par une lettre de son employeur datée du 18 juillet 1985, par laquelle lui était signifiée la suppression de son poste du fait que la Société Cobry se trouvait dans l'obligation de cesser son activité de fabrication pour se limiter au simple commerce de produits de beauté ;

Attendu qu'en suite d'un procès-verbal de non-conciliation dressé le 25 novembre 1985, E. L. a saisi le bureau de jugement du Tribunal du travail d'une demande tendant au paiement d'une indemnité de licenciement de 4 140 F, de 27 000 F à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif, et enfin au remboursement de 400 F de frais d'huissier motivés par un constat qui aurait été requis pour les besoins de la cause, demandes auxquelles la Société Cobry a déclaré s'opposer dans leur ensemble ;

Attendu que par un jugement contradictoirement rendu le 2 octobre 1986, le Tribunal du travail a estimé non valable le motif de licenciement invoqué par la Société Cobry, abusive la rupture du contrat de travail intervenue du fait de ladite société et irrecevable le chef de demande relatif au constat d'huissier ;

Que ce même jugement, déboutant E. L. du surplus de ses demandes, a condamné la Société Cobry, outre aux dépens, à payer à ladite employée 4 140 F à titre d'indemnité de licenciement et 10 000 F à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;

Attendu que par l'exploit susvisé la Société Cobry a régulièrement relevé appel de cette décision ;

Qu'elle en poursuit l'infirmation en soutenant d'abord que la suppression de l'emploi de « femme de ménage-conditionneuse », qui aurait seul été effectivement occupé par E. L., ne pouvait nullement être mise en doute, et en reprochant, dès lors, aux premiers juges d'avoir accueilli en leur principe les demandes d'indemnité formulées par cette dernière au motif que les tâches de cette employée auraient été pourvues par une autre salariée, postérieurement au licenciement dont s'agit, alors en revanche qu'E. L. n'aurait eu pour seul travail que celui d'assurer, outre 3 ou 4 heures de ménage, le conditionnement des produits de beauté élaborés par son employeur et que la cessation de toute activité de fabrication au sein de l'entreprise avait rendue inutile la fonction de conditionneuse ;

Attendu que la Société Cobry estime par ailleurs que l'absence de justification d'un motif valable de licenciement ne pouvait être retenue par les premiers juges comme ouvrant droit à des dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, puisqu'une indemnité de ce chef suppose, en droit, la preuve d'une faute dans l'exercice du droit de résiliation unilatérale du contrat de travail et, partant, que soit établie de la part de l'employeur soit l'intention délibérée de nuire à son salarié, soit une légèreté blâmable, ce qui ne serait nullement le cas de l'espèce, alors de surcroît que E. L. avait été licenciée dans le respect des règles du préavis de licenciement ;

Attendu qu'E. L., qui a conclu au débouté de la Société Cobry des fins de son appel, a régulièrement formé pour sa part un appel incident tendant à ce que lui soit allouée, outre la somme précitée de 400 F pour frais d'huissier, celle de 27 000 F initialement réclamée pour la réparation du préjudice résultant du caractère abusif allégué du licenciement dont s'agit ;

Attendu que pour statuer comme ils l'ont fait, les premiers juges ont d'abord relevé que la Société Cobry n'avait pas justifié en l'espèce de la réalité de la suppression de poste qu'elle invoquait comme pouvant la dispenser du paiement de l'indemnité légale de licenciement, à son employée, et qu'en revanche celle-ci avait établi à la charge de son employeur une faute dans l'exercice du droit de licenciement ;

Attendu, sur ce, que les motifs ainsi retenus, ouvrant droit au profit d'E. L. au paiement d'une indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, doivent être présentement approuvés en ce qu'ils se fondent en fait :

* d'une part, sur le constat d'huissier ci-dessus évoqué ainsi que sur diverses attestations émanant de salariés de la Société Cobry - dont la mauvaise foi n'a pas été démontrée, et qui ne sauraient être suspectés de partialité intentionnelle en raison du caractère objectivement concordant de leurs précisions - attestations qui établissent indiscutablement qu'E. L. assurait pour l'essentiel, et dès l'origine, un travail de préparation de commandes, indépendant des activités de fabrication de la Société Cobry et dans lequel elle a été remplacée par une employée intérimaire qu'elle a formée ;

* et d'autre part, sur le comportement injustifié de la Société Cobry lors du licenciement de son employée, lequel apparaît avoir procédé en l'espèce, au regard de difficultés financières certaines alors rencontrées par ladite société, du désir manifeste de celle-ci d'échapper à ses obligations pécuniaires envers E. L. ;

Qu'il convient dès lors de confirmer les dispositions du jugement entrepris relatives aux indemnités que la Société Cobry a été déclarée tenue de verser à E. L. et qui apparaissent avoir été justement évaluées par les premiers juges en considération, notamment, des éléments d'appréciation dont le tribunal dispose présentement quant à l'importance du préjudice occasionné à cette employée, en fonction de sa situation personnelle, par la cessation indue de son contrat de travail l'unissant à la Société Cobry ;

Attendu, sur la demande formulée par E. L. quant au remboursement des frais du constat d'huissier précité, que le jugement du Tribunal du travail doit être complété à l'effet que soient inclus lesdits frais dans les dépens, ce, par application de l'article 234-5° du Code de procédure civile ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Et ceux non contraires des premiers juges,

Le Tribunal,

Statuant comme juridiction d'appel du Tribunal du travail,

Reçoit les appels tant principal qu'incident ;

Les déclare mal fondés, sauf, pour ce qui est de l'appel incident, quant au recouvrement des frais d'huissier ;

Dit que ceux-ci seront inclus dans les dépens de première instance ;

Confirme pour le surplus le jugement susvisé du Tribunal du travail ;

Composition

MM. Landwerlin, vice-prés. ; Truchi, prem. subst. ; MMe Lorenzi et Sbarrato, av. déf. ; Gonella, av. (Barreau de Nice).

^


Synthèse
Numéro d'arrêt : 25324
Date de la décision : 30/04/1987

Analyses

Contrats de travail ; Social - Général


Parties
Demandeurs : Société nouvelle des Établissements Cobry
Défendeurs : L.

Références :

article 234-5° du Code de procédure civile


Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2023
Fonds documentaire ?: tribunal-supreme.mc
Identifiant URN:LEX : urn:lex;mc;tribunal.premiere.instance;arret;1987-04-30;25324 ?

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